Textes de la Messe |
Office |
Dom Guéranger, l’Année Liturgique |
Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum |
Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique |
A Alexandrie, déposition de Ste Apolline, en 249. Fête au XIIIe siècle.
Missa Loquébar, de Communi Virginum 1 loco. | Messe Loquébar, du Commun des Vierges 1. |
Oratio. | Collecte |
Deus, qui inter cétera poténtiæ tuæ mirácula étiam in sexu frágili victóriam martýrii contulísti : concéde propítius ; ut, qui beátæ Apollóniæ Vírginis et Mártyris tuæ natalítia cólimus, per eius ad te exémpla gradiámur. Per Dóminum. | O Dieu, qui, entre autres merveilles de votre puissance, avez fait remporter la victoire du martyre même par le sexe le plus faible ; faites, dans votre bonté, qu’honorant la naissance au ciel de la Bienheureuse Apolline, votre Vierge et Martyre, nous tendions vers vous par l’imitation de ses exemples. |
Secreta | Secrète |
Súscipe, Dómine, múnera, quæ in beátæ Apollóniæ Vírginis et Mártyris tuæ sollemnitáte deférimus : cuius nos confídimus patrocínio liberári. Per Dóminum. | Recevez, Seigneur, les dons que nous vous présentons en la fête de la Bienheureuse Apolline, votre Vierge et Martyre ; en la protection de qui nous avons confiance pour être délivrés. |
Postcommunio | Postcommunion |
Auxiliéntur nobis, Dómine, sumpta mystéria : et, intercedénte beáta Apollónia Vírgine et Mártyre tua, sempitérna fáciant protectióne gaudére. Per Dóminum. | Qu’ils nous soient un secours efficace, ô Seigneur, les mystères auxquels nous avons participé et que la bienheureuse Apolline, votre Vierge et Martyre, intercédant pour nous, ils nous fassent jouir d’une protection constante. |
Leçon des Matines avant 1960
Neuvième leçon. Apolline, vierge d’Alexandrie, était déjà fort avancée en âge, lorsque, sous l’empereur Dèce, on la conduisit devant les idoles, pour qu’elle leur donnât des marques de vénération. Elle les méprisa et déclara hautement qu’il fallait adorer le Dieu véritable, Jésus-Christ. C’est pourquoi on lui brisa et on lui arracha les dents, et des bourreaux impies, ayant allumé un bûcher, la menacèrent de la brûler vive, si elle ne détestait le Christ, et n’adorait les dieux. Elle leur répondit qu’elle était prête à subir n’importe quel genre de mort pour la foi de Jésus-Christ. Étant donc saisie pour être livrée au feu, Apolline s’arrêta un moment comme pour délibérer sur ce qu’elle avait à faire, puis s’échappa des mains qui la retenaient et se jeta allègrement dans le brasier qui lui était préparé, et dont les flammes étaient moins ardentes que celles que l’Esprit-Saint avait allumées dans son cœur. Son corps fut bientôt consumé, et son âme très pure s’envola au ciel pour y recevoir la couronne du martyre.
L’Église d’Alexandrie offre aujourd’hui à nos hommages la célèbre vierge Apolline. Cette martyre du Christ, révérée par toute la terre, vient se joindre à ses sœurs Agathe et Dorothée, pour ranimer le courage dans nos cœurs. La vie présente ne fut rien à ses yeux. Conduite par l’Esprit-Saint, on la vit s’élancer sur le bûcher, sans attendre que la main des bourreaux l’y précipitât. De nos jours, il n’est pas rare que des hommes las de la vie, ou compromis avec leur orgueil, se jettent dans la mort pour se soustraire à des devoirs ; Apolline court au brasier, témoignant ainsi son horreur pour le plus grand des’ crimes. Plus d’une fois, l’Esprit divin, au temps des persécutions, suggéra la môme conduite à d’autres vierges sacrées qui craignaient pour leur foi ou pour leur honneur. Ces exemples sont rares néanmoins ; mais ils prouvent à leur manière que Dieu est maître de notre vie, et que nous devons être disposés à la lui rendre quand il lui plaît.
