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12/06 Sts Basilide, Cyrin, Nabor et Nazaire, martyrs

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Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  
  Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique  

St Basilide, martyr romain, fête au VIIème siècle. Nabor et Nazaire, martyrs milanais, avant 404, fête au VIIème siècle le 8 juin. Cyrin (Quirin), évêque de Siszeck (Yougoslavie) martyr en 308, fête au VIIème siècle le 4 juin.

Il s’agit de trois solennités distinctes à l’origine. Par un phénomène fréquent, trois fêtes se présentant à des jours rapprochés, se fusionnèrent ensemble dans le Martyrologe et les Sacramentaires entre le IXe et le XIIe siècles. Cette fête devint simple commémoraison en 1729, lors de l’inscription de St Jean de Saint-Facond au calendrier.

Textes de la Messe

Eodem die 12 iunii
ce même 12 juin
Ss. BASILIDIS, CYRINI, NABORIS et NAZARII
Sts BASILIDE, CYRIN, NABOR et NAZAIRE
Martyrum
Martyrs
Commemoratio
Commémoraison
Ant. ad Introitum. Ps. 78, 11, 12 et 10.Introït
Intret in conspéctu tuo, Dómine, gémitus compeditórum : redde vicínis nostris séptuplum in sinu eórum : víndica sánguinem Sanctórum tuórum, qui effúsus est.Que le gémissement des captifs pénètre jusqu’à vous, Seigneur ; et pour ceux qui nous entourent faites retomber dans leur sein au septuple l’outrage qu’ils ont fait tomber sur vous ; vengez le sang de vos Saints, qui a été répandu.
Ps. Ibid., 1.
Deus, venérunt gentes in hereditátem tuam : polluérunt templum sanctum tuum : posuérunt Ierúsalem in pomórum custódiam.Ô Dieu, les nations sont venues dans votre héritage, elles ont souillé votre saint temple, elles ont fait de Jérusalem une cabane à garder les fruits.
V/. Glória Patri.
Oratio.Collecte
Sanctórum Mártyrum tuórum Basílidis, Cyrini, Naboris atque Nazárii, quǽsumus, Dómine, natalítia nobis votíva respléndeant : et, quod illis cóntulit excelléntia sempitérna, frúctibus nostræ devotiónis accréscat. Per Dóminum nostrum.Faites, s’il vous plaît, Seigneur, que l’anniversaire de la naissance au ciel de vos saints Martyrs Basilide, Cyrin, Nabor et Nazaire répande la lumière dans nos âmes et que les biens spirituels dont le bonheur éternel leur a procuré la plénitude, s’accroissent en nous grâce aux fruits de notre dévotion.
Léctio Epístolæ beáti Pauli Apóstoli ad Hebrǽos.Lecture de l’Épître de saint Paul Apôtre aux Hébreux.
Hebr. 10, 32-38.
Fratres : Rememorámini prístinos dies, in quibus illumináti magnum certámen sustinuístis passiónum : et in áltero quidem oppróbriis et tribulatiónibus spectáculum facti : in áltero autem sócii táliter conversántium effécti. Nam et vinctis compássi estis, et rapínam bonórum vestrórum cum gáudio suscepístis, cognoscéntes vos habere meliórem et manéntem substántiam. Nolíte itaque amíttere ! confidéntiam vestram, quæ magnam habet remuneratiónem. Patiéntia enim vobis necéssaria est : ut, voluntátem Dei faciéntes, reportétis promissiónem. Adhuc enim módicum aliquántulum, qui ventúrus est, véniet, et non tardábit. Iustus autem meus ex fide vivit.Mes frères : Rappelez en votre mémoire ces premiers jours où, après avoir été illuminés, vous avez soutenu un grand combat de souffrances, d’une part exposés comme en spectacle aux opprobres et aux tribulations, et de l’autre, prenant part aux maux de ceux qui étaient traités de même. Car vous avez eu de la compassion pour les prisonniers, et vous avez accepté avec joie la perte de vos biens, sachant que vous aviez une richesse meilleure et permanente. N’abandonnez donc pas votre confiance, qui aura une grande rémunération. En effet, la patience vous est nécessaire, afin que faisant la volonté de Dieu, vous obteniez ce qui vous est promis. Encore bien peu de temps, et celui qui doit venir viendra ; il ne tardera pas. Or, mon juste vit de la foi.
Graduale. Ps. 78, 10 et 2.Graduel
Vindíca, Dómine, sánguinem Sanctórum tuórum, qui effúsus est.Vengez, Seigneur, le sang de vos Saints qui a été répandu.
V/. Posuérunt mortália servórum tuórum, Dómine, escas volatílibus cæli : carnes Sanctórum tuórum béstiis terræ.V/. Ils ont livré les cadavres de vos serviteurs en pâture aux oiseaux du ciel, et la chair de vos fidèles aux bêtes de la terre.
