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08/03 St Jean de Dieu, confesseur

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Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  
  Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique  

Mort le 8 mars 1550. Canonisé en 1690. Fête en 1714.

Textes de la Messe

(En Carême, on fait seulement mémoire du Saint avec les trois oraisons de la Messe suivante)
die 8 martii
le 8 mars
SANCTI IOANNIS A DEO
SAINT JEAN DE DIEU
Conf.
Confesseur
III classis (ante CR 1960 : duplex)
IIIème classe (avant 1960 : double)
Ant. ad Introitum. Ps. 36, 30-31.Introït
Os iusti meditábitur sapiéntiam, et lingua eius loquétur iudícium : lex Dei eius in corde ipsíus.La bouche du juste méditera la sagesse et sa langue proférera l’équité ; la loi de son Dieu est dans son cœur.
Ps. Ibid., 1.
Noli æmulári in malignántibus : neque zeláveris faciéntes iniquitátem.Ne porte pas envie au méchant et ne sois pas jaloux de ceux qui commettent l’iniquité.
V/. Glória Patri.
Oratio.Collecte
Deus, qui beátum Ioánnem, tuo amóre succénsum, inter flammas innóxium incédere fecísti, et per eum Ecclésiam tuam nova prole fœcundásti : præsta, ipsíus suffragántibus méritis ; ut igne caritátis tuæ vitia nostra curéntur, et remédia nobis ætérna provéniant. Per Dóminum nostrum.O Dieu, qui, après avoir embrasé l’âme du bienheureux Jean du feu de votre amour, l’avez fait marcher au milieu des flammes sans qu’il en reçût aucune atteinte, et qui, par lui, avez enrichi votre Église d’une nouvelle famille, faites, s’il vous plaît, que, grâce à ses mérites, nous soyons purifiés de nos vices dans le feu de votre charité, et pourvus des remèdes qui conduisent à l’éternité.
Léctio libri Sapiéntiæ.Lecture du livre de la Sagesse.
Eccli. 31, 8-11.
Beátus vir, qui invéntus est sine mácula, et qui post au-rum non ábiit, nec sperávit in pecúnia et thesáuris. Quis est hic, et laudábimus eum ? fecit enim mirabília in vita sua. Qui probátus est in illo, et perféctus est, erit illi glória ætérna : qui potuit tránsgredi, et non est transgréssus : fácere mala, et non fecit : ídeo stabilíta sunt bona illíus in Dómino, et eleemósynis illíus enarrábit omnis ecclésia sanctórum.Heureux l’homme qui a été trouvé sans tache, qui n’a pas couru après l’or, et qui n’a pas mis son espérance dans l’argent et dans les trésors. Qui est-il ? Et nous le louerons, car il a fait des choses merveilleuses durant sa vie. Il a été éprouvé par l’or et trouvé parfait, il aura une gloire éternelle ; il a pu violer la loi, et il ne l’a point violée ; il a pu faire le mal, et il ne l’a pas fait. C’est pourquoi ses biens ont été affermis dans le Seigneur, et toute l’assemblée des saints publiera ses aumônes.
Graduale. Ps. 91, 13 et 14.Graduel
Iustus ut palma florébit : sicut cedrus Líbani multiplicábitur in domo Dómini.Le juste fleurira comme le palmier et il se multipliera comme le cèdre du Liban dans la maison du Seigneur.
V/. Ibid., 3. Ad annuntiándum mane misericórdiam tuam, et veritátem tuam per noctem.V/. Pour annoncer le matin votre miséricorde et votre vérité durant la nuit.
Tractus. Ps. 111, 1-3.Trait
Beátus vir, qui timet Dóminum : in mandátis eius cupit nimis.Heureux l’homme qui craint le Seigneur et qui met ses délices dans ses commandements.
V/. Potens in terra erit semen eius : generátio rectórum benedicéturV/. Sa race sera puissante sur la terre ; la postérité des justes sera bénie.
