Textes de la Messe |
Office |
Dom Guéranger, l’Année Liturgique |
Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum |
Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique |
Ant. ad Introitum. Ps. 24, 1–3. | Introït |
Ad te levávi ánimam meam : Deus meus, in te confíde, non erubéscam : neque irrídeant me inimíci mei : étenim univérsi, qui te exspéctant, non confundéntur. | Vers vous l’élan de mon âme, ô mon Dieu ! En vous ma confiance : que je n’aie pas à en rougir et que mes ennemis ne puissent pas se moquer de moi car ceux qui comptent sur votre venue ne seront pas déçus. |
Ps. ibid., 4 | |
Vias tuas, Dómine, demónstra mihi : et sémitas tuas édoce me. | Montrez-moi votre chemin, Seigneur, et apprennez-moi à le suivre. |
V/.Glória Patri. | |
Oratio. | Collecte |
Excita, quǽsumus, Dómine, poténtiam tuam, et veni : ut ab imminéntibus peccatórum nostrórum perículis, te mereámur protegénte éripi, te liberánte salvári : Qui vivis et regnas. | Réveillez votre puissance, Seigneur et venez, pour que, dans le grand péril où nous sommes à cause de nos péchés, nous puissions trouver en vous le défenseur qui nous délivre et le libérateur qui nous sauve. |
Lectio Epístolæ beati Páuli Apóstoli ad Romános | Lecture de l’Epître de Saint Paul aux Romains |
Rom. 13, 11–14. | |
Fratres : Scientes, quia hora est iam nos de somno súrgere. Nunc enim própior est nostra salus, quam cum credídimus. Nox præcéssit, dies autem appropinquávit. Abiciámus ergo ópera tenebrárum, et induámur arma lucis. Sicut in die honéste ambulémus : non in comessatiónibus et ebrietátibus, non in cubílibus et impudicítiis, non in contentióne et æmulatióne : sed induímini Dóminum Iesum Christum. | Mes Frères : vous savez en quel temps nous sommes : c’est l’heure de nous réveiller enfin du sommeil ; car maintenant le salut est plus près de nous que lorsque nous avons embrassé la foi. La nuit est avancée, et le jour approche. Dépouillons-nous donc des œuvres des ténèbres et revêtons les armes de la lumière. Marchons honnêtement, comme en plein jour, ne nous laissant point aller aux excès de la table et du vin, à la luxure et à l’impudicité, aux querelles et aux jalousies. Mais revêtez-vous du Seigneur Jésus-Christ, et ne prenez pas soin de la chair, de manière à en exciter les convoitises. |
Graduale. Ps. 24, 3 et 4. | Graduel |
Univérsi, qui te exspéctant, non confundéntur, Dómine. | Ceux qui comptent sur votre venue, Seigneur, ne seront pas déçus. |
V/. Vias tuas, Dómine, notas fac mihi : et sémitas tuas édoce me. | Montrez-moi votre chemin, Seigneur, et apprennez-moi à le suivre |
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 84, 8. Osténde nobis, Dómine, misericórdiam tuam : et salutáre tuum da nobis. Allelúia. | Allelúia, allelúia. V/. Faite-nous voir votre miséricorde, Seigneur, et donnez-nous votre Sauveur. Alléluia. |
In Feriis Adventus, quando per hebdomadam resumitur Missa de Dominica, non dicitur Allelúia nec Versus sequens, sed tantum Graduale. | Lorsqu’on reprend la messe en semaine, on ne dit pas l’Alléluia et son verset |
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Lucam. | Suite du Saint Évangile selon saint Luc. |
Luc. 21, 25–33. | |
In illo témpore : Dixit Iesus discípulis suis : Erunt signa in sole et luna et stellis, et in terris pressúra géntium præ confusióne sónitus maris et flúctuum : arescéntibus homínibus præ timóre et exspectatióne, quæ supervénient univérso orbi : nam virtútes cælórum movebúntur. Et tunc vidébunt Fílium hóminis veniéntem in nube cum potestáte magna et maiestáte. His autem fíeri incipiéntibus, respícite et leváte cápita vestra : quóniam appropínquat redémptio vestra. Et dixit illis similitúdinem : Vidéte ficúlneam et omnes árbores : cum prodúcunt iam ex se fructum, scitis, quóniam prope est æstas. Ita et vos, cum vidéritis hæc fíeri, scitóte, quóniam prope est regnum Dei. Amen, dico vobis, quia non præteríbit generátio hæc, donec ómnia fiant. Cælum et terra transíbunt : verba autem mea non transíbunt. | En ce temps là, Jésus dit à ses disciples : « Il y aura des signes dans le soleil, dans la lune et dans les astres, et, sur la terre, une angoisse des nations inquiètes du fracas de la mer et de son agitation, les hommes expirant de frayeur et d’anxiété pour ce qui doit arriver à l’univers, car les puissances des cieux seront ébranlées. Alors on verra le Fils de l’homme venant dans une nuée avec grande puissance et grande gloire. Quand ces choses commenceront à arriver, redressez-vous et relevez la tête, parce que votre délivrance approche ». Et il leur dit une parabole : « Voyez le figuier et tous les arbres : quand déjà ils bourgeonnent, à cette vue vous savez de vous-mêmes que déjà l’été est proche. Ainsi, quand vous verrez ces choses arriver, sachez que le royaume de Dieu est proche. Je vous le dis, en vérité, cette génération ne passera point que toutes (ces) choses ne soient arrivées. Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront point. » |
Credo | |
Ant. ad Offertorium. Ps. 24, 1–3. | Offertoire |
Ad te levávi ánimam meam : Deus meus, in te confído, non erubéscam : neque irrídeant me inimíci mei : étenim univérsi, qui te exspéctant, non confundéntur. | Vers vous l’élan de mon âme, ô mon Dieu ! En vous ma confiance : que je n’aie pas à en rougir et que mes ennemis ne puissent pas se moquer de moi car ceux qui comptent sur votre venue ne seront pas déçus. |
Secreta. | Secrète |
Hæc sacra nos, Dómine, poténti virtúte mundátos ad suum fáciant purióres veníre princípium. Per Dóminum nostrum. | Seigneur, que ces offrandes sacrées exercent leur pouvoir pour nous purifier, et nous fassent approcher plus purs de Celui qui les a créées. |
Præfatio de sanctissima Trinitate ; non vero in feriis, quando adhibetur Missa huius dominicæ, sed tunc dicitur præfatio communis. | Préface de la Sainte Trinité ; mais les jours de Féries, où l’on reprend la Messe de ce Dimanche, on dit la Préface Commune . |
In aliquibus diœcesibus et in Gallis, præfatio de Adventu. | Dans quelques diocèses et en France, Préface de l’Avent . |
Ant. ad Communionem. Ps. 84, 13. | Communion |
Dóminus dabit benignitátem : et terra nostra dabit fructum suum. | Le Seigneur donnera sa bénédiction, et notre terre produira son fruit. |
Postcommunio. | Postcommunion |
Suscipiámus, Dómine, misericórdiam tuam in médio templi tui : ut reparatiónis nostræ ventúra sollémnia cóngruis honóribus præcedámus. Per Dóminum. | Puissions-nous, Seigneur, recevoir au milieu de votre temple votre miséricorde : et préparer avec toute la solennité qui convient les fêtes prochaines de notre rédemption. |
AUX PREMIÈRES VÊPRES.
Avant 1960 : intitulé : Samedi avant le 1er Dimanche de l’Avent.
Ant. 1 En ce jour-là, * les montagnes distilleront la douceur, et les collines feront couler le lait et le miel, alléluia. [1]
Ant. 2 Réjouis-toi, * fille de Sion, et tressaille d’une joie parfaite, fille de Jérusalem, alléluia. [2]
Ant. 3 Voici que le Seigneur viendra, * et tous ses Saints avec lui, et il y aura en ce jour-là une grande lumière, alléluia. [3]
Ant. 4 Vous tous qui avez soif, * venez vers les eaux : cher chez le Seigneur, tandis qu’on peut le trouver, alléluia. [4]
Ant. 5 Voici que viendra * un grand prophète, et lui-même renouvellera Jérusalem, alléluia.
Capitule. Rom. 13, 11. Mes Frères : c’est l’heure de nous réveiller enfin du sommeil ; car maintenant le salut est plus près de nous que lorsque nous avons embrassé la foi.
