Aucune date exacte de la mort des saints n’est connue avant celle de St Polycarpe, 23 février 156). Lorsque le culte chrétien s’organisa au Ive siècle, et qu’on voulut commémorer les saints les plus importants de l’âge apostolique, on les fêta dans les jours qui suivaient la Nativité. C’est ainsi que les plus anciens martyrologes indiquent St Étienne le 26/12, Sts Jean et Jacques le 27/12, St Pierre et St Paul le 28/12.
La fête de St Étienne connu une grande diffusion après la découverte de ses reliques en 415.
S. Stephani Protomartyris |
St. Etienne, protomartyr |
Ant. ad Introitum. Ps. 118,23,86 et 23. | Introït |
Sedérunt príncipes, et advérsum me loquebántur : et iníqui persecúti sunt me : ádiuva me, Dómine, Deus meus, quia servus tuus exercebátur in tuis iustificatiónibus. | Les chefs du peuple se sont assemblés ; ils m’ont accusé et m’ont persécuté injustement. Viens à mon aide, Seigneur mon Dieu, car ton serviteur s’est appliqué à observer tes commandements. |
Ps. ibid., 1. | |
Beati immaculáti in via, qui ámbulant in lege Dómini. | Heureux ceux dont la route est droite et qui suivent la loi d Seigneur. |
V/.Glória Patri. | |
Oratio. | Collecte |
Da nobis, quǽsumus, Dómine, imitári quod cólimus : ut discámus et inimícos dilígere ; quia eius natalícia celebrámus, qui novit étiam pro persecutóribus exoráre Dóminum nostrum Iesum Christum, Fílium tuum : Qui tecum vivit. | Nous vous en prions, Seigneur, aidez-nous à imiter celui que nous célébrons : nous apprendrons ainsi à aimer nos ennemis puisque nous fêtons la naissance au ciel de celui qui a su, même pour ses bourreaux prier notre Seigneur Jésus-Christ. |
Et fit commemoratio Octavæ Nativitatis | Commémoraison de l’Octave de la Nativité |
Oratio. | Commémoraison. |
Concéde, quǽsumus, omnípotens Deus : ut nos Unigénititui nova per carnem Natívitas líberet ; quos sub peccáti iugo vetústa sérvitus tenet. Per eúndem Dóminum. | Nous vous en prions, Dieu tout puissant, que votre Fils éternel, par sa nouvelle naissance en notre chair, vienne nous délivrer de l’ancien esclavage qui nous maintient sous le joug du péché. |
Lectio Actuum Apostolorum. | Lecture des Actes des Apôtres. |
Act. 6, 8-10 ; 7, 54-59. | |
In diebus illis : Stéphanus plenus grátia et fortitúdine, faciébat prodígia et signa magna in pópulo. Surrexérunt autem quidam de synagóga, quæ appellátur Libertinórum, et Cyrenénsium, et Alexandrinórum, et eórum, qui erant a Cilícia et Asia, disputántes cum Stéphano : et non póterant resístere sapiéntiæ et Spirítui, qui loquebátur. Audiéntes autem hæc, dissecabántur córdibus suis, et stridébant déntibus in eum. Cum autem esset Stéphanus plenus Spíritu Sancto, inténdens in cœlum, vidit glóriam Dei, et Iesum stantem a dextris Dei. Et ait : Ecce, vídeo cœlos apértos, et Fílium hóminis stantem a dextris Dei. Exclamántes autem voce magna continuérunt aures suas, et ímpetum fecerunt unanímiter in eum. Et eiciéntes eum extra civitatem, lapidábant : et testes deposuérunt vestiménta sua secus pedes adolescéntis, qui vocabátur Saulus. Et lapidábant Stéphanum invocántem et dicéntem : Dómine Iesu, súscipe spíritum meum. Pósitis autem génibus, clamávit voce magna, dicens : Dómine, ne státuas illis hoc peccátum. Et cum hoc dixísset, obdormívit in Dómino. | En ces jours là : Etienne, plein de grâce et de force, faisait des prodiges et de grands miracles parmi le peuple. Mais il se leva des gens de la synagogue dite des Affranchis, et des Cyrénéens, et des Alexandrins, et de ceux de Cilicie et d’Asie, qui disputèrent avec Etienne ; et ils ne pouvaient résister à sa sagesse ni à l’Esprit par lequel il parlait. En l’entendant paroles, ils avaient le cœur exaspéré, et ils grinçaient des dents contre lui. Mais (Etienne), qui était rempli de l’Esprit-Saint, ayant fixé les yeux au ciel, vit la gloire de Dieu et Jésus debout à la droite de Dieu, et il dit : "Voici que je vois les cieux ouverts et le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu." Ils poussèrent de grands cris, se bouchèrent les oreilles et se jetèrent tous ensemble sur lui ; et après l’avoir entraîné hors de la ville, ils le lapidèrent. Les témoins déposèrent leurs vêtements aux pieds d’un jeune homme nommé Saul. Pendant qu’ils lapidaient Etienne, il priait disant : "Seigneur Jésus, recevez mon esprit !" S’étant mis à genoux, il s’écria d’une voix forte : "Seigneur, ne leur imputez pas ce péché !" Et, cela dit, il mourut. |
Graduale. Ps. 118, 23 et 86. | Graduel |
Sedérunt príncipes, et advérsum me loquebántur : et iníqui persecúti sunt me. | Les chefs du peuple se sont assemblés ; ils m’ont accusé et m’ont persécuté injustement. |
V/.Ps. 6, 5.Adiuva me, Dómine, Deus meus : salvum me fac propter misericórdiam tuam. | Viens à mon aide, Seigneur mon Dieu,. Dauve-moi dans ta grande miséricorde. |
Allelúia, allelúia. V/.Act. 7, 56. Vídeo cœlos apértos, et Iesum stantem a dextris virtútis Dei. Allelúia. | Allelúia, allelúia. V/. Je vois les cieux ouverts et Jésus debout à la droite du Dieu tout puissant. Alléluia. |
¶ In missis votivis post Septuagesimam, ommissis Allelúia et versu sequenti, dicitur | ¶ Aux messes votives après la Septuagésime, on omet l’Alléluia et son verset et on dit : |
Tractus. Ps. 20, 3-4. | Trait. |
Desidérium ánimæ eius tribuísti ei : et voluntáte labiórum eius non fraudásti eum. | Vous lui avez accordé le désir de son cœur, et vous ne l’avez point frustré de la demande de ses lèvres. |
V/. Quóniam prævenísti eum in benedictiónibus dulcédinis. | V/. Car vous l’avez prévenu des plus douces bénédictions. |
V/. Posuísti in cápite eius corónam de lápide pretióso. | V/. Vous avez mis sur sa tête une couronne de pierres précieuses. |
Tempore paschali omittitur graduale, et eius loco dicitur : | Pendant le temps pascal, on omet le graduel et à sa place on dit : |
Allelúia, allelúia. V/. Act. 7, 56. Vídeo cœlos apértos, et Iesum stantem a dextris virtútis Dei. | Allelúia, allelúia. V/. Je vois les cieux ouverts et Jésus debout à la droite du Dieu tout puissant. |
Allelúia. V/. Ps. 20, 4. Posuísti, Dómine, super caput eius corónam de lápide pretióso. Allelúia. | Allelúia. V/. Seigneur, vous avez mis sur sa tête une couronne de pierres précieuses. Alléluia. |
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Matthǽum. | Lecture du Saint Evangile selon saint Mathieu. |
Matth. 23, 34-39. | |
In illo témpore : Dicébat Iesus scribis et pharis.is : Ecce, ego mitto ad vos prophétas, et sapiéntes, et scribas, et ex illis occidétis et crucifigétis, et ex eis flagellábitis in synagógis vestris, et persequémini de civitáte in civitátem : ut véniat super vos omnis sanguis iustus, qui effúsus est super terram, a sánguine Abel iusti usque ad sánguinem Zacharíæ, filii Barachíæ, quem occidístis inter templum et altáre. Amen, dico vobis, vénient hæc ómnia super generatiónem istam. Ierúsalem, Ierúsalem, quæ occídis prophétas, et lápidas eos, qui ad te missi sunt, quóties vólui congregáre fílios tuos, quemádmodum gallína cóngregat pullos suos sub alas, et noluísti ? Ecce, relinquétur vobis domus vestra desérta. Dico enim vobis, non me vidébitis ámodo, donec dicátis : Benedíctus, qui venit in nómine Dómini. | En ce temps là : Jésus disait aux Scribes et aux Pharisiens : Voici que moi-même je vous envoie des Prophètes, des sages et des Docteurs : et vous tuerez les uns, et vous crucifierez les autres, vous en flagellerez dans vos synagogues, vous en persécuterez de ville en ville, afin que retombe sur vous tout le sang innocent répandu sur la terre, depuis le sang du juste Abel jusqu’au sang de Zacharie, fils de Barachie, que vous avez tué entre le sanctuaire et l’autel. En vérité, je vous le dis, tout cela viendra sur cette génération. Jérusalem, Jérusalem, qui tues les prophètes et lapides ceux qui te sont envoyés ! Que de fois j’ai voulu rassembler tes enfants, comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous n’avez pas voulu ! Voici que votre maison va vous être laissée déserte. Car, je vous le dis, vous ne me verrez plus désormais que vous n’ayez dit :"Béni celui qui vient au nom du Seigneur !". |
