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Nativité du Seigneur (25 décembre)

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Le Verbe s'est fait chair

Sommaire

Textes de la Messe
Messe de Minuit
Messe de l’Aurore
Messe du Jour
Office
1ères Vêpres
Matines
Laudes
2èmes Vêpres

Commentaires

Dom Guéranger, l’Année Liturgique
Introduction
1ères Vêpres
Avant l’Office de la Nuit
Matines
Messe de Minuit
Laudes
Messe de l’Aurore
La journée de Noël
Messe du Jour
2èmes Vêpres

Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum
Introduction
Messe de Minuit
Messe de l’Aurore
Messe du Jour

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique
Introduction
La Sainte Nuit
Les messes de Noël
Messe de Minuit
La triple nuit de la naissance
Laudes
Messe de l’Aurore
Messe du Jour
Les Vêpres
Les Saints du jour

Textes de la Messe

Die 25 Decembris
Le 25 décembre
IN NATIVITATE DOMINI
NATIVITÉ DU SEIGNEUR
I classis cum octava II classis (ante CR 1960 : duplex I classis cum Octava privilegiata III ordinis)
Ière classe avec octave de 2ème classe (avant 1960 : double de Ière classe avec Octave privilégié de 3ème ordre [1])
Ad primam Missam in nocte