V/. Glória et divítiæ in domo eius : et iustítia eius manet in sǽculum sǽculi.V/. La gloire et les richesses sont dans sa maison, et sa justice demeure dans tous les siècles.
+ Sequéntia sancti Evangélii secúndum Matthǽum.Lecture du Saint Evangile selon saint Mathieu.
Matth. 22, 34-46.
In illo témpore : Accessérunt ad Iesum pharisǽi : et interrogávit eum unus ex eis legis doctor, tentans eum : Magíster, quod est mandátum magnum in lege ? Ait illi Iesus : Díliges Dóminum, Deum tuum, ex toto corde tuo et in tota ánima tua et in tota mente tua. Hoc est máximum et primum mandátum. Secúndum autem símile est huic : Díliges próximum tuum sicut teípsum. In his duóbus mandátis univérsa lex pendet et prophétæ. Congregátis autem pharisǽis, interrogávit eos Iesus, dicens : Quid vobis vidétur de Christo ? cuius fílius est ? Dicunt ei : David. Ait illis : Quómodo ergo David in spíritu vocat eum Dóminum, dicens : Dixit Dóminus Dómino meo, sede a dextris meis, donec ponam inimícos tuos scabéllum pedum tuórum ? Si ergo David vocat eum Dóminum, quómodo fílius eius est ? Et nemo poterat ei respóndere verbum : neque ausus fuit quisquam ex illa die eum ámplius interrogáre.En ce temps-là, les pharisiens s’approchèrent de Jésus, et l’un d’eux, docteur de la loi, lui demanda pour le tenter : Maître, quel est le plus grand commandement de la loi ? Jésus lui dit : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, et de toute ton âme, et de tout ton esprit. C’est là le plus grand et le premier commandement. Mais le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Dans ces deux commandements sont renfermés la loi et les prophètes. Les pharisiens étant rassemblés, Jésus les interrogea, en disant : Que vous semble du Christ ? De qui est-il fils ? Ils lui répondirent de David. Il leur dit : Comment donc David 1’appelle-t-il en esprit son Seigneur, en disant : Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que j’aie fait de tes ennemis l’escabeau de tes pieds ? Si donc David l’appelle son Seigneur, comment est-il son fils ? Et personne ne pouvait rien lui répondre, et, depuis ce jour, nul n’osa plus lui proposer des questions.
Ant. ad Offertorium. Ps. 88, 25.Offertoire
Véritas mea et misericórdia mea cum ipso : et in nómine meo exaltábitur cornu eius.Ma vérité et ma miséricorde seront avec lui et par mon nom s’élèvera sa puissance.
SecretaSecrète
Laudis tibi, Dómine, hóstias immolámus in tuórum commemoratióne Sanctórum : quibus nos et præséntibus éxui malis confídimus et futúris. Per Dóminum.Nous vous immolons, Seigneur, une hostie de louange en mémoire de vos saints en qui nous avons confiance pour obtenir de triompher des maux de la vie présente et d’échapper aux maux de la vie future.
Ant. ad Communionem. Matth. 24,46-47.Communion
Beátus servus, quem, cum vénerit dóminus, invénerit vigilántem : amen, dico vobis, super ómnia bona sua constítuet eum.Heureux le serviteur que le maître, à son arrivée, trouvera veillant ; en vérité, je vous le dis, il l’établira sur tous ses biens.
PostcommunioPostcommunion
Refécti cibo potúque cælésti, Deus noster, te súpplices exorámus : ut, in cuius hæc commemoratióne percépimus, eius muniámur et précibus. Per Dóminum.Nourris par un aliment et un breuvage célestes, nous vous prions et supplions, ô notre Dieu, de faire que nous soit assuré le secours des prières de celui en la fête de qui nous les avons reçus.