Credo, ratione Octavæ Nativitatis. | Credo, à cause de l’Octave de la Nativité. |
Ant. ad Offertorium. Act. 6, 5 et 7, 59. | Offertoire |
Elegérunt Apóstoli Stéphanum Levítam, plenum fide et Spíritu Sancto : quem lapidavérunt Iudǽi orántem, et dicéntem : Dómine Iesu, áccipe spíritum meum, allelúia. | Les Apôtres chosirent Etienne comme diacre pour sa grande foi, et parce que le Saint-Esprit l’animait : et tandis que les juifs le lapidaient, il faisait cette prière : Seigneur Jésus, accueille mon âme. Alléluia. |
Secreta. | Secrète |
Súscipe, Dómine, múnera pro tuórum commemoratióne Sanctórum : ut, sicut illos pássio gloriósos effécit ; ita nos devótio reddat innócuos. Per Dóminum. | Seigneur, acceptez ces offrandes en mémoire de vos saints. Comme lemartyre leur a mérité la gloire, que ce sacrifice nous fasse retrouver l’innocence. |
Pro Octava Nativitatis. Secreta. | Commémoraison de l’Octave de la Nativité. Secrète. |
Oblata, Dómine, múnera, nova Unigéniti tui Nativitáte sanctífica : nosque a peccatórum nostrorum máculis emúnda. Per eúndem Dóminum nostrum. | Sanctifiez ces offrandes, Seigneur, par la nouvelle naissance de votre Fils unique, et purifiez-nous des souillures de nos péchés. |
Præfatio de Nativitate Domini. | Préface de la Nativité . |
¶ Infra actionem : Communicántes et diem sacratíssimum celebrántes. | ¶ Pendant le canon : Unis dans une même communion et célébrant le jour très saint [**]. |
Ant. ad Communionem. Act. 7, 55, 58 et 59. | Communion |
Vídeo cœlos apértos, et Iesum stantem a dextris virtútis Dei : Dómine Iesu, accipe spíritum meum, et ne státuas illis hoc peccátum. | vois les cieux ouverts et Jésus debout à la droite du Dieu tout puissant : Seigneur Jésus, accueille mon âme et ne leur tient pas rigueur de ce péché. |
Postcommunio. | Postcommunion |
Auxiliéntur nobis, Dómine, sumpta mystéria : et, intercedénte beáto Stéphano mártyre tuo, sempitérna protectióne confírment. Per Dóminum nostrum. | Nous avons reçu votre sacrement, Seineur. Puisse-t-il nous apporter votre secours, et, grâce à la prière de saint Etienne, Martyr, nous faire bénéficier toujours de votre protection. |
Pro Octava Nativitatis. Postcommunio. | Commémoraison de l’Octave de la Nativité. Postcommunion. |
Præsta, quǽsumus, omnípotens Deus : ut natus hódie Salvátor mundi, sicut divínæ nobis generatiónis est auctor ; ita et immortalitátis sit ipse largítor : Qui tecum vivit et regnat. | Dieu tout puissant, le Sauveur du monde, qui est né aujourd’hui, nous a fait naître à la vie divine. Faites, nous vous en prions, qu’il nous accorde aussi le don de l’immortalité. |
Ante 1955 | Rubrique avant 1955 |
¶ Infra Octavam S. Stephani nihil fit de ea. | ¶ Pendant l’Octave de St Étienne, on ne fait rien de lui. |
AUX PREMIÈRES VÊPRES. avant 1960
Ant.au Magnificat Or Etienne, * plein de grâce et de force, faisait de grands prodiges parmi le peuple.
A MATINES.
Invitatoire. Le Christ-né a couronné aujourd’hui le bienheureux Étienne, * Venez, adorons-le.
Au premier nocturne.
Des Actes des Apôtres. Cap. 6, 1-10 ; 7, 54-60
Première leçon. En ces jours-là, le nombre des disciples croissant, il s’éleva un murmure des Grecs [1] contre les Hébreux, parce que leurs veuves étaient négligées dans la distribution de chaque jour [2]. Les douze donc, convoquant la multitude des disciples, dirent : II n’est pas juste que nous abandonnions la parole de Dieu, et que nous vaquions au service des tables. Cherchez donc parmi vous, mes frères, sept hommes de bon témoignage, pleins de l’Esprit Saint et de sagesse, que nous puissions préposer à cette œuvre. Pour nous, nous nous appliquerons à la prière, et au ministère de la parole. Ce discours plut à toute la multitude. Et ils élurent Étienne, homme plein de foi et de l’Esprit-Saint, Philippe, Prochore, Nicanor, Timon, Parménas et Nicolas, prosélyte [3] d’Antioche. Ils les présentèrent aux Apôtres, et ceux-ci, priant, leur imposèrent les mains.
R/. Étienne, plein de grâce et de force, * Faisait des prodiges et de grands miracles au milieu du peuple. V/. Quelques-uns de la synagogue se levèrent, disputant contre Étienne, et ils ne pouvaient résister à la sagesse et à l’Esprit-Saint qui parlait. * Faisait.
Deuxième leçon. Et la parole du Seigneur croissait, et le nombre des disciples se multipliait grandement à Jérusalem ; et même un grand nombre de prêtres obéissaient à la foi. Or Étienne, plein de grâce et de force, faisait des prodiges et de grands miracles parmi le peuple. Mais quelques-uns de la synagogue, qui est appelée des Affranchis, de celle des Cyrénéens et des Alexandrins, et de ceux qui étaient de Cilicie et d’Asie, se levèrent, disputant contre Étienne ; et ils ne pouvaient résister à la sagesse et à l’Esprit-Saint qui parlait. En entendant ces paroles, ils frémissaient de rage dans leurs cœurs, et ils grinçaient des dents contre lui.
R/. Tous ceux qui étaient dans le conseil virent Étienne. * Et fixant les yeux sur son visage, il leur parut comme le visage d’un Ange, se tenant parmi eux. V/. Plein de grâce et de force, il faisait des prodiges et de grands miracles parmi le peuple. * Et.
Troisième leçon. Mais comme il était plein de l’Esprit-Saint, levant les yeux au Ciel, il vit la gloire de Dieu, et Jésus qui était debout à la droite de Dieu ; et il dit : Voici que je vois les Cieux ouverts, et le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu. Alors, poussant de grands cris, ils se bouchèrent les oreilles, et se précipitèrent tous ensemble sur lui. Et l’ayant entraîné hors de la ville, ils le lapidaient ; et les témoins déposèrent leurs vêtements aux pieds d’un jeune homme appelé Saul. Et ils lapidaient Etienne, qui priait et disait : Seigneur Jésus, recevez mon esprit. Et s’étant mis à genoux, il cria à haute voix : Seigneur, ne leur imputez pas ce péché. Et quand il eut dit cela, il s’endormit dans le Seigneur.
R/. Le bienheureux Étienne levant les yeux au ciel,vit la gloire de Dieu et dit : * Voilà que je vois les cieux ouverts, et le Fils de l’homme se tenant à la droite du Dieu tout-puissant. V/. Comme Étienne était rempli de l’Esprit-Saint, levant les yeux au ciel, il vit la gloire de Dieu, et il dit. * Voilà. Gloire au Père. * Voilà.
Au deuxième nocturne.
Quatrième leçon. Hier nous avons célébré la naissance temporelle de notre Roi éternel, aujourd’hui nous célébrons la passion triomphante d’un soldat. Hier en effet, notre Roi, revêtu de notre chair, sortant du palais d’un sein virginal, a daigné visiter le monde : aujourd’hui le soldat, quittant la tente de son corps, monte en triomphateur dans le Ciel. Celui-là, conservant toute la majesté de la nature divine et éternelle et prenant l’humble vêtement de la chair, est entré dans le camp de ce siècle pour y combattre ; celui-ci, dépouillé du vêtement corruptible de son corps, est monté dans le palais du Ciel pour y régner éternellement. L’un est descendu couvert du voile de la chair ; l’autre est monté couronné de lauriers, conquis par l’effusion de son sang.
R/. Ils lapidaient Étienne qui priait et disait : * Seigneur Jésus, recevez mon esprit, et ne leur imputez point ce péché. V/. S’étant mis à genoux, il cria d’une voix forte, disant. * Seigneur.
