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Mercredi des Quatre-Temps de l’Avent

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1960.


Sommaire

  Textes de la Messe  
  Office  
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum  
  Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique  

Textes de la Messe

Feria Quarta Quatuor Temporum Adventus
Mercredi des Quatre-Temps d’Avent
II classis (ante CR 1960 : simplex)
IIème classe (avant 1960 : simple)
Statio ad S. Mariam maiorem
Station à Ste-Marie-Majeure
Ant. ad Introitum. Is. 45, 8.Introït
Roráte, cæli, désuper, et nubes pluant iustum : aperiátur terra, et gérminet Salvatórem.Cieux, répandez votre rosée ; que des nuées descende le salut ! Que s’ouvre la terre et qu’elle donne naissance au Sauveur.
Ps. 18, 2.
Cæli enárrant glóriam Dei : et ópera mánuum eius annúntiat firmaméntum.Les cieux chantent la gloire de Dieu : leur voûte solide proclame la puissance de ses mains.
V/.Glória Patri.
Post Kýrie, eléison, immediate dicitur : Orémus. Flectámus genua. R/. Leváte.Après le Kýrie, eléison, on dit immédiatement : Prions. Fléchissons le genou. R/. Levez-vous.
Oratio.1ère oraison
Præsta, quǽsumus, omnípotens Deus : ut redemptiónis nostræ ventúra sollémnitas et præséntis nobis vitæ subsídia cónferat, et ætérnæ beatitúdinis prǽmia largiátur. Per Dóminum.Faites, nous vous le demandons, Seigneur : que la solennité approchant de notre rédemption nous apporte avec elle les grâces nécessaires pour la vie présente et nous obtienne la récompense du bonheur éternel.
Léctio Isaíæ Prophétæ.Lecture du Prophète Isaïe.
Is. 2. 2–5.
In diébus illis : Dixit Isaias Prophéta : Erit in novíssimis diébus præparátus mons domus Dómini in vértice móntium, et elevábitur super colles, et fluent ad eum omnes gentes. Et ibunt pópuli multi, et dicent : Veníte et ascendámus ad montem Dómini, et ad domum Dei Iacob, et docébit nos vias suas, et ambulábimus in sémitis eius : quia de Sion exíbit lex, et verbum Dómini de Ierúsalem. Et iudicábit gentes, et árguet pópulos multos : et conflábunt gládios suos in vómeres, et lánceas suas in falces. Non levábit gens contra gentem gládium : nec exercebúntur ultra ad prǽlium. Domus Iacob, veníte, et ambulémus in lúmine Dómini, Dei nostri. En ces jours-là : Voici ce que dit le Prophète Isaïe : Il arrivera, à la fin des jours, que la Montagne de la maison du Seigneur sera établie au sommet des montagnes et élevée au-dessus des collines. Et vers elle toutes les nations afflueront, et des nations nombreuses viendront et diront : « Venez et montons à la montagne du Seigneur, à la maison du Dieu de Jacob ; il nous instruira de ses voies, et nous marcherons dans ses sentiers. » Car de Sion sortira la loi, et de Jérusalem la parole du Seigneur. Il sera l’arbitre des peuples et le juge de nations nombreuses. Ils forgeront leurs épées en socs de charrue ; et leurs lances en faucilles. Une nation ne lèvera plus l’épée contre l’autre, et l’on n’apprendra plus la guerre. Maison de Jacob, venez, et marchons à la lumière du Seigneur.
Graduale. Ps. 23, 7, 3 et 4.Graduel
Tóllite portas, principes, vestras : et elevámini, portæ æternáles : et introíbit Rex glóriæ.Portes, élevez vos frontons ! Soulevez-vous, portails antiques ! et le Roi de gloire fera son entrée.
V/. Quis ascéndet in montem Dómini ? aut quis stabit in loco sancto eius Innocens mánibus et mundo corde.V/. Qui pourra gravir la montagne du Seigneur, et rester debout en ce lieu sacré ? Celui qui aura les mains nettes et le cœur pur.
Hic dicitur V/. Dóminus vobíscum, sine Flectámus génua.
Orémus.
Ici on dit V/. Dóminus vobíscum, sans Fléchissons le genou.
Prions.
Oratio.2ème oraison
Festína, quǽsumus, Dómine, ne tardáveris, et auxílium nobis supérnæ virtútis impénde : ut advéntus tui consolatiónibus sublevéntur, qui in tua pietáte confídunt : Qui vivis et regnas.Hâtez-vous, Seigneur, nous vous le demandons, ne tardez plus : assistez-nous de la force d’en haut pour que votre venue réconforte ceux qui se confient en votre bonté
Lectio Isaíæ Prophétæ.Lecture du Prophète Isaïe.
Is. 7, 10–15
In diébus illis : Locútus est Dóminus ad Achaz, dicens : Pete tibi signum a Dómino, Deo tuo, in profúndum inférni, sive in excélsum supra. Et dixit Achaz : Non petam et non tentábo Dóminum. Et dixit : Audíte ergo, domus David : Numquid parum vobis est, moléstos esse homínibus, quia molesti estis et Deo meo ? Propter hoc dabit Dóminus ipse vobis signum. Ecce, Virgo concípiet et páriet fílium, et vocábitur nomen eius Emmánuel. Butýrum et mel cómedet, ut sciat reprobare malum et elígere bonum.En ces jours là : Le Seigneur parla encore à Achaz, en disant : « Demande un signe au Seigneur, ton Dieu, demande-le dans les profondeurs du schéol ou dans les hauteurs du ciel. » Mais Achaz dit : « Je ne le demanderai pas, je ne tenterai pas le Seigneur. » Et Isaïe dit : « Ecoutez, maison de David : Est-ce trop peu pour vous de fatiguer les hommes, que vous fatiguiez aussi mon Dieu ? C’est pourquoi le Seigneur lui-même vous donnera un signe : Voici que la Vierge a conçu, et elle enfante un fils, et on lui donne le nom d’Emmanuel. Il mangera de la crème et du miel, jusqu’à ce qu’il sache rejeter le mal et choisir le bien. »
Graduale. Ps. 144, 18 et 21.Graduel
Prope est Dóminus ómnibus invocántibus eum : ómnibus qui ínvocant eum in veritáte.Le Seigneur n’est pas loin de tous ceux qui le prient, de tous ceux qui le prie en vérité.
V/. Laudem Dómini loquétur os meum : et benedícat omnis caro nomen sanctum eius.V/. Que ma voix proclame les louanges du Seigneur ; que tout ce qui vit chante son nom très saint.
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Lucam.Lecture du Saint Evangile selon saint Luc.
Luc. 1, 26–38.
In illo tempore : Missus est Angelus Gábriel a Deo in civitatem Galilǽæ, cui nomen Názareth, ad Vírginem desponsátam viro, cui nomen erat Ioseph, de domo David, et nomen Vírginis María. Et ingréssus Angelus ad eam, dixit : Ave, grátia plena ; Dóminus tecum : benedícta tu in muliéribus. Quæ cum audísset, turbáta est in sermóne eius : et cogitábat, qualis esset ista salutátio. Et ait Angelus ei : Ne tímeas, María, invenísti enim grátiam apud Deum : ecce, concípies in útero, et páries fílium, et vocábis nomen eius Iesum. Hic erit magnus, et Fílius Altíssimi vocábitur, et dabit illi Dóminus Deus sedem David, patris eius : et regnábit in domo Iacob in ætérnum, et regni eius non erit finis. Dixit autem María ad Angelum : Quómodo fiet istud, quóniam virum non cognósco ? Et respóndens Angelus, dixit ei : Spíritus Sanctus supervéniet in te, et virtus Altíssimi obumbrábit tibi. Ideóque et quod nascétur ex te Sanctum, vocábitur Fílius Dei. Et ecce, Elísabeth, cognáta tua, et ipsa concépit fílium in senectúte sua : et hic mensis sextus est illi, quæ vocátur stérilis : quia non erit impossíbile apud Deum omne verbum. Dixit autem María : Ecce ancílla Dómini, fiat mihi secúndum verbum tuum.En ce temps là : Au sixième mois, l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée appelée Nazareth, vers une vierge qui était fiancée à un homme de la maison de David, nommé Joseph ; et le nom de la vierge était Marie. Etant entré où elle était, il lui dit : « Salut, pleine de grâce ! Le Seigneur est avec vous ; vous êtes bénie entre les femmes. » Mais à cette parole elle fut fort troublée, et elle se demandait ce que pouvait être cette salutation. L’ange lui dit : « Ne craignez point, Marie, car vous avez trouvé grâce devant Dieu. Voici que vous concevrez, et vous enfanterez un fils, et vous lui donnerez le nom de Jésus. Il sera grand et sera appelé fils du Très-Haut ; le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; il régnera éternellement sur la maison de Jacob, et son règne n’aura point de fin. » Marie dit à l’ange : « Comment cela sera-t-il, puisque je ne connais point l’homme ? » L’ange lui répondit : « L’Esprit-Saint viendra sur vous, et la vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre. C’est pourquoi l’être saint qui naîtra sera appelé Fils de Dieu. Et voici qu’Elisabeth, votre parente, a conçu, elle aussi, un fils dans sa vieillesse, et ce mois-ci est le sixième pour elle que l’on appelait stérile, car rien ne sera impossible pour Dieu. » Marie dit alors : « Voici la servante du Seigneur : qu’il me soit fait selon votre parole ! » Et l’ange la quitta.
Ant. ad Offertorium. Is. 35, 4. Offertoire
Confortámini, et iam nolite timére : ecce enim, Deus noster retríbuet iudícium : ipse véniet, et salvos nos fáciet.Prenez courage et n’ayez plus peur. Voici que notre Dieu vient rétablir la justice. Il arrive en personne et il va nous sauver.
Secreta.Secrète
Accépta tibi sint, quǽsumus, Dómine, nostra ieiúnia : quæ et expiándo nos tua grátia dignos effíciant, et ad sempiterna promíssa perdúcant. Per Dóminum.Daignez accepter, nous vous le demandons, Seigneur, nos privations : pour qu’en nous purifiant cette pénitence nous rende dignes de votre grâce et nous achemine vers les biens éternels que vous nous promettez.
Præfatio communis. Préface Commune .
In aliquibus diœcesibus et in Gallis, præfatio de Adventu.Dans quelques diocèses et en France, Préface de l’Avent .
Ant. ad Communionem. Is. 7, 14.Communion
Ecce, Virgo concípiet et páriet fílium : et vocábitur nomen eius Emmánuel.La Vierge deviendra mère et mettra au monde un fils auquel on donnera le nom d’Emmanuel.
Postcommunio.Postcommunion
Salutáris tui, Dómine, munere satiáti, súpplices deprecámur : ut, cuius lætámur gustu, renovémur efféctu. Per Dóminum.Rassasiés, Seigneur, par le don de votre Salut, nous vous demandons humblement qu’après avoir eu la joie d’y goûter, nous soyons vraiment renouvelés.