Office

Leçons des Matines avant 1960

Quatrième leçon. Jean de Dieu naquit de parents catholiques et pieux, dans la ville de Monte-Mayor, au royaume de Portugal. Au moment de sa naissance une clarté extraordinaire parut sur sa maison, et une cloche sonna d’elle-même ; ces prodiges firent clairement présager que le Seigneur avait choisi cet enfant pour de glorieuses destinées. Dans sa jeunesse il fut retiré, par la puissance de la grâce divine, d’une vie trop relâchée et il commença à donner l’exemple d’une grande sainteté. Un jour, entendant la parole de Dieu, il se sentit tellement excité au bien, que dès lors il sembla avoir atteint une perfection consommée, quoiqu’il ne fût encore qu’au début d’une vie très sainte. Après avoir donné tout ce qu’il avait aux pauvres prisonniers, il devint pour tout le peuple un spectacle de pénitence, et de mépris de soi-même, ce qui lui attira les plus mauvais traitements de la part de beaucoup de personnes qui le regardaient comme un fou, et on alla jusqu’à l’enfermer dans une maison de santé. Mais Jean, enflammé de plus en plus d’une charité céleste, parvint à faire construire dans la ville de Grenade, avec les aumônes des personnes pieuses, deux vastes hôpitaux, et jeta les fondements d’un nouvel Ordre, donnant à l’Église l’institut des Frères hospitaliers, qui servent les malades au grand profit des âmes et des corps, et qui se sont répandus dans le monde entier.

Cinquième leçon. Il ne négligeait rien pour procurer le salut de l’âme et du corps aux pauvres malades, que souvent il portait chez lui sur ses épaules. Sa chanté ne se renfermait pas dans les limites d’un hôpital : il procurait secrètement des aliments à de pauvres veuves, à des jeunes filles dont la vertu était en danger, et mettait un soin infatigable à délivrer du vice ceux qui en étaient souillés. Un grand incendie s’étant déclaré dans l’hôpital de Grenade, Jean se jeta intrépidement au milieu du feu, courant ça et là dans l’enceinte embrasée jusqu’à ce qu’il eût transporté sur ses épaules tous les malades, et jeté les lits par les fenêtres pour les préserver du feu. Il resta ainsi pendant une demi-heure au milieu des flammes qui s’étendaient avec une rapidité extraordinaire ; il en sortit sain et sauf par le secours divin, à l’admiration de tous les habitants de Grenade ; montrant par cet exemple de charité que le feu qui le brûlait au dehors était moins ardent que celui qui l’embrasait intérieurement.

Sixième leçon. Jean de Dieu pratiqua, dans un degré éminent de perfection, des mortifications de tous genres, la plus humble obéissance, une extrême pauvreté, le zèle de la prière, la contemplation des choses divines ainsi que la dévotion à la sainte Vierge ; il fut aussi favorisé du don des larmes. Enfin, atteint d’une grave maladie, il reçut, selon l’usage, tous les sacrements de l’Église dans tes plus saintes dispositions, puis, malgré sa faiblesse, il se leva de son lit, couvert de ses vêtements, se jeta à genoux, et, pressant sur son cœur l’image de Jésus-Christ crucifié, il mourut ainsi dans le baiser du Seigneur, le huit des ides de mars, l’an mil cinq cent cinquante. Même après son dernier soupir, ses mains retinrent encore le crucifix, et son corps resta dans la même position pendant environ six heures, répandant une odeur merveilleusement suave jusqu’à ce qu’on l’eût enlevé de ce lieu. La ville entière fut témoin de ces prodiges. Illustre par de nombreux miracles, pendant sa vie et après sa mort, Jean de Dieu a été mis au nombre des Saints par le souverain Pontife Alexandre VIII. Léon XIII, agissant selon le désir des saints Évêques de l’Univers catholique et après avoir consulté la Congrégation des Rites, l’a déclaré le céleste Patron de tous les hospitaliers et des malades du monde entier, et il a ordonné qu’on invoquât son nom dans les Litanies des agonisants.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