Cinquième leçon. Celui-ci est monté après avoir été lapidé par les Juifs, parce que celui-là est descendu à la joie des Anges. Hier, les saints Anges chantaient avec jubilation : Gloire à Dieu dans le ciel ; et aujourd’hui, ils ont reçu avec allégresse Étienne dans leur compagnie. Hier, le Seigneur est sorti du sein d’une vierge ; Aujourd’hui, le soldat est sorti de la prison de la chair. Hier, le Christ a été pour nous enveloppé de langes ; aujourd’hui, Étienne est revêtu par lui de la robe de l’immortalité. Hier, l’étroite crèche a porté le Christ enfant ; aujourd’hui, l’immensité du Ciel a reçu Étienne triomphant. Le Seigneur est descendu seul, pour en élever un grand nombre ; notre Roi s’est humilié, afin d’exalter ses soldats.
R/. Ils se précipitèrent tous ensemble sur lui, et ils l’entraînèrent hors de la ville, priant et disant : * Seigneur, Jésus, recevez mon esprit. V/. Et les témoins déposèrent leurs vêtements aux pieds d’un jeune homme nommé Saul [4] : et ils lapidaient Étienne qui priait et disait. * Seigneur.
Sixième leçon. Mais il nous est nécessaire, mes frères, de savoir de quelles armes Étienne était muni, pour pouvoir surmonter ainsi la cruauté des Juifs, et pour mériter un si glorieux triomphe. Étienne donc, pour mériter de recevoir la couronne que signifie son nom [5] ; avait pour armes la charité, et par elle, il était partout victorieux. Par charité envers Dieu, il ne céda point à la fureur des Juifs ; et par charité envers son prochain, il intercéda pour ceux qui le lapidaient. Par charité, il reprenait ceux qui erraient, pour les faire rentrer dans la bonne voie ; il priait, par charité, pour ceux qui le lapidaient, afin qu’ils ne fussent point punis. Armé de cette force de la charité il vainquit Saul, qui sévissait alors cruellement contre l’Église, et mérita d’avoir pour compagnon dans le Ciel, celui qu’il avait eu pour persécuteur sur la terre.
R/. Des impies se sont jetés sur le juste, pour le livrer à la mort. * Mais lui, souffrit les pierres avec joie, pour mériter de recevoir la couronne de gloire. V/. Ils se bouchèrent les oreilles, et se précipitèrent tous ensemble sur lui. * Mais. Gloire au Père. * Mais.
Au troisième nocturne.
Lecture du saint Évangile selon saint Matthieu.
En ce temps-là : Jésus disait aux Scribes et aux Pharisiens : Voici que moi-même je vous envoie des Prophètes, des sages et des Docteurs : et vous tuerez les uns, et vous crucifierez les autres. Et le reste.
Homélie de saint Jérôme, Prêtre.
Septième leçon. Ces paroles : « comblez la nature de vos pères », que nous disons se rapporter à la personne du Seigneur, puisqu’il allait, par les Juifs, être mis à mort, se peuvent aussi rapporter à ses disciples, desquels il est dit maintenant : « Voici que moi-même je vous envoie des Prophètes, des sages et des Docteurs. » Observez en même temps que, selon la remarque de l’Apôtre dans son Épître aux Corinthiens, des dons différents sont attribués aux disciples du Christ : les uns sont Prophètes et annoncent l’avenir ; d’autres ont le don de sagesse et discernent le moment propice pour parler ; il y a enfin des Docteurs, très versés dans la science de la loi. De ce nombre Étienne a été lapidé, Paul tué (par le glaive), Pierre crucifié, les disciples, comme on le voit dans les Actes des Apôtres, furent flagellés.
R/. Étienne, le serviteur de Dieu, lui que les Juifs lapidaient, vit les Cieux ouverts ; il les vit et y entra : * Heureux mortel pour qui s’ouvraient les Cieux. V/. Tandis qu’il était frappé d’une grêle de pierres qui tombaient avec fracas, une clarté divine brilla pour lui dans le ciel, au travers des espaces éthérés. * Heureux.
Huitième leçon. Cherchons quel est ce Zacharie, fils de Barachie, car nous trouvons dans les Livres saints plusieurs Zacharie. Mais, comme si le Sauveur avait voulu nous empêcher de nous égarer dans nos recherches, il a ajouté : « Que vous avez tué entre le temple et l’autel. » J’ai lu dans les auteurs, divers sentiments par rapport à ce personnage, et je dois, ce me semble, les exposer tous. Les uns voient dans ce Zacharie, fils de Barachie, le onzième des douze Prophètes, et, en effet, le nom de son père est bien celui que l’Évangile cite ; mais on ne voit nulle part dans les Écritures qu’il ait été tué entre le temple et l’autel, ce qui eût été d’ailleurs difficile, puisqu’à ce moment, c’est à peine si du temple, il restait des ruines. D’autres, s’appuyant sur certaines rêveries des apocryphes, font de ce Zacharie le père de Jean-Baptiste, prétendant qu’il aurait été tué pour avoir prêché l’avènement du Sauveur.
R/. Les portes du Ciel ont été ouvertes au bienheureux Étienne, martyr du Christ, qui, le premier, a été mis au nombre des Martyrs [6] : * Et c’est pourquoi il a été couronné et triomphe dans les Cieux. V/. Celui-ci a rendu le premier au Sauveur, la mort que notre Sauveur a daigné souffrir pour nous. * Et. Gloire au Père. * Et.
Neuvième leçon. D’autres enfin prétendent que ce Zacharie est celui qui fut mis à mort par Joas, roi de Juda, entre le temple et l’autel, comme le racontent les livres des Rois. Mais il faut observer que le Zacharie en question n’est point fils de Barachie, mais du grand prêtre Joïada. Aussi l’Écriture dit-elle : « Joas ne se souvint pas que son père Joäda lui avait fait du bien. » Comme donc d’un côté, nous avons Zacharie, et comme d’autre part, l’endroit où il fut mis à mort est bien celui indiqué plus haut, cherchons pour quelle raison on le dit fils de Barachie et non de Joïada. « Barachie » se traduit, en notre langue, « le béni du Seigneur, » et ce serait donc la justice du grand prêtre Joïada qui indiquerait l’emploi de ce nom hébreu de Barachie, nom attestant les bénédictions divines. Nous trouvons dans i’ Évangile dont se servent les Nazaréens : « fils de Joïada », au lieu de « fils de Barachie ».
A LAUDES
Ant. 1 Ils lapidèrent Étienne, * mais lui invoquait le Seigneur et disait : Ne leur imputez point ce péché.
Ant. 2 Les pierres du torrent * lui ont été douces : toutes les âmes justes le suivent.
Ant. 3 Mon âme s’est attachée à vous, * parce que ma chair a été lapidée pour vous, mon Dieu.
Ant. 4 Étienne vit * les Cieux ouverts, il les vit et y entra : heureux mortel, pour qui les Cieux étaient ouverts !
Ant. 5 Voici que je vois * les Cieux ouverts, et Jésus se tenant à la droite de la puissance de Dieu.
Capitule. Or, Étienne, plein de grâce et de force, faisait des prodiges et de grands miracles parmi le peuple.
V/. Des hommes pieux ensevelirent Étienne.
R/. Et lui firent de grandes lamentations.
Ant. au Bénédictus Or Étienne, * plein de grâce et de force, faisait de grands miracles parmi le peuple.
AUX DEUXIÈMES VÊPRES.
V/. Étienne vit les Cieux ouverts.
R/. Il les vit et y entra : heureux mortel, à qui les Cieux étaient ouverts.
Ant. au Magnificat Étienne fut enseveli * par des hommes pieux, qui lui firent de solennelles lamentations.