Office

Leçons des Matines

Lecture du saint Évangile selon saint Luc. Cap. 1, 26-38.
En ce temps-là : Au sixième mois, l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée appelée Nazareth, vers une vierge qui était fiancée à un homme de la maison de David, nommé Joseph ; et le nom de la vierge était Marie. Et le reste.

Homélie de saint Ambroise, Évêque.

Première leçon. A la vérité, les secrets et les mystères de Dieu sont cachés, et, selon la parole d’un Prophète, il n’est pas facile aux hommes de pénétrer ses desseins ; cependant, par les autres actions et instructions du Sauveur, nous pouvons comprendre que ce n’est pas sans un dessein particulier que celle-là a été choisie pour enfanter le Seigneur, qui était l’épouse d’un homme. Mais, pourquoi n’a-t-elle pas été mère avant d’être épousée ? De crainte, peut-être, qu’on ne l’accusât d’adultère.
R/. Crie avec force, toi qui annonces la paix dans Jérusalem ; [1] * Dis aux villes de Juda et aux habitants de Sion : Voici notre Dieu que nous attendions, il va venir. V/. Monte sur une haute montagne, toi qui évangélises Sion ; élève avec force ta voix. [2] * Dis.

Deuxième leçon. Or, l’Ange vint vers elle. Reconnaissez la Vierge à ses actes, reconnaissez la Vierge à sa modestie, apprenez à la connaître par l’oracle qui lui est annoncé par le mystère qui s’opère en elle. C’est le propre des vierges de trembler, de s’effrayer à l’approche d’un homme, et de craindre tous ses discours. Que les femmes apprennent à imiter cet exemple de modestie. Marie vit seule dans le secret de sa demeure, se dérobant aux regards des hommes, un Ange seul trouve accès auprès d’elle. Elle est seule, sans compagnie ; seule, sans témoin, de crainte d’être corrompue par un entretien profane ; et l’Ange la salue.
R/. Il se lèvera une étoile de Jacob [3], et il s’élèvera un homme d’ Israël, et il frappera tous les chefs des étrangers : [4] * Et toute la terre sera sa possession. V/. Tous les rois de la terre l’adoreront ; toutes les Nations le serviront. [5] * Et.

Troisième leçon. Ce n’était pas la bouche d’un homme, mais celle d’un Ange, qui devait exposer le mystère d’un tel message. Aujourd’hui, pour la première fois l’on entend : « L’Esprit-Saint surviendra en vous. » On entend et on croit. « Voici, dit Marie, la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon votre parole. » Voyez son humilité, voyez sa dévotion. Elle se dit la Servante du Seigneur, elle qui est choisie pour sa mère ; et elle ne s’enorgueillit pas de cette promesse inattendue.
R/. Le Seigneur Dominateur viendra bientôt : [6] * Et son nom sera appelé Emmanuel [7]. V/. Dans ses jours s’élèvera la Justice et une abondance de paix [8] * Et. Gloire au Père. * Et.

A LAUDES.

