Accueil - Missel - Sanctoral

15/06 Sts Vite (ou Guy), Modeste et Crescence

Version imprimable de cet article Version imprimable Partager


Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  
  Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique  

Culte local romain au VIIème siècle. Fête au XIIème siècle.

Culte local romain au VIIème siècle. Fête au XIIème siècle.

Saint Vite est un martyr de Lucanie, dont le culte se propagea de bonne heure dans l’Italie méridionale et spécialement en Sicile. C’est là que la légende lui adjoignit deux compagnons, Modeste et Crescent. Le culte de saint Vite est attesté à Rome au 7e siècle par le sacramentaire gélasien. Il avait pour centre l’Esquilin, où une diaconie et un monastère avaient saint Vite pour titulaire [1].

Le Hiéronymien annonce successivement : in Lucania Viti ; in Sicilia Viti, Modesti et Crescentiae. Bède adopte la première mention. Les Gélasiens du 8e et l’évangéliaire romano-franc de 750 font de même. Florus, suivi par Adon et Usuard, opte pour la légende sicilienne. A Rome on trouve saint Vite seul dans l’évangéliaire du 9e siècle et, au 11e siècle, dans les témoins. A la fin du 12e siècle, c’est la légende sicilienne qui prévaut au Latran et au Vatican.

Textes de la Messe

die 15 iunii
le 15 juin
Ss VITI, MODESTI atque CRESCENTIÆ
Sts VITE (GUY), MODESTE et CRESCENCE
Martyrum
Martyrs
Commemoratio (ante CR 1960 : simplex)
Commémoraison (avant 1960 : simple)
Ant. ad Introitum. Ps. 33, 20-21.Introït
Multæ tribulatiónes iustórum, et de his ómnibus liberávit eos Dóminus : Dóminus custódit ómnia ossa eórum : unum ex his non conterétur.Les tribulations des justes sont nombreuses et le Seigneur les délivrera de toutes ces peines. Le Seigneur préserve tous leurs os ; il n’y en aura pas un seul de brisé.
Ps. ib., 2.
Benedícam Dóminum in omni témpore : semper laus eius in ore meo. Je bénirai le Seigneur en tout temps ; toujours sa louange sera dans ma bouche.
V/. Glória Patri.
Oratio.Collecte
Da Ecclésiæ tuæ, quǽsumus, Dómine, sanctis Martýribus tuis Vito, Modésto atque Crescéntia intercedéntibus, supérbe non sápere, sed tibi plácita humilitáte profícere : ut, prava despíciens, quæcúmque recta sunt, libera exérceat caritáte. Per Dóminum. Nous vous en prions, Seigneur, faites que, par l’intercession de vos saints Martyrs Vite, Modeste et Crescence, votre Église, éloignée de tout sentiment d’orgueil, professe l’humilité qui a le don de vous plaire, afin que, méprisant ce qui est mal, elle pratique avec amour et liberté tout ce qui est bien.
Léctio libri Sapiéntiæ.Lecture du livre de la Sagesse.
Sap. 3, 1-8.
Iustorum ánimæ in manu Dei sunt, et non tanget illos torméntum mortis. Visi sunt oculis insipiéntium mori : et æstimála est afflíctio exitus illórum : et quod a nobis est iter, extermínium : illi autem sunt in pace. Et si coram homínibus torménta passi sunt, spes illórum immortalitáte plena est. In paucis vexáti, in multis bene disponéntur : quóniam Deus tentávit eos, et invenit illos dignos se. Tamquam aurum in fornáce probávit illos, et quasi holocáusti hóstiam accépit illos, et in témpore erit respéctus illorum. Fulgébunt iusti, et tamquam scintíllæ in arundinéto discúrrent. Iudicábunt natiónes, et dominabúntur pópulis, et regnábit Dóminus illórum in perpétuum.Les âmes des justes sont dans la main de Dieu, et le tourment de la mort ne les touchera pas. Aux yeux des insensés ils ont paru mourir, et leur sortie de ce monde a été regardée comme une affliction, et leur séparation d’avec nous comme un anéantissement, et cependant ils sont en paix ; et s’ils ont souffert des tourments devant les hommes, leur espérance est pleine d’immortalité. Leur tribulation a été légère, et leur récompense sera grande, car Dieu les a éprouvés, et les a trouvés dignes de lui. Il les a mis à l’épreuve comme l’or dans la fournaise, il les a agréés comme une hostie d’holocauste, et quand leur temps sera venu, il les regardera favorablement. Les justes brilleront, et ils étincelleront comme les feux qui courent à travers les roseaux. Ils jugeront les nations, et ils domineront les peuples, et leur Seigneur régnera éternellement.
