Textes de la Messe |
Office |
Dom Guéranger, l’Année Liturgique |
Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum |
Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique |
Morte à Édimbourg en 1093. Canonisée avant 1249. Fête en 1693.
Missa Cognóvi de Communi Communi non Virginum 2 loco, præter orationem sequentem : | Messe Cognóvi du Commun des Saintes Femmes 2, sauf l’oraison suivante : |
Oratio. | Collecte |
Deus, qui beátam Margarítam regínam exímia in páuperes caritáte inirábilem effecísti : da ; ut, eius intercessióne et exémplo, tua in córdibus nostris cáritas iúgiter augeátur. Per Dóminum nostrum. | Dieu, vous avez rendu admirable la bienheureuse reine Marguerite, en lui inspirant une extrême charité pour les pauvres : faites que, par son intercession et à son exemple, votre charité croisse continuellement dans nos cœurs. |
Leçons des Matines avant 1960
Quatrième leçon. Marguerite, reine d’Écosse, qui avait la gloire de descendre des rois d’Angleterre par son père, et des Césars par sa mère, devint plus illustre encore par la pratique des vertus chrétiennes. Elle naquit en Hongrie, où son père était alors exilé. Après avoir passé son enfance dans la plus grande piété, elle vint en Angleterre avec son père qui était appelé par son oncle, saint Édouard, roi des Anglais, à monter sur le trône de ses aïeux. Bientôt, partageant les revers de sa famille, Marguerite quitta les rivages d’Angleterre, mais une tempête, ou plus véritablement un dessein de la divine Providence, la conduisit sur les côtes d’Écosse. Là, pour obéir à sa mère, elle épousa le roi de ce pays, Malcolm III, qui avait été charmé par ses belles qualités, et se rendit merveilleusement utile à tout le royaume par ses œuvres de sainteté et de piété pendant les trente années qu’elle régna.
Cinquième leçon. Au milieu des délices de la cour, elle affligeait son corps par des macérations, des veilles, et réservait une grande partie de la nuit à ses pieuses oraisons. Indépendamment des autres jeûnes qu’elle observait en diverses circonstances, elle avait l’habitude de jeûner quarante jours entiers avant les fêtes de Noël, et cela avec une telle rigueur, qu’elle persévérait à le faire malgré les plus vives souffrances. Dévouée au culte divin, elle construisit à nouveau ou restaura plusieurs églises et monastères, qu’elle enrichit d’objets précieux et d’un revenu abondant. Par son très salutaire exemple, elle amena le roi son époux à une conduite meilleure et à des œuvres semblables à celles qu’elle pratiquait. Elle éleva ses enfants avec tant de piété et de succès, que plusieurs d’entre eux embrassèrent, comme Agathe sa mère et Christine sa sœur, le genre de vie le plus saint. Pleine de sollicitude pour la prospérité du royaume entier, elle délivra le peuple de tous les vices qui s’y étaient glissés insensiblement, et le ramena à des mœurs dignes de la foi chrétienne.
Sixième leçon. Rien cependant ne fut plus admirable en elle que son ardente charité envers le prochain et surtout à l’égard des indigents. Non contente d’en soutenir des multitudes par ses aumônes, elle se faisait une fête de fournir tous les jours, avec une bonté maternelle, le repas de trois cents d’entre eux, de remplir à genoux l’office d’une servante envers ces pauvres, de leur laver les pieds de ses mains royales, et de panser leurs plaies, n’hésitant même point à baiser leurs ulcères. Pour ces générosités et autres dépenses, elle sacrifia ses parures royales et ses joyaux précieux, et alla même plus d’une fois jusqu’à épuiser le trésor. Enfin, après avoir enduré des peines très amères avec une patience admirable et avoir été purifiée par six mois de souffrances corporelles, elle rendit son âme à son Créateur le quatre des ides de juin. Au même instant, son visage défiguré pendant sa longue maladie par la pâleur et la maigreur, s’épanouit avec une beauté extraordinaire. Marguerite fut illustre, même après sa mort, par des prodiges éclatants. L’autorité de Clément X l’a donnée pour patronne à l’Écosse ; et elle est dans le monde entier très religieusement honorée.
