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22/08 Octave de l’Assomption

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Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  

On trouvera les commentaires liturgiques de la messe et de l’Office du jour de l’Assomption (15 août) ici

Si l’Octave de l’Assomption ne disparut qu’en 1955, son jour Octave, le 22 août fut paradoxalement occulté en 1944 par la création d’une nouvelle fête, celle du Cœur Immaculée de Marie assortie de rubriques extravagantes. Si la fête du Cœur Immaculé était empêchée par une fête de rang supérieur, elle n’était pas commémorée, comme elle aurait dû selon les rubriques, mais on commémorait alors le jour Octave disparu…

De plus, l’Office du Cœur Immaculé, bien que placé au jour Octave, emprunte tout (sauf les leçons des 2nd et 3ème Nocturnes) au Commun des fêtes de la Sainte Vierge, alors qu’il aurait pu, ce qui semblait être la plus simple logique liturgique, emprunter le propre de l’office de l’Assomption.

Une fois n’est pas coutume, nous devons ici admettre la logique du calendrier réformé® qui déplacé la fête de Marie-Reine, créée en 1955 et placée alors au 31 mai, au 22 août.

« L’octave de l’Assomption de sainte Marie fut instituée par le pape Léon IV (847-855), qui la fit célébrer par une solennelle veillée nocturne dans une basilique dédiée à Marie iuxta basilicam sancti Laurentii. A cette vigile magna populi multitude convenerat, novae festivitatis cupiens celebrare sollemnitatem [1]. Mais à Rome cette octave dût rester longtemps localisée sur la via Tiburtina, car elle n’est attestée par aucun document liturgique avant les calendriers du Latran et du Vatican et l’Ordo lateranensis de la seconde moitié du XIIe siècle. En France, sa diffusion a commencé un siècle plus tôt. Il semble donc qu’il faille rattacher la présence de l’octave mariale dans les calendriers du Latran et du Vatican non à son institution par Léon IV, mais à l’influence grandissante du culte de Marie au XIIe siècle » [2].

Textes de la Messe

Avant l’institution de la fête du Cœur Immaculé en 1944 : messe comme à l’Assomption. Après 1944, Messe du Cœur Immaculé.

Office

Depuis 1944, avec l’introduction de la fête du Cœur Immaculé, on ne fait plus rien de l’Office de l’Octave de l’Assomption, sauf si la fête du Cœur Immaculé est empêchée, auquel cas on commémore le jour Octave de l’Assomption.

Leçons des Matines avant 1944.

Au premier nocturne.

Du Cantique des cantiques. Cap. 8, 5-14.

Première leçon. Quelle est celle-ci qui monte du désert, comblée de délices, appuyée sur son bien-aimé [3] ? Sous le pommier, je t’ai réveillée ; là a été corrompue ta mère, celle qui t’a donné le jour [4]. Mets-moi comme un sceau sur ton cœur, comme un sceau sur ton bras ; parce que l’amour est fort comme la mort ; le zèle de l’amour, inflexible comme l’enfer ; ses lampes sont des lampes de feu et de flammes [5].

Deuxième leçon. De grandes eaux n’ont pu éteindre la charité, des fleuves ne la submergeront pas ; quand un homme aurait donné toutes les richesses de sa maison pour l’amour, il les mépriserait comme un rien. Notre sœur est petite, elle n’a pas de mamelles : que ferons-nous à notre sœur au jour où il faudra lui parler [6] ? Si c’est un mur, bâtissons des forts d’argent ; si c’est une porte, appliquons dessus des ais de cèdres [7].

Troisième leçon. Je suis un mur et mes mamelles sont comme une tour, depuis que j’ai paru devant lui, comme ayant trouvé en lui la paix [8]. Le pacifique a eu une vigne dans celle où il y a des peuples ; il l’a donnée à des gardiens [9] ; chacun apporte pour son fruit mille pièces d’argent. Ma vigne est devant moi. Les mille sont pour toi, pacifique, et deux cents pour ceux qui en gardent les fruits [10]. O toi qui habites dans les jardins, des amis écoutent : fais-moi entendre ta voix [11]. Fuis, mon bien-aimé, et sois semblable au chevreuil et au faon des biches sur les montagnes des aromates.

