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09/10 St Jean Léonardi, confesseur

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Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Benoît XVI, catéchèses, 7 octobre 2009  

En France, la fête de saint Denis, seulement commémoré dans le calendrier romain, l’emporte sur celle de St Jean Léonardi.

Né vers 1541-1543. Fondateur des Clercs réguliers de la Mère de Dieu (1574). Mort à Rome le 9 octobre 1609, canonisé en 1938, inscrit au calendrier universel en 1940 sous le rite double, la messe est dotée de textes propres sauf l’Evangile comme aux fondateurs d’ordres et missionnaires.

Textes de la Messe

die 9 octobris
le 9 octobre
SANCTI IOANNIS LEONARDI
SAINT JEAN LEONARDI
Conf.
Confesseur
III classis (ante CR 1960 : duplex)
IIIème classe (avant 1960 : double)
Ant. ad Introitum. Eccli. 42, 15-16.Introït
In sermónibus Dómini ópera eius : sol illúminans per ómnia respéxit, et glória Dómini plenum est opus eius.Des paroles du Seigneur émanent ses œuvres : le soleil les éclaire et les contemple toutes, et l’oeuvre du Seigneur est remplie de sa gloire.
Ps. 95, 1.
Cantáte Dómino cánticum novum : cantáte Dómino, omnis terra.Chantez au Seigneur un chant nouveau, chantez au Seigneur terre entière.
V/. Glória Patri.
Oratio.Collecte
Deus, qui beátum Ioánnem Confessórem tuum ad fidem in géntibus propagándam mirabíliter excitáre dignátus es, ac per eum in erudiéndis fidélibus novam in Ecclésia tua famíliam congregásti : da nobis fámulis tuis ; ita eius institútis profícere, ut prǽmia consequámur ætérna. Per Dominum.O Dieu, afin de répandre la foi parmi les païens, vous avez suscité d’une merveilleuse façon le bienheureux Jean votre Confesseur, et vous lui avez fait fonder dans votre Église une nouvelle famille pour instruire les fidèles : donnez-nous, à nous vos serviteurs, de profiter si bien de ses enseignements que nous obtenions la vie éternelle.
Et fit commemoratio Ss. Dionysii, Ep., Rustici et Eleutherii, Mm :Et on fait mémoire des Sts Denis, Rustique et Eleuthère, Martyrs :
Oratio.Collecte
Deus, qui hodiérna die beátum Dionýsium, Mártyrem tuum atque Pontíficem, virtúte constantiæ in passióne roborásti, quique illi, ad prædicándum géntibus glóriam tuam, Rústicum et Eleuthérium sociáre dignátus es : tríbue nobis, quǽsumus ; eórum imitatióne, pro amóre tuo próspera mundi despícere, et nulla eius advérsa formidáre. Per Dóminum.O Dieu, qui, en ce jour, avez fortifié le bienheureux Denis, votre Martyr et Pontife, lui donnant la constance dans l’épreuve du martyre, et qui avez daigné lui associer Rustique et Éleuthère, pour annoncer votre gloire aux Gentils ; faites-nous, s’il vous plaît, la grâce de mépriser, à leur exemple et pour l’amour de vous, les prospérités du monde et de ne craindre aucune de ses adversités.
Léctio Epístolæ beáti Pauli Apóstoli ad Corinthios.Lecture de l’Épître de saint Paul Apôtre aux Corinthiens.
2 Cor. 4, 1-6 et 15-18.
Fratres : Habéntes administratiónem iuxta quod misericórdiam consecúti sumus, non defícimus, sed abdicámus occúlta dedécóris, non ambulántes in astútia, neque adulterántes verbum Dei, sed in manifestatióne veritátis commendántes nosmetípsos ad omnem consciéntiam hóminum coram Deo. Quod si étiam opértum est Evangélium nostrum : in iis, qui péreunt, est opértum : in quibus Deus huius sǽculi excæcávit mentes infidélium, ut non fúlgeat illis illuminátio Evangélii glóriæ Christi, qui est imágo Dei. Non enim nosmetípsos prædicámus, sed Iesum Christum Dóminum nostrum : nos autem servos vestros per Iesum : quóniam Deus, qui dixit de ténebris lucem splendéscere, ipse illúxit in córdibus nostris ad illuminatiónem sciéntiæ claritátis Dei, in fácie Christi Iesu. Omnia enim propter vos : ut grátia abúndans, per multos in gratiárum actione, abúndet in glóriam Dei. Propter quod non deficimus : sed licet is, qui foris est, noster homo corrumpátur : tamen is, qui intus est, renovatur de die in diem. Id enim, quod in praesenti est momentáneum et leve tribulatiónis