Allelúia, allelúia. V/. Eccli. 44, 14. Córpora Sanctórum in pace sepúlta sunt, et nómina eórum vivent in generatiónem et generatiónem. Allelúia.Allelúia, allelúia. V/. Les Corps des saints ont été ensevelis dans la paix, et leurs noms vivront d’âge en âge. Alléluia.
+ Sequéntia sancti Evangélii secúndum Matthǽum.Suite du Saint Évangile selon saint Matthieu.
Matth. 24, 3-13.
In illo témpore : Sedénte Iesu super montem Olivéti, accessérunt ad eum discípuli secréto, dicéntes : Dic nobis, quando hæc erunt ? et quod signum advéntus tui et consummatiónis sǽculi ? Et respóndens Iesus, dixit eis : Vidéte, ne quis vos sedúcat. Multi enim vénient in nómine meo, dicéntes : Ego sum Christus : et multos sedúcent. Auditúri enim estis pr.lia et opiniónes proeliórum. Vidéte, ne turbémini. Opórtet enim hæc fíeri, sed nondum est finis. Consúrget enim gens in gentem, et regnum in regnum, et erunt pestiléntiæ et fames et terræmótus per loca. Hæc autem ómnia inítia sunt dolórum. Tunc tradent vos in tribulatiónem et occídent vos : et éritis ódio ómnibus géntibus propter nomen meum. Et tunc scandalizabúntur multi, et ínvicem tradent, et odio habébunt ínvicem. Et multi pseudoprophétæ surgent, et sedúcent multos. Et quóniam abundávit iníquitas, refrigéscet cáritas multórum. Qui autem perseveráverit us-que in finem, hic salvus erit.En ce temps-là : Jésus était assis sur le mont des Oliviers, ses disciples s’approchèrent de lui en particulier, et lui dirent : Dites-nous quand ces choses arriveront, et quel signe il y aura de votre avènement et de la consommation du siècle. Et Jésus leur répondit : Prenez garde que personne ne vous séduise. Car beaucoup viendront sous mon nom, disant : Je suis le Christ, et ils en séduiront beaucoup. Vous entendrez parler de guerres et de bruits de guerres. Gardez-vous de vous troubler ; car il faut que ces choses arrivent, mais ce ne sera pas encore la fin. Car on verra se soulever peuple contre peuple, et royaume contre royaume ; et il y aura des pestes et des famines, et des tremblements de terre en divers lieux. Et tout cela ne sera que le commencement des douleurs. Alors on vous livrera aux tourments, et on vous fera mourir ; et vous serez en haine à toutes les nations, à cause de Mon nom. Alors aussi beaucoup seront scandalisés, et ils se trahiront et se haïront les uns les autres. Et de nombreux faux prophètes surgiront, et séduiront beaucoup de monde. Et parce que l’iniquité abondera, la charité d’un grand nombre se refroidira. Mais celui qui persévérera jusqu’à la fin sera sauvé.
Ant. ad Offertorium. Ps. 149, 5-6.Offertoire
Exsultábunt Sancti in glória, lætabúntur in cubílibus suis : exaltatiónes Dei in fáucibus eórum, allelúia.Les Saints tressailliront dans la gloire, ils se réjouiront sur leurs couches. Les louanges de Dieu seront dans leur bouche, alléluia.
SecretaSecrète
Pro sanctórum tuórum Basílidis, Cyrini, Nabóris atque Nazárii sánguine venerándo, hóstias tibi. Dómine, sollémniter immolámus, tua mirabília pertractántes : per quem talis est perfécta victória. Per Dóminum.Accomplissant vos admirables mystères, nous vous offrons solennellement en sacrifice ces hosties, ô Seigneur, pour honorer le sang de vos saints Martyrs Basilide, Cyrin, Nabor et Nazaire, par l’effusion duquel ils ont remporté une si belle victoire.
Ant. ad Communionem. Ps. 78, 2 et 11.Communion
Posuérunt mortália servórum tuórum, Dómine, escas volatílibus cæli, carnes Sanctórum tuórum béstiis terræ : secúndum magnitúdinem bráchii tui pósside fílios morte punitórum.Ils ont livré les cadavres de vos serviteurs en pâture aux oiseaux du ciel, et la chair de vos fidèles aux bêtes de la terre : selon la grandeur de votre bras, gardez les fils de ceux qu’on a fait mourir.
PostcommunioPostcommunion
Semper, Dómine, sanctórum Martyrum tuórum Basílidis, Cyríni, Nabóris atque Nazárii sollémnia celebrántes : præsta, quǽsumus ; ut eórum patrocínia iúgiter sentiámus. Per Dóminum.Célébrant fidèlement la fête de vos saints Martyrs Basilide, Cyrin, Nabor et Nazaire, nous vous supplions, Seigneur, de faire que nous ressentions sans cesse leur patronage.

