Accueil - Missel - Temporal - Temps Per Annum après la Pentecôte

7ème dimanche après la Pentecôte

Version imprimable de cet article Version imprimable Partager


Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  
  Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique  

Textes de la Messe

Dominica Septima post Pentecosten
7ème dimanche après la Pentecôte
II Classis (ante CR 1960 : semiduplex)
2ème Classe (avant 1960 : semidouble)
Ant. ad Introitum. Ps. 46, 2.Introït
Omnes gentes, pláudite mánibus : iubiláte Deo in voce exsultatiónis.Nations, frappez toutes des mains ; célébrez Dieu par des cris d’allégresse.
Ps. ibid., 3.
Quóniam Dóminus excélsus, terríbilis : Rex magnus super omnem terram.Car le Seigneur est très haut et terrible, roi suprême sur toute la terre.
V/.Glória Patri.
Oratio.Collecte
Deus, cuius providéntia in sui dispositióne non fállitur : te súpplices exorámus ; ut nóxia cuncta submóveas, et ómnia nobis profutúra concédas. Per Dóminum.Dieu, votre providence ne se trompe jamais dans ce qu’elle dispose : nous vous prions en suppliant ; détournez de nous tout ce qui nous serait nuisible, et accordez-nous tout ce qui doit nous être avantageux.
Léctio Epístolæ beáti Pauli Apóstoli ad Romános.Lecture de l’Épître du B. Apôtre Paul aux Romains.
Rom. 6, 19-23.
Fratres : Humánum dico, propter infirmitátem carnis vestræ : sicut enim exhibuístis membra vestra servíre immundítiæ et iniquitáti ad iniquitátem, ita nunc exhibéte membra vestra servíre iustítiæ in sanctificatiónem. Cum enim servi essétis peccáti, líberi fuístis iustítiæ. Quem ergo fructum habuístis tunc in illis, in quibus nunc erubéscitis ? Nam finis illórum mors est. Nunc vero liberáti a peccáto, servi autem facti Deo, habétis fructum vestrum in sanctificatiónem, finem vero vitam ætérnam. Stipéndia enim peccáti mors. Grátia autem Dei vita ætérna, in Christo Iesu, Dómino nostro.Mes frères : Je parle à la manière des hommes, à cause de la faiblesse de votre chair. Car de même que vous avez livré vos membres comme esclaves à l’impureté et à l’injustice, pour arriver à l’injustice, de même livrez maintenant vos membres comme esclaves à la justice, pour arriver à la sainteté. Car, lorsque vous étiez les esclaves du péché, vous étiez libres à l’égard de la justice. Quel fruit aviez-vous alors des choses dont vous rougissez aujourd’hui ? Car la fin de ces choses, c’est la mort. Mais maintenant, affranchis du péché et devenus les esclaves de Dieu, vous avez pour fruit la sainteté, et pour fin la vie éternelle. Car le salaire du péché, c’est la mort ; mais le don de Dieu c’est la vie éternelle en Jésus-Christ Notre-Seigneur.
Graduale. Ps. 33, 12 et 6.Graduel
Veníte, fílii, audíte me : timórem Dómini docébo vos.Venez, mes fils, écoutez-moi, je vous enseignerai la crainte du Seigneur.
V/. Accédite ad eum, et illuminámini : et fácies vestræ non confundéntur.Approchez-vous de lui et vous serez éclairés et la confusion ne couvrira pas vos visages.
Allelúia, allelúia. V/.Ps. 46, 2. Omnes gentes, pláudite mánibus : iubiláte Deo in voce exsultatiónis. Allelúia.Alléluia, alléluia. V/.Ps. 46, 2. Nations, frappez toutes des mains, célébrez Dieu par vos cris d’allégresse. Alléluia.
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Matthǽum.Suite du Saint Évangile selon saint Mathieu.
Matth. 7, 15-21.
In illo témpore : Dixit Iesus discípulis suis : Atténdite a falsis prophétis, qui véniunt ad vos in vestiméntis óvium, intrínsecus autem sunt lupi rapáces : a frúctibus eórum cognoscétis eos. Numquid cólligunt de spinis uvas, aut de tríbulis ficus ? Sic omnis arbor bona fructus bonos facit : mala autem arbor malos fructus facit. Non potest arbor bona malos fructus fácere : neque arbor mala bonos fructus fácere. Omnis arbor, quæ non facit fructum bonum, excidétur et in ignem mittétur. Igitur ex frúctibus eórum cognoscétis eos. Non omnis, qui dicit mihi, Dómine, Dómine, intrábit in regnum cælórum : sed qui facit voluntátem Patris mei, qui in cælis est, ipse intrábit in regnum cælórum.En ce temps-là : Jésus dit à ses disciples : Gardez-vous des faux prophètes qui viennent à vous sous des vêtements de brebis, mais au dedans sont des loups rapaces. C’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez : cueille-t-on du raisin sur les épines, ou des figues sur les ronces ? Ainsi tout arbre bon porte de bons fruits, et tout arbre mauvais porte de mauvais fruits. Un arbre bon ne peut porter de mauvais fruits, ni un arbre mauvais porter de bons fruits. Tout arbre qui ne porte pas de bons fruits, on le coupe et on le jette au feu. Donc, c’est à leurs fruits que vous les reconnaîtrez. Ce n’est pas celui qui m’aura dit : « Seigneur, Seigneur ! » qui entrera dans le royaume des cieux, mais celui qui aura fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux.
Credo
Ant. ad Offertorium. Dan. 3,40.Offertoire
Sicut in holocáustis aríetum et taurórum, et sicut in mílibus agnórum pínguium : sic fiat sacrifícium nostrum in conspéctu tuo hódie, ut pláceat tibi : quia non est confúsio confidéntibus in te, Dómine.Comme un holocauste de béliers et de taureaux, ou des milliers d’agneaux gras, qu’ainsi notre sacrifice paraisse aujourd’hui devant vous et qu’il vous soit agréable, car ceux qui ont confiance en vous ne seront pas confondus, Seigneur.
Secreta.Secrète
Deus, qui legálium differéntiam hostiárum unius sacrifícii perfectione sanxísti : accipe sacrifícium a devótis tibi fámulis, et pari benedictióne, sicut múnera Abel, sanctífica ; ut, quod sínguli obtulérunt ad maiestátis tuæ honórem, cunctis profíciat ad salútem. Per Dóminum.Dieu, vous avez sanctionné les divers sacrifices offerts sous la loi par la perfection d’un sacrifice unique : recevez ce sacrifice que vous présentent vos dévots serviteurs, et sanctifiez-le au moyen d’une bénédiction pareille à celle qu’obtinrent les donc d’Abel ; afin que ce que chacun de nous a offert en l’honneur de votre majesté, profite à tous pour le salut.
Præfatio de sanctissima Trinitate ; non vero in feriis, quando adhibetur Missa huius dominicæ, sed tunc dicitur præfatio communis. Préface de la Sainte Trinité  ; mais les jours de Féries, où l’on reprend la Messe de ce Dimanche, on dit la Préface Commune .
Ant. ad Communionem. Ps. 30, 3.Communion
Inclína aurem tuam, accélera, ut erípias me.Inclinez vers moi votre oreille ; hâtez-vous de me délivrez.
Postcommunio.Postcommunion
Tua nos, Dómine, medicinális operátio, et a nostris perversitátibus cleménter expédiat, et ad ea, quæ sunt recta, perdúcat. Per Dóminum nostrum.Que votre action qui guérit, ô Seigneur, nous délivre doucement des tendances perverses, et nous conduise à ce qu’il y a de bien et de droit.

Office

AUX PREMIÈRES VÊPRES.

Psaumes, capitule et hymne : 1ères Vêpres du Dimanche per annum

V/. Vespertína orátio ascéndat ad te, Dómine. V/. Que la prière du soir s’élève vers vous, Seigneur.
R/. Et descéndat super nos misericórdia tua. R/. Et que votre miséricorde descende sur nous.
Ad Magnificat Ant. Unxérunt Salomónem * Sadoc sacérdos et Nathan prophéta, regem in Gihon et ascendéntes læti dixérunt : Vivat rex in ætérnum. Ant. au Magnificat Ils donnèrent à Salomon l’onction * royale à Gihon, Sadoc le prêtre et Nathan le prophète [1] ; puis, montant de là ils dirent en se réjouissant : Que le Roi vive à jamais [2].
Magnificat
OratioPrière
Deus, cuius providéntia in sui dispositióne non fállitur : te súpplices exorámus ; ut nóxia cuncta submóveas, et ómnia nobis profutúra concédas. Per Dóminum.Dieu, votre providence ne se trompe jamais dans ce qu’elle dispose : nous vous prions en suppliant ; détournez de nous tout ce qui nous serait nuisible, et accordez-nous tout ce qui doit nous être avantageux.