Hymnus | Hymne |
Creátor alme síderum,
Ætérna lux credéntium, Iesu, Redémptor ómnium, Inténde votis súpplicum. | Bienfaisant Créateur des Cieux,
lumière éternelle des croyants, Rédempteur de tous les hommes, ô Jésus, écoutez les vœux de ceux qui vous prient. |
Qui dǽmonis ne fráudibus
Períret orbis, ímpetu Amóris actus, lánguidi Mundi medéla factus es. | Afin d’empêcher la terre
de périr par les pièges du démon, dans l’élan de votre amour, vous vous êtes fait le remède des maux de ce monde coupable. |
Commúne qui mundi nefas
Ut expiáres, ad crucem E Vírginis sacrário Intácta prodis víctima. | Pour expier, sur la croix,
le crime commun des hommes, ô victime innocente, vous sortez de l’auguste sein de la Vierge. |
Cuius potéstas glóriæ,
Noménque cum primum sonat, Et cǽlites et ínferi Treménte curvántur genu. | A la vue de votre gloire et de votre puissance,
et dès que votre nom se fait entendre, au Ciel et dans les enfers tout fléchit le genou avec crainte. |
Te deprecámur últimæ
Magnum diéi Iúdicem, Armis supérnæ grátiæ Defénde nos ab hóstibus. | Juge souverain du dernier jour,
nous vous en supplions, daignez nous défendre de nos ennemis, par les armes de la grâce céleste. |
Virtus, honor, laus, glória
Deo Patri cum Fílio, Sancto simul Paráclito, In sæculórum sǽcula. | Puissance, honneur, louange et gloire
à Dieu le Père et à son Fils, ainsi qu’au saint Consolateur dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il. |
A MATINES. avant 1960
Invitatoire. Le Roi qui doit venir, le Seigneur, * venez, adorons-le.
Hymnus | Hymne |
Verbum supérnum, pródiens
E Patris ætérni sinu, Qui natus orbi súbvenis, Labénte cursu témporis : | Verbe suprême
qui sortez du sein éternel du Père, et qui, né dans le temps, venez au secours de l’uni vers. |
Illúmina nunc péctora,
Tuóque amóre cóncrema ; Ut cor cadúca déserens Cæli volúptas ímpleat. | Illuminez en ce moment nos cœurs ;
embrasez-les de votre amour ; pour que, détachés des biens périssables, ils soient remplis d’une joie céleste ; |
Ut, cum tribúnal Iúdicis
Damnábit igni nóxios, Et vox amíca débitum Vocábit ad cælum pios ; | Afin, qu’au jour où le Juge,
du haut de son tribunal, condamnera les coupables aux flammes ; et, d’une voix amie, conviera les bons au ciel, |
Non esca flammárum nigros
Volvámur inter túrbines, Vultu Dei sed cómpotes Cæli fruámur gáudiis. | Nous ne soyons pas du nombre de ceux qui,
voués à des feux éternels, seront lancés dans un noir tourbillon ; mais que, favorisés de la vue de Dieu, nous goûtions les délices du Paradis. |
Patri, simulque Fílio,
Tibíque, Sancte Spíritus, Sicut fuit, sit iúgiter Sæclum per omne glória. Amen. | Au Père, au Fils
et à vous, Esprit-Saint, soient à jamais dans tous les siècles, comme il fut toujours, la gloire. Ainsi soit-il. |
Au premier nocturne.
Ant. 1 Voici que viendra le Roi, le Très-haut, avec une grande puissance, pour sauver les nations, alléluia. Ps. 1.
Ant. 2 Fortifiez les mains languissantes, prenez courage et dites : Voici notre Dieu viendra et il nous sauvera, alléluia. [6] Ps. 2.
Ant. 3 Réjouissez-vous tos et livrez-vous à la joie, car voici que le Seigneur de la vengeance viendra, il amènera la rétribution, il viendra lui-même et nous sauvera. [7] Ps. 3.
V/. C’est de Sion que vient l’éclat de sa splendeur. [8]
R/. Notre Dieu viendra manifestement.
Commencement du livre du Prophète Isaïe. Cap. 1, 1-9
Première leçon. Vision d’Isaïe fils d’Amos, qu’il a vue, touchant Juda et Jérusalem, dans les jours d’Ozias, de Joathan, d’Achaz et d’Ézéchias, rois de Juda. Écoutez, cieux, et prête l’oreille, terre, parce que le Seigneur a parlé : J’ai nourri des fils et je les ai élevés ; mais eux, m’ont méprisé. Un bœuf connaît son possesseur, un âne l’étable de son Maître ; mais Israël ne m’a pas connu, et mon peuple n’a pas eu d’intelligence.
R/. Regardant de loin, voici que je vois venir la puissance de Dieu, et une nuée qui couvre toute la terre. * Allez à sa rencontre et dites : * Annoncez-nous si c’est vous-même, * Qui devez régner sur le peuple d’Israël. V/. Vous tous, fils de la terre, et fils des hommes, [9] ensemble et de concert, riche et pauvre. [10] * Allez à sa rencontre, et dites : V/. Vous qui gouvernez Israël, soyez attentif, vous qui conduisez Joseph comme une brebis. [11] * Annoncez-nous si c’est vous-même. V/. Élevez vos portes, ô princes ; et vous, élevez-vous, portes éternelles, et le Roi de la gloire entrera. [12] * Qui devez régner sur le peuple d’Israël. Gloire au Père.R/. Regardant de loin, voici que je vois venir la puissance de Dieu, et une nuée qui couvre toute la terre. * Allez à sa rencontre et dites : * Annoncez-nous si c’est vous-même, * Qui devez régner sur le peuple d’Israël.
Deuxième leçon. Malheur à la nation pécheresse, au peuple chargé d’iniquité, à la race perverse, aux enfants scélérats ; ils ont abandonné le Seigneur, ils ont blasphémé le saint d’Israël, ils sont retournés en arrière. Où vous frapperai-je encore, vous qui ajoutez à la prévarication ? [13] Toute tête est languissante, et tout cœur abattu. De la plante des pieds jusqu’au sommet de la tête, rien en lui de sain ; c’est blessure, meurtrissure, plaie enflammée qui n’a été ni bandée, ni pansée, ni adoucie par l’huile.
R/. Je regardais dans la vision de nuit et voici comme le Fils d’un homme qui venait dans les nuées du Ciel ; et il lui fut donné le royaume et l’honneur : [14] * Et tous les peuples, tribus et langues le serviront. [15] V/. Sa puissance est une puissance éternelle, qui ne lui sera pas ôtée, et son royaume ne sera pas détruit. * Et.
Troisième leçon. Votre terre est déserte, vos cités brûlées par le feu ; votre pays, devant vous des étrangers le dévorent, et il sera désolé comme une dévastation de l’ennemi. Et la fille de Sion1 sera laissée comme un berceau dans une vigne, comme une cabane dans un champ de concombres, comme une cité qui est livrée au pillage. Si le Seigneur des armées ne nous avait réservé un rejeton, nous aurions été comme Sodome, nous serions devenus semblables à Gomorrhe.
R/. L’Ange Gabriel fut envoyé à Marie, vierge qu’avait épousée Joseph, lui annonçant la parole : mais la Vierge s’effraya de la lumière. Ne craignez point, Marie, vous avez trouvé grâce devant Dieu : [16] * Voilà que vous concevrez et enfanterez, et il sera appelé le Fils du Très-Haut. V/. Le Seigneur lui donnera le trône de David son père et il régnera éternellement sur la maison de Jacob. * Voici. Gloire au Père. * Voici.
Au deuxième nocturne.
Ant. 1 Réjouis-toi et livre-toi à la joie, fille de Jérusalem ; voici que ton Roi vient à toi ; Sion, ne crains pas, car ton salut viendra bientôt. [17] Ps. 8.
Ant. 2 Notre Roi, le Christ, viendra, lui que Jean a prédit être l’Agneau qui doit venir. Ps. 9 i.
Ant. 3 Voici que je viens bientôt, et ma récompense est avec moi, dit le Seigneur ; c’est de donner à chacun selon ses œuvres. [18] Ps. 9 ii.
V/. Envoyez, Seigneur, l’Agneau dominateur de la terre. [19]
R/. De la pierre du désert à la montagne de la fille de Sion.