Le Mercredi à partir du 17 décembre

A LAUDES ET AUX HEURES.
Les Antiennes suivantes se disent à Laudes et aux Heures dans les six Féries qui précèdent la Vigile de la Nativité. On les commence le 17 Décembre, par les Antiennes assignées au jour où l’on se trouve. On dit de même, les jours qui suivent, celtes qui sont propres à la Férie où l’on est. Si le 17 Décembre tombe un Dimanche, ces Antiennes se commencent le Lundi, c’est-à-dire le 18. Quant à celles qui devraient se dire les jours où il y a occurrence d’une Fête à neuf Leçons, elles sont omises cette année-là.

Ant. 1 Les Prophètes ont prédit * que le Sauveur naîtrait de la Vierge Marie.
Ant. 2 L’Esprit * du Seigneur est sur moi ; il m’a envoyé évangéliser les pauvres. [9]
Ant. 3 A cause de Sion, * je ne me tairai pas, jusqu’à ce que paraisse son juste, comme une éclatante lumière. [10]
Ant. 4 Voici que viendra le Seigneur, * pour s’asseoir avec les princes et occuper un trône de gloire. [11]
Ant. 5 Annoncez * aux peuples et dites : Voici que Dieu, notre Sauveur, viendra. [12]

Capitule. Is. 2, 3. Venez et montons à la montagne du Seigneur et à la maison du Dieu de Jacob, et il nous enseignera ses voies, et nous marcherons dans ses sentiers, parce que de Sion sortira la loi, et la parole du Seigneur, de Jérusalem.

Ant. au Bénédictus Il fut envoyé, l’Ange* Gabriel, à Marie, vierge qu’avait épousée Joseph. [13]

AUX VÊPRES.

Capitule. Gen. 49, 10. Le sceptre ne sera pas ôté de Juda, ni le prince de sa postérité, jusqu’à ce que vienne celui qui doit être envoyé, et lui-même sera l’attente des nations.

Ant. au Magnificat Voici la servante du Seigneur, * qu’il me soit fait selon votre parole. [14]

Introduction générale aux Antiennes O, voir ici
Si ce jour tombe les 17, 18, 19 ou 20 décembre, on dit une Antienne O [15]

Le 17 Décembre. Ant. au Magnificat

O Sapiéntia, * quæ ex ore Altíssimi prodiísti, attíngens a fine usque ad finem, fórtiter suavitérque dispónens ómnia : veni ad docéndum nos viam prudéntiæ. Pour écouter l’antienne, cliquer sur l’imageO Sagesse, * qui êtes sortie de la bouche du Très-Haut [16], atteignant d’une extrémité à une autre extrémité, et disposant toutes choses avec force et douceur [17] : venez pour nous enseigner la voie de la prudence. [18]
MP3 - 4.5 Mo
Antienne chantée par Scott Turkington, source NLM

Le 18 Décembre. Ant. au Magnificat

O Adonái, * et Dux domus Israël, qui Móysi in igne flammæ rubi apparuísti, et ei in Sina legem dedísti : veni ad rediméndum nos in bráchio exténto. Pour écouter l’antienne, cliquer sur l’imageO Adonaï, * et Conducteur de la maison d’Israël [19], qui avez apparu à Moïse dans le feu du buisson ardent [20], et lui avez donné la loi sur le Sinaï : venez pour nous racheter par la puissance de votre bras. [21]
MP3 - 4.5 Mo
Antienne chantée par Scott Turkington, source NLM

Le 19 Décembre. Ant. au Magnificat

O radix Iesse, * qui stas in signum populórum, super quem continébunt reges os suum, quem Gentes deprecabúntur : veni ad liberándum nos, iam noli tardáre. Pour écouter l’antienne, cliquer sur l’imageO Racine de Jessé, * qui êtes comme l’étendard des peuples [22], devant qui les rois fermeront leur bouche [23], et dont les Nations imploreront le secours : venez nous délivrer, maintenant ne tardez plus. [24]
MP3 - 4.7 Mo
Antienne chantée par Scott Turkington, source NLM

Le 20 Décembre. Ant. au Magnificat

O clavis David, * et sceptrum domus Israël ; qui áperis, et nemo claudit ; claudis, et nemo áperit : veni, et educ vinctum de domo cárceris, sedéntem in ténebris, et umbra mortis. Pour écouter l’antienne, cliquer sur l’imageO Clef de David, * et sceptre de la maison d’Israël ; qui ouvrez, et nul ne peut fermer ; qui fermez, et nul ne peut ouvrir [25] : venez, et tirez de la prison le captif qui est assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort. [26]
MP3 - 5 Mo
Antienne chantée par Scott Turkington, source NLM

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

Prope est iam Dóminus : veníte, adorémus.Le Seigneur est déjà proche : venez, adorons-le.

Les Quatre-Temps

L’Église commence à pratiquer en ce jour le jeûne appelé des Quatre-Temps, lequel s’étend aussi au Vendredi et au Samedi suivants. Cette observance n’appartient point à l’économie liturgique de l’Avent : elle est une des institutions générales de l’Année Ecclésiastique. On peut la ranger au nombre des usages qui ont été imités de la Synagogue par l’Église ; car le prophète Zacharie parle du Jeûne du quatrième, du cinquième, du septième et du dixième mois. L’introduction de cette pratique dans l’Église chrétienne semble remonter aux temps apostoliques ; c’est du moins le sentiment de saint Léon, de saint Isidore de Séville, de Rhaban Maur et de plusieurs autres écrivains de l’antiquité chrétienne : néanmoins, il est remarquable que les Orientaux n’observent pas ce jeûne.

Dès les premiers siècles, les Quatre-Temps ont été fixés, dans l’Église Romaine, aux époques où on les garde encore présentement ; et si l’on trouve plusieurs témoignages des temps anciens dans lesquels il est parlé de Trois Temps et non de Quatre, c’est parce que les Quatre-Temps du printemps, arrivant toujours dans le cours de la première Semaine de Carême, n’ajoutent rien aux observances de la sainte Quarantaine déjà consacrée à une abstinence et à un jeûne plus rigoureux que ceux qui se pratiquent dans tout autre temps de l’année.

