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28/06 Vigile des Sts Pierre et Paul, apôtres

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"Au nom de Jésus-Christ de Nazareth, lève-toi et marche."

Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  
  Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique  

Dans l’antiquité, et encore au VIIIème siècle, on célébrait dans la nuit du 28 au 29 juin à Rome deux messes : une à la basilique Saint-Pierre au Vatican, l’autre à la basilique Saint-Paul.

La réforme de Jean XXIII a libéré le 28 juin de la fête de St Irénée, redonnant son grade de vigile majeure à la Vigile des deux Princes des Apôtres.

Textes de la Messe

die 28 iunii
le 28 juin
In Vigilia Ss. Petri et Pauli App.
Vigile des Saints Apôtres Pierre et Paul
II classis (ante CR 1960 : commemoratio)
IIème classe (avant 1960 : commémoraison)
Ant. ad Introitum. Ioann. 21, 18-19.Introït
Dicit Dóminus Petro : Cum esses iúnior, cingébas te et ambulábas, ubi volébas : cum autem senúeris, exténdes manus tuas, et álius te cinget et ducet, quo tu non vis : hoc autem dixit, signíficans, qua morte clarificatúrus esset Deum.Le Seigneur dit à Pierre : lorsque tu étais plus jeune, tu te ceignais toi-même, et tu allais où tu voulais : mais lorsque tu seras vieux, tu étendras les mains et un autre te ceindra et te conduira où tu ne voudras pas : or il dit cela pour marquer par quelle mort il devait glorifier Dieu.
Ps. 18, 1.
Cæli enárrant glóriam Dei : et ópera mánuum eius annúntiat firmaméntum.Les cieux racontent la gloire de Dieu, et le firmament publie les œuvres de ses mains.
V/.Glória Patri.
Non dicitur Glória in excélsis.On ne dit pas le Glória in excélsis.
Oratio.Collecte
Præsta, quǽsumus, omnípotens Deus : ut nullis nos permíttas perturbatiónibus cóncuti ; quos in apostólicæ confessiónis petra solidásti. Per Dóminum.Daignez, nous vous en supplions, ô Dieu tout-puissant, ne point permettre qu’aucun trouble nous ébranle, après que vous nous avez établis sur la pierre solide de la foi des Apôtres.
Léctio Actuum Apostolórum.Lecture des Actes des Apôtres.
Act. 3, 1-10.
In diébus illis : Petrus et Ioánnes ascendébant in templum ad horam oratiónis nonam. Et quidam vir, qui erat claudus ex útero matris suæ, baiulabátur : quem ponébant cotídie ad portam templi, quæ dícitur Speciósa, ut péteret eleemósynam ab introeúntibus in templum. Is cum vidísset Petrum et Ioánnem incipiéntes introíre in templum, rogábat, ut eleemósynam acciperet. Intuens autem in eum Petrus cum Ioánne, dixit : Réspice in nos. At ille intendébat in eos, sperans se áliquid acceptúrum ab eis. Petrus autem dixit : Argéntum et aurum non est mihi ; quod autem habeo, hoc tibi do : In nómine Iesu Christi Nazaréni surge, et ámbula. Et apprehénsa manu eius déxtera, allevávit eum, et protínus consolidátæ sunt bases eius et plantæ. Et exsíliens stetit, et ambulábat : et intrávit cum illis in templum, ámbulans et exsíliens et laudans Deum. Et vidit omnis populus eum ambulántem et laudántem Deum. Cognoscébant autem illum, quod ipse erat, qui ad eleemósynam sedébat ad Speciósam portam templi : et impléti sunt stupore et écstasi in eo, quod contígerat illi.En ces jours-là : Pierre et Jean montaient au temple pour la prière de la neuvième heure. Et il y avait un homme, boiteux dès le sein de sa mère, qu’on portait et qu’on plaçait chaque jour à la porte du temple qu’on appelle la Belle, pour qu’il demandât l’aumône à ceux qui entraient dans le temple. Cet homme, ayant vu Pierre et Jean qui allaient entrer dans le temple, les priait, pour recevoir une aumône. Pierre, avec Jean, fixa les yeux sur lui, et dit : Regarde-nous. Il les regardait donc attentivement, espérant qu’il allait recevoir quelque chose d’eux. Mais Pierre dit : Je n’ai ni or ni argent ; mais ce que j’ai, je te le donne. Au nom de Jésus-Christ de Nazareth, lève-toi et marche. Et l’ayant pris par la main droite, il le souleva ; et aussitôt ses jambes et ses pieds furent affermis. D’un bond, il fut debout, et il se mit à marcher ; et il entra avec eux dans le temple, marchant, sautant et louant Dieu. Tout le peuple le vit marcher et louer Dieu. Et reconnaissant que c’était celui-là même qui se tenait à la Belle-Porte du temple pour demander l’aumône, ils furent remplis de stupeur et d’étonnement de ce qui lui était arrivé.