nostræ, supra modum in sublimitáte ætérnum glóriæ pondus operátur in nobis, non contemplántibus nobis quæ vidéntur, sed quæ non vidéntur. Quæ enim vidéntur, temporália sunt : quæ autem non vidéntur, ætérna sunt.Mes Frères, ayant le ministère selon la miséricorde qui nous a été faite, nous ne faiblissons pas ; mais nous rejetons les choses honteuses que l’on cache, ne nous conduisant point avec artifice, et n’altérant point la parole de Dieu, mais nous recommandant nous-mêmes à la conscience de tous les hommes, devant Dieu, par la manifestation de la vérité. Si notre Evangile est encore voilé, c’est pour ceux qui périssent qu’il est voilé, pour les infidèles dont le Dieu de ce siècle a aveuglé les esprits, afin que ne brille pas pour eux la lumière du glorieux Evangile du Christ, qui est l’image de Dieu. Car nous ne nous prêchons pas nous-mêmes, mais Jésus-Christ notre Seigneur, et nous, nous sommes vos serviteurs en Jésus ; parce que le Dieu qui a dit à la lumière de resplendir du sein des ténèbres, a fait luire aussi sa clarté dans nos coeurs, pour que nous fassions briller la connaissance de la gloire de Dieu en la personne du Christ Jésus. Car toutes choses sont pour vous, afin que la grâce, en se multipliant, fasse abander les actions de grâces d’un grand nombre, pour la gloire de Dieu. C’est pourquoi nous ne perdons pas courage ; mais bien qu’en nous l’homme extérieur se détruise, cependant l’homme intérieur se renouvelle de jour en jour. Car notre légère tribulation du moment présent produit pour nous le poids éternel d’une sublime et incomparable gloire ; pour nous qui ne considérons point les choses visibles, mais les choses invisibles, car les choses visibles sont temporelles, mais les invisibles sont éternelles.
Graduale. Ps. 72, 21 ; 68, 10.Graduel
Inflammátum est cor meum, et renes mei commutáti sunt : zelus domus tuæ comédit me.Mon coeur s’est enflammé, et mes reins ont été altérés : le zèle de votre maison m’a dévoré
V/. Isai. 49, 2. Pósuit os meum quasi gládium acutum : in umbra manus suæ protéxit me, et pósuit me sicut sagíttam eléctam.V/. Il a rendu ma bouche semblable à un glaive acéré, il m’a protégé à l’ombre de sa main ; il a fait de moi comme une flèche choisie.
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 70, 7. Tamquam prodígium factus sum multis : et tu adiútor fortis, Allelúia.Allelúia, allelúia. V/. Je suis devenu pour beaucoup comme un prodige ; et vous, vous êtes un puissant secours.
In missis votivis post Septuagesimam, ommissis Allelúia et versu sequenti, diciturAux messes votives après la Septuagésime, on omet l’Alléluia et son verset et on dit :
Tractus. Ps. 54, 3-4 et 17.Trait
Contristátus sum in exercitatióne mea : et conturbátus sum a voce inimíci, et a tribulatióne peccatóris.J’ai été rempli de tristesse dans mon épreuve, et le trouble m’a saisi à la voix de l’ennemi, et devant l’oppression du pécheur.
V/. Quóniam declinavérunt in me iniquitátes : et in ira molésti erant mihi.V/. Car ils m’ont accusé de crimes, et dans leur colère ils m’ont affligé.
V/. Ego autem ad Deum clamávi : et Dóminus salvábit me.V/. Mais moi j’ai crié vers Dieu, et le Seigneur me sauvera.
Tempore paschali omittitur graduale, et eius loco dicitur :Pendant le temps pascal, on omet le graduel et à sa place on dit :
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 51, 10. Sicut olíva fructífera in domo Dei, speravi in misericórdia Dei in ætérnum : et in sǽculum sǽculi.Allelúia, allelúia. V/. Comme un olivier fertile dans la maison de Dieu, j’ai espèré en la miséricorde de Dieu éternellement et dans les siècles des siècles.
Allelúia. V/. Ps. 61, 8. In Deo salutáre meum, et glória mea : Deus auxílii mei, et spes mea in Deo est. Allelúia.Allelúia. V/. En Dieu est mon salut et ma gloire ; il est le Dieu qui me secourt, et mon espérance est en Dieu.
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Lucam.Lecture du Saint Evangile selon saint Luc.
Luc. 10, 1-9.
