Textes de la Messe |
Office |
Dom Guéranger, l’Année Liturgique |
Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum |
Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique |
Fête titulaire de la basilique de Ste Martine, érigée par le pape Donus (676-678). Ses restes furent découverts en la basilique en 1634. La fête fut instituée l’année suivante, 1635.
Missa Loquébar, de Communi Virginum 1 loco. | Messe Loquébar, du Commun des Vierges 1. |
A Matines
Hymnus | Hymne. (Urbain VIII) |
Martínæ célebri pláudite nómini,
Cives Romúlei, pláudite glóriæ : Insígnem méritis dícite Vírginem, Christi dícite Mártyrem. | Applaudis, ô Rome, le nom célèbre de Martine, applaudis à sa gloire ; nomme cette Vierge insigne par ses mérites, nomme la Martyre du Christ. |
Hæc dum conspícuis orta paréntibus
Inter delícias, inter amábiles Luxus illécebras, dítibus áffluit Faustæ munéribus domus, | Née de parents illustres, entourée de délices, parmi les charmes séduisants du luxe,elle possède en abondance les biens nombreux d’une maison prospère. |
Vitæ despíciens cómmoda, dédicat
Se rerum Dómino, et munífica manu Christi paupéribus distríbuens opes, Quærit præmia Cælitum. | Méprisant les avantages de cette vie, elle se consacre au Seigneur de toutes choses, et d’une main généreuse, distribuant ses richesses aux pauvres du Christ, elle recherche les récompenses célestes. |
Non illam crúcians úngula, non feræ,
Non virgæ horríbili vúlnere cómmovent ; Hinc lapsi e Súperum sédibus Angeli Cælésti dape récreant. | Ni les ongles de fer qui la déchirent, ni les bêtes, ni les horribles plaies que lui font les verges, n’ébranlent son courage. Descendus du séjour des Bienheureux, les Anges la fortifient par une nourriture céleste. |
Quin et depósita sævítie leo
Se rictu plácido próiicit ad pedes : Te, Martína, tamen dans gládius neci Cæli cœtibus ínserit. | Le lion même, ô Martine, oubliant sa cruauté, se prosterne avec douceur à tes pieds ; mais le glaive, te donnant la mort, t’introduit dans l’assemblée des cieux. |
Te, thuris rédolens ara vapóribus,
Quæ fumat, précibus iúgiter ínvocat, Et falsum périmens auspícium, tui Delet nóminis ómine. | De ton autel, embaumé des vapeurs de l’encens qui y fume, montent vers toi nos prières ; ton nom contient un présage, il efface et détruit le souvenir des auspices trompeurs (de Mars). |
A Nobis ábigas lúbrica gáudia,
Tu, qui Martyribus dexter ades, Deus Une et Trine : tuis da fámulis iubar, Quo clemens ánimos beas. Amen. | Éloignez de nous les joies dangereuses, ô Dieu, dont la droite soutient les Martyrs ; vous qui êtes Un et Trois, donnez à vos serviteurs la lumière par laquelle vous faites, dans votre clémence, le bonheur des âmes. Amen. |
Leçons des Matines avant 1960
Quatrième leçon. Martine, vierge romaine, fille d’un consulaire, était de race illustre. Privée de ses parents dès ses plus tendres années, et embrasée de l’ardeur de la piété chrétienne, elle distribua aux pauvres, avec une admirable libéralité, les richesses qu’elle possédait en abondance. Sous l’empire d’Alexandre, comme on lui ordonnait d’adorer les faux dieux, elle repoussa avec une grande liberté la proposition de ce crime énorme. C’est pourquoi elle fut frappée de verges à diverses reprises, déchirée avec des crochets, des ongles de fer et des têts de port cassés ; on lui lacéra tous les membres avec des glaives très aigus, on l’arrosa de graisse bouillante, enfin on la condamna aux bêtes de l’amphithéâtre ; mais, par un effet de la puissance divine, elle échappa sans blessure à ce nouveau danger, et, jetée sur un bûcher ardent, elle en sortit saine et sauve par un prodige semblable au premier.