Sermon de saint Léon, Pape.
Quatrième leçon. Le Sauveur, instruisant ses disciples au sujet de l’avènement du royaume de Dieu, ainsi que de la fin du monde et des temps, et, en la personne de ses Apôtres, instruisant toute son Église, leur dit : « Faites attention, de peur que vos cœurs ne s’appesantissent dans l’excès du manger et du boire et les soins de cette vie. « Nous savons, très chers, que ce précepte nous regarde tout spécialement, puisque l’on ne doute guère que ce jour annoncé, quoique encore caché, ne soit bien proche.
R/. Je vous salue, Marie, pleine de grâce, le Seigneur est avec vous : [20] * L’Esprit-Saint surviendra en vous, et la vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre ; c’est pourquoi le qui naîtra de vous, sera appelée le Fils de Dieu. V/. Comment cela se fera-t-il, car je ne connais point d’homme ? Et l’Ange, répondant, lui dit : * L’Esprit-Saint.
Cinquième leçon. I1 convient que tout homme se prépare à l’avènement du Sauveur ; de crainte qu’il ne le trouve livré à la gourmandise, ou embarrassé dans les soucis du siècle. Il est prouvé, par une expérience de tous les jours, que la vivacité de l’esprit s’altère par l’excès du boire, et que l’énergie du cœur est affaiblie par une trop grande quantité d’aliments. Le plaisir de manger peut devenir nuisible, même à la santé du corps, si la raison et la tempérance ne le modèrent, ne résistent à l’attrait, et ne retranchent au plaisir ce qui serait superflu.
R/. Nous attendons le Sauveur, notre Seigneur Jésus-Christ, [21] * Qui réformera le corps de notre humilité, en le conformant à son corps glorieux. V/. Vivons sobrement, justement et pieusement en ce monde, attendant la bienheureuse espérance, et l’avènement de la gloire du grand Dieu. [22] * Qui réformera.
Sixième leçon. Car, bien que, sans l’âme, la chair ne désirerait rien, et que c’est d’elle qu’elle reçoit la sensibilité, comme elle en reçoit le mouvement, il est cependant du devoir de cette âme de refuser certaines choses à la substance matérielle qui lui est assujettie. Par un jugement intérieur, elle doit tenir ses sens extérieurs éloignés de ce qui ne lui convient pas, afin qu’étant presque constamment détachée des désirs corporels, elle puisse vaquer à l’étude de la sagesse divine dans le palais de l’intelligence, où le bruit des sollicitudes terrestres ne se faisant plus entendre, elle se réjouit dans des méditations saintes, à la pensée des délices éternelles.
R/. Je vous conjure, Seigneur, envoyez celui que vous devez envoyer : voyez l’affliction de votre peuple : [23] * Ainsi que vous l’avez promis, venez, * Et délivrez-nous. V/. Vous qui gouvernez Israël, soyez attentif : vous qui conduisez comme une brebis, Joseph ; vous qui êtes assis au-dessus des Chérubins. [24] * Ainsi que. Gloire au Père. * Et délivrez-nous.
Au troisième nocturne.
Ant. 1 L’Ange Gabriel parla à Marie, disant : Je vous salue, pleine de grâce, le Seigneur est avec vous, vous êtes bénie entre les femmes. [25] Ps. 9 iii.
Ant. 2 Marie dit : Quelle pensez-vous que soit cette salutation ? Parce que mon âme a été troublée, et que je dois enfanter un Roi qui ne violera pas ma virginité. Ps. 9 iv.
Ant. 3 En l’avènement du souverain Roi, que les cœurs des hommes soient purifiés afin que nous marchions à sa rencontre d’une manière digne : car voici qu’Il vient et Il ne tardera pas. Ps. 10.
V/. Le Seigneur sortira de son lieu saint. [26]
R/. Il viendra pour sauver son peuple.
Lecture du saint Évangile selon saint Luc. Cap. 21, 25-33.
En ce temps-là : Jésus dit à ses disciples : il y aura des signes dans le soleil, dans la lune et dans les astres, et, sur la terre, une angoisse des nations. Et le reste.
Homélie de saint Grégoire, Pape.
Septième leçon. Notre Seigneur et Rédempteur, désirant nous trouver prêts, nous annonce les maux qui doivent accompagner la vieillesse du monde, pour nous détourner de son amour. Il nous fait connaître les maux qui précéderont sa fin prochaine, afin que, si nous ne voulons pas craindre Dieu dans la tranquillité, nous redoutions au moins son prochain jugement et soyons comme atterrés par les coups de sa justice.
R/. Voici, dit le Seigneur, que la Vierge concevra et enfantera un fils : [27] * Et son nom sera appelé Admirable, Dieu, Fort. [28] V/. Il s’assiéra sur le trône de David, * et sur son royaume pour l’éternité. [29] * Et son nom.
Huitième leçon. Un peu avant le’ passage du saint Évangile que votre fraternité a entendu tout à l’heure, le Seigneur a dit d’abord : « Une nation se soulèvera contre une nation, un royaume contre un royaume. Il y aura de grands tremblements de terre en divers lieux, et des pestes et des famines. » Et, un peu plus loin, il ajoute ce que vous venez également d’entendre : « II y aura des signes dans le soleil, dans la lune et dans les étoiles, et, sur la terre, la détresse des nations, à cause du bruit confus de la mer et des flots. » De toutes ces choses, les unes, nous les voyons déjà accomplies, les autres, nous craignons de les voir arriver bientôt.
R/. Écoutez, Nations, la parole du Seigneur, et annoncez-la aux extrémités de la terre : [30] * Et aux îles qui sont au loin, dites : Notre Sauveur viendra. V/. Annoncez et faites entendre, parlez et criez. * Et aux îles.
Neuvième leçon. Que les nations se soulèvent les unes contre les autres, que la consternation soit parmi les peuples, nous le voyons à notre époque, plus que jamais on ne le vit autrefois. Que des tremblements de terre renversent des villes innombrables en d’autres parties du monde, vous savez combien de fois nous l’avons entendu dire. La peste ne cesse de nous affliger. Quant aux signes dans le soleil, la lune et les étoiles, jusqu’ici nous n’en voyons pas ; mais, le changement que nous remarquons dans l’atmosphère, nous permet de présumer qu’ils ne tarderont pas à se manifester.
R/. Voilà que des jours viennent, dit le Seigneur, et je susciterai à David un germe juste ; un Roi régnera, il sera sage, et il rendra le jugement et la justice sur la terre : [31] * Et voici le nom dont on l’appellera. * Le Seigneur, notre juste. [32] V/. En ces jours- là Juda sera sauvé, et Israël habitera en assurance. * Et voici. Gloire au Père. * Le Seigneur.
A LAUDES.
Ant. 1 En ce jour-là, * les montagnes distilleront la douceur, et les collines feront couler le lait et le miel, alléluia. [33]
Ant. 2 Réjouis-toi, * fille de Sion, et tressaille d’une joie parfaite, fille de Jérusalem, alléluia. [34]
Ant. 3 Voici que le Seigneur viendra, * et tous ses Saints avec lui, et il y aura en ce jour-là une grande lumière, alléluia. [35]
Ant. 4 Vous tous qui avez soif, * venez vers les eaux : cher chez le Seigneur, tandis qu’on peut le trouver, alléluia. [36]
Ant. 5 Voici que viendra * un grand prophète, et lui-même renouvellera Jérusalem, alléluia.
Capitule. Rom. 13, 11. Mes Frères : c’est l’heure de nous réveiller enfin du sommeil ; car maintenant le salut est plus près de nous que lorsque nous avons embrassé la foi.