Une semaine s’est écoulée depuis le jour où, s’élevant de la terre de France dédiée au Christ par ses soins, Clotilde apprenait au monde le rôle réservé à la femme près du berceau des peuples. Avant le christianisme, l’homme, amoindri par le péché dans sa personne et dans sa vie sociale, ne connaissait pas la grandeur en ce point des intentions divines ; la philosophie et l’histoire ignoraient l’une et l’autre que la maternité pût s’élever jusqu’à ces hauteurs. Mais l’Esprit-Saint, donné aux hommes pour les instruire de toute vérité [1], théoriquement et pratiquement, multiplie depuis sa venue les exemples, afin de nous révéler l’ampleur merveilleuse du plan divin, la force et la suavité présidant ici comme partout aux conseils de l’éternelle Sagesse.
L’Écosse était chrétienne depuis longtemps déjà, lorsque Marguerite lui fut donnée, non pour l’amener au baptême, mais pour établir parmi ses peuplades diverses et trop souvent ennemies l’unité qui fait la nation. L’ancienne Calédonie, défendue par ses lacs, ses montagnes et ses fleuves, avait jusqu’à la fin de l’empire romain gardé son indépendance. Mais, inaccessible aux armées, elle était devenue le refuge des vaincus de toute race, des proscrits de toutes les époques. Les irruptions, qui s’arrêtaient à ses frontières, avaient été nombreuses et sans merci dans les provinces méridionales de la grande île britannique ; Bretons dépossédés, Saxons, Danois, envahisseurs chassés à leur tour et fuyant vers le nord, étaient venus successivement juxtaposer leurs mœurs à celles des premiers habitants, ajouter leurs rancunes mutuelles aux vieilles divisions des Pictes et des Scots. Mais du mal même le remède devait sortir. Dieu, pour montrer qu’il est le maître des révolutions aussi bien que des flots en furie, allait confier l’exécution de ses desseins miséricordieux sur l’Écosse aux bouleversements politiques et à la tempête.
Dans les premières années du XIe siècle, l’invasion danoise chassait du sol anglais les fils du dernier roi saxon, Edmond Côte de fer. L’apôtre couronné de la Hongrie, saint Etienne Ier, recevait à sa cour les petits-neveux d’Édouard le Martyr et donnait à l’aîné sa fille en mariage, tandis que le second s’alliait à la nièce de l’empereur saint Henri, le virginal époux de sainte Cunégonde. De cette dernière union naquirent deux filles : Christine qui se voua plus tard au Seigneur, Marguerite dont l’Église célèbre la gloire en ce jour, et un prince, Edgard Etheling, que les événements ramenèrent bientôt sur les marches du trône d’Angleterre. La royauté venait en effet de passer des princes danois à Édouard le Confesseur, oncle d’Edgard ; et l’angélique union du saint roi avec la douce Édith n’étant appelée à produire de fruits que pour le ciel, la couronne semblait devoir appartenir après lui par droit de naissance au frère de sainte Marguerite, son plus proche héritier. Nés dans l’exil, Edgard et ses sœurs virent donc enfin s’ouvrir pour eux la patrie. Mais peu après, la mort d’Édouard et la conquête normande bannissaient de nouveau la famille royale ; le navire qui devait reconduire sur le continent les augustes fugitifs était jeté par un ouragan sur les côtes d’Écosse. Edgard Etheling, malgré les efforts du parti saxon, ne devait jamais relever le trône de ses pères ; mais sa sainte sœur conquérait la terre où le naufrage, instrument de Dieu, l’avait portée.