Saint Pierre Damien ouvre son Sermon sur la présente solennité par ces paroles : « Nous tenons encore entre nos bras le Fils de la Vierge, et nous honorons par nos caresses l’enfance d’un Dieu. Marie nous a conduits à l’auguste berceau ; belle entre les filles des hommes, bénie entre les femmes, elle nous a présenté Celui qui est beau entre tous les enfants des hommes, et plus qu’eux tous, comblé de bénédictions. Elle soulève pour nous le voile des prophéties, et nous montre les desseins de Dieu accomplis. Qui de nous pourrait distraire ses yeux de la merveille d’un tel enfantement ? Néanmoins, tandis que le nouveau-né nous accorde les baisers de sa tendresse, et nous tient dans l’étonnement par de si grands prodiges, tout à coup, Étienne, plein de grâce et de force, opère des choses merveilleuses au milieu du peuple. [7] Laisserons-nous donc le Roi pour tourner nos regards sur un de ses soldats ? Non certes, à moins que le Prince lui-même ne nous le commande. Or, voici que le Roi, Fils de Roi, se lève lui-même, et vient assister au combat de son serviteur. Courons donc à un spectacle auquel il court lui-même, et considérons le porte-étendard des Martyrs. »
La sainte Église, dans l’Office d’aujourd’hui, nous fait lire ce début d’un Sermon de saint Fulgence sur la fête de saint Étienne : « Hier, nous avons célébré la Naissance temporelle de notre Roi éternel ; aujourd’hui, nous célébrons la Passion triomphale de son soldat. Hier notre Roi, couvert du vêtement de la chair, est sorti du sein de la Vierge et a daigné visiter le monde ; aujourd’hui, le combattant est sorti de la tente de son corps, et est monté triomphant au ciel. Le premier, tout en conservant la majesté de son éternelle divinité, a ceint l’humble baudrier de la chair, et est entré dans le camp de ce siècle pour combattre ; le second, déposant l’enveloppe corruptible du corps, est monté au palais du ciel pour y régner à jamais. L’un est descendu sous le voile de la chair, l’autre est monté sous les lauriers empourprés de son sang. L’un est descendu du milieu de la joie des Anges ; l’autre est monté du milieu des Juifs qui le lapidaient. Hier, les saints Anges, dans l’allégresse, ont chanté : Gloire à Dieu au plus haut des cieux ! Aujourd’hui, ils ont reçu Étienne dans leur compagnie avec jubilation. Hier, le Christ a été pour nous enveloppé de langes : aujourd’hui, Étienne a été par lui revêtu de la robe a d’immortalité. Hier, une étroite crèche a reçu le Christ enfant : aujourd’hui l’immensité du ciel a reçu Étienne dans son triomphe. »
Ainsi, la divine Liturgie unit les joies de la Nativité du Seigneur avec l’allégresse que lui inspire le triomphe du premier des Martyrs ; et encore Étienne ne sera pas le seul à venir partager les honneurs de cette glorieuse Octave. Après lui, nous célébrerons Jean, le bien-aimé Disciple ; les Innocents de Bethléhem ; Thomas, le Martyr de la liberté de l’Église ; Sylvestre, le Pontife delà Paix. Mais, dans cette brillante escorte du Roi nouveau-né, la place d’honneur appartient à Étienne, ce Proto-martyr qui, ainsi que le chante l’Église, « a rendu le premier au Sauveur la mort que le Sauveur a soufferte pour lui ». Ainsi méritait d’être honoré le Martyre, ce témoignage sublime qui acquitte avec plénitude envers Dieu les dons octroyés à notre race, et scelle par le sang de l’homme la vérité que le Seigneur a confiée à la terre.
Pour bien comprendre ceci, il est nécessaire de considérer le plan divin pour le salut du monde. Le Verbe de Dieu est envoyé afin d’instruire les hommes ; il sème sa divine parole, et ses œuvres rendent témoignage de lui. Mais, après son Sacrifice, il remonte à la droite de son Père ; et son témoignage, pour être reçu par les hommes qui n’ont pas vu ni entendu ce Verbe de vie, a besoin d’un témoignage nouveau. Or, ce témoignage nouveau, ce sont les Martyrs qui le donneront ; et ce ne sera pas simplement par la confession de leur bouche, mais par l’effusion de leur sang qu’ils le rendront. L’Église s’élèvera donc par la Parole et le Sang de Jésus-Christ ; mais elle se soutiendra, elle traversera les âges, elle triomphera de tous les obstacles par le sang des Martyrs, membres du Christ ; et ce sang se mêlera avec celui de leur Chef divin, dans un même Sacrifice.
Les Martyrs auront toute ressemblance avec leur Roi suprême. Ils seront, comme il l’a dit, « semblables à des agneaux au milieu des loups ». [8] Le monde sera fort contre eux ; devant lui, ils seront faibles et désarmés ; mais, dans cette lutte inégale, la victoire des Martyrs n’en sera que plus éclatante et plus divine. L’Apôtre nous dit que le Christ crucifié est la force et la sagesse de Dieu [9] ; les Martyrs immolés, et cependant conquérants du monde, attesteront, d’un témoignage que le monde même comprendra, que le Christ qu’ils ont confessé, et qui leur a donné la constance et la victoire, est véritablement la force et la sagesse de Dieu. Il est donc juste qu’ils soient associés à tous les triomphes de l’Homme-Dieu, et que le cycle liturgique les glorifie, comme l’Église elle-même les honore en plaçant sous la pierre de l’autel leurs sacrés ossements, en sorte que le Sacrifice de leur Chef triomphant ne soit jamais célébré sans qu’ils soient offerts avec lui dans l’unité de son Corps mystique. Or, la liste glorieuse des Martyrs du Fils de Dieu commence à saint Étienne ; il y brille par son beau nom qui signifie le Couronné, présage divin de sa victoire. Il commande, sous le Christ, cette blanche armée que chante l’Église, ayant été appelé le premier, avant les Apôtres eux-mêmes, et ayant répondu dignement à l’honneur de l’appel. Étienne a rendu un fort et courageux témoignage à la divinité de l’Emmanuel, en présence de la Synagogue des Juifs ; il a irrité leurs oreilles incrédules, en proclamant la vérité ; et bientôt une grêle de pierres meurtrières a été lancée contre lui par les ennemis de Dieu, devenus les siens. Il a reçu cet affront, debout, sans faiblir ; on eût dit, suivant la belle expression de saint Grégoire de Nysse, qu’une neige douce et silencieuse tombait sur lui à flocons légers, ou encore qu’une pluie de roses descendait mollement sur sa tête. Mais, à travers ces pierres qui se choquaient entre elles en lui apportant la mort, une clarté divine arrivait jusqu’à lui : Jésus, pour qui il mourait, se manifestait à ses regards ; et un dernier témoignage à la divinité de l’Emmanuel s’échappait avec force de la bouche du Martyr. Bientôt, à l’exemple de ce divin Maître, pour rendre son sacrifice complet, le Martyr répand sa dernière prière pour ses bourreaux ; il fléchit les genoux et demande que le péché ne leur soit pas imputé. Ainsi tout est consommé ; et le type du Martyre est montré à la terre pour être imité et suivi dans toutes les générations, jusqu’à la consommation des siècles, jusqu’au dernier complément du nombre des Martyrs. Étienne s’endort dans le Seigneur, et il est enseveli dans la paix, in pace, jusqu’à ce que sa tombe sacrée soit retrouvée, et que sa gloire se répande de nouveau dans toute l’Église, par cette miraculeuse Invention, comme par une résurrection anticipée.
Étienne a donc mérité de faire la garde auprès du berceau de son Roi, comme le chef des vaillants champions de la divinité du céleste Enfant que nous adorons. Prions-le, avec l’Église, de nous faciliter l’approche de l’humble couche où repose notre souverain Seigneur. Demandons-lui de nous initier aux mystères de cette divine Enfance que nous devons tous connaître et imiter dans le Christ. Dans la simplicité de la crèche, il n’a point compté le nombre de ses ennemis, il n’a point tremblé en présence de leur rage, il n’a point fui leurs coups, il n’a point imposé silence à sa bouche, il a pardonné à leur fureur ; et sa dernière prière a été pour eux. O fidèle imitateur de l’Enfant de Bethléhem ! Jésus, en effet, n’a point foudroyé les habitants de cette cité qui refusa un asile à la Vierge-Mère, au moment où elle allait enfanter le Fils de David. Il dédaignera d’arrêter la fureur d’Hérode qui bientôt le cherchera pour le faire périr ; il aimera mieux fuir en Égypte, comme un proscrit, devant la face de ce tyran vulgaire ; et c’est à travers toutes ces faiblesses apparentes qu’il montrera sa divinité, et que le Dieu-Enfant sera le Dieu-Fort. Hérode passera, et sa tyrannie ; le Christ demeurera, plus grand dans sa crèche où il fait trembler un roi, que ce prince sous sa pourpre tributaire des Romains ; plus grand que César-Auguste lui-même, dont l’empire colossal a pour destinée de servir d’escabeau à l’Église que vient établir cet Enfant si humblement inscrit sur les rôles de la ville de Bethléhem.
A LA MESSE.
La sainte Église débute par les paroles du saint Martyr qui, empruntant le langage de David, rappelle le conseil tenu contre lui par les méchants, et l’humble confiance qui Ta fait triompher de leurs persécutions. Depuis l’effusion du sang d’Abel jusqu’aux futurs Martyrs que doit immoler l’Antéchrist, l’Église est toujours persécutée ; son sang ne cesse de couler dans une contrée ou dans une autre ; mais son refuge est dans sa fidélité à son Époux, et dans la simplicité que l’Enfant de la Crèche est venu lui enseigner par son exemple.
Dans la Collecte, l’Église demande, pour elle-même et pour ses enfants, cette force divine qui produit dans les saints Martyrs le pardon des injures, et met le sceau à leur témoignage et à leur ressemblance avec le Sauveur. Elle glorifie saint Étienne, qui en a donné le premier exemple sous la loi nouvelle.
