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12/08 Ste Claire, vierge

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Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  
  Dom Pius Parsch, Le guide dans l’année liturgique  

Morte le 11 août 1253, canonisée en 1255 par Alexandre IV. Fête immédiate diffusée par les Franciscains.

Fête double jusqu’en 1568 au calendrier romain. Réduite à une simple mémoire dans l’Octave de St Laurent par St Pie V. Innocent X en fit un double ad libitum et Clément X à nouveau un double de précepte en 1670.

Textes de la Messe

die 12 augusti
le 12 août
SANCTÆ CLARÆ
SAINTE CLAIRE
Virginis
Vierge
III classis (ante CR 1960 : duplex)
IIIème classe (avant 1960 : double)
Missa Dilexísti, de Communi Virginum III loco.Messe Dilexísti, du Commun des Vierges III.

Office

Leçons des Matines avant 1960.

Au deuxième nocturne.

Quatrième leçon. La vierge Claire naquit d’une famille illustre, à Assise, en Ombrie. A l’exemple de saint François, qui était de la même ville, elle distribua et convertit tous ses biens en aumônes et secours aux pauvres. Fuyant le tumulte du siècle, elle se rendit dans l’église de la Portioncule, où le même Saint lui coupa les cheveux. Ses parents firent tous leurs efforts pour la ramener dans le monde ; mais elle y opposa une ferme résistance. Conduite par saint François à l’église de Saint-Damien, elle s’associa plusieurs compagnes et institua ainsi elle-même une communauté de religieuses consacrées à Dieu, dont elle n’accepta le gouvernement que pour céder aux saintes importunités du Bienheureux. Elle exerça pendant quarante-deux ans la charge de supérieure, et se montra admirable par sa sollicitude, sa prudence et le soin qu’elle prit de maintenir dans sa communauté la parfaite observance des règles et des statuts de l’Ordre. Sa vie, en effet, était pour ses sœurs un enseignement et un exemple, d’où elles apprirent à régler leur vie.

Cinquième leçon. Afin de fortifier l’esprit en soumettant la chair, elle avait pour lit la terre nue ou des sarments, et pour oreiller un dur morceau de bois. Une seule tunique et un manteau d’étoffe rude et grossière lui suffisaient ; un âpre cilice ne quittait point sa chair. Telle était son abstinence que, pendant un temps assez long, elle ne goûta aucun aliment corporel, trois jours par semaine ; se restreignant les autres jours à une si petite quantité de nourriture, que ses sœurs s’étonnaient qu’elle pût subsister. Avant de tomber malade, elle s’imposait deux carêmes chaque année, sa seule réfection consistant alors en du pain et de l’eau. Adonnée aux veilles et assidue à l’oraison, elle passait dans ce saint exercice la plupart des jours et des nuits. Quand, éprouvée par de longues infirmités, elle ne pouvait se lever d’elle-même pour se livrer au labeur matériel, Claire se soulevait avec l’aide de ses sœurs, puis, le dos appuyé, travaillait des mains pour ne pas demeurer oisive, même dans ses maladies. Son amour passionné de la pauvreté lui fit constamment refuser les biens que Grégoire IX lui offrait pour le soutien de sa communauté.

Sixième leçon. Des miracles nombreux et variés répandirent l’éclat de sa sainteté. A l’une des sœurs de son monastère, elle rendit l’usage de la parole, guérit une seconde de sa surdité, et en délivra d’autres de la fièvre, d’une enflure d’hydropisie, d’une fistule douloureuse et de diverses maladies qui les accablaient. Un frère de l’Ordre des Mineurs lui dut de recouvrer la raison. L’huile étant venue à manquer totalement dans le monastère, Claire prit une cruche, la lava, et tout à coup ce vase se trouva rempli d’huile par un miracle de la divine bonté. Elle multiplia la moitié d’un pain, de manière à ce qu’il y en eût assez pour cinquante sœurs. Les Sarrasins, assiégeant Assise, s’efforçaient d’envahir le couvent de Claire : la Sainte, toute malade qu’elle était, se fit porter à l’entrée de la maison, tenant elle-même le vase où était renfermé le très saint sacrement de l’Eucharistie ; là, elle adressa à Dieu cette prière : « Seigneur, ne livrez pas aux bêtes féroces des âmes qui vous louent ; protégez vos servantes, que vous avez rachetées de votre sang précieux. » Pendant qu’elle priait, on entendit cette parole : « Moi, je vous garderai toujours. » En effet, une partie des Sarrasins prit la fuite, et ceux d’entre eux qui étaient déjà montés sur les murailles furent aveuglés et tombèrent à la renverse. Enfin cette Vierge, à ses derniers moments, fut visitée par un chœur de bienheureuses Vierges vêtues de blanc parmi lesquelles s’en distinguait une surpassant en beauté toutes les autres. Alors, munie de la sainte Eucharistie et enrichie par Innocent IV de l’indulgence plénière, elle rendit son âme à Dieu, la veille des ides d’août. Les nombreux miracles qui la glorifièrent après sa mort, déterminèrent le Pape Alexandre IV à la mettre au nombre des saintes Vierges.