Devenue l’épouse de Malcolm III, sa sereine influence assouplit les instincts farouches du fils de Duncan, et triompha de la barbarie trop dominante encore en ces contrées jusque-là séparées du reste du monde. Les habitants des hautes et des basses terres, réconciliés, suivaient leur douce souveraine dans les sentiers nouveaux qu’elle ouvrait devant eux à la lumière de l’Évangile. Les puissants se rapprochèrent du faible et du pauvre, et, déposant leur dureté de race, se laissèrent prendre aux charmes de la charité. La pénitence chrétienne reprit ses droits sur les instincts grossiers de la pure nature. La pratique des sacrements, remise en honneur, produisait ses fruits. Partout, dans l’Église et l’État, disparaissaient les abus. Tout le royaume n’était plus qu’une famille, dont Marguerite se disait à bon droit la mère ; car l’Écosse naissait par elle à la vraie civilisation. David Ier, inscrit comme sa mère au catalogue des Saints, achèvera l’œuvre commencée ; pendant ce temps, un autre enfant de Marguerite, également digne d’elle, sainte Mathilde d’Écosse, épouse d’Henri Ier fils de Guillaume de Normandie, mettra fin sur le sol anglais aux rivalités persévérantes des conquérants et des vaincus par le mélange du sang des deux races.
Nous vous saluons, ô reine, digne des éloges que la postérité consacre aux plus illustres souveraines. Dans vos mains, la puissance a été l’instrument du salut des peuples. Votre passage a marqué pour l’Écosse le plein midi de la vraie lumière. Hier, en son Martyrologe, la sainte Église nous rappelait la mémoire de celui qui fut votre précurseur glorieux sur cette terre lointaine : au VIe siècle, Colomb-Kil, sortant de l’Irlande, y portait la foi. Mais le christianisme de ses habitants, comprimé par mille causes diverses dans son essor, n’avait point produit parmi eux tous ses effets civilisateurs. Une mère seule pouvait parfaire l’éducation surnaturelle de la nation. L’Esprit-Saint, qui vous avait choisie pour cette tâche, ô Marguerite, prépara votre maternité dans la tribulation et l’angoisse : ainsi avait-il procédé pour Clotilde ; ainsi fait-il pour toutes les mères. Combien mystérieuses et cachées n’apparaissent pas en votre personne les voies de l’éternelle Sagesse ! Cette naissance de proscrite loin du sol des aïeux, cette rentrée dans la patrie, suivie bientôt d’infortunes plus poignantes, cette tempête, enfin, qui vous jette dénuée de tout sur les rochers d’une terre inconnue : quel prudent de ce monde eût pressenti, dans une série de désastres pareils, la conduite d’une miséricordieuse providence faisant servir à ses plus suaves résolutions la violence combinée des hommes et des éléments ? Et pourtant, c’est ainsi que se formait en vous la femme forte [2], supérieure aux tromperies de la vie présente et fixée en Dieu, le seul bien que n’atteignent pas les révolutions de ce monde.
Loin de s’aigrir ou de se dessécher sous la souffrance, votre cœur, établi au-dessus des variations de cette terre à la vraie source de l’amour, y puisait toutes les prévoyances et tous les dévouements qui, sans autre préparation, vous tenaient à la hauteur de la mission qui devait être la vôtre. Ainsi fûtes-vous en toute vérité ce trésor qui mérite qu’on l’aille chercher jusqu’aux extrémités du monde, ce navire qui apporte des plages lointaines la nourriture et toutes les richesses au rivage où les vents l’ont poussé [3]. Heureuse votre patrie d’adoption, si jamais elle n’eût oublié vos enseignements et vos exemples ! Heureux vos descendants, si toujours ils s’étaient souvenus que le sang des Saints coulait dans leurs veines ! Digne de vous dans la mort, la dernière reine d’Écosse porta du moins sous la hache du bourreau une tête jusqu’au bout fidèle à son baptême. Mais on vit l’indigne fils de Marie Smart, par une politique aussi fausse que sacrilège, abandonner en même temps l’Église et sa mère. L’hérésie desséchait pour jamais la souche illustre d’où sortirent tant de rois, au moment où l’Angleterre et l’Écosse s’unissaient sous leur sceptre agrandi ; car la trahison consommée par Jacques Ier ne devait pas être rachetée devant Dieu par la fidélité de Jacques II à la foi de ses pères. O Marguerite, du ciel où votre trône est affermi pour les siècles sans fin, n’abandonnez ni l’Angleterre à qui vous appartenez par vos glorieux ancêtres, ni l’Écosse dont la protection spéciale vous reste confiée par l’Église de la terre. L’apôtre André partage avec vous les droits de ce puissant patronage. De concert avec lui, gardez les âmes restées fidèles, multipliez le nombre des retours à l’antique foi, et préparez pour un avenir prochain la rentrée du troupeau tout entier sous la houlette de l’unique Pasteur [4].
