Mort à Lyon le 28 décembre 1622. Canonisé en 1665, fête en 1666, docteur en 1877.
Missa In médio, de Communi Doctorum, præter orationem sequentem : | Messe In médio, du Commun des Docteurs, avec l’oraison suivante : |
Oratio | Collecte |
Deus, qui ad animárum salútem beátum Francíscum Confessórem tuum atque Pontíficem ómnibus ómnia factum esse voluísti : concéde propítius ; ut caritátis tuæ dulcedine perfúsi, eius dirigéntibus mónitis ac suffragántibus méritis, ætérna gáudia consequámur. | Dieu, pour le salut des âmes, vous avez voulu que le bienheureux François, votre Confesseur et Pontifie, se fît tout à tous : accordez-nous dans votre bonté que pénétrés de la douceur de votre amour, dirigés par ses enseignements et soutenus par ses mérites, nous obtenions les joies éternelles. |
Texte de la messe ‘Pro aliquibus Locis’ que tout prêtre peut prendre en ce jour selon le code des rubriques de 1962 [*]. C’est aussi la messe propre au diocèse d’Annecy et dans l’Ordre de la Visitation.
Ant. ad Introitum. Eccli. 45, 8-9 | Introït |
Státuit ei testaméntum ætérnum, et dedit illi sacerdótium gentis : beatificávit illum in glória, et coronávit eum in vasis virtútis. | Le Seigneur a conclu avec lui une alliance éternelle, il lui a confié le sacerdoce de son peuple, il l’a comblé de bonheur et de gloire, et il l’a paré des ornements de la vertu. |
Ps 118, 103 | |
Quam dúlcia fáucibus meis elóquia tua, super mel ori meo ! | Que ta parole est douce à mon palais ! Plus que le miel à ma bouche. |
V/.Glória Patri. | |
Oratio. | Collecte |
Deus, qui ad animárum salútem beátum Francíscum Confessórem tuum atque Pontíficem ómnibus ómnia factum esse voluísti : concéde propítius ; ut caritátis tuæ dulcedine perfúsi, eius dirigéntibus mónitis ac suffragántibus méritis, ætérna gáudia consequámur. | Dieu, pour le salut des âmes, vous avez voulu que le bienheureux François, votre Confesseur et Pontifie, se fît tout à tous : accordez-nous dans votre bonté que pénétrés de la douceur de votre amour, dirigés par ses enseignements et soutenus par ses mérites, nous obtenions les joies éternelles. |
Léctio Epístolæ beáti Pauli Apóstoli ad Ephésios | Lecture de l’æpître de saint Paul aux Ephésiens |
Ephes. 3, 7-21 | |
Fratres : Factus sum miníster, secúndum donum grátiæ Dei, quæ data est mihi secúndum operatiónem virtútis eius. Mihi ómnium sanctórum mínimo data est grátía hæc, in gentibus evangelizáre investigábiles divítias Christi : et illumináre omnes, quæ sit dispensátio sacraménti abscónditi a sǽculis in Deo qui ómnia creávit : ut innotéscat principátibus et potestátibus in cæléstibus per Ecclésiam multifórmis sapientia Dei : secúndum præfinitíónem sæculórum quam fecit in Christo Iesu Dómino nostro, in quo habémus fidúciam et accéssum in confidéntia per fidem eius. Propter quod peto ne deficiátis in tribulatiónibus meis pro vobis, quæ est glória vestra. Huius rei grátia flecto genua mea ad Patrem Dómini nostri Iesu Christi, ex quo omnis patérnitas in cælis et in terra nominátur : ut det vobis secúndum divítias glóriæ suæ, virtúte corroborári per Spíritum eius in interiórem hóminem : Christum habitáre per fidem in córdibus vestris : in cáritáte radicáti et fundáti : ut possítis comprehéndere, cum ómnibus sanctis, quæ sit latitúdo, et longitúdo, et sublímitas, et profúndum : scire étiam supereminéntem sciéntiæ caritátem Christi, ut impleámini in omnem plenitúdinem Dei. Si autem qui potens est ómnia fácere superabundánter quam pétimus aut intellégimus, secúndum virtútem quæ operátur in nobis, ipsi glória in ecclésia, et in Christo Iesu, in omnes generatiónes sǽculi sæculórum. Amen. | Frères : je suis devenu ministre par le don de la grâce que Dieu m’a accordée dans la force de sa puissance. Moi qui suis le dernier de tous les fidèles, j’ai reçu la grâce d’annoncer aux nations païennes la richesse insondable du Christ, et de mettre en lumière le contenu du mystère tenu caché depuis toujours en Dieu, 1e créateur de toutes choses ; ainsi, désormais, les forces invisibles elles-mêmes connaîtront, grâce à l’Église, les multiples aspects de la Sagesse de Dieu. C’est le projet éternel que Dieu a réalisé dans le Christ Jésus notre Seigneur. Et c’est notre foi au Christ qui nous donne l’audace d’accéder auprès de Dieu en toute confiance. Je vous supplie donc de ne pas perdre courage devant les épreuves que j’endure pour vous : elles sont votre gloire. C’est pourquoi je tombe à genoux devant le Père, qui est la source de toute paternité au ciel et sur la terre. Lui qui est si riche en gloire, qu’il vous donne la puissance par son Esprit, pour rendre fort l’homme intérieur. Que le Christ habite en vos coeurs par la foi ; restez enracinés dans l’amour, établis dans l’amour. Ainsi vous serez capables de comprendre avec tous les fidèles quelle est la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur... Vous connaîtrez l’amour du Christ qui surpasse tout ce qu’on peut connaître. Alors vous serez comblés jusqu’à entrer dans la plénitude de Dieu. Gloire à celui qui a le pouvoir de réaliser en nous par sa puissance infiniment plus que nous ne pouvons demander ou même imaginer, gloire à lui dans l’Église et dans le Christ Jésus pour toutes les générations dans les siècles des siècles. Amen. |
Graduale. Eccli. 33, 18-19 | Graduel |
Respícite quóniam non mihi soli laborávi, sed ómnibus exquiréntibus disciplínam. | Reconnaissez que je n’ai pas travaillé pour moi seul, mais pour tous ceux qui cherchent l’instruction. |
V/. Audíte me, magnátes, et omnes pópuli, et rectóres ecclésiæ, áuribus percípite. | V/. Écoutez donc, grands du peuple, présidents de l’assemblée, prêtez l’oreille. |
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 32, 18 Ecce óculi Dómini super metuéntes eum : et in eis qui sperant super misericórdia eius. Allelúia. | Allelúia, allelúia. V/. Dieu veille sur ceux qui le craignent, qui mettent leur espoir en son amour. Alléluia. |
Post Septuagesimam, ommissis Allelúia et versu sequenti, dicitur | Après la Septuagésime, on omet l’Alléluia et son verset et on dit : |
Tractus. Ps. 33, 9 | Trait |
Gustáte, et videte quóniam suávis est Dóminus : beátus vir, qui sperat in eo. | Goûtez et voyez : le Seigneur est bon ! Heureux qui trouve en lui son refuge ! |
V/. Prov. 16, 23 Cor sapientis erúdiet os eius : et lábiis eius addet grátiam. | V/. Le cœur du sage rend sa bouche avisée et à ses lèvres il ajoutera la grâce. |
V/. Ibid. 17, 27 Qui moderátur sermónes suos, doctus et prudens est : et pretiósi spíritus vir erudítus. | V/. Qui retient ses paroles est sage et prudent : l’homme savant est d’un esprit précieux. |
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Matthǽum. | Suite du Saint Évangile selon saint Mathieu. |
Mt 5, 13-19 | |
