Textes de la Messe |
Office |
Dom Guéranger, l’Année Liturgique |
Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum |
Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique |
Passion à Séville vers 586.
Tempore paschali : | Au Temps pascal : |
Ant. ad Introitum. Ps. 63, 3. | Introït |
Protexísti me, Deus, a convéntu malignántium, allelúia : a multitúdine operántium iniquitátem, allelúia, allelúia. | Vous m’avez protégé, ô Dieu, contre l’assemblée des méchants, contre la multitude de ceux qui commettent l’iniquité, alléluia, alléluia. |
Ps. Ibid., 2. | |
Exáudi, Deus, oratiónem meam, cum déprecor : a timóre inimíci éripe ánimam meam. | Exaucez, ô Dieu, ma prière lorsque je vous implore ; délivrez mon âme de la crainte de l’ennemi. |
V/. Glória Patri. | |
Oratio. | Collecte |
Deus, qui beátum Hermenegíldum Mártyrem tuum cælésti regno terrénum postpónere docuísti : da, quǽsumus, nobis ; eius exémplo cadúca despícere atque ætérna sectári. Per Dóminum. | Dieu, qui avez appris au bienheureux Herménégilde, votre Martyr, à mettre la royauté terrestre au-dessous de la royauté du ciel, accordez-nous, nous vous en supplions, de mépriser à son exemple les biens périssables, et de rechercher les biens éternels. |
Léctio libri Sapiéntiæ. | Lecture du livre de la Sagesse. |
Sap. 5, 1-5. | |
Stabunt iusti in magna constántia advérsus eos, qui se angustiavérunt et qui abstulérunt labóres eórum. Vidéntes turbabúntur timore horríbili, et mirabúntur in subitatióne insperátæ salútis, dicéntes intra se, poeniténtiam agéntes, et præ angústia spíritus geméntes : Hi sunt, quos habúimus aliquándo in derísum et in similitúdinem impropérii. Nos insensáti vitam illórum æstimabámus insániam, et finem illórum sine honóre : ecce, quómodo computáti sunt inter fílios Dei, et inter Sanctos sors illórum est. | Les justes se lèveront avec une grande assurance contre ceux qui les auront mis dans l’angoisse, et qui auront ravi le fruit de leurs travaux. A cette vue les méchants seront troublés par une horrible frayeur, et ils seront stupéfaits en voyant tout à coup ceux dont ils n’attendaient pas le salut ; ils diront en eux-mêmes, saisis de remords, et gémissant dans l’angoisse de leur cœur : Voici ceux dont nous avons fait autrefois un objet de risée, et un thème d’outrages. Insensés que nous étions, nous regardions leur vie comme une folie, et leur mort comme une honte ; et voilà qu’ils sont comptés parmi les fils de Dieu, et que leur partage est avec les saints. |
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 88, 6. Confitebúntur cæli mirabília tua, Dómine : étenim veritátem tuam in ecclésia sanctórum. | Allelúia, allelúia. V/. Les cieux publieront vos merveilles, Seigneur, et votre vérité dans l’assemblée des saints. |
Allelúia. V/. Ps. 20, 4. Posuísti, Dómine, super caput eius corónam de lápide pretióso. Allelúia. | Allelúia. V/. Vous avez mis sur sa tête, Seigneur, une couronne de pierres précieuses. Alléluia. |
+ Sequéntia sancti Evangélii secúndum Lucam. | Lecture du Saint Evangile selon saint Luc. |
Luc. 14, 26-33. | |
In illo témpore : Dixit Iesus turbis : Si quis venit ad me, et non odit patrem suum, et matrem, et uxórem, et fílios, et fratres, et soróres, adhuc autem et ánimam suam, non potest meus esse discípulus. Et qui non báiulat crucem suam, et venit post me, non potest meus esse discípulus. Quis enim ex vobis volens turrim ædificáre, non prius sedens cómputat sumptus, qui necessárii sunt, si hábeat ad perficiéndum ; ne, posteáquam posúerit fundaméntum, et non potúerit perfícere, omnes, qui vident, incípiant illúdere ei, dicéntes : Quia hic homo cœpit ædificáre, et non pótuit consummáre ? Aut quis rex iturus commíttere bellum advérsus álium regem, non sedens prius cógitat, si possit cum decem mílibus occúrrere ei, qui cum vigínti mílibus venit ad se ? Alióquin, adhuc illo longe agénte, legatiónem mittens, rogat ea, quæ pacis sunt. Sic ergo omnis ex vobis, qui non renúntiat