Les intentions du jeûne des Quatre-Temps sont les mêmes dans l’Église que dans la Synagogue : c’est-à-dire de consacrer par la pénitence chacune des saisons de l’année. Les Quatre-Temps de L’Avent sont connus, dans l’antiquité ecclésiastique, sous le nom de Jeûne du dixième mois ; et saint Léon nous apprend, dans un des Sermons qu’il nous a laissés sur ce jeûne, et dont l’Église a placé un fragment au second Nocturne du troisième dimanche de l’Avent, que cette époque a été choisie pour une manifestation spéciale de la pénitence chrétienne, parce que c’est alors que la récolte des fruits de la terre étant terminée, il convient que les chrétiens témoignent au Seigneur leur reconnaissance par un sacrifice d’abstinence, se rendant d’autant plus dignes d’approcher de Dieu, qu’ils sauront dominer davantage l’attrait des créatures ; « car, ajoute le saint Docteur, le jeûne a toujours été l’aliment de la vertu. Il est la source des pensées chastes, des t résolutions sages, des conseils salutaires. Par la mortification volontaire, la chair meurt aux 0 désirs de la concupiscence, l’esprit se renouvelle dans la vertu. Mais parce que le jeûne seul ne nous suffit pas pour acquérir le salut de nos âmes, suppléons au reste par des œuvres de miséricorde envers les pauvres. Faisons servira la vertu ce que nous retrancherons au plaisir ; et que l’abstinence de celui qui jeûne devienne la nourriture de l’indigent. »

Prenons notre part de ces avertissements, nous qui sommes les enfants de la sainte Église ; et puisque nous vivons à une époque où le jeûne de l’Avent n’existe plus, portons-nous avec d’autant plus de ferveur à remplir le précepte des Quatre-Temps, que ces trois jours, en y joignant la Vigile de Noël, sont les seuls auxquels la discipline actuelle de l’Église nous enjoigne d’une manière précise, en cette saison, l’obligation du jeûne. Ranimons en nous, à l’aide de ces légères observances, le zèle des siècles antiques, nous souvenant toujours que si la préparation intérieure est surtout nécessaire pour l’Avènement de Jésus-Christ dans nos âmes, cette préparation ne saurait être véritable en nous, sans se produire à l’extérieur par les pratiques de la religion et de la pénitence.

Le jeûne des Quatre-Temps a encore une autre fin que celle de consacrer, par un acte de piété, les diverses saisons de l’année ; il a une liaison intime avec l’Ordination des Ministres de l’Église, qui reçoivent le samedi leur consécration, et dont la proclamation avait lieu autrefois devant le peuple à la Messe du Mercredi. Dans l’Église Romaine, l’Ordination du mois de Décembre fut longtemps célèbre ; et il paraît, par les anciennes Chroniques des Papes, que, sauf les cas tout à fait extraordinaires, le dixième mois fut, durant plusieurs siècles, le seul où l’on conférât les saints Ordres à Rome. Les fidèles doivent s’unir aux intentions de l’Église, et présenter à Dieu l’offrande de leurs jeûnes et de leurs abstinences, dans le but d’obtenir de dignes Ministres de la Parole et des Sacrements, et de véritables Pasteurs du peuple chrétien.

Le Mercredi des Quatre-Temps de l’Avent

En l’Office des Matines, l’Église ne lit rien aujourd’hui du prophète Isaïe ; elle se contente de rappeler le passage de l’Évangile de saint Luc dans lequel est racontée l’Annonciation de la Sainte Vierge, et lit ensuite un fragment du Commentaire de saint Ambroise sur ce même passage. Le choix de cet Évangile, qui est le même que celui de la Messe, selon l’usage de toute l’année, a donné une célébrité particulière au Mercredi de la troisième semaine de l’Avent. On voit, par d’anciens Ordinaires à l’usage de plusieurs Églises insignes, tant Cathédrales qu’Abbatiales, que l’on transférait les fêtes qui tombaient en ce Mercredi ; qu’on ne disait point ce jour-là, à genoux, les prières fériales ; que l’Évangile Missus est, c’est-à-dire de l’Annonciation, était chanté à Matines par le Célébrant revêtu d’une chape blanche, avec la croix, les cierges et l’encens, et au son de la grosse cloche ; que, dans les Abbayes, l’Abbé devait une homélie aux Moines, comme aux fêtes solennelles. C’est même à cet Usage que nous sommes redevables des quatre magnifiques Sermons de saint Bernard sur les louanges de la Sainte Vierge, et qui sont intitulés : Super Missus est.

Comme il est rare que la Messe des Quatre-Temps soit chantée hors des Églises où l’on célèbre l’Office Canonial, et aussi, pour ne pas grossir ce volume outre mesure, nous n’avons pas jugé à propos de donner ici le texte des Messes des Mercredi, Vendredi et Samedi des Quatre-Temps de l’Avent. Nous nous contenterons d’indiquer la Station. Le Mercredi, elle a lieu à Sainte-Marie-Majeure, à cause de l’Évangile de l’Annonciation qui, comme on vient de le voir, a fait pour ainsi dire attribuer à ce jour les honneurs d’une véritable Fête de la Sainte Vierge.

Comme nous devons toucher quelque chose de ce mystère ci-après, dans le Propre des Saints de l’Avent, nous nous contenterons d’insérer ici une Prose du moyen âge, en l’honneur delà glorieuse Vierge saluée par l’Ange, et une prière tirée des anciennes Liturgies.

PROSE EN L’HONNEUR DE LA SAINTE VIERGE.
(Tirée du Missel de Çluny de 1523.)

Sur le seuil de la demeure virginale, l’Ange apparaît à Marie, et, pour rassurer son effroi, lui dit avec douceur :
Salut, Reine des vierges ! Vous concevrez le Maître du ciel et de la terre, et sans cesser d’être vierge, vous enfanterez le Salut des hommes, ô vous, la porte du ciel, le baume de nos iniquités !
Comment concevrai-je, moi qui ne connais point l’homme ? Comment pourrai-je enfreindre le vœu que mon cœur a juré ?
L’Esprit-Saint, par sa grâce, consommera tous ces mystères ; ne craignez point, mais pleine de joie, rassurez-vous ; car la pudeur en vous demeurera sans tache, par la puissance de Dieu.
Adonc, la noble Vierge répond et dit : Je suis l’humble petite servante du Dieu tout-puissant.
Céleste messager, confident d’un si haut secret, je consens et veux voir accomplie cette parole que j’entends : me voici prête à condescendre au dessein de Dieu.
L’Ange disparut, et soudain le sein très pur de la Vierge montra l’indice de la future maternité.
Son fruit, captif neuf mois dans de si chastes entrailles, en sortit et s’en alla au grand combat, appuyant sur son épaule la croix de laquelle il frappa à mort l’homicide ennemi.
Las ! Mère du Seigneur, qui avez rendu la paix à l’Ange et à l’homme, en mettant le Christ au monde ;
Suppliez votre Fils, qu’il nous soit secourable et qu’il efface nos fautes ; qu’il nous vienne en aide, et nous fasse jouir de la vie bienheureuse, au terme de cet exil. Amen.

PRIÈRE DU MISSEL MOZARABE.
(Au IIe Dimanche de l’Avent, Illatio.)

C’est une chose digne et juste, vraiment équitable et salutaire, de célébrer avec enthousiasme l’Avènement de Jésus-Christ notre Seigneur. Sa naissance au milieu des hommes fut annoncée par un messager céleste. Une Vierge habitante de cette terre entendit un salut merveilleux : l’Esprit-Saint coopérant avec le Verbe de Dieu, le cœur de la Vierge se rassurait au moment même où l’Ange la saluait, et la promesse faite par lui recevait déjà son accomplissement ; la virginité elle-même se sentait féconde, ombragée qu’elle était par la vertu du Très-Haut. L’Ange avait dit : Voilà que vous concevrez et enfanterez un Fils ; Marie avait répondu : Comment cela pourrait-il être ? Mais parce que Marie répondait dans la foi, et non dans le doute, l’Esprit-Saint accomplit ce que l’Ange avait promis. Elle avait été vierge avant la Conception ; elle demeura à jamais vierge après l’enfantement. Elle avait d’abord conçu son Dieu dans son cœur ; plus tard elle le conçut dans ses entrailles. La première de tous, elle reçut le salut du monde, cette Vierge vraiment pleine de la grâce, et, pour cela, choisie pour être la véritable Mère du Fils de Dieu.

Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

Collecte au titre d’Eudoxie. Station à Sainte-Marie-Majeure.

Il semble que le jeûne solennel des Trois-Temps ait été, à l’origine, spécial à l’Église romaine, à laquelle les autres diocèses latins l’empruntèrent plus tard. Saint Léon Ier en explique bien la signification, spécialement à l’occasion des jeûnes de décembre, observant que, au terme des saisons, et avant de toucher aux provisions d’hiver, il convient vraiment d’en offrir les prémices à la divine Providence, par une libation volontaire d’abstinence et d’aumône. Dans la circonstance il y avait en outre un motif spécial. Une antique tradition réservait au mois de décembre les ordinations des prêtres et des diacres, et, selon l’usage introduit par les apôtres eux-mêmes, le peuple chrétien devait, ait moyen du jeûne et de la prière, s’associer à l’évêque pour obtenir que le Seigneur fît descendre en abondance les dons sacerdotaux sur la tête des nouveaux ministres de l’autel.

En effet, les intérêts suprêmes du peuple chrétien dépendent en grande partie de la sainteté du clergé ; et puisque l’Écriture nous enseigne que le châtiment le plus terrible infligé par Dieu aux nations prévaricatrices consiste à leur donner des pasteurs et des chefs semblables à elles-mêmes, il est évident que l’ordination des ministres sacrés n’est pas une affaire intéressant exclusivement l’évêque et son séminaire, mais d’une importance décisive et suprême pour toute la famille catholique.

C’est pourquoi les Actes des Apôtres mentionnent les jeûnes solennels et les prières publiques qui précédèrent l’ordination des sept premiers Diacres et, ensuite, la mission de Paul et de Barnabé à l’apostolat parmi les gentils. Aujourd’hui, après tant de siècles, cette discipline n’a subi aucun relâchement essentiel. Les rites, l’appareil extérieur, sont sans doute un peu plus modestes que dans le haut moyen âge à Rome ; toutefois les jeûnes, les stations préparatoires et les prières solennelles de la communauté chrétienne précèdent encore régulièrement la sacramentelle imposition des mains sur les élus au sacerdoce.

Aujourd’hui la station — comme il est de règle le mercredi des Quatre-Temps — est dans la basilique Libérienne, pour mettre les nouveaux lévites sous le céleste patronage de celle que les Pères appelèrent parfois Vierge-Prêtre, temple où le Verbe incarné Lui-même reçut l’onction sacerdotale du divin Paraclet.

Autrefois, la procession du clergé et du peuple se rendait au temple de Libère en partant de Saint-Pierre-aux-Liens et traversait, au chant suppliant de la litanie, la Suburra, le Viminal et l’Esquilin. Après la collecte d’entrée à Sainte-Marie-Majeure, un secrétaire papal (scriniarius) annonçait au peuple, du haut de l’ambon, les noms des futurs ordinands : Auxiliante Domino et Salvatore nostro Iesu Christo, elegimus hos N. N. diaconos in presbyteratum. Si igitur est aliquis qui contra hos viros aliquid scit de causa criminis, absque dubitatione exeat et dicat ; tantum mémento Communionis suae.

Ces solennelles proclamations remplaçaient à Rome le rite antique, si répandu ailleurs, du suffrage populaire lors de l’ordination des ministres sacrés. En quelques endroits, le peuple était consulté : ainsi obéirait-il ensuite de meilleure grâce à ceux qu’il s’était lui-même choisis pour pasteurs. Toutefois, dès l’antiquité, — saint Clément l’atteste aux Corinthiens, — Rome jugeait cette concession trop périlleuse et compromettante, risquant d’être mal interprétée et peu conforme au caractère divinement autoritaire de la hiérarchie sacrée. C’est le Christ qui, au moyen des apôtres et des évêques, doit choisir ses ministres, et non par l’intermédiaire du suffrage populaire, comme cela se faisait au forum pour les magistrats. Dans les ordinations, Rome réservait donc au peuple un rôle honorable, sans doute, mais secondaire et de simple garantie, celui de déposer contre les candidats, s’il les savait juridiquement coupables et indignes. C’est précisément ce qu’exigé l’Apôtre quand il écrit à Timothée qu’il est nécessaire pour les élus au ministère sacerdotal d’avoir testimonium... bonum ab his qui foris sunt, ut non in opprobrium incidant [27].

La messe de ce jour n’est qu’un soupir, un cri ardent de l’âme vers le Messie qui doit venir. Le grand prophète de l’Avent est Isaïe ; c’est pourquoi l’Église relit en ces jours les plus beaux passages de son livre, afin que les fidèles hâtent eux aussi par leurs vœux le règne de Jésus-Christ.

L’introït est tiré du chapitre XLV d’Isaïe (v. 8). Deux brillantes images expriment à merveille le caractère doux et pacifique de cette première venue du Verbe de Dieu sur la terre : les cieux qui distillent la rosée rafraîchissante sur la toison de Gédéon, et la terre qui germe la fleur des champs sur la tige mystique de Jessé. Le psaume 18 vient ensuite ; c’est tout un hymne de la création, des astres du firmament, du soleil, de la lune, des étoiles nocturnes, au Créateur. Le psalmiste y ajoute les louanges de la Loi, reflet lumineux du Verbe éternel du Père.

A l’origine, aux jours de procession stationnale, quand on chantait, le long du chemin, la grande litanie, on omettait l’introït et, une fois arrivés à l’église, le Pape, après le Kyrie final, récitait la collecte. Le diacre invitait d’abord les fidèles à se prosterner à terre pour prier un moment en particulier : Flectamus genua ; puis, quand ils avaient passé quelques instants en oraison, le diacre leur donnait ordre de se lever et le Pontife résumait en une brève formule — collecta — les vœux de l’assemblée pour les présenter à Dieu. Dans celle de ce jour, on supplie la divine clémence de faire que la prochaine fête de Noël nous soit féconde en grâces pour la vie présente, afin de nous disposer à la récompense de la béatitude finale.

Dans la messe actuelle, on conserve encore le rite des trois lectures scripturaires, qui, dans l’antiquité, précédaient ordinairement l’offertoire. La première lecture était généralement prise dans l’Ancien Testament, la seconde dans le Nouveau et la troisième dans l’Évangile ; mais l’ordre primitif fut plusieurs fois troublé. De fait aujourd’hui, les deux premières leçons sont l’une et l’autre d’Isaïe. Dans la première (Is., II, 2-5), l’Église est comparée à une haute montagne que gravissent tous les peuples de la terre ; on y décrit les temps messianiques, l’universalité de la Rédemption, la tranquillité et la paix des nations unies enfin par les liens d’une même foi. Le répons-graduel qui suit est tiré du psaume 23 et décrit l’entrée triomphale du Christ dans son royaume.