In illo témpore : Dixit Iesus discípulis suis : Vos estis sal terræ. Quod si sal evanúerit, in quo saliétur ? Ad níhilum valet ultra, nisi ut mittátur foras, et conculcétur ab homínibus. Vos estis lux mundi. Non potest cívitas abscóndi supra montem pósita. Neque accéndunt lucérnam, et ponunt eam sub módio, sed super candelábrum, ut lúceat ómnibus qui in domo sunt. Sic lúceat lux vestra coram homínibus, ut vídeant ópera vestra bona, et gloríficent Patrem vestrum, qui in cælis est. Nolíte putáre, quóniam veni sólvere legem aut prophétas : non veni sólvere, sed adimplére. Amen, quippe dico vobis, donec tránseat cælum et terra, iota unum aut unus apex non præteríbit a lege, donec ómnia fiant. Qui ergo solvent unum de mandátis istis mínimis, et docúerit sic hómines, mínimus vocábitur in regno cælórum : qui autem fécerit et docúerit, hic magnus vocábitur in regno cælórum. | En ce temps-là, Jésus dit à ses disciples : « Vous êtes le sel de la terre. Si le sel devient fade, avec quoi va-t-on le saler ? Il n’est plus bon à rien, sinon à être jeté dehors et piétiné par les hommes. Vous êtes la lumière du monde. Une ville ne peut être cachée, quand elle est située sur une montagne. Et lorsqu’on allume une lampe, on ne la met pas non plus sous un boisseau, mais sur le lampadaire, et elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison. De même, que votre lumière brille devant les hommes, afin qu’ils voient vos bonnes œuvres, et glorifient votre Père qui est dans les cieux. Ne pensez pas que je sois venu pour abolir la Loi ou les Prophètes : Je ne suis pas venu pour abolir, mais pour accomplir. Car, en vérité, je vous le dis : avant que passent le ciel et la terre, la plus petite lettre, le plus petit trait, ne disparaîtra pas de la Loi » jusqu’à ce que tout soit réalisé. Celui donc qui violera un seul de ces commandements, même les plus petits, et qui enseignera aux hommes à faire de même, sera tenu pour le plus petit dans le Royaume des Cieux. Mais celui qui les pratiquera et les enseignera, celui-là sera tenu pour grand dans le Royaume des Cieux ». |
Ant. ad Offertorium. Apoc. 2, 19 | Offertoire |
Novi ópera tua, et fidem, et caritátem tuam, et ministérium, et patiéntiam tuam, et ópera tua novíssima plura príóribus. | Je connais tes œuvres, ta foi et ta charité, ton ministère et ta patience, et tes dernières œuvres surpassent les premières. |
Secreta. | Secrète |
Per hanc salutárem hóstiam, quam offérimus tibi, Dómine, divíno illo Sancti Spíritus igne cor nostrum accénde, quo mitíssimum beáti Francísci ánimum mirabíliter inflammásti. | Par cette hostie qui nous sauve et que nous vous offrons, Seigneur, allumez notre cœur de ce feu divin du Saint-Esprit avec lequel vous avez enflammé admirablement l’âme très douce du bienheureux François. |
Præfatio propria ubi concessa est. | Préface propre là où elle est concédée [1]. |
Ant. ad Communionem. 1 Cor 9, 22 | Communion |
Factus sum infírmis infírmus, ut infírmos lucrifácerem : ómnibus ómnia factus sum, ut omnes fácerem salvos. | Je suis devenu faible avec les faibles, afin de gagner les faibles. Je me suis fait tout à tous, afin de les sauver tous. |
Postcommunio. | Postcommunion |
Concéde, quǽsumus, omnípotens Deus : ut, per sacraménta quæ súmpsimus, beáti Francísci caritátem et mansuetúdinem imitántes in terris, glóriam quoque consequámur in cælis. Per Dóminum. | Accordez-nous, nous vous le demandons, Dieu tout-puissant : par ce sacrement que nous avons reçu, qu’imitant sur cette terre la charité et la douceur du bienheureux François, nous parvenions aussi à la gloire dans les Cieux. |
Leçons des Matines avant 1960
AU DEUXIÈME NOCTURNE.
Quatrième leçon. François naquit au château de Sales (d’où sa famille tire son nom), de parents nobles et vertueux, et donna dès ses plus tendres années, par son innocence et sa gravité, des indices de sa sainteté future. Encore adolescent, il fut instruit dans les sciences libérales ; bientôt après, il se rendit à Paris où il se livra à l’étude de la philosophie et de la théologie, et afin que rien ne manquât à la culture de son esprit, il obtint à Padoue, avec les plus grands éloges, les honneurs du doctorat en l’un et l’autre droit. François renouvela dans le sanctuaire de Lorette le vœu de perpétuelle virginité par lequel il s’était lié à Paris ; et il ne put jamais être détourné de la résolution qu’il avait prise au sujet de cette vertu, ni par aucun des artifices du démon, ni par les attraits des sens.
Cinquième leçon. Ayant refusé une grande dignité dans le sénat de Savoie, il s’enrôla dans la milice de la cléricature. Initié au sacerdoce et fait prévôt de l’Église de Genève, François remplit si parfaitement les devoirs de cette charge que Mgr de Granier, son Évêque, le destina pour travailler comme un héraut de la parole divine, à la conversion des calvinistes du Chablais et des autres confins du territoire de Genève. Il entreprit cette campagne d’un cœur joyeux, mais il eut à souffrir les plus dures épreuves ; souvent les hérétiques cherchèrent à lui donner la mort, ils le poursuivirent de diverses calomnies et lui dressèrent beaucoup d’embûches. Au milieu de tant de périls et de combats, on vit toujours briller son insurmontable constance ; et l’on rapporte qu’aidé du secours de Dieu, il ramena à la foi catholique soixante-douze mille hérétiques, parmi lesquels il y en avait beaucoup de distingués par leur noblesse et leur science.
Sixième leçon. Après la mort de Mgr de Granier, qui avait eu soin de se le faire donner pour coadjuteur, François, consacré Évêque, répandit tout autour de lui les rayons de sa sainteté, par son zèle pour la discipline ecclésiastique, son amour de la paix, sa miséricorde envers les pauvres, et se rendit remarquable en toutes sortes de vertus. Pour l’accroissement du culte divin, il institua un nouvel Ordre de religieuses, sous le nom de la Visitation de la bienheureuse Vierge Marie et sous la règle de saint Augustin, à laquelle il ajouta des constitutions admirables de sagesse, de discrétion et de douceur. Il a aussi illustré l’Église par des écrits remplis d’une doctrine céleste, où il indique un chemin sûr et facile pour arriver à la perfection chrétienne. Enfin, âgé de cinquante-cinq ans, comme il retournait de France à Annecy, le jour de saint Jean l’Évangéliste, après avoir célébré la Messe à Lyon, il fut atteint d’une maladie grave, et, le lendemain, partit pour le ciel, l’an du Seigneur mil six cent vingt-deux. Son corps fut transporté à Annecy, et enseveli honorablement dans l’église dudit Ordre. Son tombeau commença aussitôt à être illustré par des miracles, dont le souverain Pontife Alexandre VII constata la vérité selon les règles. Il mit donc François au nombre des Saints en assignant pour sa Fête le vingt-neuvième jour de janvier, et le souverain Pontife Pie IX, après avoir pris l’avis de la Congrégation des Rites sacrés, l’a déclaré Docteur de l’Église universelle.