A MATINES

1er Nocturne

Introduction des Matines et psaumes du 1er nocturne du Dimanche per annum en été

Lectio i1ère leçon
Incipit liber tértius Regum.Commencement du troisième livre des Rois.
Cap. 1, 1-4.
Et rex David senúerat habebátque ætátis plúrimos dies : cumque operirétur véstibus, non calefiébat. Dixérunt ergo ei servi sui : Quærámus dómino nostro regi adolescéntulam vírginem, et stet coram rege et fóveat eum dormiátque in sinu suo et calefáciat dóminum nostrum regem. Quæsiérunt ígitur adolescéntulam speciósam in ómnibus fínibus Israël et invenérunt Abísag Sunamítidem et adduxérunt eam ad regem. Erat autem puélla pulchra nimis dormiebátque cum rege et ministrábat ei ; rex vero non cognóvit eam.Le roi David était un vieillard avancé en âge ; on lui mit des couvertures sans qu’il pût se réchauffer. Alors ses serviteurs lui dirent : « Qu’on cherche pour Monseigneur le roi une jeune fille qui assiste le roi et qui le soigne : elle couchera sur ton sein et cela tiendra chaud à Monseigneur le roi. » Ayant donc cherché une belle jeune fille dans tout le territoire d’Israël, on trouva Abisag la Sunamite et on l’amena au roi. Cette jeune fille était extrêmement belle ; elle soigna le roi et le servit, mais il ne la connut pas.
R/. Præparáte corda vestra Dómino, et servíte illi soli : * Et liberábit vos de mánibus inimicórum vestrórum.R/. Préparez vos cœurs pour le Seigneur et ne servez que lui seul [3] : * Et il vous délivrera de la main de vos ennemis.
V/. Convertímini ad eum in toto corde vestro, et auférte deos aliénos de médio vestri.V/. Convertissez-vous au Seigneur de tout votre cœur, et ôtez d’au milieu de vous les dieux étrangers.
* Et liberábit vos de mánibus inimicórum vestrórum. * Et il vous délivrera de la main de vos ennemis.
Lectio ii2e leçon
Cap. 1, 5-8.
Adonías autem fílius Haggith elevabátur dicens : Ego regnábo. Fecítque sibi currus et équites et quinquagínta viros, qui cúrrerent ante eum. Nec corrípuit eum pater suus aliquándo dicens : Quare hoc fecísti ? Erat autem et ipse pulcher valde, secúndus natu post Absalom. Et sermo ei cum Ioab fílio Sárviæ et cum Abíathar sacerdóte, qui adiuvábant partes Adoníæ. Sadoc vero sacérdos et Banáias fílius Ióiadæ et Nathan prophéta et Sémei et Rei et robur exércitus David non erat cum Adonía.Or Adonias, le fils de Haggit, jouait au prince, pensant qu’il régnerait ; il s’était procuré char et attelage et cinquante gardes qui couraient devant lui. De sa vie, son père ne l’avait affligé en disant : « Pourquoi agis-tu ainsi ? » Il avait lui aussi très belle apparence et sa mère l’avait enfanté après Absalom. Il s’aboucha avec Joab fils de Ceruya et avec le prêtre Ebyatar, qui se rallièrent à la cause d’Adonias ; mais ni le prêtre Sadoq, ni Benayahu fils de Yehoyada, ni le prophète Nathan, ni Shiméi et ses compagnons, les preux de David, n’étaient avec Adonias.
R/. Deus ómnium exaudítor est : ipse misit Angelum suum, et tulit me de óvibus patris mei [4] ; * Et unxit me unctióne misericórdiæ suæ.R/. C’est le Seigneur qui exauce les prières de tous, lui-même a envoyé son Ange et m’a retiré du milieu des brebis de mon père ; * Et il m’a oint de l’onction de sa miséricorde.
V/. Dóminus, qui erípuit me de ore leónis, et de manu béstiæ liberávit me.V/. C’est le Seigneur qui m’a arraché de la gueule du lion, et des griffes de la bête féroce [5].
* Et unxit me unctióne misericórdiæ suæ. * Et il m’a oint de l’onction de sa miséricorde.
Lectio iii3e leçon
Cap. 1, 11-15.
Dixit ítaque Nathan ad Bethsabée matrem Salomónis : Num audísti quod regnáverit Adonías fílius Haggith, et dóminus noster David hoc ignórat ? Nunc ergo veni, áccipe consílium a me et salva ánimam tuam filiíque tui Salomónis. Vade et ingrédere ad regem David et dic ei : Nonne tu, dómine mi rex, iurásti mihi ancíllæ tuæ dicens : Sálomon fílius tuus regnábit post me et ipse sedébit in sólio meo ? Quare ergo regnat Adonías ? Et, adhuc ibi te loquénte cum rege, ego véniam post te et complébo sermónes tuos. Ingréssa est ítaque Bethsabée ad regem in cubículum.Alors Nathan dit à Bethsabée, la mère de Salomon : « N’as-tu pas appris qu’Adonias fils de Haggit est devenu roi à l’insu de notre seigneur David ? Eh bien ! laisse-moi te donner maintenant un conseil, pour que tu sauves ta vie et celle de ton fils Salomon. Va, entre chez le roi David, et dis-lui : “N’est-ce pas toi, Monseigneur le roi, qui as fait ce serment à ta servante : Ton fils Salomon règnera après moi et c’est lui qui s’assiéra sur mon trône ? Comment donc Adonias est-il devenu roi ?” Et pendant que tu seras là, conversant encore avec le roi, j’entrerai après toi et j’appuierai tes paroles. » Bethsabée se rendit chez le roi dans sa chambre.
R/. Dóminus, qui erípuit me de ore leónis, et de manu béstiæ liberávit me, * Ipse me erípiet de mánibus inimicórum meórum.R/. Le Seigneur qui m’a arraché de la gueule du lion, et délivré des griffes de la bête féroce [6], * Lui-même m’arrachera aux mains de mes ennemis.
V/. Misit Deus misericórdiam suam et veritátem suam : ánimam meam erípuit de médio catulórum leónum.V/. Dieu a envoyé sa miséricorde et sa vérité, et il a arraché mon âme du milieu des petits des lions [7].
* Ipse me erípiet de mánibus inimicórum meórum. Glória Patri. * Ipse me erípiet de mánibus inimicórum meórum.* Lui-même m’arrachera aux mains de mes ennemis. Gloire au Père. * Lui-même m’arrachera aux mains de mes ennemis.
Nota bene : Le Troisième Livre des Rois est lu en lecture continue à partir de ce jour [8], sauf si ce dimanche tombe entre le 29 juillet et le 4 août, auquel cas on commence la lecture des Livres Sapientiaux, en omettant le reste des Livres Historiques

2nd Nocturne

Psaumes du 2nd nocturne du Dimanche per annum

Lectio iv4e leçon
Ex Epístola sancti Hierónymi Presbyteri ad Nepotiánum.De la Lettre du prêtre saint Jérôme à Népotien.
Epist. 2 tom. 1
David annos natus septuagínta, bellicósus quondam vir, senectúte frigescénte, non póterat calefíeri. Quǽritur ítaque puélla de univérsis fínibus Israël Abísag Sunamítis, quæ cum rege dormíret, et seníle corpus calefáceret. Quæ est ista Sunamítis, uxor et virgo, tam fervens, ut frígidum calefáceret ; tam sancta, ut caléntem ad libídinem non provocáret ? Expónat sapientíssimus Sálomon patris sui delícias, et pacíficus bellatóris viri narret ampléxus : Pósside sapiéntiam, pósside intelligéntiam. Ne obliviscáris, et ne declináveris a verbis oris mei : neque derelínquas illam, et apprehéndet te : ama illam, et servábit te. Princípium sapiéntiæ, pósside sapiéntiam, et in omni possessióne tua pósside intelligéntiam : circúmda illam, et exaltábit te ; honóra illam, et amplexábitur te, ut det cápiti tuo corónam gratiárum. Coróna quoque deliciárum próteget te.David était septuagénaire ; il avait connu l’ardeur belliqueuse, mais en vieillissant, il était accablé par le froid et ne parvenait plus à se réchauffer. On chercha donc dans tout le territoire d’Israël une jeune fille, Abisag la Sunamite pour dormir avec le roi et réchauffer son corps sénile. Quelle est cette Sunamite, épouse et vierge, dont l’ardeur peut réchauffer celui qui est accablé par le froid, dont la sainteté peut garder de toute passion celui qu’elle réchauffe ? Que Salomon le très sage nous explique les délices de son père ; que le Pacifique nous raconte les embrassements du guerrier ! « Acquiers la sagesse, acquiers l’entendement, ne l’oublie pas et ne t’écarte pas des paroles de ma bouche ; ne l’abandonne pas, elle te gardera ; chéris-là et elle veillera sur toi. Principe de la sagesse : acquiers la sagesse ; au prix de tout ce que tu possèdes, acquiers l’entendement. Étreins-la et elle t’élèvera ; exalte-la, elle t’embrassera et sur ta tête elle posera un diadème de grâce. Elle te couvrira d’une couronne de délices » [9].
R/. Percússit Saul mille, et Davíd decem míllia : * Quia manus Dómini erat cum illo ; percússit Philisthǽum, ct ábstulit oppróbrium ex Israel.R/. Saül en a tué mille et David dix mille [10] : * Car la main du Seigneur était avec lui ; il a frappé le Philistin, et enlevé l’opprobre d’Israël [11].
V/. Nonne iste est David, de quo canébant in choro, dicéntes : Saul percússit mille, et David decem millia ?V/. Celui-ci n’est-il pas David pour lequel on chantait dans les chœurs, en disant : Saül en a tué mille et David dix mille [12] ?
* Quia manus Dómini erat cum illo ; percússit Philisthǽum, ct ábstulit oppróbrium ex Israel. * Car la main du Seigneur était avec lui ; il a frappé le Philistin, et enlevé l’opprobre d’Israël.
Lectio v5e leçon
Omnes pene virtútes córporis mutántur in sénibus, et crescénte sola sapiéntia, decréscunt cétera : ieiúnia, vigíliæ, chaméuniæ, id est, super paviméntum dormitiónes, huc illúcque discúrsus, peregrinórum suscéptio, defénsio páuperum, instántia oratiónum et perseverántia, visitátio languéntium, labor mánuum unde præbeántur eleemósynæ. Et, ne sermónem lóngius prótraham, cuncta exercéntur, fracto córpore, minóra fiunt.Presque toutes les énergies du corps s’affaiblissent chez les vieillards ; la sagesse seule se fortifie, le reste diminue : jeûnes, veilles, ‘chameunies’, c’est-à-dire repos sur la dure, démarches multipliées, hospitalité rendue aux voyageurs, défense des pauvres, assiduité et persévérance dans la prière, visite des malades, travail manuel qui produit l’aumône. En un mot, toutes les œuvres que le corps accomplit perdent de leur importance à mesure que les forces s’usent.
R/. Montes Gélboë, nec ros nec plúvia véniant super vos, * Ubi cecidérunt fortes Israël.R/. Montagnes de Gelboé, que ni pluie ni rosée ne viennent sur vous [13], * Où les forts d’Israël sont tombés.
V/. Omnes montes, qui estis in circúitu eius, vísitet Dóminus ; a Gélboë autem tránseat.V/. Que le Seigneur visite toutes les montagnes qui sont alentour, mais qu’il passe loin de Gelboé.
* Ubi cecidérunt fortes Israël. * Où les forts d’Israël sont tombés.
Lectio vi6e leçon
Nec hoc dico, quod in iuvénibus et adhuc solidióris ætátis, his dumtáxat, qui labóre et ardentíssimo stúdio, vitæ quoque sanctimónia, et oratiónis ad Dóminum Iesum frequéntia, sciéntiam consecúti sunt, frígeat sapiéntia, quæ in plerísque sénibus ætáte marcéscit ; sed quod adolescéntia multa córporis bella sustíneat, et inter incentíva vitiórum et carnis titillatiónes, quasi ignis in lignis virídibus suffocétur, ut suum non possit explicáre fulgórem. Senéctus vero rursus eórum qui adolescéntiam suam honéstis ártibus instruxérunt, et in lege Dómini meditáti sunt die ac nocte, ætáte fit dóctior, usu trítior, procéssu témporis sapiéntior, et véterum studiórum dulcíssimos fructus metit.Je ne veux pas dire que la sagesse soit de glace chez les jeunes gens et chez ceux qui sont dans la force de l’âge, quand ils se sont acquis la science par leur ardeur et leur zèle au travail, par leur vie pure et l’assiduité de leurs prière à Dieu alors que cette sagesse se ramollit par l’âge chez beaucoup de vieillards. Mais la jeunesse soutient de nombreux combats corporels, et la sagesse est ainsi étouffée au milieu de tout ce qui enflamme les vices et excite la chair : comme le feu dans du bois vert, elle ne parvient pas à faire briller sa flamme. Pourtant ceux-là encore qui ont appliqué leur jeunesse aux arts libéraux, qui ont médité jour et nuit sur la loi du Seigneur lorsqu’ils parviennent à la vieillesse, acquièrent avec l’âge plus de connaissance, avec l’expérience, plus d’habileté, avec le temps plus de sagesse et recueillent les fruits très savoureux des efforts de jadis.
R/. Ego te tuli de domo patris tui, dicit Dóminus, et pósui te páscere gregem pópuli mei : * Et fui tecum in ómnibus, ubicúmque ambulásti, firmans regnum tuum in ætérnum.R/. C’est moi qui t’ai tiré de la maison de ton père, dit le Seigneur, et t’ai établi pour pasteur du troupeau de mon peuple [14] : * Et j’ai été avec toi dans tous les lieux où tu as marché, affermissant ton royaume pour toujours.
V/. Fecíque tibi nomen grande, iuxta nomen magnórum, qui sunt in terra : et réquiem dedi tibi ab ómnibus inimícis tuis.V/. J’ai rendu ton nom grand comme le nom des grands qui sont sur la terre et je t’ai donné le repos du côté de tous tes ennemis.
* Et fui tecum in ómnibus, ubicúmque ambulásti, firmans regnum tuum in ætérnum. Glória Patri. * Et fui tecum in ómnibus, ubicúmque ambulásti, firmans regnum tuum in ætérnum.* Et j’ai été avec toi dans tous les lieux où tu as marché, affermissant ton royaume pour toujours. Gloire au Père. * Et j’ai été avec toi dans tous les lieux où tu as marché, affermissant ton royaume pour toujours.