Graduale. Ps. 18, 5 et 2.Graduel
In omnem terram exívit sonus eórum : et in fines orbis terræ verba eórum.Leur bruit s’est répandu dans toute la terre, et leurs accents jusqu’aux extrémités du monde.
V/. Cæli enárrant glóriam Dei : et ópera mánuum eius annúntiat firmaméntum.V/. Les cieux racontent la gloire de Dieu, et le firmament publie les œuvres de ses mains.
+ Sequéntia sancti Evangélii secúndum Ioánnem.Suite du Saint Évangile selon saint Jean.
Ioann. 21, 15-10.
In illo témpore : Dixit Iesus Simóni Petro : Simon Ioánnis, díligis me plus his ? Dicit ei : Etiam, Dómine, tu scis, quia amo te. Dicit ei : Pasce agnos meos. Dicit ei íterum : Simon Ioánnis, díligis me ? Ait illi : Etiam, Dómine, tu scis, quia amo te. Dicit ei : Pasce agnos meos. Dicit ei tértio : Simon Ioánnis, amas me ? Contristátus est Petrus, quia dixit ei tértio, Amas me ? et dixit ei : Dómine, tu ómnia nosti : tu scis, quia amo te. Dixit ei : Pasce oves meas. Amen, amen, dico tibi : cum esses iúnior, cingébas te et ambulábas, ubi volébas : cum autem senúeris, exténdes manus tuas, et álius te cinget et ducet, quo tu non vis. Hoc autem dixit, signíficans, qua morte clarificatúrus esset Deum.En ce temps-là : Jésus dit à Simon-Pierre : Simon, fils de Jean, m’aimes-tu plus que ceux-ci ? Il lui répondit : Oui, Seigneur, vous savez que je vous aime. Jésus lui dit : Pais mes agneaux. Il lui dit de nouveau : Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? Pierre lui répondit : Oui, Seigneur, vous savez que je vous aime. Jésus lui dit : Pais mes agneaux. Il lui dit pour la troisième fois : Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? Pierre fut attristé de ce qu’il lui avait dit pour la troisième fois : M’aimes-tu ? et il lui répondit : Seigneur, vous savez toutes choses ; vous savez que je vous aime. Jésus lui dit : Pais mes brebis. En vérité, en vérité, je te le dis, lorsque tu étais plus jeune, tu te ceignais toi-même, et tu allais où tu voulais ; mais lorsque tu seras vieux, tu étendras tes mains, et un autre te ceindra et te conduira où tu ne voudras pas. Or il dit cela pour marquer par quelle mort il devait glorifier Dieu.
Ant. ad Offertorium. Ps. 138, 17.Offertoire
Mihi autem nimis honoráti sunt amíci tui, Deus : nimis confortátus est principátus eórum.O Dieu, que vos amis sont singulièrement honorés à mes yeux ! Leur empire s’est extraordinairement affermi.
Secreta.Secrète
Munus pópuli tui, quǽsumus, Dómine, apostólica intercessióne sanctífica : nosque a peccatórum nostrórum máculis emúnda. Per Dóminum.Nous vous en supplions, Seigneur, par l’intercession des apôtres, rendez saint le don de votre peuple : et purifiez-nous des taches de nos péchés.
Ant. ad Communionem. Ioann. 21, 15 et 17.Communion
Simon Ioánnis, díligis me plus his ? Dómine, tu ómnia nosti : tu scis, Dómine, quia amo te.Simon, fils de Jean, m’aimes-tu plus que ceux-ci ? Seigneur, vous savez toutes choses : vous savez que je vous aime.
Postcommunio.Postcommunion
Quos cælésti, Dómine, aliménto satiásti : apostólicis intercessiónibus ab omni adversitáte custódi. Per Dóminum nostrum.Seigneur, eu égard à ces apôtres, défendez contre toute adversité ceux que vous avez nourris de l’aliment céleste.