Voici venir au berceau du doux Fils de Marie l’angélique évêque François de Sales, digne d’y occuper une place distinguée pour la suavité de sa vertu, l’aimable enfance de son cœur, l’humilité et la tendresse de son amour. Il arrive escorté de ses brillantes conquêtes : soixante-douze mille hérétiques soumis à l’Église par l’ascendant de sa charité ; un Ordre entier de servantes du Seigneur, conçu dans son amour, réalisé par son génie céleste ; tant de milliers d’âmes conquises à la piété par ses enseignements aussi sûrs que miséricordieux, qui lui ont mérité le titre de Docteur.
Dieu le donna à son Église pour la consoler des blasphèmes de l’hérésie qui allait prêchant que la foi romaine était stérile pour la charité ; il plaça ce vrai ministre évangélique en face des âpres sectateurs de Calvin ; et l’ardeur de la charité de François de Sales fondit la glace de ces cœurs obstinés. Si vous avez des hérétiques à convaincre, disait le savant cardinal du Perron, vous pouvez me les envoyer ; si vous en avez à convertir, adressez-les à M. de Genève.
François de Sales parut donc, au milieu de son siècle, comme une vivante image du Christ ouvrant ses bras et convoquant les pécheurs à la pénitence, les errants à la vérité, les justes au progrès vers Dieu, tous à la confiance et à l’amour. L’Esprit divin s’était reposé sur lui dans sa force et dans sa douceur : c’est pourquoi, en ces jours où nous avons célébré la descente de cet Esprit sur le Verbe incarné au milieu des eaux du Jourdain, nous ne saurions oublier une relation touchante de notre admirable Pontife avec son divin Chef. Un jour de la Pentecôte, à Annecy, François était debout à l’autel, offrant l’auguste Sacrifice ; tout à coup une colombe qu’on avait introduite dans la Cathédrale, effrayée des chants et de la multitude du peuple, après avoir voltigé longtemps, vint, à la grande émotion des fidèles, se reposer sur la tête du saint Évêque : symbole touchant de la douceur de l’amour de François, comme le globe de feu qui parut, au milieu des Mystères sacrés, au-dessus de la tête du grand saint Martin, désignait l’ardeur du feu qui dévorait le cœur de l’Apôtre des Gaules.
Une autre fois, en la Fête de la Nativité de Notre-Dame, François officiait aux Vêpres, dans la Collégiale d’Annecy. Il était assis sur un trône dont les sculptures représentaient cet Arbre prophétique de Jessé, qui a produit, selon l’oracle d’Isaïe, la branche virginale, d’où est sortie la fleur divine sur laquelle s’est reposé l’Esprit d’amour. On était occupé au chant des Psaumes, lorsque, par une fente du vitrail du chœur, du côté de l’Épître, une colombe pénètre dans l’Église. Après avoir voleté quelque temps, de l’historien, elle vint se poser sur l’épaule du saint Évêque, et de là sur ses genoux, d’où les ministres assistants la prirent. Après les Vêpres, François, jaloux d’écarter de lui l’application favorable que ce symbole inspirait naturellement à son peuple, monta en chaire, et s’empressa d’éloigner toute idée d’une faveur céleste qui lui eût été personnelle, en célébrant Marie qui, pleine de la grâce de l’Esprit-Saint, a mérité d’être appelée la colombe toute belle, en laquelle il n’y a pas une tache.
Quand on cherche parmi les disciples du Sauveur le type de sainteté qui fut départi à notre admirable Prélat, l’esprit et le cœur ont tout aussitôt nommé Jean, le disciple bien-aimé. François de Sales est comme lui l’Apôtre de la charité ; et la simplesse du grand Évangéliste pressant un innocent oiseau dans ses mains vénérables, est la mère de cette gracieuse innocence qui reposait au cœur de l’Évêque de Genève. Jean, par sa seule vue, par le seul accent de sa voix, faisait aimer Jésus ; et les contemporains de François disaient : O Dieu ! si telle est la bonté de l’Évêque de Genève, quelle ne doit pas être la vôtre !
Ce rapport merveilleux entre l’ami du Christ et François de Sales se révéla encore au moment suprême, lorsque le jour même de saint Jean, après avoir célébré la sainte Messe et communié de sa main ses chères filles de la Visitation, il sentit cette défaillance qui devait amener pour son âme la délivrance des liens du corps. On s’empressa autour de lui ; mais déjà sa conversation n’était plus que dans le ciel. Ce fut le lendemain qu’il s’envola vers sa patrie, en la fête des saints Innocents, au milieu desquels il avait droit de reposer éternellement, pour la candeur et la simplicité de son âme. La place de François de Sales, sur le Cycle, était donc marquée en la compagnie de l’Ami du Sauveur, et de ces tendres victimes que l’Église compare à un gracieux bouquet d’innocentes roses ; et s’il a été impossible de placer sa mémoire à l’anniversaire de sa sortie de ce monde, parce que ces deux jours sont occupés par la solennité de saint Jean et celle des Enfants de Bethlehem, du moins la sainte Église a-t-elle pu encore placer sa fête dans l’intervalle des quarante jours consacrés à honorer la Naissance de l’Emmanuel.
C’est donc à cet amant du Roi nouveau-né qu’il appartient de nous révéler les charmes de l’Enfant de la crèche. Nous chercherons la pensée de son cœur, pour en nourrir le nôtre, dans son admirable correspondance, où il rend avec tant de suavité les sentiments pieux qui débordaient de son cœur, en présence des mystères que nous célébrons.
Vers la fin de l’Avent 1619, il écrivait à une religieuse de la Visitation, pour l’engager à préparer son cœur à la venue de l’Époux céleste : « Ma très chère fille, voilà le tant petit aimable Jésus qui va naître en notre commémoration, ces fêtes-ci prochaines ; et puisqu’il naît pour nous visiter de la part de son Père éternel, et que les pasteurs et les rois le viendront réciproquement visiter au berceau, je crois, qu’il est le Père et l’Enfant tout ensemble de cette Sainte Marie de la Visitation.
« Or sus, caressez-le bien ; faites-lui bien l’hospitalité avec toutes nos sœurs, chantez-lui bien de beaux cantiques, et surtout adorez-le bien fortement et doucement, et en lui sa pauvreté, son humilité, son obéissance et sa douceur, à l’imitation de sa très sainte Mère et de saint Joseph ; et prenez-lui une de ses chères larmes, douce rosée du ciel, et la mettez sur votre cœur, afin qu’il n’ait jamais de tristesse que celle qui réjouit ce doux Enfant ; et quand vous lui recommanderez votre âme, recommandez-lui quant et quant la mienne, qui est certes toute vôtre.