Graduale. Ps. 149, 5 et 1.Graduel
Exsultábunt Sancti in glória : lætabúntur in cubílibus suis.Les saints tressailliront dans la gloire ; ils se réjouiront sur leurs couches.
V/. Cantáte Dómino cánticum novum : laus eius in ecclésia sanctórum.V/. Chantez au Seigneur un cantique nouveau : que sa louange retentisse dans l’assemblée des saints.
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 144, 10-11. Sancti tui, Dómine, benedícent te : glóriam regni tui dicent. Allelúia.Allelúia, allelúia. V/. Seigneur, Vos saints vous bénissent : ils diront la gloire de votre règne. Alléluia.
+ Sequéntia sancti Evangélii secúndum Lucam.Suite du Saint Évangile selon saint Luc.
Luc. 10. 16-20
In illo témpore : Dixit Iesus discípulis suis : Qui vos audit, me audit : et qui vos spernit, me spernit. Qui autem me spernit, spernit eum, qui misit me. Revérsi sunt autem septuagínta duo cum gáudio, dicéntes : Dómine, étiam dæmónia subiiciúntur nobis in nómine tuo. Et ait illis : Vidébam sátanam sicut fulgur de cælo cadéntem. Ecce, dedi vobis potestátem calcándi supra serpéntes et scorpiónes, et super omnem virtútem inimíci : et nihil vobis nocébit. Verúmtamen in hoc nolíte gaudére, quia spíritus vobis subiciúntur : gaudéte autem, quod nómina vestra scripta sunt in cælis.En ce temps-là : Jésus dit à ses disciples : Celui qui vous écoute, m’écoute ; celui qui vous méprise, me méprise. Et celui qui me méprise, méprise Celui qui m’a envoyé. Or les soixante-douze revinrent avec joie, disant : Seigneur, les démons même nous sont soumis en votre nom. Et il leur dit : Je voyais Satan tomber du Ciel comme la foudre. Voici que je vous ai donné le pouvoir de fouler aux pieds les serpents, et les scorpions, et toute la puissance de l’ennemi ; et rien ne pourra vous nuire. Cependant, ne vous réjouissez pas de ce que les esprits vous sont soumis ; mais réjouissez-vous de ce que vos noms sont écrits dans les Cieux.
Ant. ad Offertorium. Ps. 67, 36.Offertoire
Mirábilis Deus in Sanctis suis : Deus Israël, ipse dabit virtútem et fortitúdinem plebi suæ : benedíctus Deus, allelúia.Dieu est admirable dans ses saints. Le Dieu d’Israël donnera lui-même à son peuple la puissance et la force. Dieu soit béni. Alléluia.
SecretaSecrète
Sicut glóriam divínæ poténtiæ múnera pro Sanctis obláta testántur : sic nobis efféctum, Dómine, tuæ salvatiónis impéndant. Per Dóminum nostrum.Comme les dons offerts en l’honneur des Saints attestent la gloire de la puissance divine, que de même, ô Seigneur, ils nous procurent les fruits de votre œuvre de salut.
Ant. ad Communionem. Sap. 3, 1, 2 et 3.Communion
Iustórum ánimæ in manu Dei sunt, et non tanget illos torméntum malítiae : visi sunt óculis insipiéntium mori : illi autem sunt in pace.Les âmes des Justes sont dans la main de Dieu, et le tourment de la mort ne les touchera pas ; aux yeux des insensés, ils ont paru mourir, cependant ils sont en paix
PostcommunioPostcommunion
Repléti, Dómine, benedictióne sollémni : quǽsumus ; ut, per intercessiónem sanctórum Mártyrum tuórum Viti, Modésti et Crescéntiæ, medicína sacraménti et corpóribus nostris prosit et méntibus. Per Dóminum.Nourris solennellement, Seigneur, de votre hostie de bénédiction, nous vous demandons instamment que par l’intercession de vos Saints Martyrs Vite, Modeste et Crescence, le remède qu’est votre sacrement soit utile à nos corps et à nos âmes.