Hymnus | Hymne |
En clara vox redárguit
Obscúra quæque, pérsonans : Procul fugéntur sómnia : Ab alto Iesus prómicat. | La voix puissante prêche ;
elle retentit au sein des obscurités ; que les songes fuient loin de nous : des hauteurs célestes, Jésus vient. |
Mens iam resúrgat, tórpida
Non ámplius iacens humi : Sidus refúlget iam novum, Ut tollat omne nóxium. | Que l’âme engourdie se réveille enfin,
qu’elle ne gise plus sur le sol : un astre nouveau déjà resplendit, pour faire disparaître tout ce qui nuit à notre bien. |
En Agnus ad nos míttitur
Laxáre gratis débitum : Omnes simul cum lácrimis Precémur indulgéntiam ; | Voici qu’un Agneau nous est envoyé
pour remettre gratuitement la dette ; joignons, tous, nos prières et nos larmes pour obtenir le pardon ; |
Ut, cum secúndo fúlserit,
Metúque mundum cínxerit, Non pro reátu púniat, Sed nos pius tunc prótegat. | Afin qu’au jour où, brillant à nos yeux pour la seconde fois,
il remplira le monde de crainte, le Seigneur n’ait point à nous punir de nos crimes ; mais plutôt à nous protéger dans sa miséricorde. |
Virtus, honor, laus, glória
Deo Patri cum Fílio, Sancto simul Paráclito, In sæculórum sǽcula. Amen. | Puissance, honneur, louange et gloire
à Dieu le Père et à son Fils, ainsi qu’au saint Consolateur, dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il. |
Ant. au Bénédictus L’Esprit-Saint * descendra en vous, Marie ; ne craignez pas, vous aurez dans votre sein le Fils de Dieu, alléluia.
AUX DEUXIÈMES VÊPRES. Les Antiennes & le Capitule de Laudes.
Hymnus | Hymne |
Creátor alme síderum,
Ætérna lux credéntium, Iesu, Redémptor ómnium, Inténde votis súpplicum. | Bienfaisant Créateur des Cieux,
lumière éternelle des croyants, Rédempteur de tous les hommes, ô Jésus, écoutez les vœux de ceux qui vous prient. |
Qui dǽmonis ne fráudibus
Períret orbis, ímpetu Amóris actus, lánguidi Mundi medéla factus es. | Afin d’empêcher la terre
de périr par les pièges du démon, dans l’élan de votre amour, vous vous êtes fait le remède des maux de ce monde coupable. |
Commúne qui mundi nefas
Ut expiáres, ad crucem E Vírginis sacrário Intácta prodis víctima. | Pour expier, sur la croix,
le crime commun des hommes, ô victime innocente, vous sortez de l’auguste sein de la Vierge. |
Cuius potéstas glóriæ,
Noménque cum primum sonat, Et cǽlites et ínferi Treménte curvántur genu. | A la vue de votre gloire et de votre puissance,
et dès que votre nom se fait entendre, au Ciel et dans les enfers tout fléchit le genou avec crainte. |
Te deprecámur últimæ
Magnum diéi Iúdicem, Armis supérnæ grátiæ Defénde nos ab hóstibus. | Juge souverain du dernier jour,
nous vous en supplions, daignez nous défendre de nos ennemis, par les armes de la grâce céleste. |
Virtus, honor, laus, glória
Deo Patri cum Fílio, Sancto simul Paráclito, In sæculórum sǽcula. | Puissance, honneur, louange et gloire
à Dieu le Père et à son Fils, ainsi qu’au saint Consolateur dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il. |
V/. Cieux, répandez la rosée, et que les nuées fassent pleuvoir le Juste.
R/. Que la terre s’ouvre et germe le Sauveur.
Ant. au Magnificat Ne craignez point, Marie ; * vous avez trouvé grâce devant Dieu : voici que vous concevrez et enfanterez un fils, alléluia.
Ce Dimanche, le premier de l’Année Ecclésiastique, est appelé, dans les chroniques et les chartes du moyen âge, le Dimanche Ad te levavi, à cause des premiers mots de l’Introït, ou encore le Dimanche Aspiciens a longe, à cause des premières paroles d’un des Répons à l’Office de Matines.
La Station [37] est à Sainte-Marie-Majeure ; c’est sous les auspices de Marie, dans l’auguste Basilique qui garde la Crèche de Bethléhem, et qui pour cela est appelée dans les anciens monuments Sainte-Marie ad Præsepe, que l’Église Romaine recommence chaque année le Cycle sacré. Il était impossible de choisir un lieu plus convenable pour saluer l’approche du divin Enfantement qui doit enfin réjouir le ciel et la terre, et montrer le sublime prodige de la fécondité d’une Vierge. Transportons-nous par la pensée dans ce temple auguste, et unissons-nous aux prières qui s’y font entendre ; ce sont les mêmes que celles qui vont être exposées ici.
A l’Office de la nuit, l’Église commence aujourd’hui la lecture du Prophète Isaïe, celui de tous qui a prédit avec le plus d’évidence les caractères du Messie, et elle continue cette lecture jusqu’au jour même de Noël inclusivement. Efforçons-nous dégoûter les enseignements du saint Prophète, et que l’œil de notre foi découvre avec amour le Sauveur promis, sous les traits tantôt gracieux, tantôt terribles, à l’aide desquels Isaïe nous le dépeint.
Les premières paroles de l’Église, au milieu de la nuit, sont celles ci :
Regem venturum Dominum, venite, adoremus. | Le Roi qui doit venir, le Seigneur, venez, adorons-le. |
Ici commence le livre du Prophète Isaïe. Chap. I. (Voir aux Matines plus haut)
Ces paroles du saint Prophète, ou plutôt de Dieu qui parle par sa bouche, doivent faire une vive impression aux enfants de l’Église, à l’entrée de la sainte carrière de l’Avent. Qui ne tremblerait en entendant ce cri du Seigneur méprisé, méconnu, au jour même où il est venu visiter son peuple ? Il a dépouillé son éclat dans la crainte d’effrayer les hommes ; et, loin de sentir la divine force de Celui qui s’abaisse ainsi par amour, ils ne l’ont point connu ; et la crèche qu’il a choisie pour y reposer après sa naissance n’a d’abord été visitée que par deux animaux sans raison. Sentez-vous, chrétiens, combien sont amères les plaintes de votre Dieu ? Combien son amour méprisé souffre de votre indifférence ? Il prend à témoin le ciel et la terre, il lance l’anathème à la nation perverse, aux fils ingrats. Reconnaissons sincèrement que jusqu’ici nous n’avons point connu tout le prix de la visite du Seigneur, que nous avons trop imité l’insensibilité des Juifs qui ne s’émurent pas quand il apparut au milieu de leurs ténèbres. Ce fut en vain que les Anges chantèrent au milieu de la nuit, que les bergers furent conviés à l’adorer et à le reconnaître ; en vain que les Mages vinrent d’Orient demander où était son berceau. Jérusalem fut troublée un instant, il est vrai, à la nouvelle qu’un Roi lui était né ; mais elle retomba bientôt dans son insouciance, et ne s’enquit même pas de la grande nouvelle.
C’est ainsi, ô Sauveur ! Que vous venez dans les ténèbres, et que les ténèbres ne vous comprennent pas. Oh ! Faites que nos ténèbres comprennent la lumière et la désirent. Un jour viendra où vous déchirerez les ténèbres insensibles et volontaires, par l’éclair effrayant de votre justice. Gloire à vous en ce jour, ô souverain Juge ! Mais gardez-nous de votre colère, durant les jours de cette vie mortelle. — Où frapperai-je maintenant ? dites-vous. Mon peuple n’est déjà plus qu’une plaie. — Soyez donc Sauveur, ô Jésus ! dans l’Avènement que nous attendons : Toute tête est languissante, et tout cœur désolé : venez relever ces fronts que la confusion et trop souvent aussi de viles attaches courbent vers la terre. Venez consoler et rafraîchir ces cœurs timides et flétris. Et si nos plaies sont graves et invétérées, venez, vous qui êtes le charitable Samaritain, répandre sur elles l’huile qui fait disparaître la douleur et rend la santé.
Le monde entier vous attend, ô Rédempteur ! Venez vous révéler à lui en le sauvant. L’Église, votre Épouse, commence en ce moment une nouvelle année ; son premier cri est un cri de détresse vers vous ; sa première parole est celle-ci : Venez ! Nos âmes, ô Jésus ! ne veulent pas non plus cheminer sans vous dans le désert de cette vie. Il se fait tard : le jour incline au soir, les ombres sont descendues : levez-vous, divin Soleil ; venez guider nos pas, et nous sauver de la mort.
A LA MESSE.
Pendant que le Prêtre se rend à l’autel pour célébrer le Sacrifice, l’Église débute par ce beau chant qui montre si bien sa confiance d’épouse ; répétons-le avec elle, du fond de notre cœur ; car le Sauveur viendra à nous dans la mesure que nous l’aurons désiré, et fidèlement attendu.
ÉPÎTRE.