« Je salue chèrement la chère troupe de nos sœurs, que je regarde comme de simples bergères veillant sur leurs troupeaux, c’est-à-dire sur leurs affections ; qui, averties par l’Ange, vont faire l’hommage au divin Enfant, et pour gage de leur éternelle servitude, lui offrent le plus beau de leurs agneaux, qui est leur amour, sans réserve ni exception. »
La veille de la Naissance du Sauveur, saisi par avance des joies de la nuit qui va donner son Rédempteur à la terre, François s’épanche déjà avec sa fille de prédilection, Jeanne-Françoise de Chantal, et la convie à goûter avec lui les charmes de l’Enfant divin et à profiter de sa visite.
« Le grand petit Enfant de Bethlehem soit à jamais les délices et les amours de notre cœur, ma très chère mère, ma fille ! Hélas ! Comme il est beau, ce pauvre petit poupon ! Il me semble que je vois Salomon sur son grand trône d’ivoire, doré et ouvragé, qui n’eut point d’égal es royaumes, comme dit l’Écriture : et ce roi n’eut point de pair en gloire ni en magnificence. Mais j’aime cent fois mieux voir le cher enfançon en la crèche, que de voir tous les rois en leurs trônes.
« Mais si je le vois sur les genoux de sa sacrée Mère ou entre ses bras, ayant sa petite bouchette, comme un petit bouton de rose, attachée au lis de ses saintes mamelles, ô Dieu ! je le trouve plus magnifique en ce trône, non seulement que Salomon dans le sien d’ivoire, mais que jamais même ce Fils éternel du Père ne le fut au ciel ; car si bien le ciel a plus d’être visible, la Sainte Vierge a plus de perfections invisibles ; et une goutte du lait qui flue virginalement de ses sacrés sucherons, vaut mieux que toutes les affluences des cieux. Le grand saint Joseph nous fasse part de sa consolation, la souveraine Mère de son amour : et l’Enfant veuille à jamais répandre dans nos cœurs ses mérites !
« Je vous prie, reposez le plus doucement que vous pourrez auprès du petit céleste enfant : il ne laissera pas d’aimer votre cœur bien-aimé tel que vous l’avez, sans tendreté et sans sentiment. Voyez-vous pas qu’il reçoit l’haleine de ce gros bœuf et de cet âne qui n’ont sentiment ni mouvement quelconque ? Comment ne recevra-t-il pas les aspirations de notre pauvre cœur, lequel, quoique non tendrement pour le présent, solidement néanmoins et fermement, se sacrifie à ses pieds pour être à jamais serviteur inviolable du sien, et de celui de sa sainte Mère, et du grand gouverneur du petit Roi ? »
La nuit sacrée s’est écoulée, apportant avec elle la Paix aux hommes de bonne volonté ; François cherche encore le cœur de la fille que Jésus lui a confiée, pour y verser toutes les douceurs qu’il a goûtées dans la contemplation du mystère d’amour.
« Hé, vrai Jésus ! que cette nuit est douce, ma très chère fille ! Les cieux, chante l’Église, distillent de toutes parts le miel ; et moi, je pense que ces divins Anges, qui résonnent en l’air leur admirable cantique, viennent pour recueillir ce miel céleste sur les lis où il se trouve, sur la poitrine de la très douce Vierge et de saint Joseph. J’ai peur, ma chère fille, que ces divins Esprits ne se méprennent entre le lait qui sort des mamelles virginales, et le miel du ciel qui est abouché sur ces mamelles. Quelle douceur de voir le miel sucer le lait !
« Mais je vous prie, ma chère fille, ne suis-je pas si ambitieux que de penser que nos bons Anges, de vous et de moi, se trouvèrent en la chère troupe de musiciens célestes qui chantèrent en cette nuit ? O Dieu ! s’il leur plaisait d’entonner derechef, aux oreilles de notre cœur, cette même céleste chanson, quelle joie ! quelle jubilation ! Je les en supplie, afin que gloire soit au ciel, et en terre paix aux cœurs de bonne volonté.
« Revenant donc d’entre les sacrés Mystères, je donne ainsi le bonjour à ma chère fille : car je crois que les pasteurs encore, après avoir adoré le céleste poupon que le ciel même leur avait annoncé, se reposèrent un peu. Mais, ô Dieu ! que de suavité, comme je pense, à leur sommeil ! Il leur était avis qu’ils oyaient toujours la sacrée mélodie des Anges qui les avaient salués si excellemment de leur cantique, et qu’ils voyaient toujours le cher Enfant et la Mère qu’ils avaient visités.
« Que donnerions-nous à notre petit Roi, que nous n’ayons reçu de lui et de sa divine libérait lité ? Or sus, je lui donnerai donc, à la sainte Grand’Messe, la très uniquement fille bien-aimée qu’il m’a donnée. Hé ! Sauveur de nos âmes, rendez-la toute d’or en charité, toute de myrrhe en mortification, toute d’encens en oraison ; et puis recevez-la entre les bras de votre sainte protection ; et que votre cœur dise au sien : Je suis ton salut aux siècles des siècles. »
Parlant ailleurs à une autre épouse du Christ, il l’exhorte, en ces termes, à se nourrir de la douceur du nouveau-né :
« Que jamais votre âme, comme une abeille mystique, n’abandonne ce cher petit Roi, et qu’elle fasse son miel autour de lui, en lui, et pour lui ; et qu’elle le prenne sur lui, duquel les lèvres sont toutes détrempées de grâce, et sur lesquelles, bien plus heureusement que l’on ne vit sur celles de saint Ambroise, les saintes avettes, amassées en essaim, font leurs doux et gracieux ouvrages. »
Mais il faut bien s’arrêter ; écoutons cependant encore une dernière fois notre séraphique Pontife nous raconter les charmes du très saint Nom de Jésus, imposé au Sauveur dans les douleurs de la Circoncision ; il écrit encore à sa sainte coopératrice :
« O Jésus, remplissez notre cœur du baume sacré de votre Nom divin, afin que la suavité de son odeur se dilate en tous nos sens, et se répande en toutes nos actions. Mais pour rendre ce cœur capable de recevoir une si douce liqueur, circoncisez-le, et retranchez d’icelui tout ce qui peut être désagréable à vos saints yeux. O Nom glorieux ! que la bouche du Père céleste a nommé éternellement, soyez à jamais la superscription de notre âme, afin que, comme vous êtes Sauveur, elle soit éternellement sauvée ! O Vierge sainte, qui, la première de toute la nature humaine, avez prononcé ce Nom de salut, inspirez-nous la façon de le prononcer ainsi qu’il est convenable, afin que tout respire en nous le salut que votre ventre nous a porté.
« Ma très chère fille, il fallait écrire la première lettre de cette année à Notre-Seigneur et à Notre-Dame ; et voici la seconde par laquelle, ô ma fille, je vous donne le bon an, et dédie notre cœur à la divine bonté. Que puissions-nous tellement vivre cette année, qu’elle nous serve de fondement pour l’année éternelle ! Du moins ce matin, sur le réveil, j’ai crié à vos oreilles : vive Jésus ! et eusse bien voulu épandre cette huile sacrée sur toute la face de la terre.