Cinquième leçon. Quelques-uns de ses bourreaux, frappés de la nouveauté de ce miracle et sollicités par la grâce de Dieu, embrassèrent la foi de Jésus-Christ ; après plusieurs tourments, ils eurent la tête tranchée et remportèrent ainsi la palme glorieuse du martyre. Aux prières de la Sainte, des tremblements de terre se produisirent, des feux tombèrent du ciel avec un bruit de tonnerre, renversèrent les temples des faux dieux et consumèrent leurs statues. Il coulait des blessures de Martine du lait avec du sang, et une clarté très brillante ainsi qu’une très suave odeur émanaient de son corps ; parfois elle paraissait élevée sur un trône royal, chantant les louanges de Dieu avec les habitants du ciel.
Sixième leçon. Exaspéré par ces prodiges et surtout par la constance de la vierge, le juge ordonna de lui trancher la tête. Dès que Martine eut reçu le coup de la mort, l’on entendit une voix du ciel qui l’appelait au séjour des bienheureux ; toute la ville trembla fortement, et beaucoup d’adorateurs des idoles se convertirent à la foi chrétienne. Le corps sacré de Martine, martyrisée pendant que saint Urbain 1er siégeait à Rome, fut trouvé sous le pontificat d’Urbain VIII avec les corps des saints Martyrs Concorde, Épiphane et leurs conpagnons, dans une antique église, près de la prison Mamertine, sur le penchant du mont Capitolin. Cette église ayant été reconstruite sur un meilleur plan et très bien ornée, on y replaça le corps ; de la Sainte, avec une pompe solennelle, en présence d’un grand concours de peuple et à la joie de la Ville entière.
A Laudes
Hymnus | Hymne. (Urbain VIII) |
Tu natále solum prótege, tu bonæ
Da pacis réquiem Christíadum plagis ; Armórum strépitus, et fera prælia In fines age Thrácios. | Protège le sol qui t’a vue naître, donne au pays des Chrétiens le repos d’une paix utile, repousse jusqu’aux confins de la Thrace le bruit des armes et les cruels combats. |
Et regum sócians ágmina sub crucis
Vexíllo, Sólymas néxibus éxime, Vindéxque innócui sánguinis hósticum Robur fúnditus érue. | Rassemble tous les rois avec leurs bataillons sous l’étendard de la croix, délivre Jérusalem de la captivité, et, vengeant un sang innocent, renverse jusque dans ses fondements la force de l’ennemi. |
Tu nostrum cólumen, tu decus ínclytum,
Nostrárum obséquium réspice méntium ; Romæ vota libens éxcipe, quæ pio Te ritu canit, et colit. | O toi, notre appui, toi, notre gloire éclatante, agrée l’hommage de nos cœurs : reçois les vœux de Rome, qui te chante avec piété et t’honore avec joie. |
A nobis ábigas lúbrica gáudia,
Tu, qui Martyribus dexter ades, Deus Une et Trine : tuis da fámulis jubar, Quo clemens ánimos beas. Amen. | Éloignez de nous les joies dangereuses, ô Dieu, dont la droite soutient les Martyrs ; vous qui êtes Un et Trois, donnez à vos serviteurs la lumière par laquelle vous faites, dans votre clémence, le bonheur des âmes.
Amen. |
Une troisième Vierge romaine, le front ceint de la couronne du martyre, vient partager les honneurs d’Agnès et d’Émérentienne, et offrir sa palme à l’Agneau. C’est Martine, dont le nom rappelle le dieu païen qui présidait aux combats, et dont le corps glorieux repose au pied du mont Capitolin, dans un ancien temple de Mars, devenu aujourd’hui la somptueuse Église de Sainte-Martine. Le désir de se rendre digne de l’Époux divin que son cœur avait choisi, Fa rendue forte contre les tourments et la mort, et sa blanche robe a été aussi lavée dans son sang. L’Emmanuel est le Dieu fort, puissant dans les combats [1] ; mais comme le faux dieu Mars, il n’a pas besoin de fer pour vaincre. La douceur, la patience, l’innocence d’une vierge lui suffisent pour terrasser ses ennemis ; et Martine a vaincu d’une victoire plus durable que les plus grands capitaines de Rome.