Au troisième nocturne. Du Commun.

Lecture du saint Évangile selon saint Matthieu. Cap. 25, 1-13.
En ce temps-là : Jésus dit à-ses disciples cette parabole : Le royaume des cieux sera semblable à dix vierges qui ; ayant pris leurs lampes, altèrent au-devant de l’époux et de l’épouse. Et le reste.

Homélie de saint Grégoire, Pape. Homilia 12 in Evang.

Septième leçon. Je vous recommande souvent, mes très chers frères, de fuir le mal et de vous préserver de la corruption du monde ; mais aujourd’hui la lecture du saint Évangile m’oblige à vous dire de veiller avec beaucoup de soin à ne pas perdre le mérite de vos bonnes actions. Prenez garde que vous ne recherchiez dans le bien que vous faites, la faveur ou l’estime des hommes, qu’il ne s’y glisse un désir d’être loué, et que ce qui paraît au dehors ne recouvre un fond vide de mérite et peu digne de récompense. Voici que notre Rédempteur nous parle de dix vierges, il les nomme toutes vierges et cependant toutes ne méritèrent pas d’être admises au séjour de la béatitude, car tandis qu’elles espéraient recueillir de leur virginité une gloire extérieure, elles négligèrent de mettre de l’huile dans leurs vases.

Huitième leçon. Il nous faut d’abord examiner ce qu’est le royaume des cieux, ou pourquoi il est comparé à dix vierges, et encore quelles sont les vierges prudentes et les vierges folles. Puisqu’il est certain qu’aucun réprouvé n’entrera dans le royaume des cieux, pourquoi nous dit-on qu’il est semblable à des vierges parmi lesquelles il y en a de folles ? Mais nous devons savoir que l’Église du temps présent est souvent désignée dans le langage sacré sous le nom de royaume des cieux ; d’où vient que le Seigneur dit en un autre endroit : « Le Fils de l’homme enverra ses anges, et ils enlèveront de son royaume tous les scandales » [1]. Certes, ils ne pourraient trouver aucun scandale à enlever, dans ce royaume de la béatitude, où se trouve la plénitude de la paix.

Neuvième leçon. L’âme humaine subsiste dans un corps doué de cinq sens. Le nombre cinq, multiplié par deux, donne celui de dix. Et parce que la multitude des fidèles comprend l’un et l’autre sexe, la sainte Église est comparée à dix vierges. Comme, dans cette Église, les méchants se trouvent mêlés avec les bons et ceux qui seront réprouvés avec les élus, ce n’est pas sans raison qu’on la dit semblable à des vierges, dont les unes sont sages et les autres insensées. Il y a en effet, beaucoup de personnes chastes qui veillent sur leurs passions quant aux choses extérieures et sont portées par l’espérance vers les biens intérieurs ; elles mortifient leur chair et aspirent de toute l’ardeur de leur désir vers la patrie d’en haut ; elles recherchent les récompenses éternelles, et ne veulent pas recevoir pour leurs travaux de louanges humaines : celles-ci ne mettent assurément pas leur gloire dans les paroles des hommes, mais la cachent au fond de leur conscience. Et il en est aussi plusieurs qui affligent leur corps par l’abstinence, mais attendent de cette abstinence même des applaudissements humains.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

L’année même où, préalablement à tout projet de réunir des fils, saint Dominique fondait le premier établissement des Sœurs de son Ordre, le compagnon destiné du ciel au père des Prêcheurs recevait du Crucifix de Saint-Damien sa mission par ces mots : « Va, François, réparer ma maison qui tombe en ruines ». Et le nouveau patriarche inaugurait son œuvre en préparant, comme Dominique, à ses futures filles l’asile sacré où leur immolation obtiendrait toute grâce à l’Ordre puissant qu’il devait fonder. Sainte-Marie de la Portioncule, berceau des Mineurs, ne devait qu’après Saint-Damien, maison des Pauvres-Dames, occuper la pensée du séraphin d’Assise. Ainsi une deuxième fois dans ce mois [2], l’éternelle Sagesse veut-elle nous montrer que tout fruit de salut, qu’il semble provenir de la parole ou de l’action, procède premièrement de la contemplation silencieuse.