Office

L’Office est entièrement de la Férie, sauf les trois leçons des Matines

Leçons des Matines

Lecture du saint Évangile selon saint Jean.
En ce temps-là : Jésus dit à Simon Pierre. : Simon, fils de Jean, m’aimes-tu plus que ceux-ci ? Et le reste.

Homélie de saint Augustin, Évêque.

Première leçon. A son triple reniement, Pierre oppose une triple confession, voulant que sa langue n’obéisse pas moins à l’amour qu’elle n’a obéi à la crainte, et que la mort entrevue de loin ne semble pas lui avoir donné plus de voix que la présence de la Vie. Renier le Pasteur a été l’effet de la crainte : que l’office de l’amour soit de paître le troupeau du Seigneur ! Ceux qui paissent les brebis du Christ avec la disposition de vouloir qu’elles soient à eux et non au Christ, sont convaincus de s’aimer eux-mêmes et de ne point aimer Jésus-Christ, avides qu’ils sont d’honneurs, de domination, de richesses, et vides de cette charité qui fait obéir, soulager, plaire à Dieu.

Deuxième leçon. L’Apôtre gémit d’en voir certains chercher leur intérêt et non celui du Christ Jésus. La voix du Christ nous met avec insistance en garde contre eux. Que signifie, en effet : "Si tu m’aimes, pais mes brebis" sinon "si tu m’aimes, fais bien attention à ne pas te faire paître toi-même" ! Ce sont mes brebis, fais-les paître, comme miennes, et non comme tiennes. Cherche en elles ma gloire et non la tienne, mon domaine et non le tien, mon gain et non le tien. De peur que tu ne t’associes à ceux qui surviennent dans des temps difficiles, qui sont des égoïstes et ont tous les défauts liés à cette racine du mal".

Troisième leçon. Le Seigneur dit à bon droit à Pierre : "M’aimes-tu ?" Il répond : "Oui" ! Jésus lui dit alors : "Pais mes agneaux," et cela deux et trois fois. Là nous est prouvée l’identité de l’amour et de la dilection. Car, la dernière fois, le Seigneur ne dit pas : "As-tu pour moi de la dilection ?" mais : "m’aimes-tu ?" Aimons-le donc lui, et non pas nous ! et, en faisant paître ses brebis, recherchons ses intérêts et non les nôtres. Je ne sais par quel inexplicable moyen on peut s’aimer (soi et non Dieu) sans s’aimer ; ou aimer Dieu (non pas soi) et s’aimer pourtant ! En effet, qui ne peut pas vivre de soi-même, meurt en s’aimant lui-même. Il ne s’aime donc pas, celui qui s’aime de manière à fuir la vie !

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

Jean-Baptiste, placé aux confins des deux Testaments, a clos l’âge prophétique où ne régnait que l’espérance, et commencé l’ère de la foi qui possède, sans le voir encore en sa divinité, le Dieu longtemps attendu. Aussi, avant même que ne soit terminée l’Octave où nous fêtons le fils de Zacharie, la confession apostolique va se greffer sur le témoignage rendu par le Précurseur au Verbe lumière. Demain, tous les échos des cieux se renverront la parole que Césarée de Philippe entendit la première : Vous êtes le Christ, fils du Dieu vivant ; et Simon fils de Jean, pour avoir prononcé l’oracle, sera établi la base qui porte l’Église. Demain même il mourra, scellant dans le sang sa déclaration glorieuse ; mais il se survivra dans les Pontifes romains pour garder le précieux témoignage en son intégrité, jusqu’au jour où la foi fera place à l’éternelle vision. Associé aux travaux de Pierre, le Docteur des gentils partagera son triomphe ; et Rome, plus redevable à ses deux princes qu’aux guerriers fameux qui abattirent le monde à ses pieds, verra leur double victoire affermir pour jamais sur sa tête auguste le diadème de la royauté des âmes.