Office

Leçon des Matines avant 1960

Neuvième leçon. Basilide, Cyrin, Nabor et Nazaire, soldats romains, nobles par la naissance et illustres par la vertu, embrassèrent la religion chrétienne sous l’empire de Dioclétien. Comme ils prêchaient le Christ, Fils de Dieu, Aurélien, préfet de Rome, les fit saisir et les somma de sacrifier aux dieux ; ils méprisèrent ses ordres et on les jeta en prison. Pendant qu’ils priaient, soudain une très vive lumière remplit d’éclat la prison et brilla aux yeux de tous ceux qui s’y trouvaient. Marcellus, gardien de la prison, frappé de cette lumière céleste, crut en Jésus-Christ et beaucoup d’autres avec lui. Basilide et ses compagnons ayant été élargis par l’ordre de l’empereur Maximien, furent de nouveau chargés de chaînes après avoir été battus avec des scorpions, parce que, malgré la défense impériale, ils n’avaient à la bouche que le nom du Christ leur Dieu et Seigneur. Amenés aux pieds de l’empereur après sept jours d’incarcération, ils persistèrent à tourner en dérision les fausses divinités - et confesser avec constance Jésus-Christ leur Dieu. Condamnés à mort pour ce motif, ils eurent la tête tranchée. Leurs corps, jetés aux bêtes féroces, en furent respectés, et les Chrétiens les ensevelirent avec honneur.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

Près de Jean de Sahagun (Saint-Facond) apparaît sur le Cycle un groupe de martyrs ; à la suite de l’apôtre de la paix se présentent quatre guerriers des armées du Seigneur. C’est qu’en effet la guerre et la paix se donnent la main et ne font qu’un, dans le royaume du Fils de Dieu. La paix que le Christ a prêchée, la paix de l’homme avec Dieu, avec lui-même, avec ses frères de la cité sainte, est au prix des combats avec Satan, avec la chair, avec le monde et la cité maudite. Unissons donc, ainsi que l’Église, en un même hommage, le glorieux confesseur du XVe siècle et les athlètes du temps des persécutions.

Soldats de Jésus-Christ, vous nous faites comprendre la nature de la paix qu’il est venu apporter sur terre aux hommes de bonne volonté. Son prix est celui de Dieu même, qui se communique, à qui en est digne, avec elle et par elle. Sa fortifiante suavité surpasse tout sentiment, même celui des tortures que tout chrétien doit, comme vous, être prêt à subir pour garder ce trésor unique. C’était elle qui, pendant vos tourments et sous le coup de la mort, tenait en haut, libres et dégagés, vos intelligences et vos cœurs [1] ; c’est elle qui, en présence de l’indivisible et pacifique Trinité, fait maintenant votre béatitude. Quelles que puissent être les conditions variées de notre vie sur la terre, conduisez-nous, saints martyrs, par la voie de cette paix pleine de vaillance et d’amour, au repos de la fin bienheureuse.

Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

Le Bhx Schuster traite en deux fois des saints de ce jour : d’abord le 4 juin pour St Cyrin, puis le 12 pour les autres : nous réunissons ici les deux notices

Saint Quirin, évêque de Sisseck et martyr.
Station sur la voie Appienne, dans le cimetière ad Catacumbas.

Ce célèbre évêque de Pannonie, annoncé aujourd’hui dans le Hiéronymien — in Salaria civitate Pannoniæ, Quirini — et que saint Jérôme mentionne avec éloge dans le De Scriptoribus Ecclesiasticis, a été célébré par Prudence dans un beau poème du Peri Stephanon (Hym. VI) [2]. Saint Quirin fut noyé dans un fleuve ; puis, Sisseck ayant été occupée par les Barbares, son corps fut transporté à Rome au Ve siècle, et on l’ensevelit, pour l’honorer, dans l’hypogée situé à côté de l’abside de la basilique Apostolorum au deuxième mille de la voie Appienne, non loin par conséquent du lieu où la tradition romaine reconnaissait que les corps des deux Princes des Apôtres étaient demeurés cachés pendant quelque temps. Ædificantes nomini eius dignam ecclesiam [3], comme s’expriment les Actes. Ce lieu sacré semblait être en effet le plus apte à offrir une hospitalité temporaire à la dépouille du martyr exilé de Pannonie.

Autour de l’hypogée — très souvent identifié avec la Platonie — se déroule une inscription en vers, en l’honneur de saint Quirin, que De Rossi a reconstituée en partie :

... mentemque DEVOTAM.
HÆC • TIBI • MARTYR • EGO • REPENDO • MVNERA • LAVDIS
HOC • OPVS • EST • NOSTRVM • HÆC • OMNIS • CVRA • LABORIS
VT • DIGNAM • MERITIS • (dent sancta hæc limina sedem)
HÆC • POPVLIS (cunctis clarescet) • GLORIA • FACTI HÆC • QVIRINE • TVAS • (laudes _ ipsa aula) PROBABIT
« ... âme pieuse.
Je veux t’offrir, ô martyr, mes louanges.
Que ceci soit l’œuvre à nous réservée, le but du travail,
C’est-à-dire que ce sanctuaire apostolique t’offre une résidence égale à tes mérites.
Ce fait sera narré chez tous les peuples,
Et cette salle elle-même, ô Quirin, démontrera tes mérites ».

Saint Quirin dut être autrefois l’objet, à Rome, d’une grande vénération ; nous en avons la preuve, non seulement dans sa fête que l’on célèbre encore le 12 juin, comme nous le verrons plus tard, mais aussi par son image peinte avec celles de Policame et de Sébastien dans le lucernaire de la crypte de Sainte-Cécile au cimetière de Callixte.

Dans la liste des Huiles envoyées de Rome à la reine Théodelinde, il est fait mention de celle qui fut prise à la tombe du martyr de Sisseck dont le corps fut par la suite, dit-on, transporté à la basilique de Sainte-Marie au Transtévère.

Quand, en 550, l’évêque Maximien dédia la basilique de Saint-Etienne à Ravenne, il y déposa, avec beaucoup d’autres, quelques parcelles des reliques du martyr Quirin de Sisseck.

Saint Basilide, martyr.
Station sur la voie Aurélienne, au cimetière de Basilide.
Saint Quirin, évêque et martyr sur la voie Appienne ;
les saints Nabor et Nazaire, sur la voie Aurélienne.

Aujourd’hui le Hiéronymien nous conduit au IXe mille de la voie Aurélienne : Romæ via Aurelia, milliario VIIII, natale Basilledis. On donna plus tard pour compagnons à Basilide, Quirin, Nabor et Nazaire, cependant les plus anciens documents liturgiques célèbrent seulement Basilide en ce jour.