Le même esprit qui avait inspire Jean de Matha se reposa sur Jean de Dieu, et le porta à se faire le serviteur de ses frères les plus délaissés. Tous deux, dans ce saint temps, se montrent à nous comme les apôtres de la charité fraternelle. Ils nous enseignent, par leurs exemples, que c’est en vain que nous nous flatterions d’aimer Dieu, si la miséricorde envers le prochain ne règne pas dans notre cœur, selon l’oracle du disciple bien-aimé qui nous dit : « Celui qui aura reçu en partage les biens de ce monde, et qui, voyant son frère dans la nécessité, tiendra pour lui ses entrailles fermées, comment la charité de Dieu demeurerait-elle en lui [1] ? » Mais, s’il n’est point d’amour de Dieu sans l’amour du prochain, l’amour des hommes, quand il ne se rattache pas à l’amour du Créateur et du Rédempteur, n’est aussi lui-même qu’une déception. La philanthropie, au nom de laquelle un homme prétend s’isoler du Père commun, et ne secourir son semblable qu’au nom de l’humanité, cette prétendue vertu n’est qu’une illusion de l’orgueil, incapable de créer un lien entre les hommes, stérile dans ses résultats. Il n’est qu’un seul lien qui unisse les hommes : c’est Dieu, Dieu qui les a tous produits, et qui veut les réunir à lui. Servir l’humanité pour l’humanité même, c’est en faire un Dieu ; et les résultats ont montré si les ennemis de la charité ont su mieux adoucir les misères auxquelles l’homme est sujet en cette vie, que les humbles disciples de Jésus-Christ qui puisent en lui les motifs et le courage de se vouer à l’assistance de leurs frères. Le héros que nous honorons aujourd’hui fut appelé Jean de Dieu, parce que le saint nom de Dieu était toujours dans sa bouche. Ses œuvres sublimes n’eurent pas d’autre mobile que celui de plaire à Dieu, en appliquant à ses frères les effets de cette tendresse que Dieu lui avait inspirée pour eux. Imitons cet exemple ; et le Christ nous assure qu’il réputera fait à lui-même tout ce que nous aurons fait en faveur du dernier de nos semblables.

Le patronage des hôpitaux a été dévolu par l’Église à Jean de Dieu, de concert avec Camille de Lellis que nous retrouverons au Temps après la Pentecôte.

Qu’elle est belle, ô Jean de Dieu ! Votre vie consacrée au soulagement de vos frères ! Qu’elle est grande en vous, la puissance de la charité ! Sorti, comme Vincent de Paul, de la condition la plus obscure, ayant comme lui passé vos premières années dans la garde des troupeaux, la charité qui consume votre cœur arrive à vous faire produire des œuvres qui dépassent de beaucoup l’influence et les moyens des puissants selon le monde. Votre mémoire est chère à l’Église ; elle doit l’être à l’humanité tout entière, puisque vous l’avez servie au nom de Dieu, avec un dévouement personnel dont n’approchèrent jamais ces économistes qui savent disserter, sans doute, mais pour qui le pauvre ne saurait être une chose sacrée, tant qu’ils ne veulent pas voir en lui Dieu lui-même. Homme de charité, ouvrez les yeux de ces aveugles, et daignez guérir la société des maux qu’ils lui ont faits. Longtemps on a conspiré pour effacer du pauvre la ressemblance du Christ ; mais c’est le Christ lui-même qui l’a établie et déclarée, cette ressemblance ; il faut que le siècle la reconnaisse, ou il périra sous la vengeance du pauvre qu’il a dégradé. Votre zèle, ô Jean de Dieu, s’exerça, avec une particulière prédilection, sur les infirmes ; protégez-les contre les odieux attentats d’une laïcisation qui poursuit leurs âmes jusque dans les asiles que leur avait préparés la charité chrétienne. Prenez pitié des nations modernes qui, sous prétexte d’arriver à ce qu’elles appelaient la sécularisation, ont chassé Dieu de leurs mœurs et de leurs institutions : la société, elle aussi, est malade, et ne sent pas encore assez distinctement son mal ; assistez-la, éclairez-la, et obtenez pour elle la santé et la vie. Mais comme la société se compose des individus, et qu’elle ne reviendra à Dieu que par le retour personnel des membres qui la composent, réchauffez la sainte charité dans le cœur des chrétiens : afin que, dans ces jours où nous voulons obtenir miséricorde, nous nous efforcions d’être miséricordieux, comme vous l’avez été, à l’exemple de celui qui, étant notre Dieu offensé, s’est donné lui-même pour nous, en qui il a daigné voir ses frères. Protégez aussi du haut du ciel le précieux institut que vous avez fondé, et auquel vous avez donné votre esprit, afin qu’il s’accroisse et puisse répandre en tous lieux la bonne odeur de cette charité de laquelle il emprunte son beau nom.

Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

Ce fut Clément XI qui introduisit dans le Missel, sous le rite semi-double, la fête de cet insigne patron des hôpitaux catholiques (+ 1550) et de tous ceux qui, dans les douleurs de la maladie et de l’agonie, accomplissent ici-bas les dernières phases de leur purification avant de comparaître au tribunal divin. Plus tard, Innocent XIII accorda à la fête de saint Jean de Dieu le rite double, et Léon XIII prescrivit d’insérer son nom dans les litanies des agonisants, avec celui de saint Camille de Lellis.

La messe est celle du Commun des Confesseurs non Pontifes, sauf la première collecte et l’Évangile, qui sont propres. La collecte fait allusion non seulement à la fondation de .l’Ordre des Hospitaliers, mais aussi au miracle de saint Jean de Dieu, alors que, l’hôpital de Grenade étant la proie des flammes, il circula près d’une demi-heure, intrépide, dans cette fournaise, transportant en lieu sûr les malades et jetant les lits par les fenêtres pour les soustraire au feu.

Le culte particulier de ce Saint est assuré à Rome chrétienne par les religieux de son Ordre, qui desservent l’antique église de Saint-Jean de Insula, dans l’île Tibérine. Il est en outre dans les traditions de la cour papale que la pharmacie des Palais apostoliques soit administrée par un religieux de l’Ordre de Saint-Jean de Dieu, qui remplit aussi les fonctions d’infirmier du Souverain Pontife.

La lecture de l’Évangile est celle du XVIIe dimanche après la Pentecôte (Matth., XXII, 34-36) où Jésus promulgue le grand précepte de la perfection chrétienne, qui consiste essentiellement dans l’amour. A la vérité, étant donné le caractère historique de l’inspiration liturgique moderne, on se serait plutôt attendu à trouver ici le récit du bon Samaritain, prototype de l’infirmier chrétien. Néanmoins la péricope choisie s’adapte bien, elle aussi, à notre Saint, puisque en lui l’amour du prochain, et plus encore l’amour de Dieu, s’élevèrent à des hauteurs si vertigineuses qu’ils atteignirent la sublime folie de la Croix, jusqu’à le pousser à se faire passer pour fou, à subir des coups et à se laisser enfermer dans un hôpital d’aliénés. Ce fut le bienheureux Maître Jean d’Avila qui pénétra le mystère et rappela le Saint de ce singulier genre de vie à une règle plus discrète, telle que Dieu l’exigeait de lui, pour qu’il arrivât à constituer une nouvelle et stable congrégation religieuse.

A notre lit de mort, dans les litanies des agonisants, le prêtre et les assistants invoqueront pour nous l’intercession de saint Jean de Dieu. Très probablement, nous ne serons plus alors en mesure de le faire, et peut-être pas même de l’entendre ; il est donc opportun de l’implorer dès maintenant, en recommandant au Saint le moment suprême d’où dépend le sort de notre éternité.