Messe de la nuit

Statio ad S. Mariam maiorem ad Præsepe
Station à Ste-Marie-Majeure à la crèche
Ant. ad Introitum. Ps. 2, 7.Introït
Dóminus dixit ad me : Fílius meus es tu, ego hódie génui te.Le Seigneur m’a dit : « tu es mon Fils. C’est moi qui t’engendre aujourd’hui »
Ps. ib., 1.
Quare fremuérunt gentes : et pópuli meditáti sunt inánia ?Pourquoi les nations ont-elles frémi ? Pourquoi les peuples ont-ils tramé de vains complots ?
V/.Glória Patri.
Oratio.Collecte
Deus, qui hanc sacratíssimam noctem veri lúminis fecísti illustratióne claréscere : da, quǽsumus ; ut, cuius lucis mystéria in terra cognóvimus, eius quoque gáudiis in cælo perfruámur : Qui tecum vivit.Seigneur Dieu, vous avez illuminé cette nuit sainte de l’éclat de la vraie lumière : nous vous en prions, faites que cette lumière dont le mystère nous est révélé sur la terre nous fasse goûter dans le ciel la plénitude de la joie.
Léctio Epístolæ beati Páuli Apóstoli ad Titum.Lecture de l’Épître de Saint Paul Apôtre à Tite.
Tit. 2, 11-15.
Caríssime : Appáruit grátia Dei Salvatóris nostri ómnibus homínibus, erúdiens nos, ut, abnegántes impietátem et sæculária desidéria, sóbrie et iuste et pie vivámus in hoc sǽculo, exspectántes beátam spem et advéntum glóriæ magni Dei et Salvatóris nostri Iesu Christi : qui dedit semetípsum pro nobis : ut nos redímeret ab omni iniquitáte, et mundáret sibi pópulum acceptábilem, sectatórem bonórum óperum. Hæc lóquere et exhortáre : in Christo Iesu, Dómino nostro.Très cher ami : La grâce de Dieu notre sauveur s’est manifestée à tous les hommes ; nous enseignant à renoncer à l’impiété et aux convoitises mondaines, pour que nous vivions sobrement, et justement, et pieusement dans ce siècle, attendant la bienheureuse espérance et l’avènement de la gloire du grand Dieu et de notre Sauveur Jésus-Christ, qui s’est livré lui-même pour nous, afin de nous racheter de toute iniquité, et de se faire de nous un peuple purifié, agréable, et zélé pour les bonnes œuvres. Dis ces choses, et exhorte : dans le Christ Jésus, Notre-Seigneur.
Graduale. Ps. 109, 3 et 1.Graduel
Tecum princípium in die virtútis tuæ : in splendóribus Sanctórum, ex útero ante lucíferum génui te.A toi la puissance au jour de ton triomphe ! Dans les splendeurs des cieux, je t’ai engendré avant l’aurore du monde.
V/. Dixit Dóminus Dómino meo : Sede a dextris meis : donec ponam inimícos tuos, scabéllum pedum tuórum.V/. Le Seigneur a dit à mon Seigneur : « Assieds-toi à ma droite, jusqu’à ce que j’écrase tes ennemis sous tes pieds. »
Allelúia, allelúia. V/.Ps. 2,7. Dóminus dixit ad me : Fílius meus es tu, ego hódie génui te. Allelúia.Allelúia, allelúia. V/. Le Seigneur m’a dit : « tu es mon Fils. C’est moi qui t’engendre aujourd’hui ». Alléluia.
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Lucam.Suite du Saint Évangile selon saint Luc.
Luc. 2, 1-14.
In illo témpore : Exiit edíctum a Cǽsare Augústo, ut describerétur univérsus orbis. Hæc descríptio prima facta est a prǽside Sýriæ Cyríno : et ibant omnes ut profiteréntur sínguli in suam civitátem. Ascéndit autem et Ioseph a Galilǽa de civitáte Názareth, in Iudǽam in civitátem David, quæ vocatur Béthlehem : eo quod esset de domo et fámilia David, ut profiterétur cum María desponsáta sibi uxóre prægnánte. Factum est autem, cum essent ibi, impléti sunt dies, ut páreret. Et péperit fílium suum primogénitum, et pannis eum invólvit, et reclinávit eum in præsépio : quia non erat eis locus in diversório. Et pastóres erant in regióne eádem vigilántes, et custodiéntes vigílias noctis super gregem suum. Et ecce, Angelus