« Quand un baume est bien fermé dans une fiole, nul ne sait discerner quelle liqueur c’est, sinon celui qui l’y a mise ; mais quand on a ouvert la fiole, et qu’on en a répandu quelques gouttes, chacun dit : C’est du baume. Ma chère fille, notre cher petit Jésus était tout plein du baume de salut ; mais on ne le connaissait pas jusqu’à tant qu’avec ce couteau doucement cruel on a ouvert sa divine chair ; et lors on a connu qu’il est tout baume et huile répandue, et que c’est le baume de salut. C’est pourquoi saint Joseph et Notre-Dame, puis tout le voisinage, commencent à crier : Jésus, qui signifie Sauveur.
« Plaise à ce divin poupon de tremper nos cœurs dans son sang, et les parfumer de son saint Nom, afin que les roses .des bons désirs que nous avons conçus, soient toutes pourprées de sa teinture, et toutes odorantes de son onguent ! »
Le Pape Alexandre VII voulut composer lui-même la Collecte pour l’Office et la Messe du saint Prélat [2].
Conquérant pacifique des âmes, Pontife aimé de Dieu et des hommes, nous célébrons en vous la douceur de notre Emmanuel. Ayant appris de lui à être doux et humble de cœur, vous avez, selon sa promesse, possédé la terre [3]. Rien ne vous a résisté : les sectaires les plus obstinés, les pécheurs les plus endurcis, les âmes les plus tièdes, tout a cédé aux charmes de votre parole et de vos exemples. Que nous aimons à vous contempler, auprès du berceau de l’Enfant qui vient nous aimer, mêlant votre gloire avec celle de Jean et des Innocents : Apôtre comme le premier, simple comme les fils de Rachel ! Fixez pour jamais notre cœur dans cette heureuse compagnie ; qu’il apprenne enfin que le joug de l’Emmanuel est doux, et son fardeau léger.
Réchauffez nos âmes au feu de votre charité ; soutenez en elles le désir de la perfection. Docteur des voies spirituelles, introduisez-nous dans cette Vie sainte dont vous avez tracé les lois ; ranimez dans nos cœurs l’amour du prochain, sans lequel nous ne pourrions espérer de posséder l’amour de Dieu ; initiez-nous au zèle que vous avez eu pour le salut des âmes ; enseignez-nous la patience et le pardon des injures, afin que nous nous aimions tous, non seulement de bouche et de parole, comme parle Jean votre modèle, mais en œuvre et en vérité [4]. Bénissez l’Église de la terre, au sein de laquelle votre souvenir est encore aussi présent que si vous veniez de la quitter pour celle du ciel ; car vous n’êtes plus seulement l’Évêque de Genève, mais l’objet de l’amour et de la confiance de l’univers entier.
Hâtez la conversion générale des sectateurs de l’hérésie Calviniste. Déjà vos prières ont avancé l’œuvre du retour ; et le Sacrifice de l’Agneau s’offre publiquement au sein même de Genève. Consommez au plus tôt le triomphe de l’Église-Mère. Extirpez du milieu de nous lès derniers restes de l’hérésie Jansénienne, qui se préparait à semer son ivraie dans la France, aux jours mêmes où le Seigneur vous retirait de ce monde. Purgez nos contrées des maximes et des habitudes dangereuses qu’elles ont héritées des temps malheureux où cette secte perverse triomphait dans son audace.
Bénissez de toute la tendresse de votre cœur paternel le saint Ordre que vous avez fondé, et que vous avez donné à Marie sous le titre de sa Visitation. Conservez-le dans l’état où il fait l’édification de l’Église ; donnez-lui accroissement, dirigez-le, afin que votre esprit se maintienne dans la famille dont vous êtes le père. Protégez l’Épiscopat dont vous êtes l’ornement et le modèle ; demandez à Dieu, pour son Église, des Pasteurs formés à votre école, embrasés de votre zèle, émules de votre sainteté. Enfin, souvenez-vous de la France, avec laquelle vous avez contracté des liens si étroits. Elle s’émut au bruit de vos vertus, elle convoita votre Apostolat, elle vous a donné votre plus fidèle coopératrice ; vous avez enrichi sa langue de vos admirables écrits ; c’est de son sein même que vous êtes parti pour aller à Dieu : du haut du ciel, regardez-la aussi comme votre patrie.
Le grand saint de la mansuétude, de l’amabilité et de l’amour de Dieu, mourut à Lyon le 28 décembre 1622, mais ce jour étant déjà consacré au natale des Innocents à qui le saint était très dévot, sa mémoire fut retardée jusqu’aujourd’hui, anniversaire de la translation de son corps à Annecy.
La messe est celle du Commun des docteurs ; mais comme pour la fête de saint Hilaire, la première collecte est propre ; elle fut composée par Alexandre VII [5], à qui le saint avait prédit la vocation ecclésiastique et le suprême Pontificat. Deux florissants instituts religieux représentent actuellement dans l’Église la postérité spirituelle de saint François de Sales ; ce sont les religieuses de la Visitation, directement instituées par lui ; et la congrégation salésienne, que le bienheureux Don Bosco tira du cœur même et de l’esprit du saint évêque de Genève.
La caractéristique du saint évêque de Genève fut la douceur et l’humilité du cœur, vertus au moyen desquelles il convertit environ soixante-dix mille hérétiques à la foi catholique, et guida une foule d’âmes vers les sommets les plus élevés de la perfection. La rudesse des manières, le zèle impétueux et l’impatience ne sont pas toujours les meilleurs moyens pour conduire les âmes à Jésus-Christ, car la vertu, pour être aimée, doit se montrer aimable et se rendre accessible à tous les cœurs. Quel est le secret d’une telle abnégation ? La plénitude de l’amour de Dieu, parce que, comme le dit l’Apôtre, Charitas non quaerit quae sua sunt.
« On prend plus de mouches avec une cuillerée de miel, qu’avec cent tonneaux de vinaigre ».
Saint François. — Jour de mort : 28 décembre 1622, à Lyon (29 janvier, translation de ses reliques). Tombeau : église de la Visitation à Annecy (Savoie). Sa vie : François naquit le 21 août 1567 ; il fut ordonné prêtre en 1593 ; de 1593 à 1598, il fut chargé de la mission du Chablais qui se termina par la conversion de 70.000 protestants ; en 1602, il devint évêque de Genève. La douceur et l’amabilité résument toute sa vie, mais constituent aussi le secret de sa sainteté et de son influence. De ses nombreux écrits, où se reflètent la bonté et le charme de sa personne, le plus répandu, aujourd’hui encore, est l’ »Introduction à la vie dévote ». Ce livre est, avec l’ »Imitation de Jésus-Christ », le meilleur manuel de la perfection chrétienne. Ce petit livre prouve au monde que la piété est aimable et doit rendre les hommes aimables. Son amitié sainte avec sainte Françoise de Chantal est aussi très célèbre. Son « Introduction à la vie dévote » et ses autres écrits lui valurent d’être proclamé docteur de l’Église.