Claire fut pour François l’aide semblable à lui-même [3] dont la maternité engendra au Seigneur cette multitude d’héroïques vierges, d’illustres pénitentes, que l’Ordre séraphique compta bientôt sous toutes les latitudes, venant à lui des plus humbles conditions comme des marches du trône.

Dans la nouvelle chevalerie du Christ, la Pauvreté, que le père des Mineurs avait choisie pour Dame, était aussi la souveraine de celle que Dieu lui avait donnée pour émule et pour fille. Suivant jusqu’aux dernières extrémités l’Homme-Dieu humilié et dénué pour nous, elle-même pourtant déjà se sentait reine avec ses sœurs au royaume des cieux [4]. Dans le petit nid de son dénuement, répétait-elle avec amour, quel joyau d’épouse égalerait jamais la conformité avec le Dieu sans nul bien que la plus pauvre des mères enserra tout petit de vils langes en une crèche étroite [5] ! Aussi la vit-on défendre intrépidement, contre les plus hautes interventions, ce privilège de la pauvreté absolue dont la demande avait fait tressaillir le grand Pape Innocent III, dont la confirmation définitive, obtenue l’avant-veille de la mort delà sainte, apparut comme la récompense ambitionnée de quarante années de prières et de souffrances pour l’Église de Dieu.

La noble fille d’Assise avait justifié la prophétie qui, soixante ans plus tôt, l’annonçait à sa pieuse mère Hortulana comme devant éclairer le monde ; bien inspiré avait été le choix du nom qu’on lui donnait à sa naissance [6]. « Oh ! comme puissante fut cette clarté de la vierge, s’écrie dans la bulle de sa canonisation le Pontife suprême ! comme pénétrants furent ses rayons ! Elle se cachait au plus profond du cloître, et son éclat, transperçant tout, remplissait la maison de Dieu » [7]. De sa pauvre solitude qu’elle ne quitta jamais, le nom seul de Claire semblait porter partout la grâce avec la lumière, et fécondait au loin pour Dieu et son père saint François les cités.

Vaste comme le monde, où se multipliait l’admirable lignée de sa virginité, son cœur de mère débordait d’ineffable tendresse pour ces filles qu’elle n’avait jamais vues. A ceux qui croient que l’austérité embrassée pour Dieu dessèche l’âme, citons ces lignes de sa correspondance avec la Bienheureuse Agnès de Bohême. Fille d’Ottocare Ier, Agnès avait répudié pour la bure d’impériales fiançailles et renouvelait à Prague les merveilles de Saint-Damien : « O ma Mère et ma fille, lui disait notre sainte, si je ne vous ai pas écrit aussi souvent que l’eût désiré mon âme et la vôtre, n’en soyez point surprise : comme vous aimaient les entrailles de votre mère, ainsi je vous chéris ; mais rares sont les messagers, grands les périls des routes. Aujourd’hui que l’occasion m’en est présentée, mon allégresse est entière, et je me conjouis avec vous dans la joie du Saint-Esprit. Comme la première Agnès s’unit à l’Agneau immaculé, ainsi donc vous est-il donné, ô fortunée, de jouir de cette union, étonnement des cieux, avec Celui dont le désir ravit toute âme, dont la bonté est toute douceur, dont la vision fait les bienheureux, lui la lumière de l’éternelle lumière, le miroir sans nulle tache ! Regardez-vous dans ce miroir, ô Reine, ô Épouse ! Sans cesse, à son reflet, relevez vos charmes ; au dehors, au dedans, ornez-vous des vertus, parez comme il convient la fille et l’épouse du Roi suprême : ô bien-aimée, les yeux sur ce miroir, de quelles délices il vous sera donné de jouir en la divine grâce !... Souvenez-vous cependant de votre pauvre Mère, et sachez que pour moi j’ai gravé à jamais votre bienheureux souvenir en mon cœur » [8]. La famille franciscaine n’était pas seule à bénéficier d’une charité qui s’étendait à tous les nobles intérêts de ce monde. Assise, délivrée des lieutenants de Frédéric II et de la horde sarrasine à la solde de l’excommunié, comprenait quel rempart est une sainte pour sa patrie de la terre. Mais c’étaient surtout les princes de la sainte Église, c’était le Vicaire du Christ, que le ciel aimait à voir éprouver la puissance toute d’humilité, l’ascendant mystérieux dont il plaisait au Seigneur de douer son élue. François, le premier, ne lui avait-il pas, dans un jour de crise comme en connaissent les saints, demandé direction et lumière pour son âme séraphique ? De la part des anciens d’Israël arrivaient à la vierge, qui n’avait pas trente ans alors, des messages de cette sorte : « A sa très chère sœur en Jésus-Christ, à sa mère, Dame Claire servante du Christ, Hugolin d’Ostie, évêque indigne et pécheur. Depuis l’heure où il a fallu me priver de vos saints entretiens, m’arracher à cette joie du ciel, une telle amertume de cœur fait couler mes larmes que, si je ne trouvais aux pieds de Jésus la consolation que ne refuse jamais son amour, mon esprit en arriverait à défaillir et mon âme à se fondre. Où est la glorieuse allégresse de cette Pâque célébrée en votre compagnie et en celle des autres servantes du Christ ?... Je me savais pécheur ; mais au souvenir de la suréminence de votre vertu, ma misère m’accable, et je me crois indigne de retrouver jamais cette conversation des saints, si vos larmes et vos prières n’obtiennent grâce pour mes péchés. Je vous remets donc mon âme ; à vous je confie mon esprit, pour que vous m’en répondiez au jour du jugement. Le Seigneur Pape doit venir prochainement à Assise ; puissé-je l’accompagner et vous revoir ! Saluez ma sœur Agnès (c’était la sœur même de Claire et sa première fille en Dieu) ; saluez toutes vos sœurs dans le Christ » [9].