Office

Leçon des Matines avant 1960

Troisième leçon. Vite fut baptisé tout enfant à l’insu de son père, qui, l’ayant appris, n’omit rien pour détacher son fils de la religion chrétienne ; et comme l’enfant demeurait inébranlable, il le livra au juge Valérien pour être battu de verges ; Vite persistant néanmoins dans sa résolution, on le rendit à son père. Pendant que celui-ci cherchait de plus grands châtiments, le jeune Vite, averti par un Ange et conduit par Modeste et Crescence, qui l’avaient élevé, gagna une terre étrangère. Là, sa sainteté arriva à un tel éclat, que sa renommée parvint jusqu’à Dioclétien. L’empereur, qui avait un fils tourmenté par le démon, appela le Saint pour l’en délivrer ; mais, cette délivrance une fois obtenue, le prince ingrat tenta, par l’offre des plus grandes récompenses, d’amener le libérateur de son fils au culte des faux dieux, et, ne pouvant y réussir, il le fit jeter en prison, chargé de chaînes, avec Modeste et Crescence. Les trouvant plus inébranlables que jamais, l’empereur donna l’ordre de les plonger dans une chaudière remplie de plomb fondu, de poix et de résine embrasée ; comme les trois enfants hébreux, ils y chantèrent des hymnes au Seigneur. On les en retira pour les jeter à un lion ; mais le lion se coucha devant eux et lécha leurs pieds. Enflammé de colère de voir la foule touchée par ce miracle, Dioclétien les fit étendre sur le chevalet, où leurs membres furent mis en pièces et leurs os rompus. Au même moment se produisirent des éclairs, du tonnerre et de grands tremblements de terre qui renversèrent les temples des dieux et tuèrent beaucoup de monde. Une femme noble, appelée Florence, recueillit les restes des Martyrs et, les ayant embaumés de parfums, les ensevelit honorablement.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

L’Esprit divin qui règne sur cette partie du Cycle, est avant tout le témoin du Verbe [2]. L’Homme-Dieu l’annonçait sous ce titre au monde qu’il devait laisser pour retourner à son Père, après avoir rendu lui-même son grand témoignage à la vérité souveraine [3]. Formés par l’Esprit sur le type du Fils de l’homme, les fidèles sont aussi des témoins, dont la mission est de refouler le mensonge, ennemi de Dieu, en exprimant la vérité dans leurs paroles et leurs actes. Mais le témoignage suprême, qu’il n’est pas donné à tous de rendre, est celui du sang ; les martyrs sont les privilégiés de cette lutte incessante du vrai contre le faux, en laquelle se résume l’histoire. Ils ne pouvaient manquer de briller au ciel en ces jours. Bientôt l’Église va tressaillir à la naissance de Jean le Précurseur, cet homme si grand entre tous [4], et dont la grandeur fut d’avoir été envoyé par Dieu pour servir de témoin, pour rendre témoignage à la lumière [5]. Nous aurons alors occasion de méditer plus longuement ces pensées, auxquelles semblent vouloir nous préparer déjà les groupes joyeux de martyrs qui vont se succéder, comme pour annoncer la prochaine arrivée de l’Ami de l’Époux [6].

Aujourd’hui, accompagné de ses fidèles nourriciers Modeste et Crescence, c’est un enfant qui vient nous apprendre le prix du baptême, et la fidélité due contre tous au Père qui est dans les cieux. Sa gloire est grande, au ciel et sur la terre ; les démons, qui tremblaient devant lui, continuent de le craindre ; son nom reste inscrit dans la mémoire du peuple chrétien comme celui de l’un de ses plus puissants auxiliaires, à la suite de saint Elme ou Érasme, dont le commencement de ce mois nous ramenait le souvenir. Saint Vite, ou saint Gui, garde le pouvoir de délivrer ceux qui recourent à lui dans les atteintes du triste mal qui porte son nom. Il neutralise la morsure des chiens enragés, et se montre secourable aux animaux eux-mêmes. On le prie encore contre la léthargie, ou le sommeil trop prolongé ; le coq qui l’accompagne en diverses représentations rappelle cet usage, ainsi que celui d’invoquer notre saint pour obtenir d’être réveillé à une heure déterminée.