Le Sauveur que nous attendons est donc le vêtement qui couvrira notre nudité. Admirons en cela la bonté de notre Dieu, qui, se souvenant que l’homme s’était caché après son péché, parce qu’il se sentait nu, veut bien lui servir lui-même de voile, et couvrir une si grande misère du manteau de sa divinité. Soyons donc attentifs au jour et à l’heure où il, viendra, et gardons-nous de nous laisser appesantir par le sommeil de l’habitude et de la mollesse. La lumière luira bientôt ; que ses premiers rayons éclairent notre justice, ou du moins notre repentir. Si le Sauveur vient couvrir nos péchés, afin qu’ils ne paraissent plus, nous, du moins, détruisons dans nos cœurs toute affection à ces mêmes péchés ; et qu’il ne soit pas dit que nous avons refusé le salut. Les dernières paroles de cette Épître se trouvèrent à l’ouverture du livre, quand saint Augustin, pressé depuis longtemps par la grâce divine de se donner à Dieu, voulut obéir à la voix qui lui disait : Tolle, lege ; prends, et lis. Elles décidèrent sa conversion ; il résolut tout à coup de rompre avec la vie des sens et de revêtir Jésus-Christ. Imitons son exemple en ce jour : soupirons ardemment après le cher et glorieux vêtement qui sera bientôt placé sur nos épaules par la miséricorde de notre Père céleste, et répétons avec l’Église ces touchantes paroles dont nous ne devons pas craindre de fatiguer l’oreille de notre Dieu :
ÉVANGILE.
Nous devons donc nous attendre à voir éclater tout à coup votre Avènement terrible, ô Jésus ! Bientôt vous allez venir dans votre miséricorde pour couvrir notre nudité, comme un vêtement de gloire et d’immortalité ; mais vous reviendrez un jour, et avec une si effrayante majesté que les hommes en sécheront de frayeur. O Christ ! ne me perdez pas, en ce jour de l’embrasement universel. Visitez-moi auparavant dans votre amour : je veux vous préparer mon âme. Je veux que vous preniez naissance en elle, afin qu’au jour où les convulsions de la nature annonceront votre approche, je puisse lever la tête, comme vos fidèles disciples, qui, vous portant déjà dans leurs cœurs, ne craindront rien de vos foudres.
Pendant l’offrande du Pain et du Vin, l’Église a les yeux fixés sur Celui qui doit venir, et chante avec persévérance son même cantique : « Vers vous ô mon Dieu, j’ai élevé mon âme. En vous j’ai mis ma confiance, et je n’aurai point à en rougir. Que mes ennemis ne se rient point de ma patience ; car tous ceux qui vous attendent ne seront point confondus. »
Après la Communion du Prêtre et du peuple, le Chœur chante ces belles paroles de David, pour célébrer la douceur du Fruit divin que notre Terre va produire, et qui vient de se donner par avance à ses élus. Cette Terre qui est à nous, c’est la Vierge Marie fécondée par la rosée du ciel, et qui s’ouvre, comme nous le dit Isaïe, pour produire le Sauveur. « Le Seigneur répandra sur nous son bienfait, et notre terre produira son fruit. »
Le missel romain actuel commence aujourd’hui son cycle liturgique, à la différence des anciens Sacramentaires où l’année s’ouvrait par la solennité de Noël. La raison en est que l’incarnation du Verbe de Dieu est le vrai point central, la colonne milliaire qui divise la longue série des siècles parcourus par l’humanité ; celle-ci, dans les desseins de la divine Providence, ou bien prépare cette plénitude des temps qui prélude à l’heureuse « année de rédemption ».ou bien, de l’étable de Bethlehem dirige ses pas vers la vallée de Josaphat, où l’enfant de la Crèche attend pour la juger toute la descendance d’Adam, rachetée avec son Sang précieux. L’ordre du missel actuel est plus logique et correspond mieux à cette noble conception de l’histoire, qui fait de l’Incarnation le véritable point central du drame de l’univers ; mais les anciens en faisant commencer leurs Sacramentaires à la fête de Noël, suivaient la tradition de la liturgie primitive, qui, jusqu’au IVe siècle, ne connaissait pas encore une période de quatre ou six dimanches de préparation à cette solennité grande entre toutes.
Ce fut vers le milieu du Ve siècle quand, par le contre-coup des hérésies christologiques de Nestorius, la commémoration de la naissance du Sauveur acquit une grande célébrité, que, à Ravenne, dans les Gaules et en Espagne, commença à apparaître dans la liturgie un cycle spécial de préparation à Noël. La polémique contre Nestorius et Eutychès et les grands conciles d’Éphèse et de Chalcédoine, où fut solennellement proclamé le dogme des deux natures, divine et humaine, en l’unique personne du Seigneur Jésus et où, par suite, furent exaltées les gloires et les prérogatives de la Theotocos, donnèrent une impulsion vigoureuse à la piété catholique envers le mystère de l’Incarnation, qui trouva en saint Léon le Grand et en saint Pierre Chrysologue les prédicateurs les plus enthousiastes de ce mystère de Rédemption.
Le Sacramentaire Léonen étant mutilé en son début, ne peut rien nous apprendre sur les origines de l’Avent liturgique à Rome ; mais il est probable que le rite de la métropole pontificale, sur ce point également, fut identique en substance à celui de Naples et du diocèse suffragant de Ravenne, où Chrysologue — si même on ne doit pas lui attribuer la paternité des collectes d’Avent du fameux rotulus de Ravenne — prononça de splendides homélies en préparation à la fête de Noël, en quatre occasions différentes.
Depuis bien des siècles l’Église romaine consacre quatre semaines à la célébration de l’Avent, Il est vrai que les Sacramentaires gélasien et grégorien, d’accord avec plusieurs antiques lectionnaires, en énumèrent cinq, mais les listes de lectures de Capoue et de Naples, et l’usage des Nestoriens, qui connaissent seulement quatre semaines d’Avent, déposent sur ce point encore en faveur de l’antiquité de la pure tradition romaine.
Pendant le Carême, ce qui prédomine c’est le concept de pénitence et de deuil pour le déicide qui se consomme à Jérusalem ; durant l’Avent, au contraire, l’esprit de la sainte liturgie, à l’annonce joyeuse de la libération prochaine — Evangelizo vobis gaudium magnum quod erit omni populo [38] — est celui d’une pieuse allégresse, d’une tendre reconnaissance et d’un désir intense de la venue du Verbe de Dieu dans les cœurs de tous les fils d’Adam. Notre cœur, comme celui d’Abraham qui exultavit, dit Jésus-Christ, ut videret diem meum, vidit et gavisus est [39], doit être pénétré de saint enthousiasme pour le triomphe définitif de l’humanité, qui, par l’union hypostatique du Christ, est élevée jusqu’au trône de la Divinité.
Les chants de la messe, les répons, les antiennes de l’office divin sont, pour cette raison, tout émaillés d’alléluia ; il semble que la nature entière — comme l’apôtre la décrit, dans l’attente de la parousie finale : « expectatio enim creaturae revelationem filiorum Dei expectat [40] » — se sente exaltée par l’incarnation du Verbe de Dieu qui, après tant de siècles d’attente, vient enfin sur cette terre pour donner l’ultime perfection au chef-d’œuvre de ses mains — Instaurare omnia in Christo [41]. La sainte liturgie, durant ce temps, recueille dans les Écritures les expressions les plus énergiques et les plus aptes à exprimer le désir intense et la joie avec lesquels les saints patriarches, les prophètes et les justes de tout l’Ancien Testament ont hâté par leurs vœux la descente du Fils de Dieu. Nous ne pouvons faire mieux que de nous associer à leurs pieux sentiments, priant le Verbe incarné de daigner naître en tous les cœurs, d’étendre aussi son règne sur tant de régions où, jusqu’à présent, son saint nom n’a pas été annoncé, où les habitants dorment encore dans les ténèbres et dans les ombres de la mort.
Il semble que la station de ce jour dans la basilique Libérienne — où, depuis l’époque de Sixte III l’on vénérait une reproduction romaine du sanctuaire de la Nativité à Bethlehem — veuille désigner aux fidèles le but et le terme véritable de cette période de préparation et de prière. C’est là que nous attend le Praesepe Domini, le berceau du Verbe incarné, qui, tout en démontrant la vérité de sa nature humaine, est aussi le trône d’où II nous donne ses premières leçons évangéliques sur l’obéissance, la pauvreté, la mortification des sens, condamnant l’orgueil, la sensualité et le faste trompeur du monde.