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

« Dieu est amour. Celui qui demeure Dans l’amour, demeure en Dieu et Dieu en lui. » (Devise de son Ordre).

Saint Jean : Jour de mort : 8 mars 1550. — Tombeau : à Grenade. Image : On le représente avec une couronne d’épines et avec une corne autour du cou à laquelle sont suspendus deux vases (pour recueillir les aumônes). Vie : Saint Jean de Dieu naquit en 1493. A l’âge de huit ans, il s’enfuit de la maison paternelle pour une raison inconnue. Dans sa jeunesse, il fut successivement bouvier et libraire et mena une vie chrétienne assez tiède. Un sermon du bienheureux Jean d’Avila le convertit soudain. Sa conversion fut si complète qu’on le prit pour un fou. Il sauva, au péril de sa vie, dans un incendie, les malades d’un hôpital (Oraison). Cette action manifesta sa vertu et lui révéla à lui-même la grande tâche de sa vie. Il fonda l’Ordre des Frères de la miséricorde (approuvé en 1572 par Saint Pie V). Le but de cet Ordre est la charité miséricordieuse pour les malades. Les membres de cet Ordre s’engagent, par un quatrième vœu, à se consacrer toute leur vie au soin des malades. Le saint est le patron des hôpitaux et des mourants. Son nom est invoqué dans les litanies dés agonisants.

Pratique : Notre temps ne sait plus, comme l’ancienne Église, unir harmonieusement, dans une vie intime et organique, ces deux choses : la liturgie et le soin des malades. Notre saint peut nous en indiquer les moyens. — Nous prenons la messe du Carême et faisons mémoire du saint.

Quelques traits de sa vie. — Dans le grand hôpital de Grenade fondé par les souverains Ferdinand et Isabelle, un incendie avait éclaté. Parti de la cuisine, le feu avait gagné les autres pièces. Il menaçait d’envahir aussi les grandes salles dans lesquelles étaient couchés des centaines de malades. On sonna le tocsin. De toutes parts, le peuple se précipita : Jean était en tête. Les pompiers et les charpentiers étaient impuissants. Personne n’osait se lancer dans la maison en feu. On entendait les gémissements désespérés des pauvres malades. Ceux qui pouvaient se lever, se tenaient auprès des fenêtres, se tordant les mains. C’était à devenir fou. Jean, alors, ne peut plus se contenir. Sans tenir compte de la fumée et des flammes, il se précipite dans ces salles qu’il connaît bien, arrache portes et fenêtres, donne quelques indications, quelques ordres brefs à ceux qui peuvent se sauver eux-mêmes, puis guidant, poussant et traînant les autres, en portant souvent deux à la fois, dans ses bras, sur ses épaules, montant et descendant les escaliers, il met tous les malades dehors, à l’abri. Quand tous sont sauvés, il s’occupe du mobilier ; il jette, par la fenêtre, les couvertures et les lits, les habits et les chaises, les autres meubles et arrache ainsi au feu le bien sacré des pauvres. Puis, il prend une hache et monte sur le toit. Tout là-haut, on le voit frapper avec acharnement. Soudain, une gerbe de flammes jaillit à côté de lui. Il s’enfuit et cherche à se sauver dans l’édifice adjacent. Mais là aussi une vague de flammes jaillit en face de lui. Il est entre deux feux. Quelques instants et il disparaît dans le brasier et la fumée. L’incendie se limite à son foyer. On déplore à haute voix la mort de l’homme courageux quand, soudain, il se précipite hors de la maison, noir de fumée, mais sain et sauf, n’ayant que les sourcils brûlés. La foule l’entoure en poussant des cris d’allégresse et félicite le sauveur des malades et de l’hôpital. Mais Jean chercha modestement à s’arracher aux remerciements et à la reconnaissance.

[1] I Johan. III, 17.