ómnibus, quæ póssidet, non potest meus esse discípulus. | En ce temps-là, Jésus dit à la foule : Si quelqu’un vient à moi, et ne hait pas son père, et sa mère, et sa femme, et ses enfants, et ses frères, et ses sœurs, et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple. Et celui qui ne porte pas sa croix, et ne me suit pas, ne peut être mon disciple. Car quel est celui de vous qui, voulant bâtir une tour, ne s’assied d’abord, et ne suppute les dépenses qui sont nécessaires, afin de voir s’il aura de quoi l’achever ; de peur qu’après avoir posé les fondements, il ne puisse l’achever, et que tous ceux qui verront cela ne se mettent à se moquer de lui, en disant : Cet homme a commencé à bâtir, et il n’a pu achever ? Ou quel roi, sur le point de faire la guerre à un autre roi, ne s’assied d’abord, afin d’examiner s’il pourra, avec dix mille hommes, marcher contre celui qui s’avance sur lui avec vingt mille ? Autrement, tandis que l’autre roi est encore loin, il lui envoie une ambassade, et lui fait des propositions de paix. Ainsi donc, quiconque d’entre vous ne renonce pas à tout ce qu’il possède ne peut être mon disciple. |
Ant. ad Offertorium. Ps. 88, 6. | Offertoire |
Confitebúntur cæli mirabília tua, Dómine : et veritátem tuam in ecclésia sanctórum, allelúia, allelúia. | Les cieux publieront vos merveilles, Seigneur, et votre vérité dans l’assemblée des saints, alléluia, alléluia. |
Secreta | Secrète |
Munéribus nostris, quǽsumus, Dómine, precibúsque suscéptis : et cæléstibus nos munda mystériis, et cleménter exáudi. Per Dóminum nostrum. | Ayant accueilli nos dons et nos prières, nous vous en supplions, Seigneur, purifiez-nous par ces célestes mystères, et exaucez-nous dans votre clémence. |
Ant. ad Communionem. Ps. 63, 11. | Communion |
Lætábitur iustus in Dómino, et sperábit in eo : et laudabúntur omnes recti corde, allelúia, allelúia. | Le juste se réjouira dans le Seigneur, et espérera en lui ; et tous ceux qui ont le cœur droit se réjouiront, alléluia, alléluia. |
Postcommunio | Postcommunion |
Da, quǽsumus, Dómine, Deus noster : ut, sicut tuórum commemoratióne Sanctórum temporáli gratulámur offício ; ita perpétuo lætámur aspéctu. Per Dóminum nostrum. | Faites, s’il vous plaît, Seigneur notre Dieu, que comme nous nous réjouissons d’honorer dans le temps, en cet office, la mémoire de vos Saints, nous puissions aussi nous réjouir de les voir dans l’éternité. |
Extra tempus paschale : | Hors du Temps pascal : |
Missa In virtúte, de Communi unius Martyris 3 loco, cum oratione et Evangelio ut in Missa præcedenti. | Messe In virtúte, du Commun d’un Martyr 3, avec l’oraison et l’Évangile de la Messe précédente. |
A MATINES. avant 1960
Hymnus | Hymne |
Regáli sólio fortis Ibériæ,
Hermenegílde, iubar, glória Mártyrum, Christi quos amor almis Cæli cœtibus ínserit. | O Herménégilde, lumière ayant illustré
le trône royal de la puissante Ibérie, glorieux entre les Martyrs à qui l’amour du Christ a fait prendre place parmi les saintes phalanges du ciel. |
Ut perstas pátiens, pollícitum Deo
Servans obséquium ! Quo pótius tibi Nil propónis, et arces Cautus nóxia, quæ placent. | Comme tu demeures ferme dans la patience
et dans la fidélité que tu as promise à Dieu ! Tu le préfères à tout ; et plein de prudence, tu sais écarter les plaisirs dangereux. |
Ut motus cóhibes, pábula qui parant
Surgéntis vítii, non dúbios agens Per vestígia gressus, Quo veri via dírigit ! | Comme tu réprimes les passions qui préparent
un aliment à la tentation du vice ! Ce n’est point d’un pas hésitant que tu marches vers le but où conduit la voie de la vérité. |
Sit rerum Dómino iugis honor Patri,
Et natum célebrent ora precántium, Divinúmque suprémis Flamen láudibus éfferant. Amen. | Honneur à jamais au Père,
Maître souverain de toutes choses ; que nos prières célèbrent aussi le Fils, et exaltent par de suprêmes louanges l’Esprit divin. Ainsi soit-il. |
Du Livre des Dialogues de saint Grégoire.