La seconde leçon (Is., VII, 10-15) annonce en termes formels le prodige qui va s’accomplir. Plus Dieu est offensé par les crimes du monde, plus grande est sa miséricorde envers les pauvres pécheurs. Il veut leur donner un gage de cette miséricorde, et voici qu’une Vierge va mettre au monde un petit enfant qui s’appellera sans plus ce qu’il est vraiment : Dieu avec nous.

Le répons pris au psaume 144 annonce que le Seigneur est proche de ceux qui se confient en Lui. Dieu est proche de celui qui le veut ainsi et qui l’aime, mais II est loin pour celui qui ne sait que faire de Lui. Il traite les âmes selon leurs dispositions intimes. Toutefois, comme le Seigneur est bon, II rend souvent bonnes par sa grâce nos dispositions mauvaises.

La lecture évangélique (Luc., I, 26-38) contient le message de l’ange Gabriel à la Vierge et le consentement de Marie à accomplir la mission de Mère de Dieu. Quels trésors de générosité, d’humilité, de dévotion, se cachent en ces mots : « Voici la servante du Seigneur ; qu’il me soit fait selon votre parole ! »

Au moyen âge, dans les monastères, l’abbé devait donner aujourd’hui aux moines une conférence spéciale sur la lecture évangélique de cette férié ; et nous avons toute une collection d’homélies super missus est faites par saint Bernard au chapitre de ses moines de Clairvaux.

L’antienne d’offertoire est prise du livre d’Isaïe et contient l’annonce de la prochaine venue du Messie. L’Église répète avec insistance cette annonce, afin que l’âme sorte de la léthargie où la plonge la paresse et sente avec toutes ses puissances ce voisinage de Yahweh.

La collecte présente au Seigneur le fruit des jeûnes solennels que tout le troupeau chrétien célèbre en cette semaine. Ils ont pour but de nous faire expier nos fautes passées et de nous préparer convenablement au saint renouveau qui va s’inaugurer avec la venue du Verbe incarné.

L’antienne pour la Communion est tirée de l’annonce d’Isaïe au roi Achaz : « Une vierge concevra un enfant qui aura pour nom Emmanuel, c’est-à-dire Dieu avec nous. » Voilà, bien exprimé, le dogme des deux natures dans le Christ, dogme qui troubla tant la période précédant le Concile d’Éphèse, où la doctrine catholique qui attribuait à Marie le titre de Mère de Dieu fut solennellement proclamée. Le fils engendré par une Vierge ne peut pas ne pas être homme comme nous ; mais le Saint-Esprit l’appelle en même temps Emmanuel, c’est-à-dire Dieu, Par suite, il convient de reconnaître et d’adorer les deux natures, divine et humaine, dans l’unique personne de Jésus-Christ. Sans la nature divine, l’expiation de Jésus-Christ n’aurait pas eu l’efficacité de satisfaire à la justice de Dieu offensée par les péchés du monde ; sans la nature humaine, Dieu n’aurait pas été capable de souffrir. Il fallait donc que la nature humaine fût unie hypostatiquement à la personne du Verbe, pour que la réparation du Christ fût la réparation qu’un Dieu Lui-même rend à Dieu.

Dans la collecte d’action de grâces, nous prions le Seigneur de ne pas nous laisser nous arrêter au goût et à la dévotion sensible que vaut parfois la participation à la table céleste. Il faut, au contraire, tendre au solide, c’est-à-dire à la vertu. Les consolations sensibles sont comme les fleurs d’un arbre ; mais l’agriculteur ne se paie pas de fleurs, il veut des fruits. Il en est de même pour nous : nous ne devons pas nous laisser trop prendre par les douceurs sensibles de la dévotion, mais il convient de viser à l’acquisition des vertus solides, ce qui requiert le détachement des choses du monde et le dépouillement de soi-même, pour ne rien vouloir d’autre que Dieu.

En ce temps de préparation immédiate à Noël, l’Église nous invite à nous serrer près de Marie avec une affection toute spéciale, parce que c’est d’elle-même, qui durant neuf mois porta Jésus dans son sein, que notre Avent tire son origine. Quels ne durent pas être les sentiments de foi, d’amour, de zèle, qui animèrent alors la Vierge unie si intimement à ce Dieu qui s’appelle un feu consumant dans les Écritures ? Le buisson ardent de Moïse symbolise justement Marie toute enflammée de Jésus. Elle est le modèle des véritables amants de Jésus.

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

Les Quatre-Temps de l’Avent

Le Roi revêt ses haillons

Nous entrons dans un nouveau stade de la préparation de Noël. On nous a dit d’abord : Le Roi vient, puis : Jérusalem s’apprête, ensuite : il est au milieu de vous. Aujourd’hui, l’Église nous montre le Fils de Dieu sous la forme humaine : le Roi revêt les haillons de l’humaine nature. Les messes des Quatre-Temps nous présentent les antécédents de la naissance et de l’avènement du Seigneur.

Comme introduction à ces solennités d’une antiquité vénérable, donnons ici un sermon de Quatre-Temps du pape saint Léon : « Mes très chers, notre souci pastoral nous porte à vous prêcher conformément au temps et à l’usage liturgique. Nous célébrons le jeûne du dixième mois (décembre, comme son nom l’indique, était le dixième mois). Dans ce jeûne, nous offrons à Dieu, l’auteur de tous biens, après avoir achevé la récolte de tous les fruits, un digne sacrifice de tempérance. Car quelle œuvre peut être plus efficace que le jeûne, par lequel nous nous rapprochons de Dieu, nous résistons au démon, nous triomphons des vices séducteurs ? En effet, toujours le jeûne a été l’aliment de la vertu. La sobriété produit les pensées chastes, les résolutions raisonnables, les conseils salutaires. Par la mortification volontaire on meurt aux convoitises de la chair. L’esprit est renouvelé pour la pratique de la vertu. Mais comme nous ne pouvons pas faire notre salut par le jeûne seul, complétons-le par la miséricorde envers les pauvres. Donnons à la vertu ce que nous enlevons au plaisir. Que la privation de ceux qui jeûnent soit un soulagement pour les pauvres. Efforçons-nous de protéger les veuves, d’aider les orphelins, de réconcilier ceux qui sont en discorde, de recueillir les étrangers, de secourir les affligés, de vêtir ceux qui sont nus, de soigner les malades. Ainsi celui d’entre nous qui aura offert à Dieu, l’auteur de tous biens, le sacrifice de ses œuvres de charité comme un bon travailleur, méritera de recevoir comme salaire le royaume céleste. Ainsi donc, jeûnons mercredi, vendredi et samedi, veillons ensemble (célébrons l’office de nuit) auprès de l’Apôtre saint Pierre, afin que, par son intercession, nous puissions obtenir ce que nous demandons par Notre Seigneur Jésus-Christ qui avec le Père et le Saint-Esprit vit et règne dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il ».