Recueillons-nous, et avec l’Église, préparons nos cœurs. En France, où tant de sacrifices ont dû être consentis par l’Église-mère, la fête des Apôtres, le plus souvent, n’est point célébrée à son jour ; lorsque le 29 juin se rencontre un des jours de la semaine, elle voit sa solennité renvoyée au dimanche. Par suite, la Vigile a perdu chez nous de ses austérités d’autrefois. Heureux les diocèses, où quelque trace de l’ancienne discipline se garde encore ! La rigueur que sait s’imposer un peuple à certains jours de préparation, est une marque de la foi qu’il a conservée ; elle montre qu’il comprend la grandeur de l’objet proposé par la sainte Liturgie à son culte. Chrétiens d’Occident, nous dont Pierre et Paul sont la gloire devant les hommes et devant Dieu, songeons au Carême que les Grecs schismatiques commencent au lendemain des solennités pascales, en l’honneur des Apôtres, et qui ne prend fin qu’aujourd’hui. Le contraste sera de nature à nous faire dominer les penchants d’une mollesse où l’ingratitude aurait trop de part. Du moins, puissions-nous racheter en ferveur, en actions de grâces et amour, les privations dont tant d’églises, malgré leur séparation d’avec Rome, ont conservé l’usage.

Nous entrerons dans l’esprit de ce jour, en récitant les formules suivantes. La première est empruntée au Missel Gothique-Gallican ; c’est la Bénédiction qui, selon le rite de notre ancienne Liturgie, était donnée au peuple avant la Communion dans la fête des Apôtres. Les Oraisons qui la suivent sont tirées du Sacramentaire Léonien.

BÉNÉDICTION.
Deus, qui membris Ecclesiæ, velut gemellum lumen quo caveantur tenebras, fecisti Petri lacrymas, Pauli litteras, coruscare.Dieu, pour garder des ténèbres les membres de l’Église, vous avez fait briller comme deux lumières jumelles, et les larmes de Pierre, et les lettres de Paul.
R/. Amen.R/. Amen
Hanc plebem placitus inspice : qui cœlos facis aperire Petro in clave, Paulo in dogmato.Regardez ce peuple bénignement, vous par qui Pierre avec ses clefs, vous par qui Paul avec sa foi, ouvrent les cieux.
R/. Amen.R/. Amen
Ut præviantibus ducibus, illic grex possit accedere, quo pervenerunt pariter tam ille Pastor suspendio, quam iste Doctor per gladium in congresso. Per Dominum nostrum.Qu’à la suite des chefs, le troupeau parvienne où sont arrivés d’un même pas tous deux, et le Pasteur sur la croix, et le Docteur sous le glaive. Par Jésus-Christ notre Seigneur.
R/. Amen.R/. Amen
ORAISONS.
Omnipotens sempiterne Deus, qui ineffabili sacramento jus Apostolici Principatus in Romani nominis arce posuisti, unde se evangelica veritas per tota mundi regna diffunderet : præsta, ut quod in orbem terrarum eorum prædicatione manavit, christianas devotionis sequatur universitas.Dieu tout-puissant et éternel, par un ineffable mystère vous avez fondé sur Rome et son nom le droit de la principauté apostolique, afin que la vérité évangélique se répandît de ces hauteurs en tous les royaumes du monde : faites que l’univers chrétien suive pieusement les maximes dont la prédication de Pierre et de Paul a imbibé la terre.
Præsta, quæsumus, Ecclesiæ tuæ, Domine, de tantis digne gaudere Principibus, et illam sequi pia devotione doctrinam, qua delectos tibi greges sacris mysteriis imbuerunt. Per Dominum.Nous vous en prions, Seigneur, donnez à votre Église la joie qui convient pour fêter ses illustres Princes ; que sa piété se nourrisse des enseignements donnés par eux aux troupeaux de votre choix, pour les initier aux sacrés Mystères. Par Jésus-Christ.

Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

La sainte veillée près des deux tombes apostoliques des saints Pierre et Paul.

Quoique le Missel actuel assigne à la vigile des saints Pierre et Paul une unique messe, nous savons toutefois, par le Lectionnaire de Würzbourg et par Alcuin, qu’au VIIIe siècle, à Rome, on célébrait cette nuit deux synaxes distinctes, l’une au Vatican, l’autre sur la voie d’Ostie.