ÉPÎTRE. O glorieux Prince des Martyrs, vous fûtes conduit hors des portes de la ville pour être immolé, et vous fûtes mis à mort par le supplice des blasphémateurs. Le disciple devait être en tout semblable au Maître. Mais ni l’ignominie de cette mort, ni la cruauté du supplice n’épouvantèrent votre grande âme : vous portiez le Christ dans votre cœur, et avec lui vous étiez plus fort que tous vos ennemis. Mais quelle fut votre joie, lorsque les cieux s’étant ouverts au-dessus de votre tête, ce Dieu Sauveur vous apparut dans sa chair glorifiée se tenant debout à la droite de Dieu, lorsque les yeux de ce divin Emmanuel rencontrèrent les vôtres ! Ce regard d’un Dieu sur sa créature qui va souffrir pour lui, de la créature vers le Dieu pour qui elle s’immole, vous ravit hors de vous-même. En vain les pierres cruelles pleuvaient sur votre tête innocente : rien ne put vous distraire de la vue de ce Roi éternel qui, pour vous, se levait de son trône, et qui venait à vous, portant cette Couronne qu’il vous avait tressée de toute éternité, et que vous obteniez à cette heure. Demandez, dans la gloire où vous régnez aujourd’hui, que nous aussi soyons fidèles, et fidèles jusqu’à la mort, à ce Christ qui ne s’est pas seulement levé pour nous, mais qui est descendu jusqu’à nous sous la forme de l’enfance.
ÉVANGILE.
Les Martyrs sont donnés au monde pour continuer sur la terre le ministère du Christ, en rendant témoignage à sa parole, et en scellant de leur sang ce témoignage. Le monde les a méconnus ; comme leur Maître, ils ont lui dans les ténèbres, et les ténèbres ne les ont point compris. Cependant, plusieurs ont reçu leur témoignage, et ont germé à la foi, sur cette féconde semence. La Synagogue a été rejetée pour avoir versé le sang d’Étienne, après celui du Christ ; malheur donc à quiconque méconnaît le mérite des Martyrs ! Recueillons plutôt les hautes leçons que nous donne leur sacrifice ; et que notre religion envers eux témoigne de notre reconnaissance pour le sublime ministère qu’ils ont rempli et qu’ils remplissent tous les jours dans l’Église. L’Église, en effet, n’est jamais sans Martyrs, comme elle n’est jamais sans miracles ; c’est le double témoignage qu’elle rendra jusqu’à la fin des siècles, et par lequel se manifeste la vie divine que son auteur a déposée en elle. Pendant l’Offrande, la sainte Église rappelle les mérites et la mort sublime d’Étienne, pour montrer que le sacrifice du saint Diacre s’unit à celui de Jésus-Christ lui-même.
Unie à son divin Époux par la sainte Communion, l’Église voit aussi les cieux ouverts, et Jésus debout à la droite de Dieu. Elle envoie à ce Verbe incarné tous les sentiments de son amour, et puise dans la nourriture céleste cette mansuétude qui lui fait supporter les outrages de ses ennemis, pour les gagner tous à la foi et à la charité de Jésus-Christ. C’est dans la participation à cet aliment céleste qu’Étienne avait puisé la force surhumaine qui lui mérita la victoire et la couronne.
A VÊPRES.
La solennité de l’Octave de Noël dont nous a, en quelque manière, distrait la fête de saint Étienne, reparaît aux Vêpres dans toute sa splendeur. L’Église y chante les Psaumes du jour de Noël, avec leurs Antiennes, et ne recommence à s’occuper du saint Martyr qu’à partir du Capitule. Elle observe cet usage à toutes les autres fêtes qui se rencontrent pendant l’Octave.
A la gloire du premier des Martyrs, nous donnerons ici quelques-uns des chants que la Liturgie des diverses Églises consacre à célébrer ses mérites. Nous commencerons par une Hymne empruntée au Bréviaire de l’Église de Milan.
Le Sacramentaire Gallican, à la fête de saint Étienne, glorifiait Dieu en ces termes, pour les mérites qu’il a daigné conférer au premier des Martyrs :
(Missa S. Stefani.)
Dieu tout-puissant, qui avez donné à votre Église le Martyr saint Étienne comme la première gerbe de votre moisson, et qui avez fait de cette offrande primitive d’un fruit si promptement mûr, le prédicateur de votre doctrine nouvellement promulguée ; accordez à l’assemblée des fidèles, et aux prières d’un martyr si rempli de mérites, que par ses suffrages Étienne protège votre Église , qu’il a honorée par son ministère.
L’Église Gothique d’Espagne consacre à saint Étienne ces magnifiques éloges, dans son Missel Mozarabe :
(In natali S. Stephani, Contestatio.)
Il est digne et juste de vous louer, de vous bénir, de vous rendre grâces, Dieu tout-puissant et éternel, qui vous glorifiez dans l’assemblée de vos Saints. Vous les avez élus dès avant la création du monde, vous les avez marqués pour le ciel d’une bénédiction spirituelle, et vous les avez associés à votre Fils unique par l’Incarnation et par la rédemption de la croix. Vous avez fait régner en eux votre Esprit-Saint, et par lui, votre miséricorde les favorisant, ils sont parvenus à la gloire d’un heureux martyre. C’est donc avec raison, ô Seigneur des armées, que cette solennité vous est consacrée ; que nous fêtons, pour votre gloire, ce jour sacré, que le sang du bienheureux Étienne, votre premier martyr, répandu pour le témoignage de votre vérité, a marqué magnifiquement pour la gloire de votre Nom. En effet, il est le premier Confesseur de ce Nom qui est au-dessus de tout nom, et dans lequel, ô Père éternel, vous avez placé l’unique secours de notre salut. Dans votre Église, quel exemple éclatant et glorieux il a laissé pour raffermir les cœurs ! Le premier, après la Passion de notre Seigneur Jésus-Christ, il a saisi Ta palme de la victoire. Consacré, par l’Esprit-Saint et le choix des Apôtres, au ministère lévitique, il a éclaté aussitôt par une pureté semblable à celle de la neige, et par la pourpre sanglante du martyre. O rejeton béni d’Abraham ! premier imitateur et témoin de la croix du Seigneur ! il a mérité de voir les cieux ouverts, et Jésus assis à la droite de Dieu. C’est avec raison et avec justice que, célébrant votre Nom, ô Dieu tout-puissant, nous honorons celui que vous avez daigné appeler à une si grande gloire. Dans votre miséricorde, faites-nous jouir de son suffrage. Qu’il prie pour ce peuple, dans cette gloire que le Christ lui a départie, lorsqu’il l’a reçu avec triomphe après son combat victorieux. Que ces yeux s’élèvent pour nous, ces yeux qui, étant encore dans ce corps de mort, à l’heure même de sa passion, ont vu le Fils de Dieu debout à la droite du Père. Qu’il obtienne pour nous vos grâces, celui qui, pendant qu’on le lapidait, vous implorait, Dieu saint, Père tout-puissant, par Jésus-Christ notre Seigneur, votre Fils, quia daigné naître de la Vierge, selon la chair, pour nos péchés, et souffrir la mort, afin d’instruire ses martyrs à souffrir par son exemple. A lui tous les Anges et les Archanges chantent sans jamais cesser, disant : Saint ! Saint ! Saint !
Nous entendrons maintenant l’Église Grecque, et nous emprunterons quelques strophes à ses Menées, pour la louange du Protomartyr.
Le moyen âge des Églises d’Occident a produit de nombreuses pièces liturgiques, spécialement dans le genre des Proses ou Séquences, à la louange de saint Étienne. Nous en omettrons plusieurs, comme étant moins remarquables ; mais nous donnerons ici celle d’Adam de Saint-Victor. Nous nous faisons toujours un devoir d’honorer les œuvres de ce grand poète liturgique, dont les compositions rehaussèrent, durant tant de siècles, le Missel de l’Église de Paris, et furent si longtemps populaires dans l’Allemagne, l’Angleterre, et généralement dans toutes les Églises du nord de l’Europe.
Nous nous unissons à ces éloges que vous envoient tous les siècles chrétiens, ô vous le premier et le prince des Martyrs ! Nous vous félicitons d’avoir été choisi par la sainte Église pour assister, au poste d’honneur, près du berceau du souverain Seigneur de toutes choses. Qu’elle est glorieuse, la confession que vous avez rendue, au milieu des cailloux meurtriers qui brisaient vos membres généreux ! Qu’elle est éclatante, la pourpre qui vous couvre comme un triomphateur ! Qu’elles sont lumineuses, les cicatrices de ces blessures que vous reçûtes pour le Christ ! Qu’elle est nombreuse et brillante, l’armée des Martyrs qui vous suit comme son chef, et qui continue ses glorieux enrôlements jusqu’à la consommation des siècles !