In illo témpore : Designávit Dóminus et álios septuagínta duos : et misit illos binos ante fáciem suam in omnem civitátem et locum, quo erat ipse ventúrus. Et dicebat illis : Messis quidem multa, operárii autem pauci. Rogáte ergo Dóminum messis, ut mittat operários in messem suam. Ite : ecce, ego mitto vos sicut agnos inter lupos. Nolíte portare sǽculum neque peram neque calceaménta ; et néminem per viam salutavéritis. In quamcúmque domum intravéritis, primum dícite : Pax huic dómui : et si ibi fúerit fílius pacis, requiéscet super illum pax vestra : sin autem, ad vos revertétur. In eádem autem domo manéte, edéntes et bibéntes quæ apud illos sunt : dignus est enim operárius mercede sua. Nolíte transíre de domo in domum. Et in quamcúmque civitátem intravéritis, et suscéperint vos, manducáte quæ apponúntur vobis : et curáte infírmos, qui in illa sunt, et dícite illis : Appropinquávit in vos regnum Dei.En ce temps-là : le Seigneur désigna encore soixante-dix autres disciples, et il les envoya devant lui, deux à deux, en toute ville et endroit où lui-même devait aller. Il leur disait : La moisson est grande, mais les ouvriers sont en petit nombre. Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson. Allez : voici que je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups. Ne portez ni bourse, ni besace, ni sandales, et ne saluez personne en chemin. En quelque maison que vous entriez, dites d’abord : "Paix à cette maison !" Et s’il y a là un fils de paix, votre paix reposera sur lui ; sinon, elle reviendra sur vous. Demeurez dans cette maison, mangeant et buvant de ce qu’il y aura chez eux, car l’ouvrier mérite son salaire. Ne passez pas de maison en maison. Et en quelque ville que vous entriez et qu’on vous reçoive, mangez ce qui vous sera servi ; guérissez les malades qui s’y trouveront, et dites-leur : "Le royaume de Dieu est proche de vous."
Ant. ad Offertorium. Col. 1, 25.Offertoire
Christi factus sum ego miníster secúndum dispensatiónem Dei, quæ data est mihi, ut ímpleam verbum Dómini.Je suis devenu le ministre du Christ, selon la charge que Dieu m’a donnée, pour que j’annonce pleinement la parole de Dieu
SecretaSecrète
Súscipe, Dómine, oblatiónem mundam salutáris hóstiæ : et præsta ; ut, intercedénte beáto Ioánne Confessóre tuo, úbique géntium iúgiter offerátur. Per Dóminum. Recevez, Seigneur, l’offrande pure de l’hostie du salut, et faites qu’à la prière du bienheureux Jean votre Confesseur, elle soit offerte sans interruption parmi tous les peuples.
Pro Ss. MartyribusPour les Sts Martyrs
SecretaSecrète
Obláta tibi, Dómine, múnera pópuli tui, pro tuórum honóre Sanctórum, súscipe propítius, quǽsumus : et eórum nos intercessióne sanctífica. Per Dóminum.Accueillez avec bienveillance, Seigneur, nous vous en prions, les dons offerts par votre peuple en l’honneur de vos Saints et sanctifiez-nous par leur intercession.
Ant. ad Communionem. Philipp. 3, 7.Communion
Quæ mihi fúerunt lucra, hæc arbitrátus sum propter Christum detriménta.Les choses qui avaient été pour moi des gains, je les ai regardées comme une perte à cause du Christ.
PostcommunioPostcommunion
Pretiósi córporis, et sánguinis tui sacris refécti mystériis, Dómine, adprecámur : ut beáti Ioánnis Confessóris tui exémplo, studeámus confitéri quod crédidit, et ópere exercére quod dócuit : Qui vivis.Restaurés par les saints mystères de vos Corps et Sang précieux, Seigneur, nous vous prions : que l’exemple du bienheureux Jean votre Confesseur, nous entraîne à affirmer avec foi ce qu’il a cru et à mettre en pratique ce qu’il a prêché.
Pro Ss. MartyribusPour les Sts Martyrs
PostcommunioPostcommunion
Sumptis, Dómine, sacraméntis, quǽsumus : ut, intercedéntibus beátis Martýribus tuis Dionýsio, Rústico et Eleuthério, ad redemptiónis ætérnæ proficiámus augméntum. Per Dóminum nostrum Iesum Christum, Fílium tuum : Qui tecum vivit et regnat.Ayant reçu les sacrements, nous vous prions, Seigneur, que par l’intercession de vos bienheureux Martyrs Denis, Rustique et Eleuthère, nous en tirions plus largement la rédemption éternelle.