Quatrième leçon. Fils de Léovigilde, roi des Visigoths, le roi Herménégilde, fut converti de l’hérésie arienne à la foi catholique par les prédications du vénérable Léandre, Évêque de Séville, avec lequel je suis lié depuis longtemps d’une étroite amitié. Son père, demeuré arien, s’efforça, et de le gagner par des promesses, et de l’effrayer par des menaces, pour le ramener à l’hérésie. Comme Herménégilde répondait avec une constance inébranlable qu’il ne pourrait jamais quitter la vraie foi après l’avoir connue, son père irrité le priva de ses droits au trône et le dépouilla de tous ses biens. Un traitement si dur n’ayant pu abattre son courage,- Léovigilde le fit jeter dans une étroite prison et charger de fers au cou et aux mains. Le jeune roi commença alors à mépriser les royaumes de la terre, et à rechercher par les plus ardents désirs le royaume du ciel. Couvert d’un ciliée, et gisant à terre accablé par ses liens, il adressait des prières au Dieu tout-puissant, pour qu’il le fortifiât ; et plus il reconnaissait par sa captivité même le néant des biens qui avaient pu lui être ravis, plus il regardait avec dédain la gloire de ce monde qui passe.
Cinquième leçon. La fête de Pâques étant survenue, son perfide père lui envoya durant le silence d’une nuit profonde un Évêque arien, afin qu’il reçût la communion eucharistique de cette main sacrilège, et qu’il rentrât par ce moyen en grâce auprès de son père. Mais Herménégilde, tout dévoué à Dieu, adressa à l’Évêque arien, quand il l’aborda, les reproches qu’il était de son devoir de lui faire, et repoussa avec une juste indignation ses propositions insidieuses ; car, s’il gisait corporellement sous le poids de ses chaînes, intérieurement il se tenait dans une sécurité profonde et conservait toute l’élévation de son âme. Mais quand l’Évêque revint auprès de Léovigilde, ce prince arien frémit de rage et envoya aussitôt ses appariteurs pour tuer dans sa prison le très courageux confesseur de la foi ; ces ordres s’exécutèrent. Dès que les satellites furent entrés, ils lui fendirent la tête d’un coup de hache, mais en lui ôtant ainsi la vie du corps, ils ne purent lui enlever que ce que l’héroïque victime avait constamment méprisé en sa personne. Les miracles ne manquèrent pas pour manifester la véritable gloire dont il jouissait ; dans le silence de la nuit on entendit tout à coup le chant des Psaumes qui retentissait près du corps de ce roi martyr, d’autant plus véritablement roi qu’il avait obtenu la couronne du martyre.