Le grand cardinal Hugolin, âgé de plus de quatre-vingts ans, devenait peu après Grégoire IX. Durant son pontificat de quatorze années, qui fut l’un des plus glorieux et des plus laborieux du XIIIe siècle, il ne cessa point d’intéresser Claire aux périls de l’Église et aux immenses soucis dont la charge menaçait d’écraser sa faiblesse. Car, dit l’historien contemporain de notre sainte, « il savait pertinemment ce que peut l’amour, et que l’accès du palais sacré est toujours libre aux vierges : à qui le Roi des cieux se donne lui-même, quelle demande pourrait être refusée [10] ? »

L’exil, qui après la mort de François s’était prolongé vingt-sept ans pour la sainte, devait pourtant finir enfin. Des ailes de feu, aperçues par ses filles au-dessus de sa tête et couvrant ses épaules, indiquaient qu’en elle aussi la formation séraphique était à son terme. A la nouvelle de l’imminence d’un tel départ intéressant toute l’Église, le Souverain Pontife d’alors, Innocent IV, était venu de Pérouse avec les cardinaux de sa suite. Il imposa une dernière épreuve à l’humilité de la sainte, en lui ordonnant de bénir devant lui les pains qu’on avait présentés à la bénédiction du Pontife suprême [11]) ; le ciel, ratifiant l’invitation du Pontife et l’obéissance de Claire au sujet de ces pains, fit qu’à la bénédiction de la vierge, ils parurent tous marqués d’une croix.

La prédiction que Claire ne devait pas mourir sans avoir reçu la visite du Seigneur entouré de ses disciples, était accomplie. Le Vicaire de Jésus-Christ présida les solennelles funérailles qu’Assise voulut faire à celle qui était sa seconde gloire devant les hommes et devant Dieu. Déjà on commençait les chants ordinaires pour les morts, lorsqu’Innocent voulut prescrire qu’on substituât à l’Office des défunts celui des saintes vierges ; sur l’observation cependant qu’une canonisation semblable, avant que le corps n’eût même été confié à la terre, courrait risque de sembler prématurée, le Pontife laissa reprendre les chants accoutumés. L’insertion de la vierge au catalogue des Saints ne fut au reste différée que de deux ans.

O Claire, le reflet de l’Époux dont l’Église se pare en ce monde ne vous suffit plus ; c’est directement que vous vient la lumière. La clarté du Seigneur se joue avec délices dans le cristal de votre âme si pure, accroissant l’allégresse du ciel, donnant joie en ce jour à la vallée d’exil. Céleste phare dont l’éclat est si doux, éclairez nos ténèbres. Puissions nous avec vous, par la netteté du cœur, parla droiture de la pensée, par la simplicité du regard, affermir sur nous le rayon divin qui vacille dans l’âme hésitante et s’obscurcit de nos troubles, qu’écarte ou brise la duplicité d’une vie partagée entre Dieu et la terre.