Office

Leçon des Matines 1960

Jean Leonardi, né près de la ville de Lucques, montra dès son premier âge un air de gravité et de maturité. Appelé par Dieu à l’âge de vingt-six ans à s’enrôler dans la milice ecclésiastique, il apprit d’abord parmi les enfants les rudiments du latin, puis il fit de tels progrès dans les lettres et dans les disciplines philosophiques et théologiques qu’au bout de quatre ans à peine il fut élevé au sacerdoce, en vertu de l’obéissance. Il institua la Congrégation des clercs réguliers de la Mère de Dieu ; leurs efforts et leur zèle amenèrent une grande transformation spirituelle dans la république de Lucques. Il connut alors les poursuites acharnées des méchants, mais acceptant toutes les épreuves d’une âme sereine, il obtint de Grégoire XIII l’approbation de sa congrégation. Profondément affligé de savoir beaucoup de peuples privés dans les contrées lointaines de la lumière de l’Évangile, il fonda, après des entretiens avec le pieux prélat Vives, un groupement de prêtres qui aurait pour charge la formation de jeunes gens destinés à aller ensuite dans des pays éloignés pour y propager la foi. Il n’abandonna jamais le saint ministère et, dans la cendre et le cilice, il s’en alla vers le Seigneur, à Rome, le 9 octobre 1609. Pie XI l’inscrivit au nombre des saints.

Benoît XVI, catéchèses, 7 octobre 2009

Chers frères et sœurs !

Après-demain, 9 octobre, nous célébrerons les 400 ans de la mort de saint Jean Léonardi, fondateur de l’Ordre religieux des clercs réguliers de la Mère de Dieu, canonisé le 17 avril 1938 et élu patron des pharmaciens le 8 août 2006. Il est également rappelé pour son grand élan missionnaire. Avec Mgr Juan Bautista Vives et le jésuite Martin de Funes, il projeta et contribua à l’institution d’une Congrégation spécifique du Saint-Siège pour les missions, celle de Propaganda Fide, et à la future naissance du Collège urbain de Propaganda Fide qui, au cours des siècles, a formé des milliers de prêtres, dont un grand nombre de martyrs, pour évangéliser les peuples. Il s’agit donc d’une figure lumineuse de prêtre, que j’ai plaisir à indiquer comme exemple à tous les prêtres en cette année sacerdotale. Il mourut en 1609 à la suite d’une grippe contractée alors qu’il soignait tous ceux qui, dans le quartier romain de Campitelli, avaient été touchés par la maladie.