Sixième leçon. Quelques-uns rapportent aussi que des flambeaux allumés parurent la nuit autour de son corps, ce qui porta tous les fidèles à le révérer comme celui d’un Martyr, ainsi qu’ils le devaient. Le père, plein de perfidie et souillé du sang de son fils, se sentit enfin touché de repentir ; il déplora ce qu’il avait fait, mais ce regret n’alla pas jusqu’à lui obtenir le salut. Tout en reconnaissant la vérité de la foi catholique, il fut retenu par la crainte que lui inspirait son peuple, et n’eut pas le courage de se convertir. Une maladie l’ayant réduit à l’extrémité, il recommanda à l’Évêque Léandre, qu’il avait auparavant persécuté avec tant de rigueur, le roi Récarède. son fils, qu’il laissait plongé dans l’hérésie, afin que les exhortations du saint Prélat opérassent en lui l’heureux changement qu’elles avaient produit en son frère. Après avoir fait cette recommandation, Léovigilde mourut. Le roi Récarède, suivant alors, non les traces de son coupable père, mais l’exemple de son frère le Martyr, renonça aux erreurs de l’hérésie arienne, amena à la vraie foi toute la nation des Visigoths, et refusa de recevoir sous ses étendards, dans tout son royaume, ceux qui ne craindraient pas de se constituer les ennemis de Dieu en restant infectés d’hérésie. Il ne faut pas s’étonner que le frère d’un Martyr soit devenu le prédicateur de la vraie foi : les mérites du second aident le premier à ramener un grand nombre d’âmes au sein [de l’Église] du Dieu tout-puissant.
A LAUDES.
Hymnus | Hymne |
Nullis te génitor blandítiis trahit,
Non vitæ cáperis dívitis ótio, Gemmarúmve nitóre, Regnandíve cupídine. | Ton père ne peut te faire dévier par aucune caresse ;
tu ne te laisses captiver ni par les douceurs d’une vie opulente, ni par l’éclat des pierreries, ni par l’ambition du trône. |
Diris non ácies te gládii minis,
Nec terret périmens carníficis furor : Nam mansúra cadúcis Præfers gáudia Cǽlitum. | Le tranchant du glaive dont tu es cruellement menacé
et la fureur du bourreau chargé de te faire mourir n’ont rien qui t’effraie, car tu préfères les joies durables des cieux au bonheur périssable d’ici-bas. |
Nunc nos e Súperum prótege sédibus
Clemens, atque preces, dum cánimus tua Quæsítam nece palmam, Pronis áuribus éxcipe. | Maintenant, du haut du ciel, protège-nous,
sois-nous propice, et tandis que nous chantons la palme obtenue par ta mort, écoute et accueille favorablement nos prières. |
Sit rerum Dómino iugis honor Patri,
Et Natum célebrent ora precántium, Divinúmque suprémis Flamen láudibus éfferant. Amen. | Honneur soit constamment rendu au Père,
souverain Seigneur de toutes choses ; que les bouches des fidèles célèbrent le Fils dans leurs prières, et qu’ils exaltent par de suprêmes louanges l’Esprit vivifiant. Ainsi soit-il. |
Le mystère de la Pâque nous apparaît aujourd’hui à travers les palmes d’un Martyr. Herménégilde , jeune prince visigoth, est immolé par l’ordre d’un père que l’hérésie aveugle ; et la cause de son trépas est la constance avec laquelle il a repoussé la communion pascale qu’un évoque arien voulait le contraindre à recevoir de ses mains. Le martyr savait que la divine Eucharistie est le signe auguste de l’unité catholique, et qu’il n’est pas permis de participer à la chair de notre Agneau pascal avec ceux qui ne sont pas dans la véritable Église. Une consécration sacrilège peut mettre les hérétiques en possession du divin Mystère, si le caractère sacerdotal existe en celui qui a osé franchir la barrière de l’autel du Dieu qu’il blasphème ; mais le catholique qui sait qu’il ne lui est pas même permis de prier avec les hérétiques, tremble à la vue du Mystère profané, et s’éloigne pour ne pas faire outrage au Rédempteur jusque dans le Mystère qu’il n’a établi que pour s’unir à ses fidèles.