Voici le passage du Lectionnaire relatif à saint Paul : In vigilias sancti Pauli. Lectio Epistolæ beati Pauli apost. ad Galatas (I, 11-20) : Fratres, notum autem facio Evangelium... usque... quia non mentior [1].

In Natali sancti Pauli. Lect. libr. Actuum Apostolor. (IX, 1-22) : In diebus illis Saul autem adhuc spirans minas et cædes in discipulos... usque... quod hic est Christus [2].

Mais quand, vers le temps d’Hadrien Ier, on fit à Rome un travail de simplification de l’antique liturgie, on confia volontiers la célébration de la messe vigiliale de saint Paul aux moines chargés des divins offices dans la splendide basilique de l’Apôtre, et les manuscrits se bornèrent à reproduire le texte de celle qui se célébrait au Vatican, et à laquelle effectivement intervenait le peuple. Telle est la situation représentée par le Gélasien, par le Grégorien et par le Comes de Würzbourg, dont dépend notre Missel actuel.

Les chants de la messe se rapportent de préférence à saint Pierre, mais les collectes sont communes aux deux Apôtres, car les Romains tenaient à ne jamais séparer leur souvenir, Pierre et Paul étant comparés, même en Orient, aux deux yeux qui resplendissent sur le visage virginal de l’Église.

L’antienne pour l’introït est tirée de l’évangile selon saint Jean (XXI, 18-19). La grâce s’adapte savamment à la nature et elle a ses heures. Pierre disposait librement de lui-même quand il était jeune. Quand il aura assumé la charge pastorale et sera tout à Dieu et à son troupeau, il ne sera plus maître de sa vie. Un autre le ceindra et l’entraînera là où la nature a horreur d’aller, mais où l’Esprit Saint l’immolera, victime de la gloire de Dieu. Jésus, qui ne peut mourir plus d’une fois, désire ardemment de s’immoler sans cesse au Père pour le salut des hommes. Et c’est pourquoi, selon l’antique légende, apparaissant sur la voie Appienne à l’Apôtre qui fuyait Rome et lui avait demandé : Domine, quo vadis ? il répond : Eo Romam iterum crucifigi [3].

Voici la collecte : « Faites, Seigneur, qu’étant établis solidement sur la pierre mystique de la confession apostolique, aucun trouble ne nous en arrache jamais ».

La première lecture traite du miracle opéré par Pierre à la porte du temple appelée la Belle (Act., III, 1-10). Combien puissante est la grâce du Saint-Esprit qui a transformé Pierre ! Il n’y a pas trois mois que la parole d’une simple servante l’a effrayé et qu’il a renié Jésus ; aujourd’hui au contraire, pauvre et dénué de puissance, il jette, intrépide, à la face du Sanhédrin l’accusation de déicide, et il en fournit la preuve la plus écrasante en opérant un miracle au nom de Celui qui avait été condamné à mort comme un blasphémateur.

Le graduel est tiré du psaume 18, comme celui de la fête de saint Marc en dehors du temps pascal, « Leur voix se répand par toute la terre, et leurs paroles jusqu’aux extrêmes limites du monde », « Les cieux narrent la gloire de Dieu, et le firmament annonce l’œuvre de ses mains ». D’une manière figurée, ces astres qui dorent de leurs rayons le ciel de l’Église et narrent partout la gloire de Dieu, ce sont les prédicateurs du saint Évangile.

Suit la lecture évangélique (Ioan., XXI, 15-19) qui rapporte la triple protestation d’amour faite à Jésus par Pierre, et la prédiction du crucifiement de celui-ci.

Les deux scènes ont entre elles un lien évident. Si Pierre aime le Maître plus que les autres, comme il doit être au-dessus des autres dans le ministère pastoral, ainsi doit-il également reproduire plus fidèlement que les autres la passion et la mort de Jésus.

L’antienne pour l’offertoire est le même que le 30 novembre.

Voici la collecte avant l’anaphore : « Sanctifiez, Seigneur, l’oblation de votre peuple, qui aujourd’hui vous est présentée appuyée par l’intercession des Princes des Apôtres ; par les mérites d’un tel Sacrifice, délivrez-nous des souillures de nos péchés ».

L’antienne pour la Communion est empruntée à la lecture évangélique de ce jour (Ioan., XXI, 15-17). « Simon, fils de Jonas, m’aimes-tu plus que ceux-ci ? Seigneur, vous savez tout, et vous savez bien que je vous aime ».