L’Ordo Romanus de Cencius Camerarius nous atteste qu’au XIIe siècle le Pape avait encore l’habitude de se rendre à Sainte-Marie-Majeure [42] pour y célébrer la messe stationnale en ce jour. Il est probable que cet usage remonte jusqu’au temps de saint Grégoire le Grand, le réordonnateur par excellence de la liturgie stationnale, d’autant plus que, suivant une indication de plusieurs anciens manuscrits de ses œuvres, l’homélie de ce jour sur l’Évangile, qui se lit dans le bréviaire, fut prononcée précisément à Sainte-Marie-Majeure.
L’antienne d’introït Ad te levavi, avec le psaume 24 qui lui fait suite, exprime très bien les sentiments de l’humanité abattue, mais pourtant pleine d’espérance : elle prie le Seigneur de la remettre sur le sentier qui conduit à Bethlehem, sur la voie de la vérité et de la justice.
On omet l’Hymne angélique, pour en reprendre avec plus d’allégresse, la nuit de Noël, le chant interrompu. A Rome toutefois, au moyen âge, le Pape l’entonnait solennellement aujourd’hui à Sainte-Marie-Majeure, ce qui s’accorde fort bien avec le caractère de fête qui est celui de tout l’Office d’Avent.
Dans la collecte on supplie le Seigneur de venir à notre aide, et, par sa puissance, de nous soustraire aux périls auxquels le péché nous expose.
La première lecture est tirée de l’épître de saint Paul aux Romains (XIII, 11-14). Après la tiédeur et la léthargie spirituelle où nous avait comme plongés la longue paix et la prospérité temporelle, maintenant, au terme de l’année, l’Église nous arrache enfin au sommeil par les paroles inspirées de l’Apôtre, qui, jadis, déterminèrent Augustin à se convertir. La nuit du siècle, de l’ignorance et du péché est presque entièrement passée ; le flambeau évangélique, telle une aurore matinale, dore déjà les cimes des colles mundi, et il convient que nos actions soient dignes, elles aussi, de cette ère nouvelle de lumière et de sainteté inaugurée par le Christ. La phrase lapidaire de saint Paul : se revêtir de Jésus-Christ, est si profonde qu’elle ne peut être facilement traduite et expliquée. Comme l’exposent les saints docteurs, le divin Sauveur, par ses exemples, ses mérites, son esprit, doit être comme un vêtement intime et surnaturel pour notre âme, et il faut que celle-ci revive, pour ainsi dire, Jésus, et continue d’une façon mystique sur la terre son incarnation et sa vie très sainte, à la gloire du Père.
Le répons-graduel, comme cela est de règle dans l’antique liturgie, est emprunté au même psaume 24 dont a été tiré l’introït. Le verset alléluiatique, qui, originairement, suivait la seconde lecture, — l’Évangile était la troisième,— est tiré du psaume 84 et exprime le vœu que le Père nous montre désormais sa miséricorde et son salut : c’est-à-dire Jésus incarné. Dans la lecture évangélique de ce jour (Luc., XXI, 25-33), l’Église met en relation la seconde venue de Jésus à la fin du monde, in gloria majestatis suae, avec sa première apparition à Betlehem in humilitate passionis, en qualité de Rédempteur. Dans l’un et l’autre cas, il invite ses élus à lever désormais la tête, parce que le jour approche, de la revanche et de la libération. L’Église est demeurée fidèle à cet avis : les premières générations chrétiennes terminaient en effet leurs synaxes par un vœu fervent, afin que Jésus hâtât l’heure de sa dernière apparition. Amen, vent, Domine Iesu [43], et aujourd’hui encore, cette foi ardente soutient la famille catholique dans ses luttes et dans ses douleurs, hi qui diligunt adventum eius [44].
Saint Grégoire le Grand commenta aux fidèles de Rome la lecture évangélique de ce jour, en cette même basilique stationnale de Sainte-Marie-Majeure où nous nous réunissons encore aujourd’hui ; et, pour reproduire sous les plus vives couleurs la catastrophe finale du monde, il emprunta les éléments de sa description à un tremblement de terre, qui, trois jours avant, avait renversé temples et maisons, remplissant les âmes de terreur.
L’antienne de l’offertoire vient, elle aussi, du psaume 24 —- qui est donc le psaume propre du premier dimanche de l’Avent — et en exprime très bien le sens : celui qui attend le Seigneur avec une foi vigilante, ne sera pas confondu.
La collecte sur les oblations (Secrète) dans sa sobriété et son élégante concision, exprime en des termes différents l’antique concept qui informe encore l’épiclèse romaine, et supplie le Seigneur que la redoutable efficacité du Sacrifice eucharistique purifie nos âmes et nous donne de nous approcher dignement pour recevoir Celui qui en fut l’auteur.
L’antienne pour la Communion est un chant de jubilation et de reconnaissance, tiré du psaume 84, celui-là même qui nous a donné le verset alléluiatique. L’Eucharistie nous est le gage de la bonté infinie du Seigneur, et notre terre, naguère aride et stérile à cause du péché, baignée maintenant par la rosée de la grâce, portera désormais son fruit.
La collecte d’action de grâces après la sainte Communion — la véritable Eucharistia au sens étymologique — s’inspire du psaume 47. Le pain céleste auquel nous avons participé, est celui qui, mieux que tout autre, nous disposera par sa vertu divine à nous préparer convenablement à la fête prochaine du commun rachat.
Dans le bas moyen âge, au commencement de la nouvelle année liturgique, c’était un usage assez répandu, de chanter avant l’introït quelques versets en l’honneur de saint Grégoire le Grand, le rédacteur inspiré de 1’Antiphonarium qui porte son nom :
Sanctissimus namque Gregorius, cum preces effunderet ad Dominum ut musicum tonum ei desuper in carminibus dedisset : | Or, tandis que le Très-Saint Grégoire répandait ses prières au Seigneur afin qu’il lui accorde le don de la musique à appliquer aux chants, |
Tunc descendit Spiritus Sanctus super eum in specie columbae, et illustravit cor eius. Et sic demum exorsus est canere ita dicendo : | Voici que le Saint-Esprit descendit sur lui sous la forme d’une colombe et illumina son cœur, et il commença alors à chanter, en disant cela : |
Ad te levavi etc. | Vers toi j’ai élevé mon âme… |
L’homme est composé d’esprit et de chair ; celui-là veut être attiré par la vérité et par l’amour ; celle-ci ne comprend que le bien ou le mal sensible, aussi doit-elle être tenue en bride par la pénitence et par une crainte salutaire des jugements divins.
La 1ère semaine de l’Avent Il vient de loin.
L’aurore du grand jour empourpre l’horizon. Dans le lointain nébuleux, se laisse entrevoir le Roi qui va venir. Nous l’adorons : « Le Roi, le Seigneur, va venir, adorons-le ». Le chemin est sombre et des nuées recouvrent le royaume de Dieu.
Pour nous, allons à la rencontre du Roi qui va venir avec toute l’impatience de nos désirs :
Veille du premier dimanche de l’Avent. Dès la veille, on entend les premiers échos de l’Avent. Écoutons ces premiers accents, ces premiers accords. Les antiennes des Vêpres nous donnent l’image exacte de tout le temps. Nous ne devons pas réciter ces antiennes d’une manière superficielle, elles donnent la note fondamentale du chant qui doit nous accompagner pendant tout l’Avent. Ces antiennes, le dimanche, sont chantées quatre fois : aux premières et aux secondes Vêpres, à Laudes et aux petites Heures ; bien plus, nous les récitons encore pendant la semaine suivante aux stations du jour (de Prime à None). Il en est de même pour les antiennes des dimanches suivants, dont le contenu est tout à fait semblable. C’est pourquoi il me semble que rien n’est meilleur pour entrer dans la vie, la pensée et le chant de l’Avent, que de répéter sans cesse ou même de chanter ces antiennes. C’est pourquoi nous les reproduisons dès le début de l’Avent.