Dans ces jours de la Naissance de notre commun Sauveur, nous vous prions, ô Étienne, de nous faire pénétrer dans les profondeurs dés mystères du Verbe incarné. Fidèle gardien de sa Crèche, c’est à vous de nous introduire auprès du céleste Enfant qui y repose. Vous avez rendu témoignage à sa divinité et à son humanité ; vous l’avez prêché, cet Homme-Dieu, au milieu des cris furieux de la Synagogue. En vain les Juifs se bouchèrent les oreilles ; il leur fallut entendre votre voix tonnante qui leur dénonçait le déicide qu’ils avaient commis, en mettant à mort Celui qui est tout à la fois le Fils de Marie et le Fils de Dieu. Montrez-le-nous aussi, ce Rédempteur du monde, non point encore triomphant à la droite du Père, mais humble et doux, dans ces premières heures de sa manifestation, enveloppé de langes et couché dans la crèche. Nous voulons aussi lui rendre témoignage, annoncer sa Naissance pleine d’amour et de miséricorde, faire voir par nos œuvres qu’il est né aussi dans nos cœurs. Obtenez-nous ce dévouement à l’Enfant divin, qui vous a rendu fort au jour de l’épreuve. Nous l’aurons, si nous sommes simples et sans crainte, comme vous l’avez été, si nous avons l’amour de cet Enfant ; car l’amour est plus fort que la mort. Qu’il ne nous arrive jamais d’oublier que tout chrétien doit être prêt au martyre, par cela seul qu’il est chrétien. Que la vie du Christ qui commence en nous, s’y développe par notre fidélité et nos œuvres, en sorte que nous arrivions, comme dit l’Apôtre, à la plénitude du Christ. [10]
Mais souvenez-vous, ô glorieux Martyr, souvenez-vous de la sainte Église, dans ces contrées où les arrêts du Seigneur exigent qu’elle résiste jusqu’au sang Obtenez que le nombre de vos frères se complète de tous ceux qui sont éprouvés, et que pas un ne défaille dans le combat. Que ni l’âge ni le sexe ne faiblissent, afin que le témoignage soit entier, et que l’Église cueille encore, dans sa vieillesse, les palmes et les couronnes immortelles qui ont honoré ces premières années dont vous fûtes l’ornement. Mais, ô Étienne, priez, afin que le sang des Martyrs soit fécond, comme aux anciens jours ; que la terre ingrate ne l’absorbe pas, mais qu’il lui fasse germer de riches moissons. Que l’infidélité recule de plus en plus ses tristes frontières ; que l’hérésie s’éteigne et cesse de dévorer, comme une lèpre, des membres dont la vigueur ferait la gloire et la consolation de l’Église. Que le Seigneur, touché par vos prières, accorde à nos derniers Martyrs l’accomplissement des espérances qui ont fait battre leur cœur, au moment où ils courbaient la tête sous le glaive, ou rendaient leur âme au milieu des tourments.
Nous ne terminerons pas cette seconde journée de l’Octave de Noël sans nous arrêter auprès du berceau de notre Emmanuel, sans contempler ce divin Fils de Marie. Déjà deux jours se sont écoulés depuis que sa Mère l’a couché dans l’humble crèche ; et ces deux jours valent plus pour le salut du monde que les milliers d’années qui ont précédé la naissance de cet Enfant. L’œuvre de notre rédemption avance, et les vagissements du nouveau-né, ses pleurs commencent à réparer nos crimes. Considérons donc aujourd’hui, dans cette fête du premier des Martyrs, les larmes qui mouillent les joues enfantines de Jésus, et qui sont les premiers indices de ses douleurs. « Il pleure, cet Enfant, dit saint Bernard ; mais non comme les autres enfants, ni pour la même raison. Les enfants des hommes pleurent de besoin et de faiblesse ; Jésus pleure de compassion et d’amour pour nous. » Recueillons chèrement ces larmes d’un Dieu qui s’est fait notre frère, et qui ne pleure que sur nos maux. Apprenons à déplorer le mal du péché qui vient attrister, par les souffrances prématurées du tendre Enfant que le ciel nous envoie, la douce allégresse que sa venue nous a causée.
Marie aussi voit ces larmes, et son cœur de mère en est troublé. Elle pressent déjà qu’elle a mis au jour un homme de douleurs ; bientôt elle le saura mieux encore. Unissons-nous à elle pour consoler le nouveau-né par l’amour de nos cœurs. C’est le seul bien qu’il soit venu chercher à travers tant d’humiliations ; c’est pour cet amour qu’il est descendu du ciel, qu’il a accompli toutes les merveilles dont nous sommes environnés. Aimons-le donc de toute la plénitude de nos âmes, et prions Marie de lui faire agréer le don de notre cœur. Le Psalmiste a chanté, et il a dit : Le Seigneur est grand et digne de toute louange ; ajoutons avec saint Bernard : Le Seigneur est petit, et digne de tout amour !
Le pieux et éloquent Père Faber, qui fut aussi un grand poète, a célébré, dans le plus gracieux des Noëls, le mystère de l’Enfant-Jésus sous l’aspect que nous contemplons en ce moment [11]. « Cher petit enfant, s’écrie-t-il, que tu es doux ! De quel éclat brillent tes yeux ! Ils semblent presque parler, quand le regard de Marie rencontre le tien.— Combien faible est ton petit cri ! Semblable au gémissement de l’innocente colombe, est ta plainte de douleur et d’amour, dans ton sommeil. — Quand Marie te dit de dormir, tu dors ; à son appel tu t’éveilles ; content sur ses genoux, content aussi dans la crèche rustique.— O le plus simple des enfants ! Avec quelle grâce tu cèdes à la volonté de ta mère ! Tes manières enfantines trahissent la science d’un Dieu qui se cache. Lorsque Joseph te prend dans ses bras, et qu’il caresse tes petites joues, tu le regardes dans les yeux avec ton innocence et ta douceur. — Oui, tu es bien ce que tu parais être : une petite créature de sourires et de pleurs ; et pourtant tu es Dieu, et le ciel et la terre t’adorent en tremblant. — Oui, Enfant chéri, tes petites mains qui se jouent dans les cheveux de Marie, soutiennent au même moment le poids du vaste univers. — Tandis que tu serres le cou de Marie d’une étreinte tendre et timide, les plus fiers Séraphins se voilent devant ta face, ô divin Enfant ! — Quand Marie a étanché ta soif, et calmé tes faibles cris, les cœurs des hommes demeurent encore ouverts devant ton œil endormi. Faible enfant, serais-tu donc mon Dieu lui-même ? Oh ! Alors, il faut que je t’aime ; oui, que je t’aime, que j’aspire à étendre ton amour chez les oublieux mortels. Dors, doux Enfant, au cœur vigilant ; dors, Jésus chéri : pour moi un jour tu veilleras ; tu veilleras pour souffrir et pour pleurer. — Des fouets, une croix, une couronne cruelle, c’est ce que pour toi j’ai a en réserve. Et cependant une petite larme, ô Seigneur, serait rançon suffisante. — Mais non ; la mort, c’est le choix de ton cœur ; c’est le prix décrété là-haut. Tu veux faire plus que sauver nos âmes ; c’est par amour que tu veux mourir. »
A ces touchants accents de la piété de notre âge, faisons succéder cette antique Séquence de l’Abbaye de Saint-Gall, composée par le B. Notker. Elle célèbre le combat de l’Emmanuel contre notre ennemi, et sa victoire, qui a été le principe de celle qu’ont remportée Étienne et tous les Martyrs.
A la glorieuse Mère de Dieu, nous présenterons notre hommage, en lui consacrant cette gracieuse Prose du Missel de Cluny, de 1523.
La basilique stationnale de ce jour fut commencée par le pape Simplicius (468-482) mais fut achevée seulement par Jean Ier (523) et par Félix IV, qui en exécutèrent l’ornementation en mosaïques. La fête de saint Étienne, le lendemain de Noël, est beaucoup plus ancienne, et apparaît déjà dans le laterculus du martyrologe arien [12], dont l’origine doit être reportée aux vingt dernières années du ive siècle.
Il semble en effet que, pour donner plus de splendeur à la solennité de Noël, on ait voulu grouper autour de la crèche de Jésus les plus grands saints, et ceux qui, d’une certaine manière, avaient une relation spéciale avec le mystère de son Incarnation. Saint Grégoire de Nysse les mentionne dans l’ordre suivant : Étienne, Pierre, Jacques, Jean, Paul et Basile [13], tandis d’autres documents grecs postérieurs y ajoutent David, Joseph et les Mages.
Dès la première moitié du Ve siècle, peu après la découverte des reliques du Protomartyr, s’élevèrent à Rome plusieurs basiliques dédiées à son nom. Près de Saint-Pierre il y en avait deux, Saint-Étienne Katà Galla patricia, et Saint-Étienne Katà Barbara patricia ; une autre s’élevait sur une propriété de Démétriade, léguée à saint Léon Ier, sur la voie Latine. Cette Démétriade, fille de Sextus Anicius Hermogenianus Olibrius, amie de saint Augustin, qui lui donna quelques reliques du protomartyr, est la destinataire d’une célèbre lettre de Pelage sur la vie dévote.