Jean Léonardi naquit en 1541 à Diecimo, dans la province de Lucques. Dernier de sept frères, son adolescence fut marquée par les rythmes de foi vécus dans un noyau familial sain et travailleur, et par la fréquentation assidue d’une boutique d’arômes et de médicaments de son pays natal. A l’âge de 17 ans, son père l’inscrivit à un cours régulier d’apothicaire à Lucques, dans le but d’en faire un futur pharmacien, ou plutôt un apothicaire, comme on disait alors. Pendant presque dix ans, le jeune Jean Léonardi fréquenta ce cours de façon attentive et assidue, mais lorsque, selon les normes prévues par l’antique République de Lucques, il reçut la reconnaissance officielle qui devait l’autoriser à ouvrir sa boutique d’apothicaire, il se demanda si le moment n’était pas venu de réaliser un projet qui lui tenait à cœur depuis longtemps. Après une mûre réflexion, il décida de se consacrer au sacerdoce. Et ainsi, ayant quitté la boutique de l’apothicaire, et ayant reçu une formation théologique adéquate, il fut ordonné prêtre et le jour de l’Epiphanie 1572, il célébra sa première Messe. Toutefois, il n’abandonna pas la passion pour la pharmacie, car il sentait que la médiation professionnelle de pharmacien lui aurait permis de réaliser pleinement sa vocation, celle de transmettre aux hommes, à travers une vie sainte, « la médecine de Dieu », qui est Jésus Christ, mort et ressuscité, « mesure de toute chose ».

Animé par la conviction que tous les êtres humains avaient besoin plus que tout autre chose de cette médecine, saint Jean Léonardi tenta de faire de la rencontre personnelle avec Jésus Christ la raison fondamentale de son existence. « Il est nécessaire de repartir du Christ », aimait-il répéter très souvent. Le primat du Christ sur tout devint pour lui le critère concret de jugement et d’action et le principe moteur de son activité sacerdotale, qu’il exerça tandis qu’était en cours un mouvement vaste et diffus de renouveau spirituel dans l’Eglise, grâce à la floraison de nouveaux Instituts religieux et au témoignage lumineux de saints tels que Charles Borromée, Philippe Neri, Ignace de Loyola, Joseph Calasanzio, Camille de Lellis, Louis Gonzague. Il se consacra avec enthousiasme à l’apostolat auprès des jeunes à travers la Compagnie de la Doctrine chrétienne, en rassemblant autour de lui un groupe de jeunes avec lesquels, le 1er septembre 1574, il fonda la Congrégation des prêtres réformés de la Bienheureuse Vierge, appelée par la suite Ordre des clercs réguliers de la Mère de Dieu. A ses disciples, il recommandait d’avoir « devant les yeux de l’esprit uniquement l’honneur, le service et la gloire de Jésus Christ crucifié » et, en bon pharmacien habitué à doser les potions grâce à une référence précise, il ajoutait : « Elevez un peu plus vos yeux vers Dieu et mesurez les choses avec Lui ».

Mû par son zèle apostolique, en mai 1605, il envoya au Pape Paul V qui venait d’être élu un Memorial, dans lequel il suggérait les critères d’un authentique renouveau dans l’Eglise. En observant qu’il est « nécessaire que ceux qui aspirent à la réforme des mœurs des hommes recherchent en particulier, et en premier lieu, la gloire de Dieu », il ajoutait qu’ils devaient resplendir « par l’intégrité de leur vie et l’excellence de leurs mœurs, ainsi, plus que la contraindre, ils conduiront doucement à la réforme ». Il observait, en outre, que « celui qui veut opérer une sérieuse réforme religieuse et morale doit faire avant tout, comme un bon médecin, un diagnostic attentif des maux qui tourmentent l’Eglise pour pouvoir ainsi être en mesure de prescrire pour chacun d’eux le remède le plus approprié ». Et il notait que « le renouveau de l’Eglise doit avoir lieu également chez les responsables et les subalternes, en haut et en bas. Il doit commencer par celui qui commande et s’étendre aux sujets ». Ce fut pour cette raison que, tandis qu’il sollicitait le Pape à promouvoir une « réforme universelle de l’Eglise », il se préoccupait de la formation chrétienne du peuple et en particulier des enfants, qu’il fallait éduquer « dès les premières années... dans la pureté de la foi chrétienne et des saintes mœurs ».