Ant. 1 In illa die stillabunt montes dulcedinem et colles fluent lac et mel, Alleluia. | En ce jour les montagnes distilleront la suavité et les collines laisseront couler le lait et le miel, Alléluia. |
Ant. 2 Jucundare, filia Sion et exsulta satis, filia Jerusalem, Alleluia. | Réjouis-toi, fille de Sion, et tressaille d’allégresse, fille de Jérusalem, Alléluia. |
Ant. 3 Ecce Dominus veniet ; et omnes sancti ejus cum eo : et erit in die illa lux magna, Alleluia. | Voici que le Seigneur va venir et tous ses saints avec Lui ; et dans ce jour se lèvera une grande lumière, Alléluia. |
Ant. 4 Omnes sitientes, venite ad aquas : quaerite Dominum dum inveniri potest, Alleluia. | Vous tous qui avez soif, venez à la source, cherchez le Seigneur tant qu’on peut le trouver, Alléluia. |
Ant. 5 Ecce veniet Propheta magnus et ipse renovabit Jerusalem, Alleluia. | Voici que vient le grand Prophète et il créera une Jérusalem nouvelle, Alléluia. |
Le verset qui encadre le Magnificat est délicatement choisi, nous voyons le Seigneur venir de loin : « Voici que le nom du Seigneur vient de loin et sa gloire remplit l’univers ».
Considérations chorales sur les antiennes de l’Avent. Les antiennes de l’Avent ont un caractère très accusé, comme on n’en trouve pas d’exemple dans l’année liturgique. Celui qui est familier avec elles et possède leur mélodie dans l’oreille le sentira, avant même de pouvoir en donner les raisons. On perçoit le souffle de l’Esprit de Dieu même dans les mélodies de la sainte liturgie. — Le caractère dominant des antiennes de l’Avent est la joie : 1° tantôt une gaieté enfantine, 2° tantôt la joie profonde de la contemplation, 3° tantôt la joie stupéfaite et admirative, le saisissement devant la grandeur du Roi qui va venir.
Ad 1. Exemple : la troisième antienne du premier dimanche de l’Avent (Ecce Dominus veniet). Ce sont sans doute les tierces ascendantes et descendantes qui lui donnent ce caractère si joyeux.
Ad 2. Exemple : La seconde antienne du même dimanche (Jucundare). Sur la syllabe Jucun- »da »-re, les neumes se balancent, comme pour savourer la joie et sur « et exsulta satis », la mélodie descend comme pour nous instruire de la dignité et de la grandeur du Roi qui va venir.
Ad 3. Exemple : La seconde antienne du troisième dimanche (Jerusalem gaude). Les mots « Jerusalem gaude — gaudio magno — quia veniet » montent à chaque fois d’une tierce et constituent ainsi un crescendo d’une beauté incomparable. Le plus bel exemple de ce genre est sans doute la quatrième antienne du quatrième dimanche (la même que la quatrième de la vigile). (Dominus veniet, occurrite ei). Sont également caractéristiques les antiennes qui sonnent comme un appel de fanfare. Qu’on examine, par exemple, la deuxième antienne, du deuxième dimanche (Urbs fortitudinis nostrae Sion) (7e ton), ainsi que celle, dont la mélodie du 4e ton revient sans doute souvent, mais qui ici rend un son tout particulier, quelque chose comme l’annonce d’un héraut.
Le 1er Dimanche
On voit pointer l’aurore du jour de la Rédemption !
La prière nocturne. Dans les longues nuits de l’Avent, le Prophète Isaïe se tient devant nous. Dans les lectures d’Écriture sainte, nous entendons tous les jours sa voix jusqu’à Noël. C’est là une distinction particulière. On lit les autres Prophètes, depuis Ézéchiel jusqu’à Malachie, pendant le mois de novembre ; leur rôle est de nous annoncer l’achèvement du royaume du Christ. Par contre, l’Église donne la parole à deux Prophètes dans un autre temps. Ces deux Prophètes sont Isaïe et Jérémie. Jérémie est le type (le symbole) du Christ souffrant et nous guide à travers le temps de la Passion. Isaïe, de son côté, est, au cours de quatre semaines, le prédicateur et le prophète de l’Avent. Il est considéré comme le Prince des Prophètes et même comme l’« évangéliste de l’Ancien Testament ». C’est lui qui, parmi tous les Prophètes, a donné l’image la plus précise du Rédempteur. C’est là une des raisons pour lesquelles son livre est lu pendant l’Avent. Il y a une autre raison, c’est qu’il est la voix de l’humanité implorant le Rédempteur. Cette voix doit pénétrer dans notre âme et y trouver un écho. Mais il est aussi un prédicateur de pénitence et il doit nous conduire à la conversion et à la réforme de notre vie. La lecture d’aujourd’hui contient de sérieux reproches de Dieu à son peuple. Le prophète parle du peuple juif, mais l’Église pense à nous. L’amour méprisé de Dieu prend le ciel et la terre à témoins. Cette leçon retentit comme un écho de la malédiction divine au paradis terrestre (Is. l, 1-9) :
« Cieux écoutez, écoute, Ô terre, car Dieu parle :
J’ai nourri des enfants et je les ai élevés et eux m’ont méprisé.
Le bœuf connaît son maître et l’âne l’étable de son possesseur.
Mais Israël ne me connaît pas et mon peuple ne comprend pas.
Malheur à toi, nation pécheresse, peuple chargé d’iniquités.
Malheur à vous, race impie, fils dégénérés,
Qui avez abandonné le Seigneur et méprisé le Saint d’Israël.
Où pourrai-je encore vous frapper si vous continuez vos prévarications ?
La tête est toute entière malade et le cœur défaillant.
Depuis la plante des pieds jusqu’au sommet de la tête, il n’y a rien de sain en toi.
Ce n’est que coups, meurtrissures et blessures,
Sans pansement, sans herbe médicale, sans huile adoucissante.
Votre pays est dévasté, vos villes sont incendiées par le feu,
Votre sel est dévoré, sous vos yeux, par les étrangers.
Il n’est resté que la fille de Sion, comme une hutte dans le vignoble,
Comme une tour de garde dans un champ de concombres, comme une tour solitaire.
Si le Seigneur ne nous laisse un germe,
Nous deviendrons comme Sodome et Gomorrhe... ».
Sérieuses paroles qui doivent nous exhorter au changement de vie !
La messe (Ad te levavi). La messe d’aujourd’hui, la première que nous célébrions au seuil de l’année nouvelle, nous offre dans ses textes trois choses : un message d’Avent (Évangile), un avertissement d’Avent (Épître) et des prières d’Avent (Introït, Oraisons).
Nous entrons dans la maison de Dieu. Là, vient à notre rencontre la Mère de Dieu qui prépare déjà la Crèche dans laquelle elle veut déposer le Fils de Dieu. L’église de station est Sainte-Marie-Majeure à la Crèche (dans l’église de station, le saint de la station vient à notre rencontre). Quel beau symbole ! Aujourd’hui, au premier jour de la préparation à Noël, nous voyons déjà Marie auprès de la Crèche. La Mère de Dieu nous introduit alors au Saint Sacrifice, elle nous parle et dicte notre prière. Quels accents d’une beauté profonde n’a pas l’Introït dans sa bouche : « J’élève mon âme vers toi, mon Dieu, en toi, j’ai confiance... car personne n’est confondu quand il t’attend ». Mieux que personne, la Mère de Dieu peut nous apprendre à prier, à désirer.
Nous chantons ensuite le Kyrie. C’est le chant d’exil des enfants de Dieu, c’est notre chant d’imploration. Dans l’Avent spécialement, nous voulons par-là exprimer notre besoin de rédemption.
Le Gloria disparaît, nous attendrons, pour le chanter de nouveau, la nuit sainte où nous fêterons Noël, dans la même église. Maintenant, notre Mère l’Église étend ses bras pour chanter l’Oraison : C’est la prière typique de l’Avent qui commence par Excita. A la différence des collectes du temps après la Pentecôte, au rythme si calme, celle-ci est impétueuse ; l’accent est sur veni (viens). Nous remarquons que l’Oraison s’adresse directement au Christ. C’est donc comme un antique « Maranatha », c’est-à-dire : Viens Seigneur ! Pourquoi le Seigneur doit-il venir ? Pour nous délivrer : Viens et délivre-nous du péché et de la peine.