3ème Nocturne

Psaumes du 3ème nocturne du Dimanche per annum

Lectio vii7e leçon
Léctio sancti Evangélii secundum Matthǽum.Lecture du saint Évangile selon saint Matthieu.
Cap. 7, 15-21.
In illo témpore : Dixit Iesus discípulis suis : Atténdite a falsis prophétis, qui véniunt ad vos in vestiméntis óvium, intrínsecus autem sunt lupi rapáces. Et réliqua.En ce temps-là : Jésus dit à ses disciples : Gardez-vous des faux prophètes qui viennent à vous sous des vêtements de brebis, mais au dedans sont des loups rapaces. Et le reste.
Homilía sancti Hilárii Epíscopi.Homélie de saint Hilaire, évêque.
Comment. in Matth. can. 6
Blandiménta verbórum et mansuetúdinem simulatiónem ádmonet fructu operatiónis expéndi oportére ; ut non qualem quis verbis réferat, sed qualem se rebus effíciat, spectémus ; quia in multis vestítu óvium rábies lupína contégitur. Ergo ut spinæ uvas, ut tríbuli ficus non génerant, et ut iníquæ árbores utília poma non áfferunt ; ita ne in istis quidem consístere docet boni óperis efféctum, et idcírco omnes cognoscéndos esse de frúctibus. Regnum enim cælórum sola verbórum offícia non óbtinent ; neque qui díxerit : Dómine, Dómine, heres illíus erit.Le Seigneur nous recommande d’évaluer aux fruits des œuvres les paroles de flatterie et les apparences de douceur et de n’apprécier personne tel qu’il se dépeint en paroles, mais bien tel qu’il se présente par ses actes ; car la rage du loup se couvre chez plus d’un de la peau du mouton. Les épines ne produisent, pas de raisins, ni les chardons des figues, et les arbres mauvais ne donnent pas de bons fruits : le Seigneur nous enseigne par là que la réalité des bonnes œuvres ne consiste pas en de telles apparences, et qu’il faut donc reconnaître chacun à ses fruits. Car ce n’est pas uniquement le zèle en paroles qui obtiendra le Royaume des Cieux et ce n’est pas celui qui dit : « Seigneur, Seigneur » qui en recueillera l’héritage.
R/. Peccávi super númerum arénae maris, et multiplicáta sunt peccáta mea ; et non sum dignus vidére altitúdinem cæli præ multitúdine iniquitátis meæ : quóniam irritávi iram tuam, * Et malum coram te feci.R/. J’ai péché, et mes péchés se sont multipliés au-dessus du nombre du sable de la mer, et à cause de la multitude de mon iniquité je ne suis pas digne de regarder en haut le ciel : parce que j’ai excité votre colère [15], * Et commis le mal en votre présence.
V/. Quóniam iniquitátem meam ego cognósco : et delíctum meum contra me est semper, quia tibi soli peccávi.V/. Parce que je connais mon iniquité, et mon péché est toujours devant moi, car j’ai péché contre vous seul [16].
* Et malum coram te feci. * Et commis le mal en votre présence.
Lectio viii8e leçon
Quid enim mériti est Dómino dícere, Dómine ? Numquid Dóminus non erit, nisi fúerit dictus a nobis ? Et quæ offícii sánctitas est nóminis nuncupátio, cum cæléstis regni iter obediéntia pótius voluntátis Dei, non nuncupátio, repertúra sit ? Multi mihi dicent in illa die : Dómine, Dómine, nonne in tuo nómine prophetávimus ? Etiam nunc pseudoprophetárum frauduléntiam et hypocritárum simulaménta condémnat, qui glóriam sibi ex verbi virtúte præsúmunt, in doctrínæ prophetía, et dæmoniórum fuga, et istiúsmodi óperum virtútibus.Quel mérite y a-t-il en effet à dire « Seigneur, Seigneur » au Seigneur ? Ne serait-il pas Seigneur si nous ne l’appelions ainsi ? Et quelle marque de sainteté y a-t-il à lui donner ce nom ? C’est en obéissant à la volonté de Dieu bien plus qu’en lui décernant un titre qu’on trouvera l’accès au Royaume des Cieux. « Beaucoup me diront en ce jour-là : “Seigneur, Seigneur, n’est-ce pas en ton nom que nous avons prophétisé ?”« Ici encore, c’est la fourberie des faux prophètes que le Seigneur condamne ainsi que les artifices des hypocrites qui tirent présomptueusement gloire de la vertu de leurs paroles, de la prédication de la doctrine, de la mise en fuite des démons et d’autres prodiges semblables.
Répons [17]
R/. Duo Séraphim clamábant alter ad álterum : * Sanctus, sanctus, sanctus Dóminus Deus Sábaoth : * Plena est omnis terra glória eius.R/. Deux Séraphins se criaient l’un à l’autre [18] : * Saint, saint, saint est le Seigneur Dieu des armées : * Toute la terre est pleine de sa gloire.
V/. Tres sunt qui testimónium dant in cælo : Pater, Verbum, et Spíritus Sanctus : et hi tres unum sunt.V/. Ils sont trois qui rendent témoignage dans le ciel : le Père, le Verbe et l’Esprit-Saint ; et ces trois sont une seule chose [19].
* Sanctus, sanctus, sanctus Dóminus Deus Sábaoth : Glória Patri. * Plena est omnis terra glória eius.* Saint, saint, saint est le Seigneur Dieu des armées : Gloire au Père. * Toute la terre est pleine de sa gloire.
Lectio ix9e leçon
Atque hinc sibi regnum cælórum pollicéntur : quasi vero eórum áliquid próprium sit, quæ loquúntur aut fáciunt, et non ómnia virtus Dei invocáta perfíciat ; cum doctrínæ sciéntiam léctio áfferat, dæmónia Christi nomen exágitet. De nostro ígitur est beáta illa ætérnitas promerénda, præstandúmque est áliquid ex próprio, ut bonum velímus, malum omne vitémus, totóque afféctu præcéptis cæléstibus obtemperémus, ac tálibus offíciis cógniti Deo simus, agamúsque pótius quod vult, quam quod potest gloriémur ; repúdians eos ac repéllens, quos a cognitióne sua, ópera iniquitátis avérterint.Et ils se promettent ainsi le Royaume des Cieux, comme s’ils tenaient d’eux-mêmes ce qu’ils disent et réalisent, et comme si tout bien ne procédait pas de la puissance de Dieu qu’ils ont invoquée : car la science de la doctrine se tire de la lecture et le nom du Christ met en fuite les démons. L’éternité bienheureuse requiert donc notre effort, il nous faut nous dépenser un peu nous-mêmes : nous attacher au bien, éviter tout mal, obéir de tout cœur aux préceptes divins, et en accomplissant semblables devoirs, nous serons connus de Dieu. Faisons ce qu’il veut au lieu de tirer gloire de ce qu’il peut, lui qui rejette et repousse ceux dont les œuvres sont impies : il ne les connaît pas.
Te Deum

A LAUDES.

Psaumes, capitule et hymne : Laudes du Dimanche per annum en été

V/. Dóminus regnávit, decórem índuit. V/. Le Seigneur a régné, il revêt la beauté [20].
R/. Induit Dóminus fortitúdinem, et præcínxit se virtúte. R/. Le Seigneur se revêt de force, il s’est ceint de puissance [21].
Ad Bened. Ant. Atténdite * a falsis prophétis, qui véniunt ad vos in vestiméntis óvium, intrínsecus autem sunt lupi rapáces ; a frúctibus eórum cognoscétis eos, allelúia. Ant. au Benedictus Gardez-vous * des faux prophètes qui viennent à vous sous des vêtements de brebis, tandis qu’au dedans ce sont des loups ravissants : vous les connaîtrez à leurs fruits, alléluia [22].
Benedictus
OratioPrière
Deus, cuius providéntia in sui dispositióne non fállitur : te súpplices exorámus ; ut nóxia cuncta submóveas, et ómnia nobis profutúra concédas. Per Dóminum.Dieu, votre providence ne se trompe jamais dans ce qu’elle dispose : nous vous prions en suppliant ; détournez de nous tout ce qui nous serait nuisible, et accordez-nous tout ce qui doit nous être avantageux.

AUX DEUXIÈMES VÊPRES.

Psaumes, capitule et hymne : Vêpres du Dimanche per annum

V/. Dirigátur, Dómine, orátio mea. V/. Que ma prière soit dirigée, Seigneur [23].
R/. Sicut incénsum in conspéctu tuo. R/. Comme un encens en votre présence.
Ad Magnificat Ant. Non potest arbor * bona fructus malos fácere, nec arbor mala fructus bonos fácere. Omnis arbor quæ non facit fructum bonum, excidétur, et in ignem mittétur, allelúia. Ant. au Magnificat Il n’est pas possible qu’un arbre * bon produise de mauvais fruits, ni qu’un arbre mauvais produise de bons fruits. Tout arbre qui ne porte point de bon fruit sera coupé et jeté au feu, alléluia [24].
Magnificat
OratioPrière
Deus, cuius providéntia in sui dispositióne non fállitur : te súpplices exorámus ; ut nóxia cuncta submóveas, et ómnia nobis profutúra concédas. Per Dóminum.Dieu, votre providence ne se trompe jamais dans ce qu’elle dispose : nous vous prions en suppliant ; détournez de nous tout ce qui nous serait nuisible, et accordez-nous tout ce qui doit nous être avantageux.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

Le cycle dominical du Temps après la Pentecôte complète aujourd’hui son premier septénaire. Avant la translation générale qu’eurent à subir les lectures évangéliques dans cette partie de l’année, l’Évangile de la multiplication des sept pains donnait son nom au septième Dimanche, et le mystère qu’il renferme inspire encore en plus d’un point la liturgie de ce jour.