Dómini stetit iuxta illos, et cláritas Dei circumfúlsit illos, et timuérunt timóre magno. Et dixit illis Angelus : Nolíte timére : ecce enim, evangelízo vobis gáudium magnum, quod erit omni pópulo : quia natus est vobis hódie Salvátor, qui est Christus Dóminus, in civitáte David. Et hoc vobis signum : Inveniétis infántem pannis involútum, et pósitum in præsépio. Et súbito facta est cum Angelo multitúdo milítiæ cæléstis, laudántium Deum et dicéntium : Glória in altíssimis Deo, et in terra pax hóminibus bonæ voluntátis.En ce temps-là : Un édit de César Auguste fut publié , pour le recensement de toute la terre. Ce premier recensement eut lieu pendant que Quirinius était gouverneur de Syrie. Et tous allaient se faire recenser, chacun dans sa ville. Joseph aussi monta de Galilée, de la ville de Nazareth, en Judée, à la ville de David, qui s’appelle Bethléem, parce qu’il était de la maison et de la famille de David, pour se faire recenser avec Marie son épouse, qui était enceinte. Or, pendant qu’ils étaient là, le temps où elle devait enfanter s’accomplit, et elle mit au monde son fils premier-né, l’emmaillota et le coucha dans une crèche, parce qu’il n’y avait pas de place pour eux dans l’hôtellerie. Il y avait dans la même région des bergers qui vivaient aux champs et qui veillaient la nuit sur leur troupeau. Un ange du Seigneur parut auprès d’eux et la gloire du Seigneur les enveloppa de clarté, et ils furent saisis d’une grande crainte. Mais l’ange leur dit : « Ne craignez point, car je vous annonce une nouvelle qui sera pour tout le peuple une grande joie : il vous est né aujourd’hui, dans la ville de David, un Sauveur, qui est le Christ Seigneur. Et voici ce qui vous en sera le signe : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une crèche. » Tout à coup se joignit à l’ange une troupe de la milice céleste, louant Dieu et disant : « Gloire, dans les hauteurs, à Dieu ! Et, sur terre, paix chez les hommes de bonne vonlonté ! »
CredoCredo
Ant. ad Offertorium. Ps. 95,11 et 13.Offertoire
Læténtur cæli et exsúltet terra ante fáciem Dómini : quóniam venit.Les cieux se réjouissent, la terre bondit de joie en présence du Seigneur, parce qu’il est venu.
Secreta.Secrète
Accépta tibi sit, Dómine, quǽsumus, hodiérnæ festivitátis oblátio : ut, tua gratia largiénte, per hæc sacrosáncta commércia, in illíus inveniámur forma, in quo tecum est nostra substántia : Qui tecum vivit.En ce jour de fête, Seigneur, rendez notre offrande digne de vous. Et dans l’échange infiniment saint que réalise ce sacrifice, accordez-nous la grâce de ressembler au Christ Jésus, en qui notre nature humaine se trouve unie à vous.
Præfatio de Nativitate Domini. Préface de la Nativité .
Infra actionem : Communicántes et noctem sacratíssimam celebrántes.Pendant le canon : Unis dans une même communion et célébrant la nuit très sainte [*].
Ant. ad Communionem. Ps. 109, 3.Communion
In splendóribus Sanctórum, ex útero ante lucíferum génui te.Dans les splendeurs des cieux, je t’ai engendré avant l’aurore du monde.
Postcommunio.Postcommunion
Da nobis, quǽsumus, Dómine, Deus noster : ut, qui Nativitátem Dómini nostri Iesu Christi mystériis nos frequentáre gaudémus ; dignis conversatiónibus ad eius mereámur per veníre consórtium : Qui tecum.Nous avons la joie, Seigneur notre Dieu, de célébrer tous ensemble dans ces saints mystères la naissance de Notre Seigneur Jésus Christ : faites, nous vous en prions, qu’au terme d’une vie sainte, nous méritions de partager sa gloire.
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Ad secundam Missam in aurora