Au moyen âge la piété des Pontifes multiplia de toutes parts dans la Ville les sanctuaires de Saint-Étienne, si bien qu’on en compte au moins trente-cinq, parmi lesquels plusieurs monastères tant latins qu’orientaux. Étant donnée cette popularité du culte du premier martyr, la solennité avec laquelle on célébrait la station de ce jour sur le Cœlius n’a donc rien de surprenant.
Le Pape s’y rendait à cheval, du Latran, .avec les cardinaux et la cour, toute revêtue de somptueux habits de soie. Le caparaçon du destrier était d’écarlate précieuse, et le Pontife, la tête ceinte de la tiare, endossait la paenula blanche, habit de voyage des anciens Romains. A Saint-Étienne-le-Rond, il déposait la couronne et les vêtements blancs, pour prendre les rouges avec lesquels il célébrait la messe, après quoi il remontait à cheval, et le cortège retournait au patriarchium, où avaient lieu l’habituelle distribution des gratifications — presbyterium — et le repas rituel dans le triclinium. Uordo de Pierre Amelius prescrit de le servir avec une grande dignité, et d’y inviter les chapelains, les acolytes, les auditeurs et les pénitenciers, auxquels on distribuait aussi une provision de poivre [14]. En cas d’indisposition du Pape, la messe de ce jour devait être célébrée par le prêtre cardinal de Saint-Clément, puisque celui de Saint-Étienne suppléait de droit le Pontife le jour de Noël. Dans l’après-midi, les vêpres avaient lieu au Latran, et le Pape y prenait part, vêtu du pluvial rouge et mitre en tête.
L’introït est tiré du psaume 118, et l’on y montre les princes du Sanhédrin se réunissant en concile contre le juste. Les hommes iniques ne le persécutent pour aucune autre raison que pour la droiture de ses voies. Les colères comprimées depuis longtemps vont éclater, et le juste sent que le moment est imminent, de la lutte suprême, à découvert. Il est parfaitement conscient de l’insuffisance de ses forces ; aussi, tout rempli de confiance, supplie-t-il le Seigneur de l’aider à soutenir le martyre.
Dans la collecte nous demandons au Seigneur d’imiter l’exemple d’Étienne, non seulement en pardonnant à nos ennemis, mais en allant jusqu’à les aimer, et leur désirant la grâce de la conversion.
Le passage des Actes des Apôtres qui vient ensuite, décrit en couleurs dramatiques le jugement d’Étienne dans le Sanhédrin, et sa lapidation hors des murs de Jérusalem. Saint Luc dut en apprendre les détails de saint Paul, dans l’âme de qui cette scène atroce demeura gravée d’une façon indélébile. Le Protomartyr, contre qui maintenant se soulèvent particulièrement les synagogues représentant la Diaspora dans la Cité sainte, tombe victime de son zèle pour la propagande universelle de l’idéal évangélique au-delà même des barrières nationales d’Israël. Lui, helléniste, s’adressant directement aux hellénistes, aux Alexandrins et aux Cyrénéens, avait espéré les trouver moins hostiles et moins étroits dans leur conception messianique, mais la semence chrétienne devait mourir dans la terre et être arrosée avec du sang, et le Protomartyr tomba victime de l’aberration religieuse du Sanhédrin. L’œuvre ira néanmoins de l’avant, malgré les hommes, puisque le plus féroce persécuteur d’Étienne aujourd’hui, Saul, malgré lui en recueille déjà le programme dans son cœur, pour s’en faire demain l’apôtre jusqu’aux extrêmes confins du monde. Le répons-graduel provient, comme l’introït, du psaume 118. Le martyr demande l’aide d’En-Haut, attribuant ainsi la victoire à la divine miséricorde, qui le soutient par la grâce.
Le verset alléluiatique est tiré des Actes des Apôtres (VII, 55), là où Étienne, intrépide au milieu du Sanhédrin, confirme sa démonstration scripturaire de la divinité de Jésus-Christ par son témoignage personnel, qui décide évidemment de sa condamnation à mort. Ce ne sont plus seulement les prophètes qui attestent que le Christ est Dieu, mais lui-même, Étienne, qui le contemple maintenant dans le ciel, assis à la droite du Père, à qui il est consubstantiel et égal en majesté et en puissance.
Étienne n’est pas simplement un martyr, il est l’un des plus insignes personnages de l’âge apostolique ; de là vient que les Grecs lui attribuent le titre d’Apôtre et que la liturgie romaine le met dans la catégorie des prophètes, des docteurs, et des maîtres, dont l’Évangile de ce jour décrit le dur destin. Jérusalem, la bien-aimée de Yahweh, lapide eos qui... missi sunt, en d’autres termes ses apôtres ; mais la mesure de l’ingratitude est comble désormais. Le Seigneur se retire d’elle, et l’abandonne pour un temps à son sort. Oui, pour un temps, puisque le « Pasteur d’Israël » ne peut jamais oublier son peuple d’une façon définitive et il est en effet tout prêt à retourner aux fils de Jacob in misericordiis, dès que ceux-ci consentiront à l’accepter comme Rédempteur. L’acclamation refusée au Christ par les Hébreux est mise comme condition de pacification : Béni soit Celui qui vient au nom de Yahweh, c’est le cri joyeux de l’Église à l’arrivée de l’Agneau divin sur l’autel eucharistique.
L’antienne de l’offertoire, tirée de divers passages des Actes des Apôtres (VI-VIII) parle de l’élection d’Étienne par les Douze. Les Juifs ont lapidé celui qui était rempli de foi et du Saint-Esprit, pendant que, ployant les genoux en oraison, il rendait un dernier témoignage au Seigneur Jésus, — c’était là en effet toute la controverse entre lui et le Sanhédrin, — lui demandant de recevoir dans le ciel son esprit.
La collecte pour l’offrande des oblations est de caractère assez général, mais elle revêt une signification spéciale en cette commémoration du Protomartyr. L’hostie qui est immolée associe au sacrifice de Jésus les souffrances des martyrs ; c’est pourquoi nous demandons que, comme leur mort violente fut pour eux un titre éternel de gloire, ainsi notre dévotion serve à nous tenir éloignés de tout péché.
La Schola Cantorum du Latran étant dédiée à Saint-Étienne, on comprend aisément qu’elle veuille se distinguer par son splendide office en l’honneur du saint titulaire. L’antienne de la Communion unit les deux derniers témoignages du Protomartyr. Il contemple Jésus à la droite de la majesté de Dieu, c’est pourquoi il lui recommande son esprit ; et il le prie de pardonner à ses bourreaux, aveuglés par l’ignorance et la passion. L’oraison d’Étienne fut exaucée, et son plus beau fruit fut Paul. C’est ce rapprochement entre le Protomartyr et l’Apôtre que voulut précisément signifier l’antique piété des Pontifes, quand, à côté du sépulcre de saint Paul sur la voie d’Ostie, ils érigèrent dès le VIe siècle un oratoire insigne, en l’honneur de saint Étienne, y annexant un monastère.
Dans la prière d’action de grâces après la Communion, nous demandons que la participation au Mystère eucharistique produise en nous ses fruits et soutienne notre faiblesse par sa divine vertu.
A l’époque d’un si grand épuisement des énergies, de tels compromis avec la conscience, de tels égards pour ce qu’on appelle les convenances, et qui, au fond, n’est que respect humain, quel exemple de force chrétienne nous est donné par Ëtienne, debout en face du Sanhédrin et sachant dire aux Juifs la vérité sur les questions les plus brûlantes. Ceux-ci, comme des serpents, se bouchent les oreilles pour ne pas l’entendre davantage et grincent des dents contre lui ; mais Étienne, inébranlable, poursuit jusqu’au bout son long réquisitoire, le scellant finalement de son sang.
Demandons aujourd’hui par l’intercession de saint Étienne cette force qui est l’un des dons du Saint-Esprit.
Dans le sang du saint lévite Étienne « l’Église offre les prémices du martyre » au Roi des martyrs.
La fête peut être considérée d’un double [15] point de vue : en soi et dans ses relations avec la fête de Noël. A la messe, la fête est tout à fait indépendante, il n’est pas question de Noël. Il est vrai que, dans la pensée de l’Église, cette relation, que la prière des Heures marque expressément, n’est jamais oubliée.