Or nous avons vu que ce mystère était celui de la consommation des parfaits dans le repos de Dieu, dans la paix féconde de l’union divine. Salomon, le Pacifique par excellence, le chantre auguste et autorisé de l’épithalame sacré du Cantique, est donc bienvenu pour exalter aujourd’hui la Sagesse divine, et révéler ses voies aux fils des hommes. Dans les années où la Pâque atteint son plus haut terme en avril, le septième Dimanche après la Pentecôte est en effet le premier du mois d’août, et l’Église y commence, à l’Office de la nuit, la lecture des livres Sapientiaux. Autrement elle continue, il est vrai, celle des livres historiques, qui peut se poursuivre ainsi cinq semaines encore ; mais alors même la Sagesse éternelle garde ses droits sur ce Dimanche que le nombre septénaire lui consacrait déjà d’une façon si spéciale. Car au défaut des instructions inspirées du livre des Proverbes, nous voyons Salomon en personne prêcher d’exemple au troisième livre des Rois, préférer la Sagesse à tous les trésors, et la faire asseoir avec lui comme son inspiratrice et sa très noble Épouse sur le trône de David son père.

David lui aussi, nous dit saint Jérôme interprétant l’Écriture de ce jour au.nom de l’Église elle-même [25], David, sur la fin de sa vie guerrière et tourmentée, connut les charmes de cette incomparable Épouse des pacifiques ; et ses chastes caresses, qui n’allument point les feux de la concupiscence, triomphèrent en lui divinement des glaces de l’âge.

« Qu’elle soit donc mienne aussi, reprend un peu plus loin le solitaire de Bethlehem ; qu’elle repose en mon sein cette Sagesse toujours pure. Sans vieillir jamais, féconde à toute heure en son éternelle virginité, c’est aux ardeurs de sa flamme divine que s’allume dans le chrétien la ferveur de l’esprit demandée par l’Apôtre [26] ; c’est par l’amoindrissement de son empire qu’à la fin des temps [27] se refroidira la charité de plusieurs [28]. »

A LA MESSE

L’Église, laissant la synagogue dans ses villes condamnées à périr, a suivi Jésus au désert. Pendant que les fils du royaume [29] assistent sans voir à cette transmigration pour eux si fatale, la tige de Jessé, devenue l’étendard des nations [30], convoque les peuples et les amène par rangs pressés sur les traces de l’Église. De l’Orient et de l’Occident, du Nord et du Midi, ils arrivent et prennent place avec Abraham, Isaac et Jacob au banquet du royaume des cieux [31]. Mêlons nos voix, dans l’Introït, à leurs chants d’allégresse.

Il n’est point de contradiction qui puisse empêcher la Sagesse d’arriver à ses fins. Le peuple juif renie son roi ; mais la gentilité s’est levée pour acclamer le fils de David [32]. Comme nous le chantions dans l’Introït, son règne s’étend déjà sur toute la terre. L’Église demande, dans la Collecte, l’éloignement des maux et l’abondance des biens qui doivent affermir dans la paix la puissance du vrai Salomon.

ÉPÎTRE.

« Considérez-vous comme morts au péché et vivant pour Dieu dans le Christ Jésus notre Seigneur [33]. » Le Docteur des nations entre aujourd’hui dans le développement de cette formule par excellence de la vie chrétienne. L’Épître de Dimanche dernier n’avait eu d’autre but que d’en établir les termes ; elle nous l’a montrée ressortant de la notion du baptême qui nous unit au Christ sous les eaux.

Là, comme dans un tombeau, la mort de Jésus devient nôtre et nous délivre du péché. Vendus au péché [34] par nos premiers parents avant même que d’avoir vu le jour, marqués en naissant de son stigmate ignominieux, notre vie entière appartenait à ce tyran cruel ; maître avide, il nous faisait sentir son droit de tout instant sur les membres flétris d’un corps esclave. Mais si la vie de l’esclave est de droit à son maître, la mort au moins délivre son âme, et la sépulture dérobe son corps même aux revendications de l’exacteur [35]. Or sur la croix de l’Homme-Dieu, sur la croix de Jésus devenu péché [36] pour nos crimes, l’humanité coupable a suivi, au regard d’une miséricordieuse justice, le sort de son chef innocent. Le vieil homme, issu d’Adam pécheur, a été crucifié ; il est mort dans le Christ ; et l’esclave de naissance, affranchi par cette bienheureuse mort, a vu ensevelir sous les eaux le corps de péché qui portait dans sa chair le titre de sa servitude.

Le corps du péché, c’était en effet notre chair, non l’innocente sortie toute pure à l’origine des mains du Créateur, mais la chair souillée de génération en génération par la transmission d’un honteux héritage. Dans le secret du mystérieux tombeau, l’onde dissolvante a détruit la souillure de ce corps avili ; elle a disjoint du même coup ces membres du péché qui sont les passions mauvaises [37], tristes puissances du mal qui déformaient en nous et tournaient au crime les facultés et les organes reçus de Dieu pour accomplir toute justice. En un moment, le fort armé [38] a perdu le titre de sa possession ; la mort lui a ravi son esclave. Le péché donc étant détruit, la triple concupiscence décapitée s’agite en vain ; aidé de la grâce, l’homme délivré saura toujours empêcher, s’il le veut, ces hideux tronçons du serpent de se rejoindre et de retrouver leur chef.

Car telle est l’action multiple et une du saint baptême : en un clin d’œil, et par sa seule puissance, il extirpe le péché et réduit à néant tous ses droits acquis ; mais l’homme doit ensuite prêter son concours à la grâce du sacrement, pour surveiller en lui les penchants complices du mal toujours prêt à renaître, et continuer sans fin sur ses rejetons impurs l’œuvre d’extermination salutaire du premier jour. A la mort du péché, résultat tout divin dans sa plénitude et sa rapidité foudroyante pour l’ancien ennemi, succède pour l’esclave affranchi le long travail de la mortification de l’esprit et des sens. Mais c’est toujours la vertu du premier sacrement qui poursuit alors dans le chrétien son œuvre vengeresse ; c’est le saint baptême qui, ayant opéré seul dans le malheureux captif du péché ce que Dieu seul en effet pouvait faire, l’appelle, maintenant que ses chaînes sont tombées, à mener de concert la lutte glorieuse de son indépendance, et le convie à partager l’honneur de la victoire divine sur Satan et ses œuvres.

La répression de la chair apparaîtra de nouveau, Dimanche prochain, comme le vrai monument de notre liberté sur terre, comme la preuve authentique de la noblesse des fils de Dieu. « Que du moins, dirons-nous dès maintenant avec l’Apôtre [39], que du moins le péché ne règne plus dans votre corps mortel ; n’obéissez plus à ses désirs honteux. Ne faites plus de vos membres des armes d’injustice au service du mal ; de morts que vous étiez, soyez vraiment vivants pour Dieu ; faites de vos membres des armes de justice à sa gloire. Car le péché n’est plus votre maître, et sa tyrannie sur vous a pris fin par la grâce. Lui obéissant de nouveau, vous redeviendriez son esclave ; ne lui rendez pas contre vous ce titre de mort. Mais louez Dieu qui a brisé vos fers, et souvenez-vous qu’affranchis du péché, vous êtes devenus les serviteurs de la justice. »

Ferons-nous moins pour elle qu’on ne fait partout pour le péché son ennemi ? Certes, la justice mérite plus d’efforts de notre part que l’odieux tyran qui n’a pour ses esclaves que la honte et la mort. Et pourtant, admirable condescendance du ciel pour notre faiblesse ! saint Paul le déclare au nom du Saint-Esprit, dans l’Épître du jour : servons la justice comme nous avons servi le péché, et nous serons saints, et nous aurons la vie éternelle [40].

Humilions-nous, hélas ! et sondons nos misères. Qu’est devenue pour plusieurs, dans la voie du salut, cette ardeur dévorante avec laquelle on les voyait courir les mille sentiers du mal ? La vraie conversion cependant n’a point pour résultat l’engourdissement des facultés ; elle tourne à Dieu l’activité humaine, et l’augmente en lui rendant son but légitime, ou tout au moins ne la diminue pas, ce qui serait une injure à la grâce.

Quelles leçons donc ne nous donnent point les fils du siècle, à la poursuite de l’ambition, de l’intérêt ou du plaisir ! Que d’activité, d’industrie et de persévérance, que de souffrances souvent, que d’abnégation en tous genres et d’héroïsme à faux, pour satisfaire à la fois les sept têtes de la bête, et gagner d’être admis à tremper ses lèvres un instant dans la coupe fangeuse de Babylone [41] ! Il en est, sous les voûtes infernales, qui ont plus peiné et pâti, pour se damner, que n’ont fait les martyrs : et que de fois sans même avoir atteint la compensation prétendue qu’ils rêvaient ici-bas ! Car le troupeau de Satan n’arrive pas toujours à lui complaire au point de mériter, même un jour, les viles récompenses de ses esclaves. La justice en use autrement avec les siens ; elle n’abaisse point, elle ne trompe point ceux qui la servent. Elle affermit leurs pas dans la paix, augmente sans fin le trésor de leurs mérites, et les conduit sûrement à la perfection de l’amour. La vie de l’union divine s’épanouit alors comme spontanément à ce faîte de la justice, et s’appuie sur elle comme la fleur sur sa tige. « Celui qui est affermi dans la justice possédera la Sagesse, dit l’Esprit-Saint ; c’est en lui qu’elle prendra ses délices d’Épouse [42]. »