Cette sainte reine confirme ce qu’écrivait jadis saint Paul : Une femme remplie de foi peut sanctifier son mari et toute sa maison. Marguerite fut l’ange tutélaire de son peuple, c’est pourquoi Clément X la proclama patronne de l’Écosse.
La messe est semblable à celle de sainte Françoise Romaine, le 9 mars. Seule la première collecte est spéciale : « Seigneur qui avez inspiré à la bienheureuse reine Marguerite un tendre amour pour les pauvres ; à son exemple et par ses prières, faites que la charité embrase de plus en plus notre cœur ».
Il est meilleur de donner que de recevoir, a dit le Seigneur (Act., XX, 35). Dieu a imprimé sur les puissants et sur les riches comme un rayon de sa magnificence, afin que ceux-ci, partageant entre les malheureux les ressources qu’il leur a accordées, soient les organes et les ministres de la divine Providence. La richesse est donc une mission sacrée et divine, et c’est la raison pour laquelle Dieu nous déclare si souvent dans la sainte Écriture qu’il a lui-même créé le riche comme le pauvre.
Que Dieu donne de bonnes mères !
Sainte Marguerite. Jour de mort : 10 juin 1093. Tombeau : La plus grande partie des reliques se trouve au couvent de l’Escurial, en Espagne. Image : On la représente en reine, secourant les pauvres. « Elle naquit en Hongrie (vers 1045) où son père était alors exilé. Elle y passa son enfance dans une profonde piété. Elle vint plus tard en Angleterre. Son père avait, en effet, été élevé par son oncle, le saint roi Édouard III d’Angleterre, aux plus hautes dignités du royaume. Après la mort subite de son père, en 1057, elle quitta l’Angleterre. Une violente tempête, ou plutôt une disposition spéciale de la Providence, la jeta sur les côtes écossaises. Là, elle épousa, sur l’ordre de sa mère, le roi d’Écosse, Malcolm III (1070). Sa sainteté et sa charité en firent pendant ses trente ans de règne la bénédiction du pays. Au sein même des grandeurs royales, Marguerite mortifiait sa chair par des austérités et des veilles. Ce qui était surtout admirable dans cette sainte reine, c’était sa charité pour le prochain et particulièrement pour les nécessiteux. Elle ne se contentait pas de secourir les nombreux nécessiteux par des aumônes ; elle nourrissait encore chaque jour à sa table environ 300 pauvres, elle les servait de sa propre main et baisait leurs plaies ». Elle a été déclarée patronne du royaume d’Écosse.
Encore deux traits de sa vie : La reine insistait souvent auprès de son confesseur pour qu’il lui indiquât sans pitié tous ses défauts. Elle fit convoquer plusieurs synodes et manifesta beaucoup de zèle pour faire observer les commandements de l’Église.
Pratique. — L’oraison de la fête fait ressortir « son amour pour les pauvres » et demande que, « par son intercession et son exemple, l’amour de Dieu grandisse chaque jour dans nos cœurs ». La charité doit toujours être cultivée avec un soin particulier. « Ce que vous aurez fait au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous l’aurez fait », dit le Seigneur. — La messe est du commun des saintes femmes (Cognóvi).