Au deuxième nocturne.

Sermon de saint Bernard, Abbé. Sermo 4 de Assumpt. B.M.V. circa medium

Quatrième leçon. Rien ne me charme, mais aussi rien ne m’effraie plus, que de parler des gloires de la Vierge Marie. Si je loue sa virginité, beaucoup de vierges se présentent à mon souvenir. Si je célèbre son humilité, il s’en trouve au moins quelques-uns qui, à l’école de son Fils, sont devenus doux et humbles de cœur. Si je veux exalter sa grande miséricorde, il y a eu des hommes et aussi des femmes qui ont exercé la miséricorde. Mais il est un point où Marie n’a eu, ni devancière ni imitatrice, c’est qu’elle a tout ensemble, et les joies de la maternité et l’honneur de la virginité. C’est là le privilège de Marie, il ne sera pas donné à une autre ; il est unique et par cela même il est ineffable.

Cinquième leçon. Néanmoins, elle n’a pas que cela de particulier. A bien considérer toutes ses vertus, on trouve que celles-là même qui semblent lui être communes avec d’autres, lui sont spécialement propres. Quelle pureté, fût-ce la pureté des Anges, osera-t-on mettre en parallèle avec celle qui a rendu Marie digne de devenir le sanctuaire du Saint-Esprit, et la demeure du Fils de Dieu ? Et quelle admirable et précieuse humilité, jointe à une si grande pureté, à une parfaite innocence, à une conscience exempte de toute ombre de faute, et, pour mieux dire, à une si merveilleuse plénitude de grâce ! D’où vous vient cette humilité et cette humilité si grande, ô Vierge bienheureuse ? Elle était digne assurément des regards du Seigneur, c’est de sa beauté que le Roi a été épris [12], c’est son parfum très suave qui, attirant le Fils de Dieu, l’a fait sortir de l’éternel repos qu’il goûte dans le sein de son Père.

Sixième leçon. Nous vous avons accompagnée de tous les vœux possibles, quand vous montiez vers votre Fils, et nous vous avons suivie du moins à distance, ô Vierge bénie ! Que votre bonté fasse connaître au monde la grâce que vous avez trouvée auprès de Dieu : obtenez par vos saintes prières le pardon aux coupables, la guérison aux malades, la force aux âmes faibles, la consolation aux affligés, le secours et la délivrance à ceux qui sont en péril. O Marie, reine de clémence, qu’en ce jour de solennité et d’allégresse vos humbles serviteurs qui louent et invoquent votre très doux nom, soient comblés des dons de la grâce par Jésus-Christ votre Fils, notre Seigneur, qui est le Dieu souverain, béni dans tous les siècles. Amen.

Au troisième nocturne.

Lecture du saint Évangile selon saint Luc. Cap. 10, 38-42.
En ce temps-là : Jésus entra dans un village, et une femme, nommée Marthe, le reçut dans sa maison. Et le reste.

Homélie de saint Bernard, Abbé. Sermo 2 de Assumptione B.M.V.

Septième leçon. Pourquoi disons-nous qu’il entra dans un village ? Il est même entré dans l’étroite hôtellerie que lui offrait le sein d’une vierge. « Une femme le reçut dans sa maison ». Heureuse femme, dont la maison, en recevant le Seigneur, fut trouvée pure mais certes non point vide ! En effet, qui pourrait appeler vide la demeure qu’un Ange salue comme « pleine de grâce [13] ? » Non seulement il la nomme ainsi ; mais il affirme que l’Esprit-Saint va survenir en elle, et pourquoi, si ce n’est pour la remplir avec surabondance ? Pourquoi, si ce n’est afin que, déjà remplie pour elle-même du Saint-Esprit, cet Esprit survenant en elle, il surajoute à sa plénitude et la fasse déborder ?