Pourrions-nous donc compter avec des travaux qui préparent le ciel, et devancent ici-bas les mystères de la patrie ? La vie présente, quelque longue qu’elle puisse être, paraît peu de chose à l’âme fidèle heureuse de pouvoir y prouver son amour. « Jacob, dit saint Augustin, servit deux fois sept ans [43] pour Rachel, dont le nom signifie la vision du principe, ou le Verbe, la Sagesse qui révèle Dieu. C’est elle qu’aime en effet tout homme vertueux en ce monde ; c’est pour elle qu’il travaille et souffre, en servant la justice. Comme Jacob, ce qu’il recherche dans ses labeurs, ce n’est point assurément la fatigue pour elle-même, mais la possession qu’elle doit lui valoir de Rachel en sa beauté, le repos dans le Verbe où l’on voit le principe qui est Dieu. Est-il un vrai serviteur de Dieu qui puisse avoir d’autre pensée sous l’empire de la grâce ? Que veut l’homme, quand il se convertit ? que médite-t-il, que porte-t-il en son cœur, qu’aime-t-il et désire-t-il ainsi passionnément, sinon la science de la Sagesse ? L’homme sans doute voudrait, s’il était possible, écarter le travail et la peine, pour arriver de suite aux délices de la toute belle et parfaite Sagesse ; mais cela ne se peut dans la terre des mourants. L’Écriture nous l’apprend, quand elle dit : Tu désires la Sagesse ? garde les commandements, et le Seigneur te la donnera [44]. Les commandements dont il est ici parlé regardent les œuvres de la justice, de cette justice qui vient de la foi, qui vit au milieu de l’incertitude des tentations et sous les ombres, afin qu’en croyant pieusement ce qu’elle ne comprend pas encore, elle arrive à mériter l’intelligence. « Il ne faut donc point blâmer l’ardeur de ceux qu’embrase le désir de posséder la vérité sans voiles, mais ramener leur amour à l’ordre qui est de commencer par la foi, et de s’efforcer d’arriver par l’exercice des bonnes mœurs où il tend. Dans le chemin, c’est le labeur de la vertu ; mais au terme convoité brille la Sagesse. Aime et désire dès le commencement et au-dessus de toute chose un objet si digne ; mais que l’ardeur qui te domine ait pour premier résultat, de te faire embrasser la fatigue de la route qui conduit au but où te porte l’amour. Une fois arrivé même, tu ne posséderas point dans le temps la belle vérité, sans avoir à cultiver toujours de compagnie la laborieuse justice. Quelque pénétrante et pure que puisse devenir en effet pour des mortels la vue du bien immuable, le corps qui se corrompt alourdit l’âme, et cette demeure terrestre abat toujours l’esprit sous le poids de mille soins [45]. La Sagesse est Tunique but auquel on doit tendre ; mais il faut supporter beaucoup pour l’atteindre [46]. »

L’Église, dans le Graduel, continue d’exprimer la pensée qui domine ce septième Dimanche : elle invite ses fils à venir recevoir d’elle la science de la crainte du Seigneur ; car la crainte du Seigneur est le commencement de la Sagesse [47]. Le Verset appelle de nouveau les nations, héritières de Jacob, à célébrer dans l’allégresse le don de Dieu.

ÉVANGILE.

Le peuple juif, en repoussant l’Évangile, a rejeté la lumière. Pendant que le Soleil de justice, salué par les nations, illumine de ses feux toujours croissants l’ancienne région des ombres de la mort [48], la nuit s’étend sur la terre autrefois bénie des patriarches, et les ténèbres s’épaississent à toute heure en Jérusalem. Dans l’aveuglement qui la pousse à sa perte, la synagogue justifie pleinement la parole du Sauveur : Celui gui marche dans les ténèbres ne sait où il va [49]. Elle précipite par ses démarches insensées la catastrophe qui doit l’engloutir.

Les faux prophètes et les faux christs abondent en Israël [50], depuis que le vrai Messie qu’annonçaient les Prophètes, s’est vu méconnu et traité par les siens [51] comme les Prophètes eux-mêmes [52]. Ses témoins, les Apôtres, ont tenté en vain d’obtenir de Juda la rétractation du fatal reniement du prétoire. Juda cependant sait mieux que personne que les temps sont accomplis, depuis que le sceptre est tombé de ses mains [53] ; et Juda, qui repousse dédaigneusement la royauté spirituelle du Sauveur des hommes, n’en continue pas moins d’attendre sans cesse et de chercher partout le christ qu’il a rêvé, le messie qui lui rendra sa puissance. Les docteurs juifs n’ont point encore, pour écarter l’autorité écrasante d’oracles qui les confondent, inventé la sentence de leur Talmud : « Maudit soit celui qui suppute les temps de la venue du Messie [54] ! » Quels sentiments ne doivent donc pas s’agiter dans l’âme d’un peuple qui, tant de siècles durant, vécut de l’attente d’une heure solennelle entre toutes : lorsqu’enfin il se rend compte que la dernière limite des temps annoncés lui échappe et va le contraindre à renier son passé, ou le forcer d’avouer, au pied de la croix qu’il a dressée, son erreur lamentable !

Une étrange anxiété s’empare alors de la nation déicide. L’esprit de vertige préside à ses conseils. Dans l’effarement de la fébrile démence qui remplace en son cœur l’attente sereine et soumise des patriarches, elle voit le Christ en tous les révoltés ; elle qui n’a point voulu du fils de David se livre à des hommes sans nom, et s’abandonne à tous les aventuriers qui se la disputent au nom de l’insurrection contre Rome et de l’indépendance chimérique de la patrie terrestre. Bientôt l’anarchie et la confusion sont au comble dans la Judée ; les partis hostiles portent leurs querelles sanglantes jusqu’au fond du sanctuaire. La fille de Sion suit ses faux christs au désert [55], et s’y dresse à l’émeute ; elle en revient, pour remplir la ville sainte des voleurs de grand chemin et de tous les sicaires errants dans les solitudes. Longtemps à l’avance, Ezéchiel avait dit : « Tes prophètes, Israël, sont devenus pareils aux renards du désert ; malheur aux prophètes insensés qui ne débitent que des visions menteuses [56] ! » Et Isaïe s’écriait : « A cause de cela, le Seigneur frappera ce peuple ; il n’aura pitié ni des jeunes gens, ni des enfants, ni des veuves, parce qu’ils sont tous hypocrites et criminels, et que leur bouche ne profère que folies [57]. » Le temps est proche ; l’heure vient, pour ceux qui sont dans la Judée, de fuir aux montagnes [58].

C’était la recommandation du Seigneur ; et, en effet, l’histoire nous montrera bientôt les chrétiens de Jérusalem quittant la ville réprouvée, sous la conduite de Siméon leur évêque [59]. Avec eux s’enfuit la dernière espérance de Sion ; Dieu va venger son Christ. Déjà le signal de ruine, le coup de sifflet divin qu’entendait le prophète [60], a retenti au delà des mers ; et ils accourent, ils viennent d’Italie sur les navires qu’avait vus Balaam [61] ceux qui doivent dévaster les Hébreux. Le chef annoncé par Daniel aborde enfin l’ancienne terre des promesses ; la désolation et la ruine qui l’accompagnent resteront après lui [62]. Laissons les Juifs hâter leur perte et revenons à l’Église qui s’élève, au même temps, si grande et si belle sur la pierre d’angle rejetée de la synagogue [63]. A cause de l’absence de cette pierre, où les ouvriers de Sion n’ont point su reconnaître la base nécessaire qui portait leur ville, Jérusalem tombe en Judée ; mais elle reparaît plus brillante sur les collines [64] où Céphas [65], prince des Apôtres, a transplanté son fondement éternel. Affermie sur le roc divin, elle ne craindra plus la violence des flots ni les vents déchaînés contre ses murailles [66]. Les faux prophètes et tous ces ouvriers de mensonge, qui sapèrent si fatalement les murs de l’ancienne, ne manqueront point cependant à la nouvelle Jérusalem. « Car il est nécessaire que le scandale arrive », disait le Seigneur [67] ; et l’Apôtre, parlant de l’hérésie, le plus grand des scandales : « Il faut, dit-il de même, qu’il y ait des hérésies,pour que la vertu des bons soit manifestée dans l’épreuve de leur foi [68]. »

Pour chaque chrétien, en effet, comme pour l’Église entière, la garantie de l’édifice de la sainteté repose sur la fermeté de la foi qui en est le fondement. L’Esprit-Saint se refuse à bâtir sur un fondement ruineux ou mal assuré. Quand surtout il doit conduire une âme jusqu’aux régions supérieures de l’union divine, il exige d’elle tout d’abord une foi non moins supérieure, dont l’héroïsme puisse affronter victorieusement les luttes purificatrices au prix desquelles se conquièrent la lumière et l’amour. A tous les degrés de la vie chrétienne d’ailleurs, c’est la foi qui fournit à l’amour son aliment et sa substance [69], comme c’est elle aussi qui donne aux vertus leurs motifs surnaturels et les rend dignes de former le cortège royal de la sainte charité. Le développement d’une âme ne saurait donc point dépasser la mesure de sa foi. L’ampleur de celle-ci, sa plénitude croissante, sa rectitude en tout, assurent les progrès que le juste doit accomplir ; tandis que la sainteté qui prétend marcher de concert avec une croyance amoindrie, n’est elle-même qu’une sainteté bien équivoque et sujette aux plus redoutables illusions. Il était donc véritablement bon et salutaire que la foi fût tentée, parce qu’elle rayonne davantage et s’affermit dans l’épreuve. Saint Paul a célébré magnifiquement, dans l’Épître aux Hébreux [70], les triomphes de la foi des anciens. L’alliance nouvelle pouvait-elle se trouver dépourvue des luttes glorieuses qui furent le mérite de nos pères au temps des figures ?

C’est par leur foi victorieuse dans la parole de la promesse, que tous ces dignes ancêtres du peuple chrétien ont mérité que Dieu même leur rendît témoignage [71], Pour nous qui possédons dans la joie l’objet de leurs héroïques espérances, l’épreuve sans doute n’est plus comme pour eux dans l’attente. Mais l’hérésie, née de l’orgueil de l’homme et de la malice de l’enfer, l’hérésie et ses annexes variées, qui sont les multiples diminutions de la vérité dans le monde [72], sauront nous faire un mérite de la bienheureuse possession des réalités qu’ils saluaient de loin dans leurs larmes [73]. L’homme voudra, malgré l’Église, mêler à la révélation d’en haut ses vaines pensées ; et le prince du monde [74] appuiera ces tentatives audacieuses d’altération du Verbe. Mais la Sagesse, jamais vaincue [75], y trouvera pour les siens l’occasion des plus belles victoires ; de là cette permission si large laissée par Dieu aux sectes ennemies, dès les premiers jours du christianisme et dans tous les temps, de se produire au grand jour. C’est dans le champ des combats contre l’erreur que l’Église, produisant au soleil sa divine armure [76], apparaît toute resplendissante de cette vérité absolue qui est la splendeur du Verbe son Époux [77] ; c’est par le triomphe personnel sur l’esprit de mensonge et l’adhésion spontanée aux enseignements du Christ et de son Église, que le chrétien se manifeste en toute vérité fils de la lumière [78], et devient lui-même la lumière du monde [79].