A ceux qui se trouvent aux plus hauts degrés de la hiérarchie, revêtus de l’honneur pastoral, une vertu commune ne suffit point. La charge épiscopale est si lourde qu’elle exige une immolation continuelle de soi-même. C’est ce qui faisait dire à saint Paul : Quotidie morior [4]. Pour qu’il puisse remplir dignement une fonction comportant une si haute dignité et tant de responsabilité, le Christ exige de Pierre un amour éminent : plus his [5]. C’est donc avec raison que saint Bernard disait qu’il est monstrueux d’être le premier quant au rang et à la situation et de ne pas être aussi le premier en vertu.

La prière d’action de grâces est la suivante : « Par l’intercession des Princes des Apôtres, délivrez, Seigneur, de tous les périls ceux que vous avez aujourd’hui rendus participants de l’aliment céleste ».

Selon l’Ordo du chanoine Benoît, aujourd’hui, dans l’après-midi, le Pape et toute sa cour se rendaient à Saint-Pierre où l’on célébrait les Vêpres. Elles étaient suivies de l’habituelle compotatio, et le Pape offrait de sa main une coupe de vin à tout le haut clergé qui avait pris part à la cérémonie. Le repas était préparé dans un local appelé domus aguliæ, où le Pontife et les cardinaux se retiraient pour le repos nocturne.

A minuit on donnait le signal de l’office vigilial. Le cortège des évêques et des clercs déniait le long de l’atrium ou paradisus du temple éclairé par quelques rares flambeaux. Le Pontife, qui était précédé de quatre domestiques portant des torches allumées, s’arrêtait d’abord devant la tombe de saint Léon le Grand pour l’encenser, puis il allait rendre le même hommage à celle de saint Grégoire le Grand, et aux autels alors très vénérés de saint Sébastien, de saint Tiburce, de la Veronica et de saint Pasteur. De là, la procession descendait à la crypte sépulcrale de l’Apôtre, on encensait sa tombe et on commençait enfin l’office de la vigile.

On sait qu’à Rome, aux jours de fête, il y avait deux offices de matines. A Saint-Pierre, le premier était chanté dans la crypte de l’Apôtre, et le second près de l’autel dans la basilique supérieure.

Après les trois premiers psaumes venaient neuf lectures séparées par des répons ; les chanoines chantaient les trois premières, tirées des Actes des Apôtres ; les indices chantaient la quatrième et la cinquième : de sermonibus apostolorum Petri et Pauli ; un évêque, la sixième ; un des cardinaux la septième ; le prior basilicarius, la huitième, et enfin le Pape lui-même chantait la neuvième leçon, avec l’homélie sur l’Évangile. Quand, avant de commencer la lecture, le Pontife chantait, selon la coutume : Iube, domne, benedicere [6], aucun des assistants n’osait acquiescer. Le chanoine Benoît dit à ce sujet : Nullus benedicit eum, nisi Spiritus Sanctus [7]. Aussi toute l’assemblée répondait-elle : Amen.

Pour le service choral prêté en cette nuit, les cardinaux et le Pape recevaient l’habituel presbyterium provenant des aumônes déposées par le peuple sur l’autel de saint Pierre. Au Pontife revenaient vingt sous de Pavie ; aux cardinaux, aux diacres et aux chantres, cinq ; à l’archidiacre, à la charge duquel était la paye des solistes qui exécutaient les répons, on donnait dix-huit sous, un peu moins donc qu’au Pape. Cette vieille tradition romaine s’est conservée en partie, puisque maintenant encore, chaque fois que le Pontife célèbre à Saint-Pierre la messe solennelle, l’archiprêtre de la basilique lui offre une bourse avec quelques « Jules » correspondant à environ 20 francs de notre monnaie : pro missa bene cantata.

Après les lectures, le primicier des chantres entonnait le Te Deum suivi de la collecte et de la bénédiction du Pontife, et ainsi se terminait le premier office vigilial.