Son amabilité et sa douceur ont aussi leur histoire. Il ne les avait pas trouvées dans son berceau. Au contraire, il avait un tempérament violent et ardent, un esprit excessivement vif et impétueux. Il lui fallut de nombreuses années pour dompter son tempérament emporté et violent. Durant son épiscopat, ce tempérament l’emporta encore une fois, parce que, pendant un de ses sermons, on sonna avant qu’il eût terminé. Il arriva cependant à se dominer en « prenant toujours vite la colère au collet ». Faisons de même nous aussi.
La messe (In medio). — La messe est empruntée au commun des docteurs (cf. 14 janvier). L’Oraison seule est propre, elle caractérise très bien notre saint : elle parle d’abord du pasteur des âmes, qui a fait sienne la devise de saint Paul : je me suis fait tout à tous pour les sauver tous (1. Cor. X, 22) ; elle parle ensuite de sa douceur et la demande pour nous, comme fruit de Rédemption, en ce jour : « afin que, pénétrés de la douceur de ta charité, dirigés par ses avis et soutenus par ses mérites, nous obtenions les joies éternelles. »
Quand le saint du jour possède une vertu caractéristique ou une grâce spéciale (comme c’est le cas aujourd’hui), il faut en faire, non seulement à la messe et au bréviaire, mais pendant toute la journée, l’objet de nos méditations et le principe de nos résolutions. Le saint doit être notre maître. A l’Offrande de la messe, nous apporterons notre volonté de pratiquer cette vertu ; à la communion, nous recevrons la force et la grâce de la pratiquer. Aux heures de l’Office, notre prière et notre intention doivent avoir cette vertu pour objet. Lisons aujourd’hui, dans l’« Introduction », précisément le chapitre qui traite de la mansuétude et de la douceur. Ainsi le saint du jour nous deviendra plus familier, il sera notre maître et notre professeur de vertu.
La douceur d’après l’Introduction à la vie dévote. « Cette misérable vie n’est qu’un cheminement à la bienheureuse. Ne nous courrouçons donc point en chemin les uns avec les autres, marchons avec la troupe de nos frères et compagnons doucement et amiablement. Mais je vous dit nettement et sans exception, ne vous courroucez point du tout s’il est possible et ne recevez aucun prétexte quel qu’il soit pour ouvrir la porte de votre cœur au courroux, car saint Jacques dit tout court et sans réserve que « l’ire de l’homme n’opère point la justice de Dieu ». Il faut vraiment résister au mal et réprimer les vices de ceux que nous avons en charge, constamment et vaillamment, mais doucement et paisiblement. Rien ne mâte tant l’éléphant courroucé que la vue d’un agnelet et rien ne rompt si aisément la force des canonnades que la laine. On ne prise pas tant la correction qui sort de la passion, quoique accompagnée de raison que celle qui n’a aucune autre origine que la raison seule ; car l’âme raisonnable étant naturellement sujette à la raison, elle n’est sujette à la passion que par tyrannie ; et partant, quand la raison est accompagnée de passion, elle se rend odieuse, sa juste domination étant avilie par la société de la tyrannie... » Il est mieux, dit saint Augustin, de refuser l’entrée à l’ire juste et équitable que de la recevoir pour petite qu’elle soit, parce que, étant reçue, il est malaisé de la faire sortir. » Que si une fois elle peut gagner la nuit et que le soleil couche sur notre ire (ce que l’Apôtre défend) se convertissant en haine, il n’y a plus moyen de s’en défaire. »
Chers frères et sœurs,
« Dieu est le Dieu du cœur humain » [6] : dans ces paroles apparemment simples, nous percevons l’empreinte de la spiritualité d’un grand maître, dont je voudrais vous parler aujourd’hui, saint François de Sale, évêque et docteur de l’Église. Né en 1567 dans une région frontalière de France, il était le fils du Seigneur de Boisy, antique et noble famille de Savoie. Ayant vécu à cheval entre deux siècles, le XVIe et le XVIIe, il rassemblait en lui le meilleur des enseignements et des conquêtes culturelles du siècle qui s’achevait, réconciliant l’héritage de l’humanisme et la tension vers l’absolu propre aux courants mystiques. Sa formation fut très complète ; à Paris, il suivit ses études supérieures, se consacrant également à la théologie, et à l’Université de Padoue celles de droit, suivant le désir de son père, qu’il conclut brillamment par une maîtrise in utroque iure, droit canonique et droit civil. Dans sa jeunesse équilibrée, réfléchissant sur la pensée de saint Augustin et de saint Thomas d’Aquin, il traversa une crise profonde qui le conduisit à s’interroger sur son salut éternel et sur la prédestination de Dieu à son égard, vivant avec souffrance comme un véritable drame spirituel les questions théologiques de son époque. Il priait intensément, mais le doute le tourmenta si fort que pendant plusieurs semaines, il ne réussit presque plus à manger et à dormir. Au comble de l’épreuve, il se rendit dans l’église des dominicains à Paris, ouvrit son cœur et pria ainsi : « Quoi qu’il advienne, Seigneur, toi qui détiens tout entre tes mains, et dont les voies sont justice et vérité ; quoi que tu aies établi à mon égard... ; toi qui es toujours un juge équitable et un Père miséricordieux, je t’aimerai Seigneur (...) je j’aimerai ici, ô mon Dieu, et j’espérerai toujours en ta miséricorde, et je répéterai toujours tes louanges... O Seigneur Jésus, tu seras toujours mon espérance et mon salut dans la terre des vivants » [7]. François, âgé de vingt ans, trouva la paix dans la réalité radicale et libératrice de l’amour de Dieu : l’aimer sans rien attendre en retour et placer sa confiance dans l’amour divin ; ne plus demander ce que Dieu fera de moi : moi je l’aime simplement, indépendamment de ce qu’il me donne ou pas. Ainsi, il trouva la paix, et la question de la prédestination — sur laquelle on débattait à cette époque — s’en trouva résolue, car il ne cherchait pas plus que ce qu’il pouvait avoir de Dieu ; il l’aimait simplement, il s’abandonnait à sa bonté. Et cela sera le secret de sa vie, qui transparaîtra dans son œuvre principale : le Traité de l’amour de Dieu.