Le combat n’est point sans périls pour le chrétien qui veut garder dans son intégrité la foi de sa mère l’Église. Les ruses de l’ennemi, son hypocrisie calculée et patiente, l’adresse perfide avec laquelle il sait mouvoir dans l’âme, presque à l’insu de l’âme même, mille ressorts secrets qui l’inclinent à l’erreur, finissent souvent par prévaloir contre la lumière en diminuant ses rayons, s’ils ne l’éteignent entièrement. La victoire néanmoins reste assurée à ceux qui s’inspirent des enseignements de notre Évangile. Méditons-les dans la reconnaissance et l’amour ; car c’est par eux que l’éternelle Sagesse exauce la prière que nous lui adressions au temps de l’Avent, la suppliant de venir nous enseigner le chemin de la prudence [80]. La prudence, amie du sage [81], gardienne de ses trésors et sa très sûre défense, n’a point en effet de danger plus grand à écarter de celui qui la prend pour compagne, que le danger du naufrage de la foi [82], dont la perte entraîne tout le reste dans l’abîme. Acquérons à tout prix [83] cette prudence du serpent qui s’allie si bien, dans les disciples de Jésus-Christ, avec la simplicité de la colombe [84]. Quand nous l’aurons, la distinction se fera pour nous d’elle-même entre les docteurs que nous devons fuir et ceux qu’il convient d’écouter, entre les faussaires du Verbe et ses interprètes fidèles.

« Vous les reconnaîtrez à leurs fruits », dit l’Évangile ; et l’histoire justifie la parole du Sauveur. Sous la peau de brebis dans laquelle ils veulent tromper les simples, les apôtres du mensonge exhalent toujours une odeur de mort. Leurs habiletés de paroles [85] et leurs flatteries intéressées [86] ne dissimulent point le vide de leurs œuvres [87]. N’ayez donc rien de commun avec eux [88]. Les fruits inutiles ou impurs des ténèbres, les arbres d’automne et deux fois morts [89] qui les portent sur leurs branches desséchées, auront le feu pour partage. Si vous avez été vous-mêmes ténèbres autrefois, maintenant que vous êtes devenus lumière dans le Seigneur par le baptême ou le retour d’une conversion sincère, montrez-vous tels : produisez les fruits de la lumière en toute bonté, justice et vérité [90]. A cette condition seulement vous pourrez espérer le royaume des cieux, et vous dire dès ce monde les disciples de cette Sagesse du Père qui réclame pour elle aujourd’hui notre amour.

En effet, dit l’Apôtre saint Jacques, semblant commenter l’Évangile de ce jour, « est-ce que le figuier peut porter des raisins, ou la vigne produire des figues ? Est-ce que la fontaine peut donner de l’eau amère et de l’eau douce à la fois ? Et maintenant qui d’entre vous prétend passer pour sage ? Qu’il le prouve en montrant dans ses œuvres et toute sa vie la douceur de la Sagesse. Car il y a une sagesse amère et trompeuse qui n’est point d’en haut, mais de la terre et de l’enfer. La Sagesse qui est d’en haut est d’abord toute chaste et pure, ensuite amie de la paix, modeste, sans attache à son sens, toujours d’accord avec les bons, pleine de miséricorde et de fruits de bonnes œuvres, ne jugeant point les autres et sans arrière-pensée. Les fruits de justice qu’elle produit se sèment dans la paix au sein des pacifiques [91]. »

L’Antienne de l’Offertoire a été choisie, d’après Honorius d’Autun [92], pour rappeler le sacrifice de mille victimes offert à Gabaon par Salomon, dans les premiers jours de son règne ; à la suite de ce sacrifice, ayant à demander ce qu’il voudrait au Seigneur, il désira et obtint la Sagesse, avec les richesses et la gloire qu’il n’avait point recherchées [93]. Il ne tient qu’à nous que le Sacrifice qui s’apprête soit agréé pareillement et mieux encore. Car c’est la Sagesse incarnée qui s’y offre en personne au Dieu Très-haut, désirant nous mériter tous les dons du Père souverain et se donner elle-même.

Nouveau trait qui confirme ce que nous avons remarqué du caractère mystérieux de ce septième Dimanche, consacré plus spécialement à l’éternelle Sagesse : le Verset de l’Écriture qui accompagnait autrefois pour aujourd’hui l’Antienne de l’Offertoire [94], est le même qui ouvre, au Pontifical romain, la splendide fonction de la Consécration des Vierges : Et maintenant nous vous suivons de tout notre cœur, nous vous craignons et cherchons votre face ; ne nous repoussez pas ; mais agissez avec nous d’après votre douceur et selon la multitude de vos miséricordes [95]. C’est en chantant ces mots, qu’à l’appel du Pontife, les élues du Seigneur s’avancent vers l’autel où doit se consommer leur alliance.

La Secrète rappelle à Dieu comment la multiple variété des victimes légales, célébrées dans l’Offertoire, a trouvé son unité dans l’oblation du grand Sacrifice.

D’après Honorius d’Autun , l’Antienne de la Communion , qu’il ne faut point séparer du Psaume 30 d’où elle est tirée, exprime la prière du fils de David demandant à Dieu la Sagesse et l’obtenant aussitôt [96]. Si quelqu’un de vous désire la Sagesse, dit l’apôtre saint Jacques, qu’il la demande à Dieu qui donne à tous sans compter et ne rebute personne ; elle lui sera donnée [97].

La faute première a tellement vicié l’homme, il est si loin de l’union divine à son entrée dans la vie, qu’il ne peut de lui-même ni laver ses souillures, ni s’engager dans la voie qui mène à Dieu. Il faut que le Seigneur, comme un médecin généreux et patient, fasse tous les frais de sa guérison, et, même après qu’il est relevé, le soutienne et le conduise. Disons avec l’Église, dans la Postcommunion.

Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

Dans la succession des introïts après la Pentecôte, le mode étrange selon lequel très souvent s’interrompt l’ordre des psaumes, est remarquable. Ainsi le Ve Dimanche prend son introït au psaume 26, le VIe au 27e, puis se présente une lacune de dix-neuf psaumes avant le VIIe dimanche qui tirera son introït du psaume 46 ; le VIIIe dimanche l’empruntera au 47e, puis nouvelle lacune de cinq psaumes, interrompue au IXe dimanche par le psaume 53 ; ensuite viennent le Xe dimanche avec le psaume 54, le XIe avec le 67e, le XIIe avec le 69e et ainsi de suite. Comment expliquer cette anomalie ? Les stations hebdomadaires du mercredi, du vendredi et du samedi auraient-elles fait primitivement partie de la série ? Ou bien, avant saint Grégoire le Grand, chaque jour aurait-il eu son propre introït, en sorte que les lacunes que nous observons maintenant ne seraient dues qu’à l’élimination pure et simple des messes quotidiennes du Sacramentaire et de l’Antiphonaire ? Faute de documents, nous allons un peu à tâtons dans les ténèbres, tout en concédant que les hypothèses proposées ne sont pas dépourvues de probabilités.

Quelle que soit d’ailleurs la solution de la question, même si jamais l’on ne peut reconstituer la série primitive des messes dominicales, il importe pourtant toujours à l’histoire de la liturgie romaine de constater l’antiquité reculée de son formulaire euchologique, lequel apparaît à nos yeux d’autant plus vénérable qu’il est plus mutilé.

L’introït est tiré, comme on l’a vu, du psaume 46, qui prélude à la rédemption messianique universelle, sans barrières nationales. « Vous tous, ô peuples, battez des mains, jubilez à Dieu avec des hymnes de gloire, parce que le Seigneur s’est montré le Très-Haut, le terrible, le souverain Dominateur sur la terre. » Le Très-Haut, parce que son conseil de paix est impénétrable aux démons, qui n’ont pas pu y mettre obstacle ; terrible, parce qu’il a causé la perte de Satan dans l’effort suprême que celui-ci faisait pour étendre son domaine sur Lui, innocent, en le frappant de mort ignominieuse : « O mors, ero mors tua, morsus tuus ero, o inferne » ainsi qu’il en avait déjà menacé le démon par l’intermédiaire du prophète Osée ; le souverain Dominateur sur la terre, parce que le divin Crucifié étend ses pacifiques conquêtes sur tous les peuples et les enrôle dans ses milices, ne contraignant pas mais persuadant, avec les suaves procédés de l’amour. Ainsi le service même que l’homme prête à Dieu, non seulement est l’unique qui convienne à la majesté du Seigneur, qui est Esprit et veut être adoré en esprit et en vérité, mais il est aussi celui qui convient le mieux à la noblesse et à la dignité de la nature humaine, dont il sauvegarde toujours les exigences naturelles. En effet, la foi ne rabaisse pas, mais au contraire élève à d’inaccessibles régions surnaturelles la raison humaine, et la charité de Dieu, loin de faire violence au libre arbitre, rend son acte plus libre, plus volontaire, plus énergique, puisque rien ne peut être plus voulu et plus dignement voulu par la créature raisonnable que Celui qui se définissait à Abraham : Omne bonum. La collecte de ce jour touche précisément la question des rapports entre la liberté de notre vouloir et l’indéfectibilité de la divine Providence, dont les desseins ne peuvent faillir. La sainte liturgie, pour être populaire, ne peut faire ici une dissertation théologique relative à la conciliation entre ces deux mystères, c’est-à-dire entre le cœur humain et le Cœur de Dieu. Toutefois, étant donné qu’il est impossible que la divine prédestination vienne à faillir, la liturgie en indique d’une manière simple et populaire le mode même. Dieu veut nous sauver. Eh bien ! Pour atteindre ce but, il écarte de notre chemin les obstacles, et il nous donne toutes ces grâces qu’il sait nous être nécessaires et efficaces pour persévérer dans notre sainte vocation à la vie éternelle.

Dans le passage de l’épître aux Romains (6, 19-23) l’Apôtre, considérant la vertu encore peu affermie de ses correspondants, déclare vouloir exposer une doctrine plutôt simple, afin de leur inspirer une vive horreur de l’état de dépravation où les avait conduits l’idolâtrie. Au souvenir de leurs crimes passés, les Romains rougissaient ; mais l’Apôtre, en maître prudent, rie leur épargne pas cette confusion, qui, dans les âmes pieuses, est toujours une source d’humilité et de contrition. C’est pourquoi Dieu permet parfois pour ses élus des chutes honteuses, comme le reniement de Pierre, afin que l’humiliation qui en résulte pour l’âme et la vive contrition qu’elle en éprouve, soient la meilleure garantie des dons magnifiques que Dieu lui réserve dans l’avenir. L’humiliation et la contrition assurent l’âme contre la chaleur fébrile de l’amour-propre.

Le répons devant être chanté par le soliste est le même qui fut exécuté après la première lecture à l’occasion des grands scrutins baptismaux à Saint-Paul, le mercredi après le IVe dimanche de Carême. Il est tiré du psaume 33. Le Psalmiste, à la lumière prophétique de l’Esprit, voit les futures générations chrétiennes qui, par l’intermédiaire du Christ son Fils, remonteront jusqu’à lui comme au chef de leur race, au patriarche des rachetés, au dépositaire des divines promesses, pour être instruites des voies de la justice. Il ne peut se refuser à une telle mission, et commence donc son enseignement en inculquant la crainte de Dieu, principe de toute sagesse. Cette crainte sainte jaillit, comme une conséquence nécessaire, de la connaissance de Dieu et de tous les droits qu’il a à notre obéissance et à notre service.