Huitième leçon. Que le Sauveur entre donc dans la maison, qu’il visite souvent la demeure purifiée par la pénitence de Lazare, ornée par les soins de Marthe et remplie de délices par la contemplation intérieure de Marie. Mais la curiosité portera peut-être quelqu’un à demander pourquoi l’Évangile ne fait ici aucune mention de Lazare ; je pense que ce n’est pas sans une raison qui a du rapport avec ce que j’ai dit plus haut. L’Esprit-Saint voulant désigner une habitation virginale devait ne point parler de pénitence, puisque la pénitence suppose le péché commis. Or, à Dieu ne plaise qu’on dise que cette maison-là ait eu quelque souillure, et que l’on y cherche en conséquence le travail purificateur de Lazare [14].

Neuvième leçon. Mémoire des Sts Timothée, Hippolyte et Symphorien.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

Celui-là seul qui comprendrait la sainteté de Marie pourrait apprécier sa gloire. Mais la Sagesse, qui présida au creusement des abîmes [15], ne nous a point révélé la profondeur de cet océan, près duquel les vertus des justes et toutes les grâces qui leur furent prodiguées ne sont que ruisseaux. Toutefois l’immensité de grâce et de mérite qui constitue à part de toutes autres la perfection surnaturelle de la Vierge bénie, nous met en droit de conclure pour elle à une égale suréminence dans cette gloire qui n’est que la consécration de la sainteté des élus.

Tandis que les autres prédestinés de notre race s’échelonnent aux divers rangs des célestes hiérarchies, la sainte Mère de Dieu s’élève par delà tous les chœurs bienheureux [16], formant à elle seule un ordre distinct, un ciel nouveau, où les harmonies angéliques et humaines sont dépassées. En Marie, Dieu est glorifié davantage, mieux connu, plus aimé que dans tout le reste de l’univers.

A ce seul titre, selon l’ordre de la Providence créatrice qui au plus parfait subordonne le moindre, Marie devait être la souveraine de la terre et des cieux.

Dans ce sens, c’est pour elle, après l’Homme-Dieu, qu’existe le monde. Le grand théologien et cardinal de Lugo, expliquant ici les paroles des saints, ose bien dire : « De même que Dieu, créant tout dans sa complaisance pour son Christ, a fait de lui la fin des créatures ; de même avec proportion peut-on dire qu’il a tiré du néant le reste du monde par amour pour la Vierge Mère, faisant qu’elle soit appelée justement elle aussi, en cette manière, fin de toutes choses » [17].

Comme Mère de Dieu, et à la fois comme sa première-née [18], elle avait titre et droit sur ses biens ; comme Épouse, elle devait partager sa couronne. « La Vierge glorieuse compte autant de sujets que la Trinité, dit saint Bernardin de Sienne. Toute créature, quel que soit son rang dans la création, spirituelle comme les Anges, raisonnable comme l’homme, matérielle comme les corps célestes ou les éléments, le ciel, la terre, les réprouvés, les bienheureux, tout ce qui relève de la puissance de Dieu est soumis à la Vierge. Car celui qui est Fils de Dieu et de la Vierge bénie, voulant, pour ainsi dire, égaler en quelque sorte à la principauté du Père la principauté de sa Mère, s’est fait, lui Dieu, serviteur de Marie. Si donc il est vrai de dire que tout, même la Vierge, obéit à Dieu ; on peut aussi renverser la proposition, et affirmer que tout, même Dieu, obéit à la Vierge » [19].

L’empire de l’éternelle Sagesse, comprenant, nous dit l’Esprit-Saint, les cieux, la terre et l’abîme [20], tel est donc l’apanage de Marie en ce jour de son couronnement. Comme cette Sagesse divine sortie d’elle en la chair, elle peut se glorifier en Dieu [21]. Celui dont elle chanta autrefois la magnificence, exalte aujourd’hui son humilité [22]. La Bienheureuse par excellence [23] est devenue l’honneur de son peuple, l’admiration des Saints, la gloire des armées du Très-Haut [24]. En sa beauté, avec l’Époux, qu’elle marche à la victoire [25] qu’elle triomphe du cœur des puissants et des humbles [26]. La remise en ses mains du sceptre du monde n’est point un honneur vide de réalité : à dater de ce jour, elle commande et combat, protège l’Église, garde son chef, maintient les rangs de la milice sacrée, suscite les saints, dirige les apôtres, illumine les docteurs, extermine l’hérésie, refoule l’enfer.