Une circonstance du martyre de sainte Apolline a frappé l’attention des fidèles. Pour punir la liberté avec laquelle elle annonçait Jésus-Christ, la fureur des bourreaux alla jusqu’à briser les dents de la sainte dans sa bouche inspirée. Une pieuse confiance, souvent récompensée, a porté les chrétiens à implorer sainte Apolline pour obtenir du soulagement dans ces cruelles douleurs qui ont les dents pour siège ou pour occasion. C’est ainsi que le Seigneur a voulu qu’il nous fût donné de compter sur la protection de ses saints, non seulement dans les besoins de nos âmes, mais encore dans les nécessités de nos corps.
Quelle ardeur est la vôtre, ô Apolline ! La flamme du bûcher, loin de vous effrayer, vous attire, et vous y courez comme à un lieu de délices. En face du péché, la mort vous semble douce ; et vous n’attendez pas que la main barbare des hommes vous y précipite. Ce courage étonne notre faiblesse ; et cependant le brasier que vous avez préféré à l’apostasie, et qui, dans peu d’instants, devait vous enfanter à un bonheur sans fin, n’est rien auprès de ces feux éternels que le pécheur brave à toute heure, parce qu’il ne les sent pas encore. Il ose défier ces flammes vengeresses, s’y exposer, pour une satisfaction passagère. Avec cela, les mondains se scandalisent des saints ; ils les trouvent exagérés, emportés, fanatiques, parce que les saints voient plus loin qu’ils ne voient eux-mêmes. Réveillez en nous, ô Apolline, la crainte du péché qui dévore éternellement ceux qui meurent avec lui. Si le bûcher qui fut pour vous comme un lit de repos nous semble affreux, que l’horreur de la souffrance et de la destruction serve du moins à nous éloigner du mal qui entraîne les hommes dans cet abîme, du fond duquel, comme parle saint Jean, la fumée de leurs tourments monte dans les siècles des siècles [1]. Ayez pitié de nous, ô Vierge ! Priez pour les pécheurs. Ouvrez-leur les yeux sur les périls qui les menacent. Faites-nous craindre Dieu, afin que nous puissions éviter ses justices, et que nous commencions enfin à l’aimer.
C’est saint Denys le Grand lui-même qui, dans une lettre à Fabius d’Antioche, nous décrit le martyre de cette courageuse vierge d’Alexandrie. Sa mémoire est entrée dars le Missel Romain vers la fin du moyen âge, et le fait que dans son martyre le bourreau lui arracha les dents, contribua beaucoup à la diffusion de son culte, à titre de protectrice contre les maux de dents.
A Rome, près de la basilique de Sainte-Marie au Transtevere, s’élevait une antique église dédiée à sainte Apollonie, avec un petit cimetière contigu ; elle est maintenant détruite, et il ne reste que son nom, donné à une place de ce quartier. Grâce précisément à ce temple, sainte Apollonie a acquis droit de cité dans le calendrier romain.
La messe est celle du Commun des vierges martyres, Loquébar.
Sainte Apolline. — Le martyrologe relate : « A Alexandrie, la mort de la sainte vierge Apolline. On lui avait d’abord, sous l’empereur Dèce (249-251), brisé toutes les dents. Ensuite les persécuteurs dressèrent un grand bûcher et y mirent le feu, ils menacèrent alors la sainte de l’y brûler vive si elle ne voulait pas répéter une formule blasphématoire. Après quelques instants de réflexion, la sainte s’arracha soudain des mains des persécuteurs et se jeta dans les flammes ardentes. Le feu du Saint-Esprit qui la brûlait était plus ardent que les flammes du bûcher. Les cruels bourreaux furent eux-mêmes vivement impressionnés de voir une faible femme aller, avec une telle décision, volontairement à la mort, avant qu’ils aient pu exécuter leur menace. » La sainte était déjà âgée. Le récit de son martyre a pour auteur l’évêque Denys d’Alexandrie qui vivait à son époque (+265). On invoque sainte Apolline contre les maux de dents.
Apolline a commis à proprement parler un suicide. Son exemple était déjà allégué par les anciens pour prouver qu’il est permis d’échapper à la persécution ou au déshonneur par la mort volontaire. Cependant les moralistes les plus notoires déclarèrent que, même dans ce cas, le suicide était illicite et essayèrent de justifier les actes héroïques de ce genre accomplis par des saints, en supposant qu’ils avaient agi sous une inspiration divine et ajoutèrent que, s’il n’y avait pas eu d’ordre de Dieu, on ne devait pas imiter ces exemples. Tous les actes des saints ne sont pas à imiter.
[1] Apoc. XIV, 11.