Chers frères et sœurs, la figure lumineuse de ce saint est une invitation tout d’abord pour les prêtres, et pour tous les chrétiens, à tendre constamment vers la « haute mesure de la vie chrétienne » qui est la sainteté, naturellement chacun selon son état. En effet, ce n’est que de la fidélité au Christ que peut naître l’authentique renouveau ecclésial. Au cours de ces années, lors du passage culturel et social entre le XVIe siècle et le XVIIe siècle, commencèrent à se dessiner les prémisses de la future culture contemporaine, caractérisée par une scission indue entre foi et raison, qui a eut, parmi ses effets négatifs, la marginalisation de Dieu, avec l’illusion d’une possible et totale autonomie de l’homme qui choisit de vivre « comme si Dieu n’existait pas ». C’est la crise de la pensée moderne, que j’ai eu plusieurs fois l’occasion de souligner et qui débouche souvent sur des formes de relativisme. Jean Léonardi eut l’intuition du véritable remède pour ces maux spirituels et il la synthétisa dans l’expression : « le Christ avant tout », le Christ au centre du cœur, au centre de l’histoire et de l’univers. Et l’humanité a un besoin extrême du Christ - affirmait-il avec force - , car Il est notre « mesure ». Il n’y a pas de milieu qui ne puisse être touché par sa force ; il n’y a pas de maux qui ne trouvent remède en Lui, il n’y a pas de problème qui ne se résolvent en Lui. « Ou le Christ ou rien » ! Voilà sa recette pour chaque type de réforme spirituelle et sociale.

Il existe un autre aspect de la spiritualité de saint Jean Léonardi qu’il me plaît de souligner. En plusieurs circonstances, il réaffirma que la rencontre vivante avec le Christ se réalise dans son Eglise, sainte mais fragile, enracinée dans l’histoire et dans son devenir parfois obscur, où le blé et l’ivraie croissent ensemble (cf. Mt 13, 30), mais toutefois toujours Sacrement de salut. Ayant clairement conscience du fait que l’Eglise est le champ de Dieu (cf. Mt 13, 24), il ne se scandalisa pas de ses faiblesses humaines. Pour faire obstacle à l’ivraie, il choisit d’être le bon grain : c’est-à-dire qu’il décida d’aimer le Christ dans l’Eglise et de contribuer à la rendre toujours davantage un signe transparent de sa personne. Avec un grand réalisme, il vit l’Eglise, sa fragilité humaine, mais également sa manière d’être « champ de Dieu », instrument de Dieu pour le salut de l’humanité. Pas seulement. Par amour du Christ, il travailla avec zèle pour purifier l’Eglise, pour la rendre plus belle et sainte. Il comprit que toute réforme doit être faite dans l’Eglise et jamais contre l’Eglise. En cela, saint Jean Léonardi a vraiment été extraordinaire et son exemple reste toujours actuel. Chaque réforme concerne assurément les structures, mais elle doit tout d’abord toucher le cœur des croyants. Seuls les saints, les hommes et les femmes qui se laissent guider par l’Esprit divin, prêts à accomplir des choix radicaux et courageux à la lumière de l’Evangile, renouvellent l’Eglise et contribuent, de manière déterminante, à construire un monde meilleur.

Chers frères et sœurs, l’existence de saint Jean Léonardi fut toujours illuminée par la splendeur de la « Sainte Face » de Jésus, conservée et vénérée dans l’église-cathédrale de Lucques, devenue le symbole éloquent et la synthèse indiscutable de la foi qui l’animait. Conquis par le Christ comme l’apôtre Paul, il indiqua à ses disciples, et il continue de nous indiquer à tous, l’idéal christocentrique pour lequel « il faut se dépouiller de chaque intérêt personnel et ne voir que le service de Dieu », en ayant « devant les yeux de l’esprit uniquement l’honneur, le service et la gloire du Christ Jésus crucifié ». A côté de la face du Christ, il fixa son regard sur le visage maternel de Marie. Celle qu’il élisit Patronne de son ordre, fut pour lui maîtresse, sœur, mère, et il fit l’expérience de sa constante protection. Que l’exemple et l’intercession de cet « homme de Dieu fascinant » soient, en particulier en cette Année sacerdotale, un appel et un encouragement pour les prêtres et pour tous les chrétiens à vivre avec passion et enthousiasme leur propre vocation.

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