Cette illustre Vierge, l’une des patronnes de Rome, a eu l’honneur d’être chantée par un Pape. Urbain VIII est l’auteur des Hymnes du bréviaire.
C’est par ces chants, ô Vierge magnanime, que Rome chrétienne continue de remettre entre vos mains le soin de sa défense. Elle est captive ; si vous la protégez, elle reprendra possession d’elle-même et reposera dans la sécurité. Écoutez ses prières, et repoussez loin de la ville sainte les ennemis qui l’oppriment. Mais souvenez-vous qu’elle n’a pas seulement à craindre les bataillons qui lancent la foudre et renversent les remparts ; même dans la paix, des attaques ténébreuses n’ont jamais cessé d’être dirigées contre sa liberté. Déjouez, ô Martine, ces plans perfides ; et souvenez-vous que vous fûtes la fille de l’Église romaine, avant d’en être la protectrice. Détruisez de plus en plus la puissance du Croissant ; affranchissez Jérusalem, amenez l’Europe à sentir enfin ses entrailles émues pour les Églises de Syrie.
Demandez pour nous à l’Agneau votre Époux la force nécessaire pour enlever de notre cœur les idoles auxquelles il pourrait encore être tenté de sacrifier. Dans les attaques que les ennemis de notre salut dirigent contre nous, prêtez-nous l’appui de votre bras. Il a ébranlé les idoles au sein même de Rome païenne ; il ne sera pas moins puissant contre le monde qui cherche à nous envahir. Pour prix de vos victoires, vous brillez auprès du berceau de notre Rédempteur ; si, comme vous, nous savons combattre et vaincre, ce Dieu fort daignera nous accueillir aussi. Il est venu pour soumettre nos ennemis ; mais il exige que nous prenions part à la lutte. Fortifiez-nous, ô Martine, afin que nous ne reculions jamais, et que notre confiance en Dieu soit toujours accompagnée de la défiance de nous-mêmes.
Bien qu’Urbain VIII, par la restauration de la basilique de Sainte-Martine près du Carcer Mamertini au Forum romain, et par la composition classique d’hymnes propres pour l’office de sa fête, ait cherché à rendre populaire la mémoire de cette martyre, elle est cependant presque complètement ignorée de l’antique hagiographie romaine. Son culte date à Rome du temps du pape Donus qui, entre 676 et 678, la fit représenter dans la mosaïque absidale de sa basilique entre les images du pape Honorius Ier et la sienne propre.
Le Laterculus de Berne du Hiéronymien mentionne cette sainte le Ier janvier : Romae... et Martini martyris. Il s’agit toutefois d’une sainte quelque peu étrangère à la Ville éternelle, et dont on ignore à la fois l’origine et l’histoire.
Un Oratorium sanctae Martinae est mentionné par Jean Diacre dans la vie de saint Grégoire [2], mais il se trouvait sur la voie d’Ostie, dans le fundus Barbilianus.
Cette localisation peut toutefois nous mettre en mesure de retrouver la patrie de Martine. De fait, dans ses actes, on parle de compagnons de son martyre, qui seraient morts le 15 novembre, et dans le récit de la découverte des corps de sainte Martine et de ses compagnons martyrs, Concorde et Épiphane, au temps d’Urbain VIII, l’on remarque que ceux-ci provenaient originairement d’une localité sur la voie d’Ostie [3]. Or, il est frappant que précisément sur la même voie, dans le fundus Barbilianus, il existait au ixe siècle un oratoire en l’honneur de sainte Martine, desservi par des moines. Il s’agit peut-être d’un groupe de martyrs du faubourg Ostien, transportés à Rome du temps d’Honorius Ier ? Nous considérons cette hypothèse comme probable.
Les deux salles dédiées à saint Adrien et à cette sainte Martine étaient contiguës et ne formaient qu’un seul monument. L’une était la grande salle du Sénat romain et l’autre une salle (le secretarium), annexe de la Curie, dont elle était séparée seulement par un court portique.
La messe est celle du Commun des vierges martyres, comme pour la fête de sainte Barbe, le 4 décembre.
Vous êtes les concitoyens des saints et les familiers de Dieu.