Saluons notre Reine ; chantons ses hauts faits ; soyons-lui dociles ; avant tout, aimons-la et confions-nous à son amour. Ne craignons point qu’au milieu des grands intérêts de l’extension du règne de Dieu, elle oublie notre petitesse ou nos misères. Rien ne lui échappe de ce qui se passe aux plus obscurs réduits, aux plus lointaines limites de son domaine immense. De son titre, en effet, de cause universelle au-dessous du Seigneur, se déduit à bon droit l’universalité de sa providence ; et les maîtres de la doctrine [27] nous montrent Marie associée dans la gloire à cette science dite de vision, par laquelle tout ce qui est, a été ou sera, demeure présent devant Dieu. Croyons bien, d’autre part, que sa charité non plus ne saurait être boiteuse : comme son amour pour Dieu passe l’amour de tous les élus, la tendresse de toutes les mères réunie sur la tête d’un enfant unique n’égale pas celle dont la divine Mère entoure le moindre, le plus oublié, le plus délaissé des enfants de Dieu, qui sont aussi ses fils. Elle les prévient de sa sollicitude, écoute en tout temps leurs humbles prières, les poursuit dans leurs fuites coupables, soutient leur faiblesse, compatit à leurs maux du corps et de l’âme, répand sur tous les faveurs d’en haut dont elle est la céleste trésorière. Disons-lui donc par la bouche d’un de ses grands serviteurs : « O très sainte Mère de Dieu qui avez embelli la terre et le ciel, en quittant ce monde vous n’avez point abandonné les hommes. Ici-bas, vous viviez dans le ciel ; du ciel, vous conversez avec nous. Trois fois heureux, ceux qui vous contemplèrent et qui vécurent avec la Mère de la vie ! Mais en la manière que vous habitiez dans la chair avec les hommes du premier âge, vous demeurez avec nous spirituellement. Nous entendons votre voix ; la voix de tous arrive à votre oreille ; et l’incessante protection dont vous nous entourez manifeste votre présence. Vous nous visitez ; votre œil est sur tous ; et bien que nos yeux ne puissent vous apercevoir, ô très sainte, vous êtes au milieu de nous, vous montrant vous-même en diverses manières à qui en est digne. Votre chair immaculée, sortie du tombeau, n’arrête point la puissance immatérielle, l’activité très pure de cet esprit qui est le vôtre, qui, inséparable de l’Esprit-Saint, souffle aussi où il veut [28]. O Mère de Dieu, recevez l’hommage reconnaissant de notre allégresse, et parlez pour vos fils à Celui qui vous a glorifiée : quoi que ce soit que vous lui demandiez, il l’accomplit par sa vertu divine ; qu’il soit béni dans les siècles ! » [29]

L’inépuisable Adam de Saint-Victor nous donne sur la divine Mère en son Assomption cette nouvelle Séquence, qui se chantait à Saint-Victor pour l’Octave.