Vos combats sont finis, glorieux martyrs ; ils ont peu dure, mais la couronne qu’ils vous valurent est éternelle. Pour toujours vous est acquise, ô Modeste et Crescence, la reconnaissance de Dieu même, à qui vous avez rendu fidèlement le dépôt qu’il vous confia dans cet enfant devenu le vôtre par là foi et le saint baptême. Et vous, noble enfant qui préférâtes le Père du ciel à celui de la terre, qui dira la tendresse dont vous entoure à jamais Celui que vous avez si courageusement reconnu devant les hommes ? Il veut que dès ici-bas éclatent à votre endroit les marques de sa munificence ; car il vous confie une large part dans l’exercice de sa puissance miséricordieuse. En retour de la sainte liberté qui, dès les premières lueurs de la raison, régna dans votre âme et soumit dans une complète obéissance votre corps à cette âme, vous possédez sur la nature déchue un pouvoir merveilleux : les malheureux dont les membres désordonnément agités par une cruelle maladie ne connaissent plus la direction d’une volonté maîtresse, les hommes mêmes qu’un sommeil trop prolongé ne laisse point libres de leurs actes, retrouvent à vos pieds la parfaite harmonie du corps et de l’âme, la docilité du premier permettant à celle-ci de vaquer aux devoirs qui lui incombent envers Dieu et la société. Illustre saint, soyez toujours plus large dans l’exercice de votre don précieux, pour le bien de l’humanité souffrante et la plus grande gloire du Dieu qui vous a couronné. Nous vous demandons pour tous avec l’Église, et par vous nous demandons à Dieu la destruction de l’orgueil qui rompt l’équilibre dans l’homme et le fait dévier de sa voie, le mépris du mal qui lui rend au contraire la liberté dans l’amour : superbe non sapere, sed placita humilitate proficere, ut, prava despiciens, quœcumque recta sunt libera exerceat charitate [7].

Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

Les Actes de saint Vite ont tellement subi d’interpolations qu’il est difficile d’y retrouver la vérité. Il s’agit d’un martyr auquel le Hiéronymien assigne pour patrie tantôt la Lucanie, tantôt la Sicile, et dont le culte fut très répandu en Italie durant la période lombarde. La présence d’une messe en son honneur dans le Gélasien, est due sans doute à l’existence du monastère de Saint-Vite, près de l’arc de Gallien. C’est de ce monastère qu’en 768 fut élevé au pontificat, en compétition avec Sixte IV, le prêtre Philippe. Celui-ci voyant dès le lendemain que les choses tournaient mal, revint aux tranquilles travaux de son cloître et ne voulut plus entrer dans ces compétitions contre le pontife légitime.

Le Liber Pontificalis mentionne un autre oratoire, dédié à saint Vite, et qui s’élevait dans le monastère de Corsas sur la voie Appienne. Cette chapelle a disparu depuis longtemps. En revanche, la diaconie de Saint-Vite existe encore, et les fidèles la fréquentent toujours, particulièrement s’ils ont été victimes de chiens enragés ou de serpents venimeux ; souvent, ils y obtiennent la santé.

La messe était, à l’origine, exclusivement dédiée à saint Vite ; plus tard, les martyrs Modeste et Crescence y eurent part eux aussi ; selon les Actes, le premier aurait été le précepteur et la seconde, la nourrice de saint Vite.

L’antienne pour l’introït est tirée du psaume 33 et décrit le sort des justes tant en ce monde que dans l’autre : ici-bas, ils sont éprouvés par de nombreuses tribulations, afin qu’ils accomplissent en eux-mêmes le mystère du Crucifié ; mais Dieu les secourt par sa grâce, et non seulement au ciel il préserve leur âme de la haine des persécuteurs, mais encore il se porte garant de leur réunion à leur corps, qui repose sous l’autel du temple dans l’attente de la résurrection finale.

La première collecte veut nous obtenir du Seigneur l’humilité, cette humilité si nécessaire à la vie chrétienne, et grâce à laquelle tant d’âmes simples et pauvres, et jusqu’à des enfants, assistés de la divine puissance, affrontèrent le martyre. Cette basse opinion de nous-mêmes, ce dépouillement de l’esprit propre, éteindra en nous la fièvre de l’égoïsme et nous rendra agiles dans l’exercice de la divine charité.