Le clergé étant remonté dans la basilique supérieure, on encensait l’autel de la Confession, et le Pape entonnait le verset : Domine, labia mea aperies [8], suivi de l’invitatoire et des psaumes habituels des matines festives. Les laudes se chantaient dès l’apparition de l’aurore, et aussitôt après l’on célébrait la messe durant laquelle, après la première lecture, avaient lieu les traditionnelles acclamations ou laudes en l’honneur du Pape : Exaudi, Christe. Summo et egregio et ter beatissimo papæ N. vita. — Salvator mundi. R/. Tu illum adiuva. — Sancta Maria. R/. Tu illum adiuva etc. [9]Après le divin Sacrifice, le Pape, en signe de fête et de triomphe, était couronné de la tiare : debet... coronari in tanta festivitate, cuius vicarius est [10].

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

Une veillée nocturne au tombeau de Saint Pierre.

1. Vigile d’Apôtres. — Transportons-nous aujourd’hui encore dans l’ancienne Église. La chrétienté de Rome se réunit le soir autour du tombeau de saint Pierre pour y passer la nuit entière. Elle a amené aussi ses malades, qui trouveront peut-être la guérison au tombeau de l’Apôtre. Le service religieux commence. La communauté évoque d’abord le saint. Il lui semble voir sortir de la tombe le porte-clefs de l’Église ; elle le voit comme disciple et Apôtre du Christ ; elle le voit marcher sur les flots et, quand il enfonce, saisir la main de son Maître ; elle le voit dans la nuit de la Passion : « Il pleura amèrement » ; elle le voit devant le Ressuscité : « M’aimes-tu plus que ceux-ci ? » Elle le voit chef de la jeune Église, arrêté et emprisonné par Hérode. Elle écoute ses lettres pastorales, ses paroles sur le « sacerdoce royal » des fidèles. Elle s’intéresse au récit de son martyre douloureux. Ces images encadrent les psaumes et les hymnes que chante l’Église romaine.

Vers le matin, « le Verbe devient chair » dans les saints mystères. On célèbre la messe, et la grâce de la Rédemption est versée par les mains de Pierre dans les cœurs des fidèles. Célébrons cette vigile dans l’esprit de l’ancienne Église.

2. La messe (Dicit Dóminus). — Cette messe semble plus ancienne que celle de la fête. Le thème principal est la prédiction du Seigneur annonçant à Pierre qu’il mourrait sur la croix. Ce thème retentit déjà dans l’Introït. Le psaume directeur est le psaume 18 qui, depuis l’antiquité, est appelé « Apóstolus », et fait allusion à la prédication apostolique.

La leçon nous raconte la guérison du paralytique par saint Pierre (c’est la leçon du premier nocturne de la fête). L’Apôtre est le chef de l’Église, et l’Église nous dit aujourd’hui et chaque jour : « Au nom de Jésus-Christ, lève-toi et marche ».

L’Évangile nous transporte sur les bords du lac de Génésareth. Là, le Seigneur ressuscité et glorifié prend avec ses disciples un mystérieux repas ; il fait de Pierre le pasteur de son Église et il lui annonce en même temps son martyre : « Par ces paroles, il indiquait par quelle mort il glorifierait Dieu ». Nous aussi nous devons être aujourd’hui Pierre.

A la Communion, le Seigneur demande à chacun de nous : « M’aimes-tu plus que ceux-ci ? » Répondons : « Tu sais tout, tu sais aussi que je t’aime ».

[1] A la vigile de saint Paul. Lecture de l’Épître du bienheureux apôtre Paul aux Galates : Mes frères, l’Évangile que j’ai annoncé… jusqu’à… que je ne mens pas

[2] Au natale de saint Paul. Lecture du livre des Actes des Apôtres : En ces jours-là, Saul, cependant, ne respirant encore que menaces et carnage contre les disciples… jusqu’à… qu’il est le Christ

[3] Seigneur, où vas-tu ? Je vais à Rome pour être crucifié de nouveau.

[4] 1Cor 15:31 : je meurs chaque jour.

[5] Plus que ceux-ci.

[6] Père, veuillez me bénir.

[7] Personne ne le bénit, si ce n’est le Saint-Esprit.

[8] Seigneur, ouvrez mes lèvres.

[9] Exaucez, ô Christ. Au très grand, magnifique et trois fois bienheureux pape N. vie ! — Sauveur du monde. R/. Aidez-le. — Sainte Marie. R/. Aidez-le.

[10] Il doit... être couronné en la si grande fête de celui dont il est le vicaire.