En vainquant les résistances de son père, François suivit l’appel du Seigneur et, le 18 décembre 1593, fut ordonné prêtre. En 1602, il devint évêque de Genève, à une époque où la ville était un bastion du calvinisme, au point que le siège épiscopal se trouvait « en exil » à Annecy. Pasteur d’un diocèse pauvre et tourmenté, dans un paysage de montagne dont il connaissait aussi bien la dureté que la beauté, il écrivit : « (Dieu) je l’ai rencontré dans toute sa douceur et sa délicatesse dans nos plus hautes et rudes montagnes, où de nombreuses âmes simples l’aimaient et l’adoraient en toute vérité et sincérité ; et les chevreuils et les chamois sautillaient ici et là entre les glaciers terrifiants pour chanter ses louanges » [8]. Et toutefois, l’influence de sa vie et de son enseignement sur l’Europe de l’époque et des siècles successifs apparaît immense. C’est un apôtre, un prédicateur, un homme d’action et de prière ; engagé dans la réalisation des idéaux du Concile de Trente ; participant à la controverse et au dialogue avec les protestants, faisant toujours plus l’expérience, au-delà de la confrontation théologique nécessaire, de l’importance de la relation personnelle et de la charité ; chargé de missions diplomatiques au niveau européen, et de fonctions sociales de médiation et de réconciliation. Mais saint François de Sales est surtout un guide des âmes : de sa rencontre avec une jeune femme, madame de Charmoisy, il tirera l’inspiration pour écrire l’un des livres les plus lus à l’époque moderne, l’Introduction à la vie dévote ; de sa profonde communion spirituelle avec une personnalité d’exception, sainte Jeanne Françoise de Chantal, naîtra une nouvelle famille religieuse, l’Ordre de la Visitation, caractérisé — comme le voulut le saint — par une consécration totale à Dieu vécue dans la simplicité et l’humilité, en accomplissant extraordinairement bien les choses ordinaires : « ... Je veux que mes Filles — écrit-il — n’aient pas d’autre idéal que celui de glorifier (Notre Seigneur) par leur humilité » [9]. Il meurt en 1622, à cinquante-cinq ans, après une existence marquée par la dureté des temps et par le labeur apostolique.
La vie de saint François de Sales a été une vie relativement brève, mais vécue avec une grande intensité. De la figure de ce saint émane une impression de rare plénitude, démontrée dans la sérénité de sa recherche intellectuelle, mais également dans la richesse de ses sentiments, dans la « douceur » de ses enseignements qui ont eu une grande influence sur la conscience chrétienne. De la parole « humanité », il a incarné les diverses acceptions que, aujourd’hui comme hier, ce terme peut prendre : culture et courtoisie, liberté et tendresse, noblesse et solidarité. Il avait dans son aspect quelque chose de la majesté du paysage dans lequel il a vécu, conservant également sa simplicité et son naturel. Les antiques paroles et les images avec lesquelles il s’exprimait résonnent de manière inattendue, également à l’oreille de l’homme d’aujourd’hui, comme une langue natale et familière.
François de Sales adresse à Philotée, le destinataire imaginaire de son Introduction à la vie dévote (1607) une invitation qui, à l’époque, dut sembler révolutionnaire. Il s’agit de l’invitation à appartenir complètement à Dieu, en vivant en plénitude la présence dans le monde et les devoirs de son propre état. « Mon intention est d’instruire ceux qui vivent en villes, en ménages, en la cour... » [10]. Le document par lequel le Pape Pie ix, plus de deux siècles après, le proclamera docteur de l’Église insistera sur cet élargissement de l’appel à la perfection, à la sainteté. Il y est écrit : « (la véritable piété) a pénétré jusqu’au trône des rois, dans la tente des chefs des armées, dans le prétoire des juges, dans les bureaux, dans les boutiques et même dans les cabanes de pasteurs... » [11]. C’est ainsi que naissait cet appel aux laïcs, ce soin pour la consécration des choses temporelles et pour la sanctification du quotidien sur lesquels insisteront le Concile Vatican ii et la spiritualité de notre temps. L’idéal d’une humanité réconciliée se manifestait, dans l’harmonie entre action dans le monde et prière, entre condition séculière et recherche de perfection, avec l’aide de la grâce de Dieu qui imprègne l’homme et, sans le détruire, le purifie, en l’élevant aux hauteurs divines. Saint François de Sales offre une leçon plus complexe à Théotime, le chrétien adulte, spirituellement mûr, auquel il adresse quelques années plus tard son Traité de l’amour de Dieu (1616). Cette leçon suppose, au début, une vision précise de l’être humain, une anthropologie : la « raison » de l’homme, ou plutôt l’« âme raisonnable », y est vue comme une architecture harmonieuse, un temple, articulé en plusieurs espaces, autour d’un centre, qu’il appelle, avec les grands mystiques, « cime », « pointe » de l’esprit, ou « fond » de l’âme. C’est le point où la raison, une fois parcourus tous ses degrés, « ferme les yeux » et la connaissance ne fait plus qu’un avec l’amour [12] Que l’amour, dans sa dimension théologale, divine, soit la raison d’être de toutes les choses, selon une échelle ascendante qui ne semble pas connaître de fractures et d’abîmes. Saint François de Sales l’a résumé dans une phrase célèbre : « L’homme est la perfection de l’univers ; l’esprit est la perfection de l’homme ; l’amour, celle de l’esprit ; et la charité, celle de l’amour » [13].
Dans une saison d’intense floraison mystique, le Traité de l’amour de Dieu est une véritable somme, en même temps qu’une fascinante œuvre littéraire. Sa description de l’itinéraire vers Dieu part de la reconnaissance de l’« inclination naturelle » [14], inscrite dans le cœur de l’homme bien qu’il soit pécheur, à aimer Dieu par dessus toute chose. Selon le modèle de la Sainte Ecriture, saint François de Sales parle de l’union entre Dieu et l’homme en développant toute une série d’images de relation interpersonnelle. Son Dieu est père et seigneur, époux et ami, il a des caractéristiques maternelles et d’une nourrice, il est le soleil dont même la nuit est une mystérieuse révélation. Un tel Dieu attire l’homme à lui avec les liens de l’amour, c’est-à-dire de la vraie liberté : « Car l’amour n’a point de forçats ni d’esclaves, [mais] réduit toutes choses à son obéissance avec une force si délicieuse, que comme rien n’est si fort que l’amour, aussi rien n’est si aimable que sa force » [15]. Nous trouvons dans le traité de notre saint une méditation profonde sur la volonté humaine et la description de son flux, son passage, sa mort, pour vivre [16] dans l’abandon total non seulement à la volonté de Dieu, mais à ce qui Lui plaît, à son « bon plaisir » [17]. Au sommet de l’union avec Dieu, outre les ravissements de l’extase contemplative, se place ce reflux de charité concrète, qui se fait attentive à tous les besoins des autres et qu’il appelle « l’extase de l’œuvre et de la vie » [18].
On perçoit bien, en lisant le livre sur l’amour de Dieu et plus encore les si nombreuses lettres de direction et d’amitié spirituelle, quel connaisseur du cœur humain a été saint François de Sales. A sainte Jeanne de Chantal, à qui il écrit : « … car voici la règle générale de notre obéissance écrite en grosses lettres : il faut tout faire par amour, et rien par force ; il faut plus aimer l’obéissance que craindre la désobéissance. Je vous laisse l’esprit de liberté, non pas celui qui forclos (exclut) l’obéissance, car c’est la liberté de la chair ; mais celui qui forclos la contrainte et le scrupule, ou empressement » [19]. Ce n’est pas par hasard qu’à l’origine de nombreux parcours de la pédagogie et de la spiritualité de notre époque nous retrouvons la trace de ce maître, sans lequel n’auraient pas existé saint Jean Bosco ni l’héroïque « petite voie » de sainte Thérèse de Lisieux.
Chers frères et sœurs, à une époque comme la nôtre qui recherche la liberté, parfois par la violence et l’inquiétude, ne doit pas échapper l’actualité de ce grand maître de spiritualité et de paix, qui remet à ses disciples l’« esprit de liberté », la vraie, au sommet d’un enseignement fascinant et complet sur la réalité de l’amour. Saint François de Sales est un témoin exemplaire de l’humanisme chrétien avec son style familier, avec des paraboles qui volent parfois sur les ailes de la poésie, il rappelle que l’homme porte inscrite en lui la nostalgie de Dieu et que ce n’est qu’en Lui que se trouve la vraie joie et sa réalisation la plus totale.