Dans l’intérieur de la Ville éternelle, une église s’élevait sous son vocable sur la voie Merulana, et c’est probablement la maison du martyr qui aura plus tard été convertie en sanctuaire, selon l’usage romain. Il en est question dans le Liber Pontificalis, à la biographie de Léon III, qui refit le toit de cette église. Verum, etiam et sarta tecta basilicæ beati Basilidis martyris, sitæ in Merulana, noviter restauravit [4].

La liste de Würzbourg indique la seule messe de saint Basilide ; celle-ci est également mentionnée dans le Lectionnaire romain de Fronteau, où la péricope évangélique est tirée de saint Jean, III, 1-15, comme pour la fête du 3 mai.

Au contraire, les différents manuscrits du Gélasien qui nous donnent les collectes des saints Quirin, Nabor et Nazaire, omettent régulièrement le nom de Basilide ; cette distinction se retrouve aussi dans le Hiéronymien où Nabor et Nazaire sont annoncés le 8 juin : Romæ, via Aurelia, Naboris Nazarii, mais sans que le nom de Basilide apparaisse.

L’énigmatique Quirin fait défaut, et il n’appartient pas au groupe milanais. Qui est-il donc ? Les diverses recensions des Actes ont étrangement confondu et mélangé toutes choses ; cependant l’édition qui en a été faite par les Bollandistes, d’après le manuscrit de saint Maximin de Trêves, nous fournit un détail topographique important qui nous donne la clef de la difficulté. Selon cette recension, ce ne serait pas sur la voie Aurélienne, comme l’indiquent toutes les autres sources, mais sur la voie Appienne, que le groupe entier de Basilide, Quirin, Nabor et Nazaire, aurait été enseveli : Via Appia, tertio milliario ab Urbe, in basilica Apostolorum, ubi corpora eorumdem Principum aliquando iacuerunt, videlicet Petri et Pauli, et sanctus Sebastianus Martyr Christi requiescit in eodem loco qui dicitur catacumbas, ædificantes sanctitati eorum ecclesiam [5].

Basilide était enseveli sur la voie Aurélienne ; Nabor et Nazaire à Milan. Quant à Quirin, il reposait bien dans la Platonie ad Catacumbas ; mais c’était le célèbre évêque de Sisseck que nous avons mentionné le 4 juin et non pas un soldat. La difficulté est donc résolue.

Il s’agit de trois solennités distinctes à l’origine : l’une en l’honneur de Basilide sur la voie Aurélienne, l’autre pour Quirin sur la voie Appienne, et enfin une troisième pour les saints Nabor et Nazaire, Milanais, des reliques desquels on célébrait aujourd’hui la découverte, advenue sous saint Ambroise. La translation qu’il en fit était probablement fêtée à Rome sur la même voie Aurélienne, car près de la basilique de Saint-Pancrace s’élevait un oratoire et un monastère dédiés à saint Victor, l’un des martyrs du groupe milanais. Avec le temps, se réalisa ce que nous avons plusieurs fois constaté dans ces notes : trois synaxes distinctes, se présentant à des jours rapprochés, se fusionnèrent ensemble dans le Martyrologe et dans les Sacramentaires, donnant naissance, pour le cas qui nous occupe aujourd’hui, à une étrange confusion de la part des hagiographes postérieurs.

La messe qui se trouve actuellement dans le missel est celle de la fête du groupe des martyrs milanais. L’antienne pour l’introït est la même que le 20 janvier. Voici la collecte : « Que resplendisse pour nous, Seigneur, le natale de vos martyrs Basilide, Quirin, Nabor et Nazaire ; et que ce caractère sacré et privilégié que lui a conféré la gloire éternelle des saints soit encore accru par le mérite de notre dévotion ».

Les deux lectures sont communes à la fête des martyrs Maris, Marthe, etc. le 19 janvier.

Le répons-graduel est tiré du psaume 78. « Vengez, Seigneur le sang de vos serviteurs, qui a été versé », « Ils donnèrent les cadavres de vos serviteurs en nourriture aux oiseaux de proie, les chairs de vos saints aux bêtes féroces ».