La première lecture est tirée du livre de la Sagesse (III, 1-18). L’âme des justes s’est confiée à Dieu, et il la garde et la sauve, même si dans ce but il permet que les impies l’éprouvent par leurs tourments. Ceux-ci, loin de contrevenir d’une façon quelconque aux desseins divins, entrent au contraire dans leur plan pour la prédestination des élus, puisque l’épreuve à laquelle ils soumettent les saints est comme la flamme d’un creuset où l’or se purifie.

Le répons est tiré du psaume 149 et continue, pour ainsi dire, la description du paradis des martyrs, commencée dans la lecture précédente. — Tel est, en effet, le véritable caractère du psaume responsorial classique : il doit être en étroite relation avec la lecture, comme s’il voulait exprimer les sentiments que celle-ci a excités dans l’auditoire. — « Que les saints triomphent dans la gloire, et qu’assis sur leurs lits, ils chantent. Chantez à Yahweh un cantique nouveau, — celui de l’amour, explique saint Augustin, — célébrez-le au milieu des assemblées des justes ». Les saints dans le ciel sont unis entre eux par une charité si parfaite que la béatitude de l’un est un motif pour tous les autres de se réjouir et de glorifier Dieu.

Le verset alléluiatique est semblable à l’antienne d’introït du 22 avril.

La lecture évangélique est tirée de saint Luc (X, 16-20). Jésus confère à ses disciples tout pouvoir sur le démon, en sorte que les serpents et les autres animaux venimeux ne pourront leur nuire, allusion évidente à la vertu thaumaturgique de saint Vite en faveur des victimes de l’hydrophobie. — Toutefois, loin de mettre leur confiance dans ces grâces qui leur sont principalement accordées pour l’édification d’autrui, que les chrétiens visent de plus en plus à acquérir les vertus qui assureront leur salut éternel. Ainsi faisait saint Paul ; au moyen de la pénitence il réduisait son corps en servitude, pour ne pas connaître le malheur d’être rejeté avec les réprouvés après avoir évangélisé le monde entier.

L’antienne qu’on intercalait dans le psaume 67 durant la présentation des offrandes, est identique à celle du 22 janvier. Le sens littéral ne se rapporte point aux saints, comme le ferait croire la version latine, mais au sanctuaire de Jérusalem. « O Yahweh, vous êtes terrible de votre sanctuaire ! Le Dieu d’Israël donne à son peuple valeur et force. Yahweh soit béni ! » Voici, donc, d’où les martyrs ont tiré un si grand courage. « Aujourd’hui, — disait sainte Félicité de Carthage en proie aux douleurs de l’enfantement, — aujourd’hui c’est moi qui souffre ce que je souffre ; quand, au contraire, je serai exposée aux bêtes féroces dans le cirque, alors ce sera un autre qui souffrira pour moi, puisque c’est pour lui qu’alors je souffrirai. »

La collecte avant l’anaphore a une exquise saveur d’antiquité classique. « Comme aujourd’hui les oblations présentées à l’autel pour la fête des martyrs sont une confirmation de la puissance de la divine grâce, qu’ainsi elles nous obtiennent le salut à nous aussi ».

L’antienne pour la distribution des saints Mystères au peuple est la même que le 2 juin. Les pensées de la foi et les jugements de Dieu sont bien différents de ceux du monde. Les martyrs succombent au milieu des douleurs et des tourments ; les persécuteurs appellent cela la mort, tandis qu’eux au contraire, calmes et sereins, prennent leur vol vers le ciel.

La prière après la Communion contient une allusion au caractère solennel et stationnal qu’avaient autrefois toutes ces messes de martyrs. « Comblés aujourd’hui d’une solennelle bénédiction, nous vous demandons, Seigneur, par l’intercession de vos martyrs Vite, Modeste et Crescence, que la grâce médicinale du Sacrement soit profitable à notre âme non moins qu’à notre corps ».

Comme nous l’avons déjà observé ailleurs, la divine Eucharistie, en tant qu’elle contient l’antidote du poison répandu par le serpent dans le fruit de l’Éden, peut conférer au corps lui-même santé, force et heureuse jeunesse. Saint Grégoire de Nazianze raconte que sa sœur n’acceptait pas d’autres remèdes que la sainte Communion. Aussi l’Église, dans ses collectes, nous fait-elle demander souvent avec la santé de l’âme celle du corps, pour que nous puissions mieux servir Dieu et le prochain.