SÉQUENCE.
Gratulemur in hac die
In qua sanctæ fit Mariæ
Celebris Assumptio ;
Dies ista, dies grata,
Qua de terris est translata
In cœlum cum gaudio.
Réjouissons-nous en ce jour
de l’auguste Assomption
de Marie la très sainte ;
ce jour est un jour béni,
qui la voit passer de la terre
au ciel en allégresse.
Super choros exaltata
Angelorum, est prælata
Cunctis cœli civibus.
In decore contemplatur
Natum suum, et precatur
Pro cunctis fidelibus.
Élevée au-dessus des chœurs des Anges,
elle est donnée pour Reine
aux habitants des cieux.
Elle contemple son Fils
dans sa gloire, elle le prie
pour tous les fidèles.
Expurgemus nostras sordes
Ut illius, mundicordes,
Assistamus laudibus ;
Si concordent linguis mentes,
Aures ejus intendentes
Erunt nostris vocibus.
Dégageons-nous de nos souillures,
afin que, purs de cœur,
nous prenions part à ses louanges ;
si l’âme en nous
concorde avec les chants,
son oreille écoutera nos voix.
Nunc concordes hanc laudemus
Et in laude proclamemus :
Ave, plena gratia !
Ave, virgo mater Christi,
Quæ de Sancti concepisti
Spiritus præsentia !
Célébrons-la dans cet accord,
et disons haut à sa louange :
Pleine de grâce, salut !
Salut, Vierge Mère du Christ,
qui conçûtes à la seule
présence de l’Esprit-Saint !
Virgo sancta, Virgo munda,
Tibi nostræ sit jocunda
Vocis modulatio.
Nobis opem fer desursum,
Et, post hujus vitæ cursum,
Tuo junge Filio.
O Vierge sainte, ô Vierge pure,
ayez nos chants
pour agréables ;
d’en haut secourez-nous,
et, cette vie parcourue,
réunissez-nous à votre Fils.
Tu a sæclis præelecta,
Litterali diu tecta
Fuisti sub cortice ;
De te, Christum genitura,
Prædixerunt in Scriptura
Prophetæ, sed typice.
Élue dès l’éternité avant tous,
longtemps vous fûtes cachée
sous l’écorce de la lettre ;
dans les saints Livres,
comme future mère du Christ,
les Prophètes vous annoncèrent, mais en figures.
Sacramentum patefactum
Est, dum Verbum, caro factum,
Ex te nasci voluit,
Quod nos sua pietate
A Maligni potestate
Potenter eripuit.
Le mystère fut dévoilé,
quand le Verbe fait chair
voulut naître de vous :
par son amour,
dans sa puissance,
il nous délivra de l’empire du mauvais.
Te per thronun Salomonis,
Te per vellus Gedeonis
Præsignatam credimus
Et per rubum incombustum,
Testamentum si vetustum
Mystice perpendimus.
Si nous pesons le sens
mystique du vieux Testament,
le trône de Salomon,
la toison de Gédéon,
le buisson ardent
vous présagent pour notre foi.
Super vellus ros descendens
Et in rubo flamma splendens,
(Neutrum tamen læditur,)
Fuit Christus carnem sumens,
In te tamen non consumens
Pudorem,dum gignitur.
Sur la toison la rosée descendue,
dans le buisson la flamme brillante,
sans nul dommage des deux parts,
ce fut le Christ prenant chair
en sauvegardant dans sa naissance
votre virginité.
De te virga processurum
Florem mundo profuturum
Isaias cecinit,
Flore Christum præfigurans
Cujus virtus semper durans
Nec cœpit, nec desinit.
Ce fut vous que chanta
Isaïe dans la tige d’où devait sortir
la fleur précieuse pour le monde :
la fleur, c’était le Christ
dont l’éternelle vertu est
sans commencement et sans fin.
Fontis vitæ tu cisterna,
Ardens, lucens es lucerna ;
Per te nobis lux superna
Suum fudit radium ;
Ardens igne caritatis,
Luce lucens castitatis,
Lucem summæ claritatis
Mundo gignens Filium.
Vous êtes le réservoir de la source de vie ;
flambeau ardent et luisant,
par vous la lumière d’en haut
nous envoie son rayon :
ardente, vous l’êtes du feu de charité ;
luisante, vous l’êtes de la lumière de chasteté :
le Fils que vous donnez au monde
est l’éclat de la splendeur suprême.
O salutis nostræ porta,
Nos exaudi, nos conforta,
Et a via nos distorta
Revocare propera :
Te vocantes de profundo,
Navigantes in hoc mundo,
Nos ab hoste furibundo
Tua prece libera.
O vous, porte de notre salut,
exaucez-nous, confortez-nous,
faites-nous sortir promptement
des voies tortueuses ;
naviguant sur la mer de ce monde,
nous crions vers vous de l’abîme :
délivrez-nous de l’ennemi
en furie par votre prière.
Jesu, nostrum salutare,
Ob meritum singulare
Tuæ Matris, visitare
In hac valle nos dignare
Tuæ dono gratiæ.
Jésus, notre Sauveur,
par le mérite incomparable
de votre Mère,
daignez nous visiter en cette vallée,
nous donner votre grâce.
Qui neminem vis damnari,
Sic directe conversari
Nos concedas in hoc mari,
Ut post mortem munerari
Digni simus requie.
Amen.
Vous qui ne voulez la condamnation de personne,
accordez-nous de nous comporter
de telle sorte en cette mer,
qu’après la mort nous méritions
votre repos pour récompense.
Amen.