Le sang du martyr fut fécond. L’Espagne asservie à l’erreur secoua ses chaînes ; un concile tenu à Tolède consomma la réconciliation que la sainte victime avait commencée. Ce fut un spectacle sublime et rare dans les siècles de voir une nation entière se lever pour abjurer l’hérésie ; mais cette nation a été bénie du ciel. Soumise bientôt à la terrible épreuve de l’invasion sarrasine, elle sut en triompher par ses armes, et sa foi toujours pure depuis lui a mérité le plus beau des titres pour un peuple, celui de Catholique.
Le Pape Urbain VIII a composé les deux Hymnes pour l’Office du saint Martyr.
Courageux témoin de la vérité du Symbole de la foi, Herménégilde, nous vous offrons aujourd’hui nos hommages et nos actions de grâces.
Votre mort courageuse a montré l’amour que vous aviez pour le Christ, et votre mépris des honneurs de la terre nous apprend à les mépriser. Né pour le trône, un cachot est devenu votre séjour ici-bas ; et c’est de là que vous êtes parti pour le ciel, le front ceint des palmes du martyre, couronne mille fois plus éclatante que celle qui vous était offerte pour prix d’une honteuse apostasie. Priez maintenant pour nous ; l’Église, en inscrivant votre nom sur le Cycle sacré, vous y convie en ces jours. La Pâque fut le jour de votre triomphe ; obtenez qu’elle soit pour nous une véritable Pâque, une complète résurrection qui nous conduise sur vos traces jusqu’à l’heureux séjour où vos yeux contemplent Jésus ressuscité. Rendez-nous fermes dans la foi, dociles à l’enseignement de la sainte Église, opposés à toute erreur et à toute nouveauté. Veillez sur l’Espagne votre patrie, qui doit à votre sang versé en témoignage de la vraie foi tant de siècles de pure orthodoxie ; préservez-la de toute défection, afin qu’elle ne cesse jamais de mériter le beau titre qui fait sa gloire.
Voici un martyr du cycle pascal puisqu’il fut massacré dans sa prison par ordre de son père, pour avoir refusé de recevoir des mains d’un évêque arien la sainte Communion à l’occasion de la solennité de Pâques. Tandis qu’il était apocrisiaire à Constantinople, saint Grégoire le Grand apprit du saint évêque Léandre de Séville les détails de ce martyre et, devenu Pontife, il les consigna au troisième livre de ses Dialogues. L’insertion du nom de saint Herménégilde dans le Missel romain ne date cependant que du temps d’Urbain VIII.
La messe est celle du Commun des Martyrs durant le temps pascal ; mais la collecte et l’évangile sont propres.
L’antienne pour le chant d’introït est tirée du psaume 63 : « Vous m’avez mis, Seigneur, à l’abri de la conspiration des méchants, d’une foule d’ouvriers d’iniquité. » Cet abri est la grâce de Dieu, qui rend le juste supérieur à l’épreuve, et finalement le couronne dans l’éternité. Le persécuteur vise à l’âme du martyr et sévit contre lui ; mais Dieu appelle l’âme au ciel, et il ne demeure entre les mains du tyran qu’un cadavre glacé, contre lequel le persécuteur déchargerait désormais vainement sa colère.
La première lecture est tirée du livre de la Sagesse (V, 1-5) : Les justes se tiennent intrépides devant les tyrans, parce que la crainte de Dieu les réconforte, en sorte qu’ils ne craignent pas les hommes. Mais dans le monde d’outre-tombe la scène changera et les rôles seront intervertis ; c’est pourquoi, tandis que les persécutés d’hier triompheront avec Jésus, le grand proscrit de la vie, les impies reconnaîtront, mais trop tard, leur folie et confesseront s’être trompés.
Le chant alléluiatique, au temps pascal, est composé d’un double verset psalmodique, avec quatre alléluia intercalés. Cependant à l’origine c’était deux psaumes distincts qui suivaient les deux lectures scripturaires précédant le saint Évangile.