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

L’humilité est la vertu fondamentale.

1. Les saints du jour. — Jour de mort : 15 juin, vers 305. Tombeau : Primitivement à Rome. Les reliques de saint Vit furent transférées en divers lieux ; un bras se trouve dans la cathédrale Saint-Vit, à Prague. Image : On représente saint Vit avec une bassine de poix bouillante. Vie : D’après les actes légendaires, Vit fut baptisé tout enfant à l’insu de son père. Dès que son père l’apprit, il le fit battre de verges par le juge. Comme son père songeait à des châtiments plus sévères, Vit, sur l’ordre d’un ange, se rendit en Sicile avec son maître Modeste et sa nourrice Crescence. Mais là aussi ils furent persécutés à cause de la foi. On les jeta dans une chaudière d’huile bouillante, mais, comme les trois jeunes gens dans la fournaise, ils n’eurent aucun mal et chantèrent les louanges de Dieu. Les bêtes féroces ne voulurent pas les toucher ; Enfin ils moururent tous martyrs. Saint Vit est un des 14 saints qu’on invoque dans les cas désespérés.

Pratique. — L’oraison d’aujourd’hui nous enseigne à pratiquer, à l’exemple de nos saints martyrs, la vertu d’humilité : « Nous t’en prions, Seigneur, donne à ton Église, par l’intercession des saints martyrs, Vit, Modeste et Crescence, de ne pas avoir des sentiments d’orgueil, mais de marcher dans l’humilité qui te plaît, afin qu’elle méprise le mal et accomplisse tout bien dans la liberté de la charité ».

2. La messe (Multae tribulationes). — La messe contient presque uniquement des textes propres. Ces textes sont, comme c’est le cas dans les messes antiques, un éloge du martyre. Dès l’Introït, l’Église nous enseigne que les martyrs, malgré toutes leurs tribulations, sont dans la main de Dieu. Dieu les garde pour l’éternité. La communauté chante en même temps le psaume de prédilection de l’ancienne Église, le psaume 33. La leçon exprime la même pensée : le sort des justes (« justi » est l’expression habituelle de la liturgie) sur la terre et dans le ciel. Ici, ils souffrent de grands tourments, mais ils sont comme l’or qui doit être purifié dans le feu des souffrances. Dieu accepte leur mort comme un agréable holocauste. Là-haut, ils brilleront comme des étincelles et participeront à la royauté du Christ. Le Graduel se rattache, comme un écho, à l’Épître. L’Alléluia est un véritable « louez le Seigneur » dans la bouche des saints. L’Évangile ne se trouve sans doute nulle part ailleurs dans le missel. Les 72 disciples que le Seigneur a envoyés se réjouissent du succès merveilleux qu’ils ont remporté. Le Christ confirme qu’il leur a donné le pouvoir de « marcher sur les serpents et les scorpions, et la force contre toute puissance de l’ennemi ». Mais ils doivent estimer bien plus la joie d’être enfants de Dieu, le fait « que leurs noms sont écrits au ciel ». L’Évangile est très bien choisi par rapport au pouvoir des miracles qu’exerce saint Vit (il est considéré comme thaumaturge surtout pour ceux qui sont mordus par des chiens enragés et des serpents venimeux) ; mais l’Église nous enseigne aussi la véritable manière d’honorer les saints. Le rôle des saints n’est pas de nous aider dans nos besoins terrestres ; leur rôle, principal est de nous assurer le bonheur éternel. Les membres glorifiés du corps mystique doivent conduire à l’éternelle béatitude les membres qui ne sont pas encore glorifiés. Nous allons à l’Offrande en répétant ce cri qu’aimait tant l’ancienne Église : « Dieu est admirable dans ses saints ». L’antienne de communion se contente de répéter un verset de la leçon : « Les saints sont dans la paix ». Ce mot paix signifie la béatitude. Une partie de cette paix coule maintenant dans nos âmes par la sainte Eucharistie. La postcommunion nous enseigne que le pain du ciel est un remède pour le corps et pour l’âme.

[1] G. Ferrari, Early roman monasteries, pp. 345-352.

[2] Johan. XV, 26.

[3] Ibid. XVIII, 37.

[4] Matth. XI, 11.

[5] Johan. I, 6-8.

[6] Johan. III, 29.

[7] Collecta diei.