Sainte Martine. — jour de mort : 1er janvier, vers 226. Tombeau : Sous le règne d’Urbain VIII, ses reliques furent découvertes et déposées dans l’église Sainte-Martine sur le forum, à Rome. Image : On la représente avec les instruments de son supplice : l’épée et les tenailles. Sa vie : Martine, vierge romaine, dont le père était consulaire, perdit de bonne heure ses parents. Par amour pour le Christ, elle distribua ses biens aux pauvres. Sous l’empereur Alexandre Sévère, elle reçut l’ordre d’adorer les dieux. Elle repoussa avec horreur un pareil sacrilège. C’est pourquoi elle fut battue de verges, déchirée avec des tenailles et, après beaucoup d’autres tortures, elle fut décapitée par l’épée. Elle mourut, sous le pape Urbain l, vers 226.
La messe (Loquebar). — La messe unit le thème de l’Épouse avec celui du martyre. A l’Introït, nous voyons la sainte se tenir, sans crainte, devant son juge et de plus l’entrée du prêtre nous rappelle la « démarche ») immaculée de la vierge sainte. Il est émouvant d’entendre, dans la Leçon, les actions de grâces de la sainte pour le secours du Christ, du « Roi », au milieu des « rugissements des lions » et de la « flamme oppressante ». Dans les deux chants qui suivent, nous voyons le cortège nuptial du Christ et de son Épouse l’Église, qui, dans cette sainte, est si semblable à l’Époux divin. L’Évangile des vierges sages qui, dans la nuit, attendent, avec des lampes allumées à la main, l’Époux qui va venir, s’applique à l’Église, à sainte Martine et à nous aussi. Comme cette parabole s’est merveilleusement accomplie dans la mort de la sainte martyre ! Au Saint-Sacrifice, elle se réalise. C’est pourquoi, à l’Offertoire, nous nous avançons comme des vierges sages vers l’autel, avec les lampes allumées de l’amour de Dieu et de notre union au Sacrifice : les vierges sont offertes au Roi (qui a son trône sur l’autel) « offerentur » (Off.). A la Communion, nous comprenons une fois de plus que c’est l’Eucharistie qui donne la force de souffrir.
La lumière dans la liturgie. — « Toutes les vierges se levèrent et allumèrent leur lampe. » Cette belle parabole de la lumière peut nous servir de préparation à la fête imminente de la Chandeleur. Il importe de nous demander quelle est la signification de la lumière dans la liturgie. La lumière est le symbole de Dieu et de la vie divine, alors que, par contre, les ténèbres sont le symbole du démon et de ses œuvres (le péché). Toute l’année liturgique est un grand symbole de lumière.
Le cycle d’hiver ou de la nuit exprime nos efforts pour sortir de la nuit et tendre vers la lumière. Le cycle d’été ou du jour représente la victoire de la lumière, du Christ, sur les ténèbres.
Le jour liturgique lui aussi est tout pénétré des pensées de lumière. De même, dans les offices liturgiques, on se sert fréquemment de la lumière comme symbole. Le sens symbolique se résume toujours ainsi : le Christ et la vie divine qui procède de lui. C’est pourquoi on se sert de la lumière partout où le Christ paraît. C’est pourquoi il est prescrit d’avoir des cierges allumés pour célébrer la messe ; c’est pourquoi brûle toujours, devant le Saint-Sacrement, la lampe du sanctuaire ; c’est pourquoi, aussi, on porte des cierges pendant le chant de l’Évangile ; c’est pourquoi on allume des cierges au moment de la Consécration ; c’est pourquoi enfin, à Pâques, on bénit et on allume solennellement le cierge pascal. Mais il convient aussi que le chrétien ait à la main un cierge allumé, car il possède la vie divine : il le reçoit solennellement des mains de l’Église au moment de son Baptême ; il le porte le jour de sa première communion ; chez lui, il l’allume dans les périls et le besoin ; enfin, au moment de sa mort, il le reçoit dans sa main tremblante, pour s’en aller dans la nuit du trépas au-devant de l’Époux. Au jour de la Chandeleur, nous recevons de nouveau, de la main du prêtre, un cierge bénit. L’Église nous exhorte, par là, à rester toute l’année des fils de lumière et à passer à travers le monde, en portant le Christ en nous.