« Alléluia, alléluia. » Ps. 88. « Les cieux révèlent vos merveilles, Seigneur, et l’assemblée des justes votre fidélité. » — Ici, les cieux désignent l’Église triomphante, où la vision béatifique est un bien si grand que nul esprit humain ne le pourrait ici-bas concevoir. Quant à l’assemblée des justes, elle désigne l’Église militante, qui jouit par anticipation, grâce à l’espérance, de la possession future de Dieu. Le fondement de cette espérance, c’est la fidélité du Seigneur, parce que comme l’écrit l’Apôtre : Spes autem non confondit. — « Alléluia. » Ps. 20 : « Vous, Seigneur, vous avez posé sur sa tête une couronne d’or fin. » Dieu lui-même sur la terre est, par sa grâce, le bouclier des justes, et au ciel il est la couronne des bienheureux.
L’évangile est celui de la messe Statuit : Si quis venit, comme le 24 janvier, justement pour mettre en relief les circonstances spéciales du martyre d’Herménégilde qui, pour défendre la foi catholique, n’hésita pas à prendre les armes contre son propre père qui était arien. Finalement il succomba, victime de la perfidie de son père ; mais, monté au ciel, il lui obtint de se convertir au moment de sa mort, et, avec le salut de l’âme du vieux roi. Dieu lui accorda aussi le retour de toute la nation visigothe à la foi catholique.
Si cette fête tombe en Carême, sauf la première collecte et l’évangile tout se prend de la messe In virtute.
Si l’on juge héroïque l’acte du moine qui abandonne ses parents et sa famille et court se réfugier dans la paix du cloître, que devra-t-on dire de la vertu de ce jeune prince qui, pour défendre la foi de Nicée et son peuple tyrannisé, va jusqu’à prendre les armes contre son père hérétique ? La charité de Dieu devait vraiment être parfaite dans son cœur, puisqu’elle lui fit mépriser jusqu’aux sentiments les plus doux de la nature, par zèle pour l’honneur dû à la divinité du Sauveur.
Un martyr de la communion pascale.
Saint Herménégilde. — Jour de mort : 13 avril 585. Tombeau : à Séville ; son chef est à Saragosse. Image : On le représente avec la couronne royale et une hache (l’instrument de son supplice). Vie : Le fils du roi, saint Herménégilde, fut par sa mort sanglante « le grain de froment qui est tombé en terre et mourut. (Jean, XII, 24 sq.). « Il ne resta pas seul, mais porta des fruits nombreux : la conversion de tout un peuple. « Dans le royaume des Wisigoths, un homme mourut afin que plusieurs vivent et, comme un grain de blé était tombé dans la foi, il leva une riche moisson d’âmes pour obtenir la vie » (saint Grégoire le Grand). Saint Grégoire nous donne, au bréviaire, une biographie magistrale de notre saint : Le roi Herménégilde, fils du roi Wisigoth Léovigilde, avait été converti de l’erreur arienne à la foi catholique par les prédications du vénérable évêque Léandre (27 février, à Rome, Mart.) avec lequel je suis uni depuis longtemps par une amitié intime. Son père qui était toujours arien essaya, d’abord par de brillantes promesses, ensuite par des menaces, de le faire apostasier. Mais son fils déclara qu’il n’abandonnerait jamais la véritable foi maintenant qu’il la connaissait. Irrité au plus haut point, son père le déshérita et le déclara privé des droits de la succession au trône. Voyant que sa fermeté n’était pas ébranlée, il le fit jeter en prison, le cou et les mains chargés de lourdes chaînes. Alors, le jeune fils de roi commença à mépriser le royaume terrestre pour rechercher avec ardeur le royaume céleste ; dans les chaînes et l’habit de pénitence, il demanda constamment la force au Dieu tout puissant et apprit d’autant plus à mépriser la gloire du monde périssable qu’il reconnaissait davantage, dans ses fers, le néant de ce qu’on pouvait lui enlever. Quand arriva la fête