Votre vie, ô vierge, ne fut pas ainsi divisée. La très haute pauvreté, que vous eûtes pour maîtresse et pour guide, préservait votre esprit de cette fascination de la frivolité qui ternit l’éclat des vrais biens pour nous mortels [12]. Le détachement de tout ce qui passe maintenait votre œil fixé vers les éternelles réalités ; il ouvrait votre âme aux ardeurs séraphiques qui devaient achever de faire de vous l’émule de François votre père. Aussi, comme celle des Séraphins qui n’ont que pour Dieu de regards, votre action sur terre était immense ; et Saint-Damien, tandis que vous vécûtes, fut une des fermes bases sur lesquelles le monde vieilli put étayer ses ruines.

Daignez nous continuer votre secours. Multipliez vos filles, et maintenez-les fidèles à suivre les exemples qui feront d’elles, comme de leur mère, le soutien puissant de l’Église. Que la famille franciscaine en ses diverses branches s’échauffe toujours à vos rayons ; que tout l’Ordre religieux s’illumine à leur suave clarté. Brillez enfin sur tous, ô Claire, pour nous montrer ce que valent cette vie qui passe et l’autre qui ne doit pas finir.

Bhx cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

Voici celle qu’aujourd’hui la sainte liturgie appelle la première plante de la pauvre famille des Mineurs, dans sa branche féminine. Pauvre d’argent, oui, mais splendide dans la magnificence de son dénuement, parce qu’elle reflète fidèlement la pauvreté royale du Christ en Bethléem et sur la Croix.

Pour bien comprendre la figure séraphique de sainte Claire Sciti, il faut se reporter au temps où elle vécut. L’abus de la richesse et de la puissance féodale au XIIIe siècle avait imposé au clergé et aux moines des soins temporels qui, souvent, les distrayaient trop, au détriment de leur mission spirituelle. Les hérétiques en prenaient sujet d’accuser l’Église de s’être écartée de la pauvreté apostolique, tandis que les bons catholiques gémissaient de cet état de choses et appelaient une réforme. Dieu suscita enfin saint François, qui professa, dans le premier article de sa Règle, humble obéissance au pape Honorius (III) et à ses successeurs. Le héraut du grand Roi, sans bulle de privilèges, sans immunités féodales, se présenta donc aux fidèles pauvre et sans chaussures, mais portant aux mains, aux pieds et au côté, le sceau du Crucifié et, en son nom, fit résonner à nouveau sur les places et aux carrefours, la parole évangélique et les béatitudes de la montagne.

Le puissant abbé de Saint-Benoît du Subasio exerçait sa suzeraineté sur de nombreuses terres et forteresses dans le territoire d’Assise. Le Poverello, pour donner un berceau à la nouvelle famille qu’il voulait instituer, lui demanda la plus pauvre de ses possessions, la chapelle à demi détruite de la Portiuncule, qui devint ainsi le Bethléem des Mineurs.

Claire fut la parfaite imitatrice de saint François. Ce que celui-ci fit lui-même pour la vie religieuse dans la branche masculine, il le fit par l’intermédiaire de Claire dans la branche féminine. Au début, saint François lui donna à professer la Règle du Patriarche saint Benoît, sur l’Ordre duquel il voulut greffer sa nouvelle réforme des recluses de Saint-Damien, afin de l’établir sur une base canonique, déjà reconnue par la sainte Église. Toutefois, ne se contentant pas de l’exemple des riches monastères de Bénédictines répandus alors en Ombrie, saint François établit que Claire et ses moniales se rattacheraient, en vertu d’un recul de plusieurs siècles, aux traditions austères de la vie bénédictine, telle que le saint Patriarche l’avait instituée parmi les rochers solitaires de Subiaco, et dans la plus rigoureuse pauvreté.

C’est ainsi que Grégoire IX, avant que les Clarisses n’eussent encore une règle propre, put leur écrire : « Voici que vous êtes les dignes filles du bienheureux Benoît ».