Jésus nous dit cependant dans l’Évangile : « Ne craignez point ceux qui, après qu’ils vous auront mis à mort, ne pourront plus vous faire de mal. » Inutile est donc la furie des persécuteurs, ajoute Bède le Vénérable, alors qu’ils font jeter aux bêtes féroces ou dans les cloaques les corps des martyrs. Les saints ont fini de souffrir, et toutes les ruses des méchants ne pourront jamais enlever à Dieu la puissance de ressusciter ces cadavres pour la gloire impérissable.

Le verset alléluiatique est tiré de l’Ecclésiastique (XLIV, 14). « Les corps des saints reposent dans la paix du tombeau, mais leur renommée demeure de génération en génération ». — Il est écrit d’Élisée : mortum prophetavit corpus eius [6] ; ainsi les tombeaux des saints ne sont pas simplement des mausolées recouvrant des cadavres, mais les trophées de notre foi. La dévotion des peuples réchauffe pour ainsi dire ces ossements glacés, et il en émane une vertu divine qui chasse les démons et guérit les malades.

L’antienne pour l’offertoire est tirée du psaume 149. « Que les saints se réjouissent dans la gloire ; qu’ils chantent sur leurs couches ; que les louanges de Dieu soient sur leurs lèvres ». — Ici les saints signifient les fidèles eux-mêmes, qui doivent glorifier Dieu en tout temps et en toute circonstance, en public et dans l’intime de leur demeure et même sur leur lit avant de se livrer au sommeil. Cet hymne continuel de louange, ils le chantent, ceux qui, grâce à la droiture de leurs intentions, marchent en présence de Dieu et dirigent toutes leurs actions de la journée à sa plus grande gloire, les unissant aux actions et aux intentions très saintes de l’humanité sacrée de Jésus. — Ut in omnibus glorificetur Deus [7], selon le mot d’ordre du grand patriarche saint Benoît.

Suit la collecte avant l’anaphore : « Pour commémorer le sang que versèrent aujourd’hui vos saints Basilide, Quirin, Nabor et Nazaire, nous vous immolons, Seigneur, l’admirable sacrifice solennel de votre Fils, par qui ils remportèrent une si glorieuse victoire ». — Tant il est vrai que : Eucharistia Martyres facit [8].

L’antienne pour la Communion est tirée du même psaume que l’introït. « Ils jetèrent les cadavres de vos serviteurs en pâture aux oiseaux de proie ; ils donnèrent les chairs de vos fidèles à dévorer aux bêtes féroces. Par votre bras puissant, régnez sur les fils des suppliciés ».

Les fils des suppliciés, c’est nous, rejetons éclos sur une terre arrosée du sang, ou plutôt, comme le dit Tertullien, éclos du sang même des martyrs, qui est semen Christianorum. Reconnaissant donc la noblesse de notre origine, nous prions le Seigneur de prendre possession de nous, c’est-à-dire de faire que son règne sur nous soit total, incontesté et pacifique. Adveniat regnum tuum.

La collecte d’action de grâces est la suivante : « Célébrant fidèlement la solennité de vos martyrs Basilide, Quirin, Nabor et Nazaire, nous vous demandons, Seigneur, d’éprouver aussi continuellement leur protection ».

Les saints Victor, Nabor et Félix sont les trois martyrs vénérés à Milan du temps de saint Ambroise. A ceux-ci vinrent s’ajouter par la suite deux autres groupes : Gervais et Protais, Nabor et Celse. Le Hiéronymien fond ensemble les trois groupes, et la liturgie romaine reflète elle aussi cette fusion. Un monastère en l’honneur de saint Victor s’élevait, nous l’avons déjà dit, près de la basilique de Saint-Pancrace. Celse et Nazaire sont fêtés le 28 juillet ; en même temps la mémoire de Nazaire se rencontre unie à celle des martyrs Nabor et Félix, mentionnés dans le Hiéronymien le 10, le 13 et le 14 de ce mois.