Mais même avant de nous apprendre la crainte, il nous invite à nous approcher avec confiance de Dieu pour être illuminés. Cette confiance est, elle aussi, le fruit de la connaissance de Dieu, car ceux qui ne le connaissent pas pourront seuls trouver de la difficulté à s’approcher de Lui. Les âmes au contraire qui savent que Dieu est le bien commun, le bien le plus personnel à chaque créature, que chacune, par le fait même qu’elle est sortie des mains et du cœur de Dieu, peut saluer comme son bien, les âmes qui sentent ces choses, ne peuvent pas ne pas nourrir une très vive confiance en Dieu.

Le verset alléluiatique répète Antienne de l’introït. Battre des mains en l’honneur du Seigneur peut fort bien s’entendre de la nécessité d’accompagner par nos œuvres les louanges que nous rendons à Dieu par nos lèvres. Bien plus, selon l’avertissement de saint Philippe Néri, nous devons veiller à ce que notre dévotion consiste plutôt en actes qu’en paroles ; de celles-ci, nous devons être extrêmement sobres, soit pour éviter la vaine gloire, soit encore parce que les paroles sont comme l’abondant feuillage qui couvre un arbre touffu ; si tout l’amour s’en va dans les feuilles et dans les branches, c’en est fini des fruits.

La lecture évangélique (Matth., vu, 15-21) nous enseigne la prudence surnaturelle dans le discernement des voies de Dieu, Pour connaître la vertu d’une personne, la règle la plus sûre est de regarder ses œuvres. Les paroles bonnes et saintes coûtent peu, et le démon lui-même sait citer avec une onction apparente la sainte Écriture [98]. Ce qui importe, c’est de se vaincre soi-même, pour accomplir la sainte volonté de Dieu. Aujourd’hui surtout que la fausse gnose oppose à la doctrine traditionnelle catholique de soi-disant magistros prurientes auribus comme le prévoyait déjà l’Apôtre, cette règle est très importante pour distinguer tout de suite les vrais maîtres des faux. Dans ce but, il faut avant tout tenir compte de ce qu’est vraiment la vie spirituelle, c’est-à-dire non pas une joyeuse promenade sportive, mais une marche militaire vers la vie éternelle. Il n’est donc pas question de dilettantisme, mais il s’agit d’accomplir un devoir ardu.

De plus, il faut observer aussi quelle est l’autorité de celui qui se présente aux autres comme maître de vérité. Pour accomplir dignement ce ministère, il faut d’abord pratiquer et vivre ce qu’on veut enseigner aux autres par la parole, en sorte que la prédication la plus efficace soit le bon exemple. En tout cas, les belles théories ne suffisent pas, et soit pour la propre sanctification, soit pour celle d’autrui, les bonnes œuvres, et les œuvres très bonnes sont requises.

Il y a une intime liaison entre l’antienne de l’offertoire d’aujourd’hui, tirée de Daniel (3, 40) et la Secrète. Ananias, étant avec ses deux compagnons dans la fournaise ardente de Babylone, et considérant qu’alors il n’était plus possible d’offrir au Seigneur le sacrifice légal des agneaux et des taureaux, puisque le temple était détruit, lui offre le sacrifice spirituel de la foi et du martyre. De même, au lieu des victimes inconscientes de l’Ancienne Loi, le peuple chrétien associe l’offrande du cœur au sacrifice eucharistique, afin que, au lieu de réserver au culte du Seigneur, comme les Juifs, une petite partie de ses biens, l’esprit de l’homme se soumette au domaine de Dieu, et sit Deus omnia. in omnibus.

La secrète reprend un concept déjà développé admirablement dans l’épître aux Hébreux sur l’unité du sacrifice de la Nouvelle Loi, ce qui démontre la supériorité du sacerdoce du Christ sur celui d’Aaron. Celui-ci avait besoin d’une quantité de sacrifices rituels, qui, par le fait même de leur continuelle répétition, accusaient leur insuffisance. Le Christ au contraire a, par un unique sacrifice, accompli l’office de son pontificat, et à travers tous les siècles passés et futurs, il a conféré la grâce et la sainteté à ses fidèles. La force de l’argumentation de l’Apôtre relativement à l’unité du sacrifice du Christ — dont le sacrifice d’Abel innocent est un délicat symbole — n’est pas affaiblie par le fait de l’incessant renouvellement de l’oblation eucharistique, puisque par elle on commémore la Victime du Calvaire et on donne un caractère de pérennité à son immolation qui dépasse les jours et les lieux, et qui est vraiment universelle, c’est-à-dire éminemment catholique.

De plus, le Christ sur la croix ne voulut pas être seul, et il nous rendit tous solidaires de son acte expiatoire, associant à son sacrifice celui de l’humanité croyante. Pour cette raison, tout ce que nous faisons et souffrons pour lui entre dans la sainteté de cet holocauste, si bien que l’Apôtre a pu considérer les labeurs de son ministère comme l’achèvement de la passion de Jésus pour le bien de l’Église. Voici le texte de cette magnifique collecte :

SecretaSecrète
Deus, qui legálium differéntiam hostiárum unius sacrifícii perfectione sanxísti : accipe sacrifícium a devótis tibi fámulis, et pari benedictióne, sicut múnera Abel, sanctífica ; ut, quod sínguli obtulérunt ad maiestátis tuæ honórem, cunctis profíciat ad salútem. Per Dóminum.O Dieu, qui avez sanctionné les divers sacrifices offerts sous la loi par la perfection d’un sacrifice unique, recevez ce sacrifice que vous présentent vos dévots serviteurs, et rendez-le saint au moyen d’une bénédiction pareille à celle qu’obtinrent les dons d’Abel, afin que ce que chacun de nous a offert en l’honneur de votre majesté, profite à tous pour le salut.

Le souvenir de ces relations entre notre vie spirituelle et le sacrifice du Calvaire est très apte à alimenter la solide piété chrétienne surtout au moment du Sacrifice Eucharistique, où toute la communauté des fidèles présente à Dieu, par la main du prêtre, l’offrande de l’Agneau immolé pour les péchés du monde, célébrant ainsi « les mystères de la mort de Jésus ».

L’antienne durant la distribution de la sainte Communion est tirée du psaume 30. « Prêtez l’oreille, ô Seigneur, et venez m’arracher aux dents de l’adversaire. » Prêter l’oreille signifie de la part de Dieu la condescendance, et, par suite, le caractère gratuit de la divine grâce. La raison pour laquelle le Psalmiste nous décrit si souvent ses souffrances, est que notre misère est précisément ce qui détermine le cœur de Dieu à la miséricorde, en sorte que plus grandes sont nos misères, plus elles sont puissantes sur le cœur si bon de Dieu. Dans la prière d’action de grâces de ce jour, il est fait allusion au caractère médicinal de la divine Eucharistie, véritable antidote contre le virus du fruit fatal de l’Éden. Dans ce Sacrement en effet, sous le léger voile de la foi, le Christ nous nourrit du bois très amer du Calvaire, — in amaro salus, — et par sa mort triomphale, il nous immunise contre notre propre mort.

PostcommunioPostcommunion
Tua nos, Dómine, medicinális operátio, et a nostris perversitátibus cleménter expédiat, et ad ea, quæ sunt recta, perdúcat. Per Dóminum nostrum.Que votre action qui guérit, ô Seigneur, nous délivre doucement des tendances perverses, et nous conduise à ce qu’il y a de bien et de droit.

Même le pain azyme, dont se sert l’Église latine pour offrir à Dieu le divin Sacrifice, symbolise bien le mystère de douleur qui enveloppe le Sacrement de la mort du Christ. L’azyme fut en effet le pain de l’angoisse qui tourmenta nos pères, quand les Égyptiens les pressèrent de s’en aller d’Égypte. Ils n’eurent pas le temps alors de laisser fermenter leur pain, et ils se nourrirent de l’azyme arrosé de leurs larmes. Toutefois quand ils furent entrés dans la terre promise, ils s’assirent joyeusement à table et se nourrirent du pain de la fleur de farine. Ainsi fait Dieu avec le peuple chrétien. Ce monde est l’Égypte, et nous nous nourrissons en pleurant de l’azyme des exilés, anticipant par l’espérance ce jour fortuné où, arrivés dans l’éternité, et posant le pied sur la terre promise, nous serons nourris par le Christ du pain des enfants, dans les splendeurs de la béatitude.

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

Esclaves du péché — esclaves de Dieu.

Nous avons pris plaisir, les dimanches précédents, à faire ressortir une pensée et une image qui nous ont permis de caractériser d’un mot chacun de ces dimanches. Nous avons vu dans le Christ notre hôte généreux (2e dimanche), le bon Pasteur (3e dimanche), le divin Pêcheur (4e dimanche). Le cinquième dimanche a été le dimanche de l’amour du prochain. Quant au sixième dimanche, nous l’avons intitulé : Baptême et Eucharistie. Maintenant commence une série de dimanches qui nous offrent une antithèse. Ils nous montrent deux camps : ici, le royaume de Dieu ; là, le royaume du monde ; ici, le bon chrétien ; là, le mauvais chrétien. Ce parallèle nous est présenté pendant ces dimanches, sous différentes images.