© Copyright 2011 - Libreria Editrice Vaticana
[*]
PROPRIUM SANCTORUM PRO ALIQUIBUS LOCIS | PROPRE DES SAINTS POUR CERTAINS LIEUX |
¶ Infrascriptae Missae de Mysterio vel Sancto elogium in Martyrologio eo die habente, dici possunt ut festivae ubicumque, ad libitum sacerdotis, iuxta rubricas. Similiter huiusmodi Missae dici possunt etiam ut votivae, nisi aliqua expresse excipiatur. | ¶ Les Messes données ici d’un Mystère ou d’un saint qui a le jour-même une mention au Martyrologe, peuvent être dites comme festives partout, selon la volonté du prêtre et les rubriques. De la même manière, les Messes peuvent être dites comme votives sauf si c’est indiqué expressément. |
[1] Préface du diocèse d’Annecy et de l’Ordre de la Visitation :
Vere dignum et iustum est, æquum et salutáre,
nos tibi semper et ubíque grátias ágere : Dómine, sancte Pater, omnípotens ætérne Deus : per Christum Dóminum nostrum. | Il est vraiment juste et nécessaire,
c’est notre devoir et c’est notre salut, de vous rendre grâces toujours et partout, Seigneur, Père saint, Dieu éternel et tout-puissant : par le Christ Notre-Seigneur |
Qui Ecclésiæ suæ
beátum Francíscum Pastórem juxta cor suum suscitávit, ut scriptis, sermónibus et exémplis pietátem corroboráret, et áspera converéteret in vias planas | A vous, qui avez suscité à votre Eglise
le Bienheureux François, Pasteur selon votre cœur, afin que par ses écrits, ses paroles et ses exemples, il fortifiât les vertus et aplanît les routes difficiles. |
Quique illum suæ lenitátis spíritu tam mirabíliter adimplévit,
ut non solum induráta peccatórum corda ad pæniténtiam flécteret, sed et rebéllis tot hæreticórum mentes ad fídei cathólicæ unitátem revocáret. | A vous, Seigneur, qui l’avez comblé de votre esprit de douceur d’une manière si étonnante
que non seulement il attira à la pénitence les cœurs endurcis par le péché, mais qu’il rappela à l’unité de la foi catholique une multitude d’hérétiques rebelles. |
Et ídeo cum Angelís et Archángelis,
cum Thronis et Dominatiónibus, cumque omni milítia cæléstis exércitus, hymnum glóriæ tuæ cánimus, sine fine dicéntes. | C’est pourquoi avec les Anges et les Archanges,
avec les Trônes et les Dominations, avec toute l’armée céleste, nous chantons une hymne à votre gloire, disant sans cesse. |
ut non solum induráta peccatórum corda
ad pæniténtiam flécteret, sed et rebéllis tot hæreticórum mentes ad fídei cathólicæ unitátem revocáret. | que non seulement il attira à la pénitence
les cœurs endurcis par le péché, mais qu’il rappela à l’unité de la foi catholique une multitude d’hérétiques rebelles. |
ut et induráta peccatórum corda
ad pæniténtiam flécteret, et ómnium credéntium in vínculo pacis inquíreret unitátem. | qu’il attira à la pénitence
les cœurs endurcis par le péché, et qu’il chercha l’unité de tous les croyants dans le lien de la paix. |
[2] Cette attribution au pape de la rédaction de l’oraison de St François de Sales est erronée. Dans les papiers du cistercien Hilarion Rancati (2 septembre 1594 -17 avril 1663), soigneusement classes et conservés à l’Ambrosienne de Milan, on trouve traces de ses nombreuses activités comme Qualificateur du Saint Office, consulteur de la S. G. de Propaganda Fide et de la S. Congrégation des Rites.
A ce dernier titre (au ms. B 238 p. 431-432) on trouve des essais de composition d’une oraison liturgique pour le bienheureux François de Sales qui, décédé à Lyon, en l’aumônerie de la Visitation le 28 décembre 1622, sur les 8 heures du- soir, venait d’être béatifié à Saint-Pierre de Rome le 8 janvier 1662.
Divisé ici en stiques et numéroté pour la clarté de la présentation, voici le double essai que pour sa part, préparait et présentait le P. Rancati.
1er schéma | 2ème schéma | Missel Romain |
1. Deus qui ad salutem animarum | 1. Deus qui | 1. Deus, qui ad animarum salutem |
2. beatum Franciscum Confessorem tuum atque Pontificem | 2. beatum Franciscum Confessorcm tuum atque Pontificem | 2. beatum Franciscum Confessorem tuum atque Pontificem |
2bis a) ad lucrifaciendum omnium animas | ||
b) ad lucrandum omnium animas | ||
c) ut omnes faceret salvos | ||
3. apostolicae caritatis zelo | 3. apostolicae caritatis zelo | 3. |
4. tuique spiritus suavitate | 4. tuique spirirus suavitatc | 4. |
5. mirabiliter imbuisti | 5. a) omnibus omnia mirabiliter fecisti | 5. omnibus omnia factum esse voluisti ; |
b) omnibus omnia mirabiliter factum esse voluisti | ||
c) omnium hominum cordibus mirabiliter aptasti | ||
6. quaesumus | 6. quaesumus | 6. concede propitius ; |
7. ut eo intercedente | 7. ut eo intercedente | 7. |
8. tuae caritatis potenti suavitate | 8. sancti amoris tui multiplici dulcedine | 8. ut caritatis tuae dulcedine perfusi, |
9. nostras etiam rebelles | 9. a) voluntates nostras ad te rapias | 9. eius dirigcntibus monitis ac suffragantibus meritis, |
b) voluntates nostras ad te trahas | ||
9a. etiam rebellium voluntatum | ||
10. ad te misericorditer trahas voluntates | 10. a) et raptos | 10. aeterna gaudia consequamur. |
t) et tractos | ||
10a. salutem misericorditer operens. | 10a. a) perfice indesinenter esse perseverantcs | |
b) perseverantes esse perficias |
[3] Matth. 5, 4.
[4] I Johan. 3, 18.
[5] Voir note précédente.
[6] Traité de l’Amour de Dieu, I, XV.
[7] I Proc. Canon., vol. I, art. 4.
[8] Lettre à la Mère de Chantal, octobre 1606, in Œuvres, éd. Mackey, t. XIII, p. 223.
[9] Lettre à Mgr de Marquemond, juin 1615.
[10] Préface de l’Introduction à la vie dévote.
[11] Bref Dives in misericordia, 16 novembre 1877.
[12] Cf. livre I, chap. XII.
[13] Ibid., livre X, chap. I.
[14] Ibid., livre I, chap. XVI.
[15] Ibid., livre I, chap. VI.
[16] Cf. ibid., livre IX, chap. XIII.
[17] Cf. ibid., livre IX, chap. I.
[18] Ibid., livre VII, chap. VI.
[19] Lettre du 14 octobre 1604.