Voici les beaux vers que saint Ambroise fit graver dans la basilique des Apôtres à Milan, où il avait déposé le corps de saint Nazaire :

CONDIDIT • AMBROSIVS • TEMPLVM • DOMINOQVE • SACRAVIT
NOMINE • APOSTOLICO • MVNERE • RELIQVIIS
FORMA • CRVCIS • TEMPLVM • EST • VICTORIA • CHRISTI
SACRA • TRIVMPHALIS • SIGNAT • IMAGO • LOCVM
IN • CAPITE • EST • TEMPLI • VITÆ • NAZARIVS • ALMÆ
ET • SVBLIME • SOLUM • MARTYRIS • EXVVIIS
CRVX • VBI • SACRATVM • CAPVT • EXTVLIT • ORBE • REFLEXO
HOC • CAPVT • EST • TEMPLO • NAZARIOQVE • DOMVS
QVI • FOVET • ÆTERNAM • VICTOR • PIETATE • QVIETEM
CRVX • CVI • PALMA • FVIT • CRVX • ETIAM • SINVS • EST
Ambroise érigea ce temple et le dédia au Seigneur sous le nom des apôtres, dont se trouvent ici les reliques. Le temple, en forme de croix, indique la victoire du Christ, dont le signe triomphal est ainsi dessiné par la salle même. Au sommet de la croisée est le martyr Nazaire, à la vie sainte, qui, par ses reliques, sanctifie ce lieu. Là où se prolonge, terminée en demi-cercle, la branche supérieure de la Croix, se trouve le tombeau de Nazaire et le berna de la basilique. Le Christ triomphateur donne en ce lieu la paix éternelle à ses os pieux ; car à celui pour qui la Croix fut une palme de victoire, elle est aussi un asile de repos.

Disons maintenant un mot de Quirin de Sisseck, nommé plusieurs fois en ce mois dans le martyrologe Hiéronymien. La notice du manuscrit de saint Maximin de Trêves mentionné plus haut, qui nous apprend que le martyr fut enseveli ad Catacumbas, où les fidèles érigèrent un sanctuaire : ædificantes sanctitati eorum ecclesiam, coïncide dans ses termes avec les Actes de l’évêque martyr de Sisseck, si bien qu’aucun doute n’est possible. Que, dans le Hiéronymien, Quirin soit descendu du 4 juin au 13 ou au 14 du même mois, cela ne saurait étonner ceux qui connaissent le désordre de cette compilation hagiographique. Le martyrologe a ensuite exercé son influence sur le calendrier, et nous retrouvons en ce jour sur la voie Aurélienne Cyrinus transformé en soldat et rapproché de Basilide et de Nabor, dont il a fini par devenir compagnon de martyre.

Quant à nous, retenons soigneusement l’enseignement du dernier vers ambrosien de l’Apostoleion milanais : La croix n’est pas seulement un symbole de victoire, elle est aussi un refuge de salut : Crux qui palma fuit, Crux etiam sinus est [9].

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

Les saints Basilide, Cyrinus, Nabor et Nazaire. Basilide était soldat à Rome. Nazaire et Nabor étaient également soldats à Milan. Les corps de ces derniers furent découverts par saint Ambroise, et c’est aujourd’hui l’anniversaire de cette découverte. Ils moururent martyrs sous le règne de Dioclétien. Cyrinus, ou Quirinus, était évêque de Siscia. Saint Ambroise fit placer au-dessus du tombeau de saint Nazaire, dans l’église des Apôtres à Milan, une belle inscription en vers qui se termine par ces mots : « Celui qui a mené la croix à la victoire ; la croix lui accorde la paix ».

[1] Philip, IV, 7.

[2] P. L. LX, col. 424.

[3] Édifiant à son nom une église digne.

[4] Lib. Pontif., II, 29 : Il restaura à neuf aussi les toits réparés de la basilique du bienheureux martyr Basilide, sur la Merulana.

[5] Act. SS. Iun., III, 11.

[6] Eccli., XLVIII, 14 : après sa mort son corps prophétisa.

[7] Que Dieu soit glorifié en toute chose.

[8] L’Eucharistie fait les martyrs.

[9] La Croix qui fut la palme, la Croix aussi est le repos.