Le monastère de Saint-Damien, où Claire vécut et mourut, représente aujourd’hui encore le palais royal de madonna paupertade. Mais, pour mieux assurer ce trésor, la fille spirituelle du Poverello voulut obtenir d’Innocent IV un diplôme de parfaite pauvreté ; aussi, tandis que d’autres sollicitaient du Pontife romain des honneurs, des privilèges et des biens, Claire ambitionna au contraire, pour elle et pour ses sœurs, le privilège de suivre la parfaite pauvreté du Christ.

Sainte Claire mourut en 1253 et fut canonisée deux ans après par Alexandre IV.

Aujourd’hui la messe est du commun (Dilexísti).

Sainte Claire nous enseigne aussi la dévotion à l’Eucharistie. Dans l’extrême dénuement de sa pauvreté, elle conservait le Très Saint Sacrement dans une custode d’argent, placée dans une pyxide en ivoire. Quand, sous Frédéric II, les Sarrasins assiégèrent Assise et assaillirent même le monastère de Saint-Damien, la Sainte, malade alors, ayant vu que tout secours humain était inutile, demanda celui de Dieu. Elle se fit transporter à la porte de clôture, et de là elle éleva, tel un bouclier, la pyxide eucharistique pour défendre ses religieuses contre les infidèles. A cette vue les ennemis prirent immédiatement la fuite, comme si, de ce vase sacré, fût sortie une vertu qui les repoussait de ce lieu.

Dom Pius Parsch, Le guide dans l’année liturgique

Seigneur, ne livrez pas aux bêtes sauvages les âmes de ceux qui vous louent ! (Ps. LXXIII).

Sainte Claire. — Jour de mort : le 12 août 1253. Tombeau : son corps reposa pendant six cents ans profondément enfoui sous l’église d’Assise. En 1850, Pie IX en ayant permis l’exhumation, on le trouva parfaitement conservé (en particulier, la tête et toutes les dents). Image : une religieuse, avec un ciboire dans la main.

Vie : La vie de collaboratrice de saint François d’Assise est comme enveloppée d’un voile de tendre charité divine. L’Ordre des Clarisses, branche féminine de la famille franciscaine, lui doit l’existence. A l’exemple de saint François, dit le bréviaire, elle distribua tous ses biens aux pauvres. Fuyant le tumulte du siècle, elle se réfugia à la campagne, dans une église. Là, saint François lui coupa les cheveux et lui imposa un habit de pénitence (18 mars 1212). Puis, elle se rendit à l’église Saint-Damien, où le Seigneur lui envoya plusieurs compagnes avec lesquelles elle institua une communauté dont elle accepta le gouvernement sur les instances de saint François. Pendant quarante-deux ans sa direction fut admirable de sollicitude et de prudence ; et sa vie tout entière, un enseignement et une lumière pour ses sœurs. Elle obtint du pape Innocent IV, pour elle et pour ses compagnes, le privilège de vivre dans la pauvreté parfaite. Elle fut la très fidèle imitatrice du saint d’Assise.

Comme les Sarrasins assiégeaient Assise et s’efforçaient d’envahir son couvent, bien que malade, sainte Claire se fit transporter à la porte de la maison, tenant elle-même le vase où était renfermé le Très Saint Sacrement. « Seigneur, implora-t-elle, ne livrez pas aux bêtes sauvages les âmes qui, vous louent (Ps LXXIII). Protégez vos servantes que vous avez rachetées de votre sang précieux ! » On entendit alors une voix qui disait : « Je vous garderai toujours ! » Et, en effet, les Sarrasins prirent la fuite.

Claire d’Assise fut proclamée sainte deux ans seulement après sa mort. On connaît l’ingénieuse trouvaille de Thomas de Celano : Clara nomine, vita clarior, clarissima moribus.

La Messe est du commun (Dilexísti).

[1] Matth. 13, 41.

[2] Il est fait allusion ici à la fête franciscaine de la Dédicace de la Portioncule le 2 août.

[3] Gen. II, 18.

[4] Regula Damianitarum, VIII.

[5] Regula, II ;Vita S. Clarae coeva, II.

[6] Clara claris praeclara meritis, magnas in cœlo claritate glorias ac in terra splendore miraculorum sublimium, clare claret, Bulla canonizationis.

[7] Ibid.

[8] S. Clarae ad B. Agnetem, Epist. IV.

[9] Wadding, ad an. 1221.

[10] Vita S. Clarae coaeva, III.

[11] Wadding, ad an. 1253, bien que le fait soit rapporté par d’autres au pontificat de Grégoire IX.

[12] Sap. IV, 12.