Les Quatre-Temps comptent parmi les usages les plus anciens de l’année liturgique et remontent aux tout premiers temps de l’Église romaine. Ils sont plus anciens que l’Avent et le pape saint Léon (vers 450) nous a laissé toute une série de beaux sermons de Quatre-Temps. C’était originairement une fête d’action de grâces pour les récoltes. Il n’yen avait que trois, après chacune des trois récoltes principales : le blé, le vin et l’huile — les plus importants symboles naturels de la liturgie. Les fidèles apportaient à l’Offrande la dîme de leurs récoltes, pour les besoins du Sacrifice, de l’Église et des pauvres — et ceci est un exemple pour nous. Néanmoins ces époques sont aussi des jours de renouvellement spirituel. L’homme, au milieu de ses occupations matérielles, oublie trop facilement ses intérêts éternels ; c’est pourquoi il est bon qu’à chaque saison il se rappelle la pensée de Dieu et fasse réflexion sur l’état de son âme. Si le carême est l’époque de la retraite spirituelle annuelle, les Quatre-Temps sont celle du renouvellement intérieur. Ce sont des semaines de sérieux, mais non de tristesse et de pénitence. Le jeûne est moins une manifestation de pénitence qu’une dîme joyeusement offerte à Dieu et qui doit nous inciter à l’aumône. Le sacrifice de la charité miséricordieuse doit être offert en même temps que celui du jeûne (saint Léon). En devenant jours d’ordination (le samedi), les Quatre-Temps ont revêtu un caractère particulier. Le samedi des Quatre-Temps de décembre était le principal jour d’ordination. (En ce jour les fidèles doivent prier spécialement pour obtenir de Dieu de bons prêtres). Cependant, dans la suite des temps, les Quatre-Temps ont été insérés dans la trame de l’année liturgique et chacune de ces semaines a pris une nuance particulière. Les Quatre-Temps de décembre signifient une préparation plus intense à la fête de Noël.

Les derniers grands préparatifs pour la venue du Christ se font pendant ces semaines, comme l’attente de Noël trouve sa plus haute expression dans les antiennes O.

Le Mercredi des Quatre-Temps

L’Annonciation de la Sainte Vierge.
La messe d’or.

Aujourd’hui nous célébrons le mystère de l’Annonciation de la Sainte Vierge, l’instant solennel où le Verbe divin s’unit à la nature humaine. C’est le commencement de la Rédemption. Le corps mystique a reçu son centre lumineux, les membres peuvent s’y adjoindre. Ce n’est pas seulement le souvenir de ce grand événement que nous célébrons ; à la messe, est mise sous nos yeux l’Incarnation du Christ, puisque l’Incarnation est le commencement de la Passion dont la messe est le renouvellement. Au moment de la consécration, nous pourrions répéter : le Verbe s’est fait chair.

C’est pourquoi, depuis l’antiquité, cette messe a été très appréciée et appelée la messe d’or (missa aurea). Au moyen âge, on la célébrait avec une grande solennité. C’est à l’occasion de cette messe que saint Bernard fit en qualité d’Abbé ses célèbres homélies « super Missus est » qui se trouvent en partie dans le bréviaire. Une des preuves de la considération qu’on avait pour elle, c’est que la messe « Rorate » qui, dans certaines régions, est célébrée pendant tout l’Avent, en procède.

Lecture de l’Avent. — Isaïe nous montre aujourd’hui l’image du Messie souffrant. C’est une des prophéties les plus célèbres de l’Ancien Testament (Chap. LIII).

« Qui a cru à ce qui nous était annoncé ?
Et la puissance du Seigneur, à qui a-t-elle été révélée ?
Il (le Rédempteur) s’élève comme un arbrisseau devant lui,
Comme une racine qui sort d’une terre desséchée ;
Il n’a ni forme ni beauté, nous l’avons vu,
Mais ce n’était pas une vue que nous désirions,
Il était méprisé, le dernier des hommes,
Un homme de douleurs connaissant la souffrance ;
Son visage était comme voilé et déshonoré.
Si bien que nous ne faisions de lui aucun cas.
En vérité il a porté nos maladies
Et nos douleurs il les a chargées sur lui.
Nous le considérions comme un lépreux,
Comme un homme frappé et humilié par Dieu.
Il a été blessé à cause de nos méfaits,
Il a été frappé à cause de nos péchés,
Pour notre salut il a été en butte au châtiment
Et par ses meurtrissures nous est venue la guérison.
Comme des brebis, nous étions errants,
Chacun s’écartait de son chemin ;
Le Seigneur a chargé sur lui tous nos méfaits
Il a été sacrifié parce qu’il l’a voulu lui-même ;
Et il n’ouvre pas sa bouche,
Comme un agneau, il est conduit à la tuerie.
Comme une brebis devant celui qui la tond, il se tait
Et n’ouvre pas sa bouche.
Sans protection de jugement, il est enlevé ;
Ne se préoccupe de lui personne de sa race,
En le voyant retranché de la terre des vivants.
A cause des péchés de mon peuple, je l’ai frappé.
Parmi les impies, on fixe son sépulcre,
Mais auprès du riche a été sa demeure. »

La messe (Rorate coeli). — Nous célébrons aujourd’hui la messe avec toute la chrétienté dans la grande église de Sainte-Marie à Rome où se trouve aussi la Crèche qui est pour nous l’image de Bethléem. A l’Introït, nous crions avec toute l’humanité qui implore la Rédemption : « Cieux répandez votre rosée. » Dans le psaume 18, nous voyons sous le symbole du soleil levant, l’accomplissement de nos espérances : « Pour le soleil il a dressé une tente, au ciel, (l’astre) s’avance comme un époux hors de la chambre nuptiale, il s’élance comme un héros qui fournit sa carrière, d’une extrémité du ciel il prend sa course vers l’autre et rien ne peut échapper à sa chaleur. » Le Christ, le divin Soleil de justice est resté caché neuf mois dans sa tente, c’est-à-dire dans le sein de Marie, mais, à Noël, après le solstice d’hiver, il paraît au dehors.

Dans la première Oraison, l’Église demande que « la fête de la Rédemption qui va venir » nous soit utile ici-bas et là-haut. Plus belle encore est la seconde Oraison : « Hâtez-vous, ne tardez plus, Seigneur, relevez-nous par les consolations de votre avènement. » C’est une oraison d’une impétuosité remarquable et qui sort du style ordinaire. La haute antiquité de cette messe apparaît dans les trois leçons (aux tout premiers temps de la liturgie romaine, la plupart des messes avaient au moins trois leçons). Les deux premières sont tirées de notre Prophète de l’Avent : Isaïe ; nous les connaissons déjà toutes les deux. Sion est le lieu de naissance de la Sainte Église, vers elle affluent les Gentils. C’est d’elle que sort la loi et le législateur (nous entendons le mot « Parole » dans le sens de « Verbe »). Sion est le symbole de la Vierge Marie qui a donné au monde le Verbe divin. Sion est aussi le symbole de l’Église et de l’âme. Ainsi trois noms se présentent à nous pendant toute la messe, Marie, l’Église, l’âme. L’Église aussi est mère de Dieu, en ce sens que par le ministère des sacrements, elle enfante et fait croître mystiquement le Christ dans les âmes. Et notre âme, à chaque messe peut être dite en quelque sorte mère du Christ, en tant que par la grâce du Saint Esprit reçue en elle, elle enfante mystique ment le Christ.