L’Oraison suivante est remarquable parle symbolisme qui l’inspire. On l’emploie pour la bénédiction des herbes médicinales, ou fruits de même sorte, usitée de temps immémorial en divers lieux le jour de l’Assomption.

ORAISON.
Deus, qui virgam Jesse, Genitricem Filii tui Domini nostri Jesu Christi, hodierna die ad cœlorum fastigia ideo evexisti, ut per ejus suffragia et patrocinia fructum ventris illius, eumdem Filium tuum, mortalitati nostræ communicares : te supplices exoramus ; ut ejusdem Filii tui virtute, ejusque Genitricis glorioso patrocinio, istorum terræ fructuum præsidiis per temporalem ad æternam salutem disponamur. Per eundem Dominum nostrum.O Dieu qui en ce jour avez élevé la tige de Jessé, la Mère de votre Fils notre Seigneur Jésus-Christ, au sommet des cieux ; vous vouliez ainsi, par sa protection et ses suffrages, communiquer à notre mortalité ce même Fils, fruit de ses entrailles : nous vous en supplions donc : par la vertu de votre Fils, par la glorieuse protection de sa Mère, faites que le secours espéré de ces fruits de la terre nous dispose par la santé du temps au salut éternel. Par le même Jésus-Christ notre Seigneur.

Mais terminons l’Octave radieuse en laissant la parole à Marie, dans cette belle Antienne que les manuscrits indiquent entre plusieurs autres pour accompagner le Magnificat de la fête. Notre-Dame y apparaît, non pas en son seul nom, mais comme représentant l’Église qui commence avec elle son entrée en corps et en âme dans les cieux. Le bonheur présent de la Vierge bénie est le gage pour tous de l’éternelle félicité qui nous fut promise ; le triomphe de la divine Mère ne sera complet, que lorsque le dernier des siens l’aura suivie dans la gloire. Unissons-nous à cette formule où déborde un amour si suave : elle est vraiment digne d’exprimer les sentiments de Marie franchissant le seuil du séjour divin.

ANTIENNE.
Maria exsultavit in spiritu, et dixit : Benedico te, qui dominaris super omnem benedictionem. Benedico habitaculum gloriæ tuæ, benedico te, cui factum est habitaculum in utero meo ; et benedico omnia opera manuum tuarum, quæ obediunt tibi in omni subjectione. Benedico dilectionem tuam qua nos dilexisti. Benedico omnia verba quæ exierunt de ore tuo, quæ data sunt nobis. In veritate enim credam, quia sicut dixisti sic fiet. Alleluia.Marie tressaillit en esprit, et elle dit : Je vous bénis, vous le Seigneur de toute bénédiction. Je bénis le séjour de votre gloire ; je vous bénis, vous qui fîtes de mon sein votre séjour ; et je bénis toutes les œuvres de vos mains qui vous obéissent et vous sont si pleinement soumises. Je bénis l’amour dont vous nous avez aimés. Je bénis toutes les paroles qui sont sorties de votre bouche, toutes ces paroles qui nous furent données. Car je crois qu’en toute vérité, comme vous avez dit, ainsi sera-t-il. Alléluia.

Bhx cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

L’octave de l’Assomption de la bienheureuse Vierge Marie.
Station à Saint-Laurent.

Cette station fut instituée par saint Léon IV, et le choix de la basilique Tiburtine a été suggéré par le fait que l’église Maior, de Sixte III, contiguë au tombeau de saint Laurent dont, il y a six jours, nous célébrions l’octave, était dédiée à la sainte Vierge.