Maintenant, Marie s’avance de nouveau pour nous instruire, dans l’Épître. C’est une parole magnifique, surtout dans la bouche de Marie. Marie se tient debout devant nous, à l’aurore du jour de délivrance. Sur la terre s’étendait jusqu’ici une nuit profonde ; les hommes dormaient, revêtus du vêtement nocturne du péché. Mais le jour de la Rédemption n’est pas éloigné, les premiers feux de l’aurore s’allument à l’horizon, le Roi est proche. Il appelle au combat ses chevaliers de lumière ; Marie parle comme notre guide Revêtez la cuirasse de lumière ; mieux encore : revêtez-vous du Seigneur Jésus, comme je m’en suis revêtue moi-même.
A l’Évangile, le Seigneur paraît dans sa puissance et sa majesté. C’est déjà la réponse à l’Excita. Nous regardons en haut et nous levons nos têtes, car notre Rédemption s’approche. La Parole est maintenant suivie de l’Acte, tant du côté des hommes que du côté de Dieu. Pour montrer que ce ne sont pas de simples paroles, nous nous offrons nous-mêmes dans le symbole de l’offrande et nous accompagnons cette offrande de nos désirs. l’Offrande est par conséquent le culte de prière de l’avant-messe, transformé en acte. Et l’Acte de Dieu est la venue du Christ par la grâce avec les mêmes effets que ceux qui sont décrits dans la Parole de Dieu (l’Évangile).
Cette venue du Christ est encore une venue cachée, voilée, mais elle est la préparation, la première, de son grand avènement de grâce au jour de Noël (Postc.). Qu’on observe la Postcommunion, elle s’inspire du Ps. 47, « Puissions-nous, Seigneur, recevoir ta miséricorde au milieu de ton temple ». En voici le sens symbolique : nous sommes agenouillés dans la maison de Dieu, les mains jointes, et nous attendons que la Miséricorde (incarnée) soit déposée dans nos bras comme jadis dans ceux du vieillard Siméon. Telle est notre attitude au début de ce cycle festival. A la fin du cycle, le 2 février, nous prierons avec les mêmes paroles du psaume : « Nous avons reçu ta miséricorde... » (Intr.).
Le banquet eucharistique doit calmer l’impatience que nous avons de l’avènement du Seigneur, il doit être la semence déposée dans la terre fertile, qui doit produire à Noël des fruits abondants (Comm.). Notre cœur doit ressembler à la Mère de Dieu et à la Crèche.
Faisons une remarque. Quand il s’agit d’exprimer l’attente de l’homme, nous chantons le psaume 24 (Intr. Grad. Off) ; quand il s’agit d’exprimer la réponse de Dieu qui vient, nous entonnons le psaume de Noël, le psaume 84 (All. Comm.).
Marie. — Pendant l’Avent, l’Église nous donne, pour nous accompagner, la Mère de Dieu ; la Sainte Vierge nous enseigne à attendre le Seigneur. C’est pourquoi nous commençons la célébration de l’Avent dans la grande église romaine de Sainte-Marie « ad praesepe » « à la Crèche ». Cette église de station fut reconstruite en 432 pour commémorer le concile d’Éphèse et dédiée à la « Mère de Dieu ». Elle est l’église spéciale de station pour le temps de Noël (on y célèbre six fois pendant ce temps). Au reste, les secondes oraisons des messes de l’Avent sont les oraisons de la Sainte Vierge [45]. Ces oraisons ont un contenu très riche. Elles affirment la maternité divine, elles rappellent le message de l’ange et nous assurent de la protection maternelle de Marie. L’oraison de la communion est devenue l’oraison de l’Angelus et, à ce titre, fait partie du trésor populaire. — Une oreille sensible reconnaîtra aussi, dans l’antienne de communion de ce jour, une allusion à la Mère de Dieu : Nous nous demandons ce qu’entend la liturgie par « notre terre » qui « porte son fruit » ? Il faut sans doute penser d’abord à la terre de l’Église et de notre âme qui maintenant, dans le banquet sacrifical, porte des fruits de rédemption. Cependant l’Église pense sûrement à son modèle, la Vierge bénie entre toutes les femmes, et au « fruit de ses entrailles », à la Mère de Dieu et au Fils de Dieu. C’est justement au moment de la communion que nous ressemblons à Marie dans sa dignité de Mère de Dieu. D’une certaine manière, nous pouvons, nous aussi, concevoir le Seigneur, le porter, afin qu’il puisse prendre forme en nous et que nous le mettions au monde le jour de Noël.
Avec beaucoup plus de clarté que dans le Missel, l’Église chante Marie au bréviaire.
« Marie dit : Que signifie cette salutation ? Mon âme est toute troublée : je dois enfanter le Roi qui ne me fera pas perdre ma virginité » (Ant. Matines). Comme on le voit, dès le premier jour de l’Avent, l’Église fait déjà entendre la cloche de l’Ave. Ne nous étonnons donc pas de voir que les deux antiennes chantées au lever et au coucher du soleil ont aujourd’hui Marie pour objet. Au lever du soleil, nous chantons : « Le Saint-Esprit descendra sur Toi, ô Marie, ne crains pas, Tu porteras dans Ton sein le Fils de Dieu, Alléluia ».
Et au coucher du soleil : « Ne crains pas, Marie ; Tu as trouvé grâce devant le Seigneur, voici que Tu concevras et enfanteras un Fils, Alléluia ».
[1] Joël. 3, 18.
[2] Zach. 9, 9.
[3] Zach. 14, 5.
[4] Is. 55, 1.
[5] Ce Verset, pour être bien compris, doit être rapporté au temps où les justes et les prophètes appelaient le Messie de leurs vœux ; mais nous pouvons aussi l’appliquer à la naissance spirituelle de Jésus-Christ dans nos âmes. « Jésus-Christ est admirablement comparé à la rosée : 1° la source de la rosée est cachée ; ainsi l’incarnation du Verbe est secrète ; 2° la rosée qui n’est autre chose qu’une pure vapeur qui se change en eau, est le symbole de la virginité de la Mère de Dieu ; 3° la rosée est douce et féconde, de même Jésus-Christ vivifie le monde par sa grâce ; 4° la rosée ressemble au diamant, or l’humanité de Jésus-Christ est un diamant divin qui est l’anneau de l’alliance du Verbe avec son Église et avec toute âme fidèle. » (Cornélius a Lapide).
[6] Is. 35, 3.
[7] Is. 35, 4.
[8] Ps. 49, 2.
[9] Soit attachés à la terre, soit appartenant déjà au Fils de l’homme. (Saint Augustin).
[10] Ps. 48, 2.
[11] Ps. 79, 1.
[12] Ps. 23, 7.
[13] Nous apprenons par là que Dieu frappe les prévaricateurs dans le but de les corriger. C’est moins une peine qu’une leçon. (Saint Jérôme).
[14] Dan. 7, 13.
[15] Dan. 7, 14.
[16] Luc. 1, 26.
[17] Zach. 9, 9.
[18] Apoc. 22, 12.
[19] Is. 16, 1.
[20] Luc. 1, 28.
[21] Philipp. 3, 20.
[22] Tit. 2, 12.
[23] Ex. 4, 13.
[24] Ps. 79, 1.
[25] Luc. 1, 28.
[26] Is. 26, 1.
[27] Is. 7, 14.
[28] Is. 9, 6.
[29] Is. 9, 7.
[30] Jerem. 31, 10.
[31] Jerem. 23, 5.
[32] Jerem. 23, 6.
[33] Joël. 3, 18.
[34] Zach. 9, 9.
[35] Zach. 14, 5.
[36] Is. 55, 1.
[37] Les Stations marquées au Missel romain, pour certains jours de l’année, étaient autrefois des Processions dans lesquelles tout le Clergé et tout le peuple se rendaient à une église désignée pour cet effet, et y célébraient l’Office et la Messe. Cet usage, qui remonte aux premiers temps de l’Église Romaine, et dont saint Grégoire le Grand n’a été que le restaurateur, existe encore aujourd’hui dans un certain degré ; et les Stations continuent de s’accomplir, quoique avec moins de pompe et de concours, à tous les jours marqués au Missel.
[38] Luc., II, 10.
[39] Iohan., VIII, 56.
[40] Rom,, VIII, 19.
[41] Ephes., I, 10.
[42] P. L., LXXVIII, col. 1063.
[43] Apoc., XXII, 20.
[44] II Timoth., IV, 8.
[45] Avant la réforme des rubriques sous Pie XII.