Le premier Graduel est un chant d’une grande beauté, c’est une image de Noël : nous nous tenons devant les portes fermées du paradis terrestre, déjà se soulèvent les verrous, déjà se tirent les chaînes ; pleins d’impatience nous crions : « Levez les portes, princes des anges ; ouvrez-vous, portes éternelles et le Roi de gloire fera son entrée. »

Les deux leçons suivantes ont entre elles une conformité merveilleuse. Le Prophète dit : « Voici qu’une Vierge concevra et enfantera un Fils et on l’appellera Emmanuel. » L’évangéliste dit : Je te salue... voici que tu concevras et enfanteras un Fils et tu lui donneras le nom de Jésus. Il sera appelé le Fils du Très-Haut... Le Saint-Esprit te couvrira de son ombre. »

Cet Évangile, d’une impérissable beauté, compte parmi les plus sublimes révélations que Dieu ait jamais faites à l’humanité. L’avant-messe a, en quelque sorte, parcouru tout l’Avent jusqu’au seuil du mystère de Noël. C’est pourquoi, au commencement du Sacrifice, nous nous voyons déjà le Sauveur venir : « Consolez-vous et ne craignez pas, car voici que notre Dieu apporte la récompense. Il va venir lui-même et nous apporter la Rédemption. Alors s’ouvriront les yeux des aveugles, les oreilles des sourds ne seront plus fermées ; alors le paralytique bondira comme un cerf, la langue du muet jubilera. Il va venir lui-même et nous apporter la Rédemption »

Au sacrifice et à la communion, nous participons mystiquement au mystère de la Maternité divine, aussi pouvons-nous nous appliquer ce que chante l’Église à la Communion : « Voici qu’une Vierge concevra et enfantera un Fils... » Une fois encore nous chantons le cantique du soleil (psaume 18). — C’est vraiment une messe d’or.

Chants de l’Avent. — Nous restons étonnés devant tous ces chants poétiques qui jaillissent de la lyre de l’Église :

« Crie de toutes tes forces toi qui annonces la paix dans Jérusalem,
Annonce aux villes de Juda et aux habitants de Sion :
Voici que notre Dieu que nous attendions va venir. » (Répons.)
« Une étoile se lèvera de Jacob
Et un homme se lèvera d’Israël qui anéantira tous les chefs des étrangers,
Et toute la terre sera sa possession,
Tous les rois de la terre l’adoreront,
Tous les peuples le serviront. » (Répons.)

Les antiennes du lever et du coucher du soleil indiquent que nous devons nous occuper, toute la journée, des sublimes passages de l’Évangile ; « L’ange Gabriel fut envoyé à la Vierge Marie fiancée à Joseph. » Le soir, nous disons avec Marie : « Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta parole. »

[1] Is. 40, 9.

[2] « Il est ordonné au chœur des Apôtres de monter sur les hauteurs, puisqu’ils doivent parler de grandes choses, et d’élever la voix sans crainte. » (Saint Jérôme). Gravir la montagne, c’est encore, selon saint Bernard, s’élever à l’amour de Dieu le plus épuré, le plus dégagé de tout ce qui est terrestre.

[3] « Sous ce nom d’étoile, est désignée la sainte Mère de Dieu. Grâce à elle, la lumière d’en haut est venue se répandre sur le genre humain. Étoile radieuse, que l’ombre du péché n’a jamais obscurcie, elle a brillé par ses mérites, elle nous a guidés par ses exemples, elle éclaire les aveugles et ranime les faibles. C’est dans cette étoile que s’est caché le vrai Soleil de justice, lorsqu’il a disparu derrière le nuage de notre humanité. Balaam a dit qu’elle sortirait de Jacob, parce qu’en effet, la Vierge immaculée descendait, en ligne droite, de la race des patriarches. » (Saint Augustin).

[4] Nomb. 24, 17.

[5] Ps. 71, 10.

[6] Is. 7, 14.

[7] C’est-à-dire Dieu avec nous. Avec nous dans la crèche, sur la croix et sur l’autel.

[8] Ps. 71, 1.

[9] Luc. 4, 18.

[10] Is. 62, 1.

[11] I Reg. 2, 8.

[12] Is. 40, 1.

[13] Luc. 1, 26.

[14] Luc. 1, 38.

[15] On dit solennellement les Antiennes O. On les dit à Magnificat, parce que c’est Marie qui nous a donné Jésus, et à Vêpres, parce que le Messie était attendu sur le soir du monde. D’après Honorius d’Autun, ces sept Antiennes se rapportent aux sept dons du Saint-Esprit. Dans la première, Jésus est appelé sagesse, parce qu’il est venu dans l’Esprit de sagesse. Dans la seconde, Adonaï, nom que Dieu indiqua à Moïse sur le Sinaï, parce que J.-C. est venu nous racheter par l’Esprit d’intelligence. Dans la troisième, Radix Jesse in signum populorum, c’est-à-dire en signe de la croix, parce qu’il est venu nous délivrer dans l’Esprit de conseil. Dans la quatrième, Clef de David, parce qu’il ouvre le Ciel aux justes et ferme l’enfer, dans l’Esprit de force. Dans la cinquième, Orient, parce qu’il nous éclaire par l’Esprit de science. Dans la sixième, Roi des Gentils et Pierre angulaire, parce qu’il sauve tous les hommes par l’Esprit de piété. Dans la septième, Emmanuel, parce qu’il vient dans l’Esprit de crainte, mais en donnant aussi la loi de l’amour. Ce nombre septénaire signifie encore les sept misères du genre humain, savoir : l’ignorance ; les peines éternelles et la mort ; l’esclavage du démon ; le péché ; les ténèbres ; l’exil de la patrie. Et voilà pourquoi nous avons besoin d’un Docteur, O Sapientia ; d’un Rédempteur O Adonaï ; d’un Libérateur, O Radix Jesse ; d’un Sauveur, O Clavis David ; d’un illuminateur, O Oriens ; d’un Chef et guide pour ramener à la patrie, soit les Gentils (O Rex Gentium), soit les Juifs (O Emmanuel).

[16] Eccli., 24, 3.

[17] Sap. 8, 1.

[18] ou de la justiceIs. 40, 14.

[19] Exod. 6, 2, 3, 13.

[20] Exod. 3, 2.

[21] Exod. 6, 6.

[22] Is. 11, 10 & Rom. 15, 12.

[23] Is. 52, 15.

[24] Habac. 2, 3 & Hebr. 10, 37.

[25] Is. 22, 22 & Apoc. 3, 7.

[26] Is. 44, 7 ; Ps. 106, 14 & Apoc. 3, 7 ; Luc. 1, 79.

[27] I Timoth., III, 7.