De plus, c’est aujourd’hui la fête de saint Hippolyte de Porto. Or, comme ce Saint a été confondu avec le saint Hippolyte docteur, vénéré sur la voie Tiburtine, il est probable qu’aujourd’hui, par la station dans la basilica maior de l’Agro Verano, on aura voulu honorer, outre la sainte Vierge, la mémoire d’Hippolyte, enseveli précisément en ce temple et mentionné dans l’épigraphe médiévale du Catalogue des reliques vénérées à Saint-Laurent :

POST • HOS • IPOLITVS • COLLIS • RELIGATVS • EQVORVM
CVM • NVTRICE • SVA • CVM • CVNCTA • PLEBE • SVORVM

La messe est la même que le 15 août, par respect envers saint Grégoire le Grand, dont le Sacramentaire, durant le haut moyen âge, était considéré comme inspiré et intangible, à ce point qu’on n’osait pas composer, pour les y introduire, de nouveaux textes liturgiques.

Pour compenser cette lacune liturgique, et en l’honneur de la Bienheureuse Vierge que, il y a huit jours, nous avons contemplée élevée au ciel où elle nous prépare une place, nous voulons aujourd’hui emprunter au Gélasien la collecte suivante : Oblationes nostras, quaesumus Domine, propitiatus intende ; quas in honore beatae et gloriosae semper virginis Dei Genitricis Mariae annua solemnitate deferimus ; et coaeternus Spiritus Sanctus tuus, qui illius viscera splendore suae gratiae veritatis replevit, nos ab omni facinore delictorum emundet benignus [30].

Marie est le joyau de Dieu. Quand, dans l’Écriture, nous trouvons l’éloge de l’Épouse du Cantique, de la Sagesse sacrée, de l’Église, ces éloges doivent être appliqués d’abord à Marie, parce qu’elle réalise, dans la forme la plus élevée, la sainteté et les perfections attribuées à l’Épouse mystique du Nazaréen, qui est l’Église.

[1] L. Duchesne, Le Liber Pontificalis, tome 2, p. 112.

[2] Cf. Pierre Jounel, Le Culte des Saints dans les Basiliques du Latran et du Vatican au douzième siècle, École Française de Rome, Palais Farnèse, 1977.

[3] Lors de l’Assomption « la nature humaine, dans la personne de Marie, est exaltée par-dessus les esprits immortels. Aussi les princes de la cour céleste, à la vue d’une telle nouveauté, s’écrient-ils avec l’accent de l’admiration : Quelle est celle-ci, et d’où vient une pareille abondance de délices à une âme qui monte du désert ? » (S. Bernard).

[4] Tandis que l’âme sanctifiée s’avance, appuyée sur son bien-aimé, vers le palais de l’éternel amour, l’Époux lui rappelle tout ce dont elle lui est redevable. L’arbre de mort dont le fruit, en répandant son venin dans les veines d’Ève notre mère, avait infecté tous ses enfants (sauf Jésus et Marie), l’arbre dont les feuilles mêmes donnaient une ombre funeste, est devenu l’arbre de vie. Son ombre guérit les nations et son fruit est une manne cachée qui procure l’immortalité. L’arbre est devenu la croix, et le fruit qu’on y cueille, c’est Jésus-Christ. (L’Abbé Le Hir). Marie elle-même doit la vie de la grâce aux mérites du Rédempteur, car c’est en prévision de ses mérites qu’elle a été préservée de toute tache.

[5] Celle qui vient d’être couronnée demande au Sauveur l’achèvement de son œuvre de miséricorde. Elle célèbre son amour, supérieur à tout, semblable à une flamme inextinguible, qui devient plus vive et plus ardente au milieu des eaux mêmes de l’océan, qu’aucune ingratitude, aucune noirceur, aucune perfidie des hommes n’a ralentie ; qui l’a attiré sur notre terre, appauvri, dépouillé de tous ses biens, anéanti dans sa gloire, sa puissance, sa grandeur, et qui lui fait encore envisager tous les sacrifices comme rien. (L’Abbé Le Hir).

[6] Quand il faudra lui parler, c’est-à-dire la demander en mariage.