de Pâques, le père cruel envoya vers minuit un évêque arien à son fils, pour lui offrir sa grâce s’il voulait recevoir la communion consacrée sacrilègement. Mais le saint jeune homme repoussa l’évêque avec horreur et lui reprocha avec une noble hardiesse son attachement à l’hérésie impie. Car bien que son corps fût dans les chaînes, il se tenait, dans une sainte liberté d’esprit, sur les saintes hauteurs de la foi. Le roi, instruit par l’évêque de ce qui s’était passé, devint encore plus furieux et il envoya des bourreaux dans la prison pour mettre son fils à mort sur-le-champ. Ils lui tranchèrent la tête d’un coup de hache. Mais ils ne purent que tuer ce que, depuis longtemps, leur victime estimait de peu de valeur. Immédiatement, il se produisit de nombreux miracles surprenants pour prouver la sainteté du martyr. Aussi tous les fidèles considérèrent comme un devoir sacré de traiter le cadavre avec les plus grands honneurs, comme le corps d’un martyr. Le père meurtrier regretta, il est vrai, son acte, mais son repentir ne fut pas assez parfait pour lui obtenir le salut. Il reconnut la vérité de la religion catholique, mais la crainte de ses sujets ariens l’empêcha d’abandonner ses erreurs. A son lit de mort, il recommanda son fils encore arien, Récarède, au saint évêque Léandre qu’il avait naguère si violemment persécuté ; il le pria de l’instruire dans la foi catholique, comme il l’avait fait avec tant de succès pour le saint martyr. Après cette recommandation, il mourut. Après la mort de Léovigilde, son fils Récarède ne suivit pas les traces de son père hérétique, mais celles de son saint frère. Il quitta l’erreur arienne et détermina aussi tout le peuple des Wisigoths à revenir à la véritable Église. Il interdit le port des armes dans son royaume à tous ceux qui se montreraient les ennemis de Dieu en persistant dans l’hérésie arienne. C’est ainsi que celui dont le frère avait été un martyr devint un prédicateur de la vraie foi. Ce sont sans doute les mérites de ce saint qui ramenèrent tant d’âmes dans le sein du Dieu tout puissant.
La messe (Protexisti). — Dans le temps pascal, la liturgie accorde à un groupe de saints des honneurs plus particuliers qu’aux autres. Ce sont les martyrs, parce qu’ils forment l’escorte du Roi des martyrs qui, par sa mort, a sanctifié tout martyre. Les martyrs doivent avoir une part privilégiée à la victoire que leur Roi a remportée dans sa Passion et sa Résurrection. C’est pourquoi ils ont un commun spécial dans le temps pascal. Les textes de ce commun respirent le parfum des catacombes. A l’Introït (Protexisti), le martyr chante lui-même un cantique d’action de grâces. Les persécutions n’ont fait qu’accroître son triomphe. Le Vendredi-Saint et le Samedi-Saint, nous avons appliqué le psaume 63 à la Passion du Christ, nous l’appliquons maintenant aux souffrances des martyrs. La leçon, elle aussi, est dramatique. Nous jetons un regard dans l’au-delà Nous voyons les persécuteurs debout, maintenant, en face de leurs victimes. Ils sont remplis d’effroi et s’écrient : « Les voilà ceux dont nous nous sommes moqués... Fous que nous étions, nous pensions que leur vie était insensée... Voici qu’ils sont comptés maintenant au nombre des enfants de Dieu ». L’Évangile a été choisi en raison des circonstances du martyre de notre saint. « Celui qui vient à moi et ne hait pas son père et sa mère... et ses frères et même sa propre vie, ne peut pas être mon disciple ». Herménégilde, fils de roi, a réellement haï tout ce qui est terrestre, père, royaume, vie, pour l’amour du Christ. Les chants rendent un son énergique, particulièrement le verset que nous chantons deux fois : « Les cieux attestent les merveilles de Dieu » (comme les martyrs) (All. et Off.).