1. Premières impressions. — Le dimanche d’aujourd’hui nous montre deux images opposées : une image guerrière et une image pacifique.

a) La première est une image guerrière. Le livre des Exercices de saint Ignace en donne une vive peinture. Nous voyons la plaine de Babylone. Sur un trône de feu et de fumée est assis le roi du monde, Lucifer. Il rassemble tous ses soldats. Il leur donne l’ordre de s’en aller dans tout pays et dans toute ville pour tenter les hommes. Ils doivent jeter leurs chaînes et tendre leurs filets pour soumettre beaucoup de sujets à leur roi. Lucifer indique aussi à ses soldats les moyens de captiver les hommes. C’est d’abord, par le désir des biens terrestres ; puis, par la recherche du vain honneur du monde : cela les conduit à l’orgueil indomptable. Nous voyons les soldats de Lucifer s’en aller pour exécuter avec zèle leur mission. Si nous nous demandons quelle est la solde des soldats de Lucifer, nous apprenons avec horreur que l’unique solde de ces soldats, c’est la mort, la mort éternelle. — Nous voyons une autre réunion de guerriers. C’est dans la plaine de Jérusalem. Là aussi, un trône est érigé. Sur ce trône est assis le Roi Jésus-Christ : u Tous les peuples applaudissent, car terrible est le grand Roi de l’univers entier » (Intr.). Il enrôle ici aussi des soldats pour son service. Il les envoie conquérir et agrandir le royaume de Dieu. Ils doivent aller dans toute ville, dans toute maison. Le Christ, lui aussi, indique les moyens de soumettre les hommes à son empire : ses soldats doivent les amener au mépris du monde, à l’acceptation de la souffrance et de la croix, et enfin à l’humilité. Si nous demandons quelle est la récompense des soldats du Christ, on nous répond : c’est la vie éternelle. — Est-ce que l’Église nous laisse le choix entre ces deux récompenses ? Non, nous avons déjà choisi. Déjà, dans le baptême, nous avons renoncé au service de Lucifer. Quand le prêtre nous demanda : Renoncez-vous au démon, nous avons répondu : j’y renonce. Nous avons reconnu de tout cœur le Christ pour notre véritable Roi. Si l’Église a mis sous nos yeux cette image, c’était simplement pour que nous nous rappelions avec gratitude notre délivrance du joug de l’esclavage. Le dimanche est un jour de Pâques, un jour de baptême. Renouvelons nos promesses du baptême. Ne soyons pas des traîtres, des déserteurs, en adhérant tantôt à un parti, tantôt à l’autre. Rangeons-nous aujourd’hui de toute notre âme sous les étendards du divin chef de l’armée du ciel.

b) La seconde est une image pacifique. Nous entrons dans un beau jardin bien entretenu où se trouvent des arbres fruitiers innombrables. Dans ce jardin, le jardinier et ses aides travaillent inlassablement. A travers le jardin coule un ruisseau qui apporte la fraîcheur aux arbres. Le soleil brille avec une chaleur douce ; il fait mûrir les pommes rougissantes. Or, le maître de la maison vient trouver le jardinier. Tous les deux examinent un arbre qui a bien des feuilles, mais ne porte aucun fruit. Le maître secoue pensivement la tête et dit : « Il y a des années que je viens ici pour chercher des fruits sur cet arbre et je n’en trouve pas. Abats-le donc. Pourquoi occupe-t-il la terre ? » Le jardinier intercède auprès du maître : « Maître, laisse-le encore debout cette année. Je creuserai tout autour et je mettrai du fumier. Peut-être portera-t-il des fruits dans l’avenir. Sinon, tu pourras le faire abattre » (Luc, 13, 7 sq.). Le père de famille se laisse toucher. Tous les deux s’en vont. Ils voient les arbres chargés de beaux fruits et se réjouissent dans leur cœur. — Comprenons-nous cette seconde image ? Dans la première, il nous fallait choisir entre le Christ et le diable. Dans la seconde, nous entrons dans le jardin le l’Église. Chaque chrétien est un arbre de ce jardin. Le jardinier, c’est le Christ qui plante, nourrit, lie et appuie les arbres. Le ruisseau a jailli de la plaie du côté du Christ et coule dans les sacrements à travers le jardin de l’Église. Le soleil est le Saint-Esprit qui fait mûrir les fruits. Or, le père de famille circule avec le jardinier à travers les rangées d’arbres. Maintenant, Dieu le Père et le Christ visitent notre âme. Ils l’examinent en tenant compte non de la belle couronne de feuilles, mais des fruits, c’est-à-dire : des bonnes œuvres. Ils s’arrêtent devant un arbre. C’est moi. Hélas ! J’ai bien des feuilles, mais peu ou pas de fruits. Le Père de famille me regarde avec sévérité, mais le Christ prie pour moi. Il prie en ce moment à la messe ; il rappelle sa Croix.

2. La messe (Omnes gentes). — L’Introït donne souvent l’impression générale du jour. Aujourd’hui, c’est une impression pascale. Le Christ, le Roi glorifié, trône au-dessus de nous. La raison de la joie pascale, c’est la vie divine. Le psaume 46 dans son entier expose cette raison. Dieu a vaincu en nous l’ennemi de notre âme, il nous a choisis pour son héritage. Notre seul souci, notre seul désir doit être d’écarter l’ennemi de notre âme.

Oraison : Les enfants de Dieu demandent à leur Père, dont la Providence sage veille sur eux, de leur donner les moyens convenables pour arriver à la véritable vie...

Maintenant, notre docteur se présente de nouveau devant nous et, dans l’Épître (Rom. 6, 19-23), nous fait jeter un regard sur le passé pour nous rappeler tout notre bonheur et aussi la grande tâche qui s’impose à nous. Saint Paul nous présente dans une puissante antithèse deux images : l’esclave du péché et l’esclave de Dieu. Autrefois, avant notre conversion, nous étions soumis à la tyrannie du péché et nous mettions toutes nos forces à son service. Maintenant, nous servons Dieu et nous devons mettre notre âme, notre corps et notre vie à son service. C’est là la véritable liberté. Le fruit d’une telle vie, c’est la sainteté, et sa fin est la béatitude éternelle. « Mais maintenant que vous êtes délivrés du péché, vous avez comme fruit la sainteté, et comme fin la vie éternelle ». Ce sont là des paroles que le monde entier devrait méditer.

Au Graduel, c’est notre Mère l’Église qui veut nous enseigner cet esclavage de Dieu, le « fruit du Seigneur ». Par là nous deviendrons des « hommes de lumière ». L’Alléluia, lui aussi, est un chant joyeux de Pâques.

Le disciple nous a parlé des fruits de la vie au service du péché et de la vie au service de Dieu. Nous entendons maintenant le même enseignement de la bouche du Maître. L’Évangile est un extrait du Sermon sur la montagne. Jésus y parle des tentateurs (faux-prophètes) et nous indique à quels signes nous les reconnaîtrons : leurs œuvres. Que veut nous dire l’Église ? Elle nous enseigne à distinguer la véritable vie chrétienne de la fausse. On reconnaît l’arbre à ses fruits ; de même on reconnaît le vrai chrétien non pas à ses paroles pieuses, mais à la manière dont il accomplit la volonté de Dieu. L’Évangile nous propose un sérieux examen de conscience : Gardons-nous de l’illusion ; sommes-nous un bon arbre avec de bons fruits ?

L’Offertoire et la Secrète sont aujourd’hui d’importantes prières sacrificielles, qui empruntent leurs images aux rites de l’Ancien Testament et nous rappellent de nouveau la supériorité de la messe. Le fruit du Saint-Sacrifice est, aujourd’hui, la force et la grâce d’accomplir la volonté de Dieu, d’être un esclave de Dieu, un bon arbre.

[1] 3 Reg. 1, 45.

[2] 3Reg. 1, 39.

[3] I Reg. 7, 3.

[4] Ps. 151 apocr.

[5] I Reg. 17, 37.

[6] I Reg. 17, 37.

[7] Ps. 56, 4.

[8] Lundi : 1, 28-40
Mardi : 2, 1-9
Mercredi : 3, 5-13
Jeudi : 4, 21-34
Vendredi : 5, 1-9
Samedi : 7, 51 ; 8, 1-12

[9] Prov. 4, 5-9.

[10] I reg. 18, 7.

[11] Luc. 1, 66.

[12] I Reg. 17, 26 & 21, 11.

[13] 2 Reg. 1, 21.

[14] 2 Reg. 7, 8.

[15] Prière de Manassé, apocr.

[16] Ps. 50, 5-6.

[17] Ce répons, le 8ème de la Fête de la Sainte Trinité, est repris tous les dimanches après la Pentecôte.

[18] Is. 6, 3.

[19] I. Jn. 5, 7.

[20] Ps. 92, 2.

[21] Le Seigneur a régné, il s’est revêtu de gloire, lorsqu’en ressuscitant des morts il s’est adjoint le chœur des Saints : Le Seigneur s’est revêtu de force, parce qu’il a détruit l’empire du démon, et l’a ceinte autour de ses reins, lorsqu’il est remonté vers son Père, entouré de la multitude des Anges. (S. Jérôme). Selon S. Augustin, notre Seigneur se couvrit de gloire et de beauté dans ses souffrances, de force dans l’ignominie, et, quand il se ceignit d’un linge retombant devant lui (præcinxit se), pour laver les pieds de ses Apôtres, sa puissance éclata dans son humilité.

[22] Matth. 7, 15.

[23] Ps. 140, 2.

[24] Matth. 7, 18.

[25] In II Nocturno, ex Epist. ad Nepotianum.

[26] Rom. XII, 11.

[27] Matth. 24, 12

[28] Ep. ad Nepot., 4.

[29] Matth. 8, 12

[30] Isai. XI, 10.

[31] Matth. 8, 11.

[32] Vivat rex in aeternum : Ant. du Magnificat des 1ères Vêpres

[33] Rom. 6, 11.

[34] Ibid. 7, 14.

[35] Job. 3, 18.

[36] II Cor. 5, 21.

[37] Col. 3, 5-9.

[38] Luc. 11, 21.

[39] Rom. 6, 12-18.

[40] Ibid. 19-23.

[41] Apoc. 17, 7.

[42] Eccli. 15, 1-8.

[43] Gen. 29, 18-30.

[44] Eccli. 1, 33.

[45] Sap. 9, 15.

[46] Aug. Contra Faust., 22, 50-58.

[47] Psalm. 110, 10.

[48] Isai. 9, 2.

[49] Jean. 12, 35.

[50] Matth. 24, 24.

[51] Jean. I, 11.

[52] Matth. XXIII, 29-32.

[53] Gen. 49, 10.

[54] Tract. Sanhedr. C. X.

[55] Matth. 24, 26.

[56] Ezech. 13, 1-8.

[57] Isai. 9, 17.

[58] Matth. 24, 16.

[59] Eus. Hist. eccl., 3, 5.

[60] Isai. 5, 20.

[61] Num. 24, 24.

[62] Dan. 9, 26-27.

[63] Psalm. 117, 22.

[64] Isai. 2, 2.

[65] Jean 1, 42.

[66] Matth. 7, 24-27.

[67] Ibid. 18, 7.

[68] I Cor. 9, 19.

[69] Heb. 11, 1.

[70] Ibid. 4-40.

[71] Heb. 11, 2, 39.

[72] Psalm. 11, 2.

[73] Heb. 11, 13.

[74] Jean. 16, 11.

[75] Sap. 7, 3o.

[76] Eph. 6, 11-17.

[77] Heb. 1, 3.

[78] Jean. 12, 36.

[79] Matth. 5, 14.

[80] Ia ex Ant. maj. Adv.

[81] Prov. 7, 4.

[82] I Tim. 1, 19.

[83] Prov. 3, 13-19.

[84] Matth. 10, 16.

[85] Eph. 5, 6.

[86] Jud. 16.

[87] Eph. 5, 11.

[88] Ibid. 7.

[89] Jud. 12.

[90] Eph. 5, 8, 9.

[91] Jac., 3, 11-18.

[92] Gemma anim. IV, 57.

[93] III Reg. 3 ; II Paralip. 1.

[94] Antiph. Gregor. ap. Thomasi. V.

[95] Dan. 3, 40-42.

[96] Honor. ubi supra.

[97] Jac. I, 5.

[98] Cf. Matth., 4.