[7] Que ferons-nous à notre sœur ? On peut dire que par ces paroles, Marie (notre sœur par nature) « recommande à son Époux ceux qui sont encore sur la terre exposés aux tentations du siècle. Le jour viendra pour telle âme, où elle sera mûre pour se prononcer entre une alliance terrestre et l’alliance avec le saint Époux. Alors, dit le bien-aimé, je me souviendrai de la sollicitude avec laquelle cette âme m’a été recommandée. Je veillerai sur son innocence, qui est la virginité spirituelle nécessaire pour l’alliance avec Dieu. C’est ce que signifient les deux comparaisons tirées d’un mur que l’on revêt à son sommet de plaques d’argent, pour empêcher les pluies de le dégrader, et d’une porte que l’on ferme avec du bois de cèdre, pour que sa clôture soit inviolable ». (L’Abbé Le Hir).

[8] Marie paraissant devant l’Époux de son âme peut se comparer à un mur flanqué de tours inaccessibles et inexpugnables ; car elle ne connaîtra plus d’ennemis qui osent l’attaquer et troubler son repos. Son union avec son Époux ne souffrira plus d’interruption. (L’Abbé Le Hir).

[9] Ces gardiens sont les Anges, les Apôtres, les pasteurs des âmes.

[10] Les gardiens reçoivent deux cents pièces d’argent : cent indique la récompense. Celui qui aura quitté sa maison, ou ses frères ou ses sœurs, etc., recevra le centuple. Le gardien de l’Église et des âmes, se conservant immaculé et gagnant ses frères à Dieu, obtient double récompense.

[11] Le vrai pacifique, le mystique Salomon, a donc transplanté sa vigne dans les jardins célestes. Il suspend un moment sa métaphore, et, considérant cette âme béatifiée au milieu des Saints et des Anges qui sont accourus pour prendre part à son exaltation, il lui dit : Ma bien-aimée, vois cette troupe innombrable de mes amis qui t’environnent. Eux et moi, nous unissons nos désirs pour te presser de nous faire entendre ta voix. O mon céleste Époux, répond l’âme ravie, puisque vous m’avez plantée comme une vigne qui jouira toujours de vos regards, puisque vous m’avez arrosée comme un jardin, et élevée comme une montagne de parfums, prenez vos délices dans ce jardin ; promenez-vous dans cette vigne ; répandez-vous au milieu des parfums et dans tous les bosquets odoriférants de cette montagne. Soyez semblable au jeune faon qui se nourrit d’herbes parfumées, et qu’ainsi je sois à vous uniquement pour les siècles des siècles. Amen. (L’Abbé Le Hir).

[12] Ps. 44, 12.

[13] Luc. 1, 28.

[14] Littéralement le balai de Lazare, expression originale qui indique la purification de la demeure spirituelle par la pénitence. Si presque tous les Pères se sont accordes a voir en Madeleine la personnification de la vie contemplative et en Marthe celle de la vie active, il en est qui ont voulu attacher à Lazare aussi un caractère spécial, et puisque la mort est la suite du péché, ils lui ont attribué le rôle de la pénitence qui fait commencer une vie nouvelle. C’est là en quelque sorte placer Madeleine dans la voie unitive, Marthe dans la voie illuminative et Lazare dans la voie purgative. Ils nous encourageaient ainsi montrant tout état d’âme admis à l’intimité du divin Maître.

[15] Prov. VIII, 27.

[16] Verset des Vêpres, Matines et Laudes de l’Assomption.

[17] De Lugo, De Incarnat. Disput. VII, sect. 11.

[18] Eccli. XXIV, 5.

[19] Bernardin. Sen. Sermo V De festivit. V. M. cap. 6.

[20] Eccli. XXIV, 7-11.

[21] Eccli, XXIV, 1.

[22] Luc. I, 46-55.

[23] Ibid. 48.

[24] Eccli. XXIV, 1-4.

[25] Psalm. XLIV, 4-6.

[26] Eccli. XXIV, 11.

[27] Suarez, in IIIam P. qu. XXXVII, art. 4 ; Disput XXI, sect. 3.

[28] Johan. III, 8.

[29] German. Constantinop. In Dormit B. M. Oratio I.

[30] Regardez favorablement, Seigneur, nos offrandes, que nous présentons en la solennité annuelle en l’honneur de la bienheureuse et glorieuse Marie Mère de Dieu et toujours Vierge ; et que votre Saint-Esprit coéternel, qui a rempli son sein de la splendeur de sa grâce de vérité, nous purifie avec bienveillance des taches de tous nos délits.