1. Saint Étienne et Noël. — Dès l’invitatoire de Matines, l’Église marque cette relation. « Le Christ nouveau-né, qui en ce jour a couronné saint Étienne, venez, adorons-le. » Rien ne marque mieux cette relation que le panégyrique de saint Fulgence que nous lisons aujourd’hui au bréviaire : « Hier nous fêtions la Nativité de notre Roi éternel dans cette vie temporelle. Aujourd’hui nous célébrons solennellement le souvenir des glorieuses souffrance ! ; d’un soldat. Hier notre Roi se voilait dans les vêtements pourpre de la chair, sortait du palais du sein virginal et visitait le monde dans sa grâce. Aujourd’hui un soldat quitte la tente du corps et s’avance en triomphateur vers le ciel. Celui-ci se ceignit de la ceinture d’esclave de la chair et entra pour combattre sur le champ de bataille de ce monde : celui-là dépose la dépouille corruptible de son corps et monte pour régner éternellement dans le palais des cieux. Celui-ci descend recouvert de la chair, celui-là monte couronné de sang. Celui-là monte, après avoir été lapidé par les Juifs, parce que celui-ci est descendu, acclamé par les anges ; aujourd’hui les anges ont reçu avec joie saint Étienne dans leurs rangs. Hier le Seigneur est sorti du sein de la Vierge, aujourd’hui ce soldat est sorti de la prison du corps ; hier le Christ était pour nous enveloppé de langes, aujourd’hui Étienne est par lui revêtu du vêtement de l’immortalité. Hier l’étroitesse de la Crèche enfermait le Sauveur, aujourd’hui l’immensité du ciel reçoit saint Étienne triomphant. Le Seigneur est, descendu seul pour en relever plusieurs, notre Roi s’est abaissé pour exalter ses soldats. Cependant, mes frères, nous devons reconnaître avec quelles armes Étienne a vaincu la rage des Juifs pour être jugé digne d’un si magnifique triomphe. Pour conquérir la couronne de son nom, Étienne combattit avec les armes de l’amour et il remporta partout la victoire. En vertu de l’amour de Dieu, il ne fut pas vaincu par les Juifs en furie ; en vertu de son amour pour le prochain, il pria pour ceux qui le lapidaient. Par l’amour il exhorta les égarés à se convertir, par l’amour il pria pour ceux qui le lapidaient, afin qu’ils ne soient pas punis. Appuyé sur la puissance de l’amour, il triompha de la rage cruelle de Saul et celui qui sur la terre fut son persécuteur est au ciel son compagnon. »
2. La fête en elle-même.
a) La Sainte Écriture nous raconte d’une façon saisissante le martyre de notre héros : « Les Juifs en entendant cela (son discours de défense) se laissèrent aller à la fureur et grincèrent des dents contre lui. Mais Étienne, rempli de l’Esprit-Saint, leva les yeux au ciel et, voyant la gloire de Dieu et Jésus debout à la droite de Dieu, il dit : Je vois les cieux ouverts et le Fils de l’Homme assis à la droite de Dieu. Alors les Juifs poussèrent de grands cris, ils se bouchèrent les oreilles et se précipitèrent tous ensemble sur lui. Ensuite ils le traînèrent hors la ville et le lapidèrent. Or les témoins déposèrent leurs vêtements aux pieds d’un jeune homme nommé Saul. Tandis qu’on lapidait Étienne il priait et disait : Seigneur Jésus, recevez mon esprit. Étant alors tombé à genoux il cria à haute voix : « Seigneur ne leur imputez pas ce péché. » A ces mots, il s’endormit dans le Seigneur.
b) La messe (Sederunt principes) : Nous admirons la vivacité dramatique avec laquelle l’Église place le saint au milieu de nous. Nous assistons positivement à son martyre. Bien plus, l’Église nous unit à lui, nous prenons part à ses souffrances et à sa gloire. Nous pouvons, dans ce drame, distinguer trois phases : la souffrance — l’abandon — l’union au Christ. L’avant-messe nous fait partager la détresse de saint Étienne. Nous nous tenons avec lui devant le Sanhédrin, nous venons, nous aussi, du monde rempli de tentations et de combats. Ainsi nous pouvons, nous aussi, réciter du fond du cœur la prière de l’Introït et du Graduel : « Les impies me poursuivent, viens à mon secours, ô Seigneur, car ton serviteur veut garder tes commandements ». A l’Offertoire, nous déposons sur l’autel, avec saint Étienne, les peines de la vie et nous prions avec lui : « Seigneur Jésus, recevez mon âme. » Saint. Étienne nous apprend le sacrifice. Or nous avons une digne victime, le Christ. Le Christ, Étienne et moi, voilà un sacrifice magnifique et complet. A la Communion, nous gravissons le troisième degré. Quel était le but de saint Étienne ? Il fut couronné comme son nom l’indique, il obtint la gloire éternelle. C’est aussi le but du Saint-Sacrifice. La sainte Communion nous unit avec le Christ et prépare la gloire éternelle. Chaque fête de saint nous facilite la rencontre avec Dieu et le contact avec lui. Le saint est un pont qui nous mène à Dieu. Cette messe nous montre, d’une manière exemplaire, comment nous pouvons, au Saint-Sacrifice, accomplir notre ascension spirituelle.
c) La prière des Heures. Le bréviaire nous paraît aujourd’hui un peu âpre. Après un jour de fête rempli de la plus haute poésie et des émotions les plus fortes, le commun des martyrs nous semble trop simple. Mais justement, ce style lapidaire, aux lignes sobres, est dans l’esprit de la liturgie romaine classique. Nous remarquons aujourd’hui que, dans cet office, il, est question à tout moment de « couronne », de couronnement », et nous songeons qu’Étienne veut dire le couronné. Les antiennes de Laudes sont d’une grande beauté. « Avec joie il supporta les pierres, il est suivi de toutes les âmes justes. » Ensuite nous récitons avec Étienne le beau psaume 62 : « Mon âme s’attache à toi car mon corps a été lapidé pour toi, mon Dieu. »
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Communicántes, et diem sacratíssimum celebrántes, quo beátæ Maríæ intemeráta Virgínitas huic mundo édidit Salvatórem, sed et memóriam venerántes, in primis eiúsdem gloriósæ semper Vírginis Maríæ, Genitrícis Dei et Dómini nostri Iesu Christi : | Unis dans une même communion et célébrant le jour très saint où la bienheureuse Marie gardant sa virginité sans tâche mit au monde le Sauveur, et honorant la mémoire tout d’abord de la glorieuse Marie toujours Vierge, Mère du même Jésus-Christ notre Dieu et Seigneur... |
[1] Le mot de Grecs désigne ici les Juifs qui, étant nés parmi les Grecs, ne parlaient que la largue grecque.
[2] Les veuves avaient d’autant plus besoin d’être assistées que, suivant la loi, elles ne pouvaient hériter.
[3] Prosélyte, c’est-à-dire Gentil converti au christianisme.
[4] Le futur saint Paul, qui dut peut-être sa conversion aux prières du martyr.
[5] Le nom Stephanus vient d’un mot grec qui signifie couronne. L’office contient de nombreuses allusions à cette étymologie : « couronné de lauriers », « couronné de gloire et d’honneur », etc.
[6] C’est pour ce motif qu’il est appelé Protomartyr.
[7] Act. VI, 8.
[8] Matth. X, 16.
[9] I Cor. I, 24
[10] Ephes. IV, 13.
[11] Dear Little One ! how sweet Thou art,
Thine eyes how bright they shine,
So bright they almost seem to speak
When Mary’s look meets Thine !
How faint and feeble is Thy y
Like plaint of harmless dove,
When Thou dost murmur in Thy sleep
Of sorrow and of love.
When Mary bids Thee sleep Thou sleepst,
Thou wakest when she calls
Thou art content upon her lap,
Or in the rugged stalls.
Simplest of Babes ! with what a grace
Thou dost Thy Mother’s will
Thine infant fashions well betray
The Godhead’s hidden skill.
When Joseph takes Thee in his arms,
And smooths Thy little cheek,
Thou lookest up into his face
So helpless and so meek.
Yes ! Thou art what Thou seemst to be,
A thing of smiles and tears ;
Yet Thou art God, and heaven and earth
Adore Thee with their fears.
Yes ! dearest Babe ! those tiny hands,
That play with Mary’s hair,
The weight of ail the mighty world
This very moment bear.
While Thou art clasping Mary’s neck
In timid tight embrace,
The boldest Seraphs veil themselves
Before Thine infant Face.
When Mary hath appeased Thy thirst,
And hushed Thy feeble cry,
The hearts of men lie open still
Before Thy s’umbering eye.
Art Thou, weak Babe ! my very God ?
Oh ! must love Thee then,
Love Thee, and yearn to spread Thy love
Among forgetful men.
O sweet, O wakeful-hearted Child !
Sleep on, dear Jesus ! sleep ;
For Thou must one day wake for me
To suffer and to weep.
A scourge, a Cross, a cruel Crown
Have I in store for Thee ;
Yet why ? one little tear, O Lord !
Ransom enough would be.
But no ! death is Thine own sweet will,
The price decreed above ;
Thou wilt do more than save our souls,
For Thou wilt die for love.
[12] L’original grec du Martyrologe Syriaque où se lisaient plusieurs noms d’évêques ariens et probablement celui d’Arius lui-même. (N. du T.).
[13] P. G., XLVI, col. 790 seq.
[14] P. L., LXXVIII, col. 1281.
[15] Rite particulier du bréviaire avant la réforme de 1960.