Messe de l’aurore

Statio ad S. Anastasiam
Station à Ste-Anastasie
Ant. ad Introitum. Is. 9, 2 et 6.Introït
Lux fulgébit hódie super nos : quia natus est nobis Dóminus : et vocábitur Admirábilis, Deus, Princeps pacis, Pater futúri sǽculi : cuius regni non erit finis.La lumière va resplendir aujourd’hui sur nous : car le Seigneur nous est né : et on l’appellera l’Admirable, le Dieu fort, prince de la paix, Père du siècle à venir : car son règne n’aura pas de fin.
Ps. 92, 1.
Dominus regnávit, decorem indutus est : indutus est Dominus fortitudinem, et præcínxit se.Le Seigneur est roi, il est revêtu de gloire : le Seigneur est revêtu de force, il s’arme de puissance.
V/.Glória Patri.
Oratio.Collecte
Da nobis, quǽsumus, omnípotens Deus : ut, qui nova incarnáti Verbi tui luce perfúndimur ; hoc in nostro respléndeat ópere, quod per fidem fulget in mente. Per eúndem Dóminum.Dieu tout puissant, l’incarnation de votre Verbe vient de nous inonder d’une lumière nouvelle : faites, s’il vous plaît, resplendir dans nos vies cette lumière qui brille par la foi en nos intelligences.
Et fit Commemoratio S. Anastasiæ Mart. :Et on fait Mémoire de Ste Anastasie, Mart. :
Oratio.Collecte
Da, quǽsumus, omnípotens Deus : ut, qui beátæ Anastásiæ Mártyris tuæ sollémnia cólimus ; eius apud te patrocínia sentiámus. Per Dóminum.Dieu tout puissant, faites qu’en célébrant la fête annuelle de votre bienheureuse martyre Anastasie, nous éprouvions les bienfaits de son intercession auprès de vous.
Lectio Epístolæ beati Páuli Apóstoli ad Titum.Lecture de l’Épître de Saint Paul Apôtre à Tite.
Tit. 3, 4-7.
Caríssime : Appáruit benígnitas et humánitas Salvatóris nostri Dei : non ex opéribus iustítiæ, quæ fécimus nos, sed secúndum suam misericórdiam salvos nos fecit per lavácrum regeneratiónis et renovatiónis Spíritus Sancti, quem effúdit in nos abúnde per Iesum Christum, Salvatorem nostrum : ut, iustificáti grátia ipsíus, herédes simus secúndum spem vitæ ætérnæ : in Christo Iesu, Dómino nostro.Très cher ami : Lorsque la bonté de Dieu, notre Sauveur, et son amour pour les hommes ont paru, il nous a sauvés, non à cause des œuvres de justice que nous aurions faites, mais en vertu de sa miséricorde, par le bain de la régénération et du renouvellement de l’Esprit-Saint, qu’il a répandu sur nous abondamment par Jésus-Christ notre Sauveur, afin que, justifiés par sa grâce, nous devinssions héritiers, conformément à l’espérance de la vie éternelle : dans le Christ Jésus, Notre-Seigneur.
Graduale. Ps. 117, 26, 27 et 23.Graduel
Benedíctus, qui venit in nómine Dómini : Deus Dóminus, et illúxit nobis.Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur : c’est le Seigneur Dieu et il a fait briller sur nous sa lumière.
V/. A Dómino factum est istud : et est mirábile in óculis nostris.V/. C’est l’œuvre du Seigneur, et nous la regardons tout émerveillé.
Allelúia, allelúia. V/.Ps. 92, 1. Dóminus regnávit, decórem índuit : índuit Dóminus fortitúdinem, et præcínxit se virtúte. Allelúia.Allelúia, allelúia. V/. Le Seigneur est roi, il est revêtu de gloire : le Seigneur est revêtu de force, il s’arme de puissance. Alléluia.
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Lucam.Suite du Saint Évangile selon saint Luc.
Luc. 2, 15-20.
In illo témpore : Pastóres loquebántur ad ínvicem : Transeámus usque Béthlehem, et videámus hoc verbum, quod factum est, quod Dóminus osténdit nobis. Et venérunt festinántes : et invenérunt Maríam et Ioseph. et Infántem pósitum in præsépio. Vidéntes autem cognovérunt de verbo, quod dictum erat illis de Púero hoc. Et omnes, qui audiérunt, miráti sunt : et de his, quæ dicta erant a pastóribus ad ipsos. María autem conservábat ómnia verba hæc, cónferens in corde suo. Et revérsi sunt pastóres, glorificántes et laudántes Deum in ómnibus, quæ audíerant et víderant, sicut dictum est ad illos.En ce temps là : les bergers se dirent entre eux : « Passons donc jusqu’à Bethléem, et voyons cet événement qui est arrivé, et que le Seigneur nous a fait connaître. » Ils s’y rendirent en toute hâte, et trouvèrent Marie, Joseph et le nouveau-né couché dans la crèche. Après avoir vu, ils firent connaître ce qui leur avait été dit au sujet de cet enfant. Et tous ceux qui les entendirent furent dans l’admiration de ce que leur avaient dit les bergers. Quant à Marie, elle conservait avec soin toutes ces choses, les méditant dans son cœur. Et les bergers s’en retournèrent, glorifiant et louant Dieu de tout ce qu’ils avaient entendu et vu, selon ce qui leur avait été dit.
CredoCredo
Ant. ad Offertorium. Ps. 92, 1-2.Offertoire
Deus firmávit orbem terræ, qui non commovébitur : paráta sedes tua, Deus, ex tunc, a sǽculo tu es.Dieu a établi un univers inébranlable : c’est un trône dressé pour vous depuis toujours, ô Dieu éternel.
Secreta.Secrète
Múnera nostra, quǽsumus, Dómine, Nativitátis hodiérnæ mystériis apta provéniant, et pacem nobis semper infúndant : ut, sicut homo génitus idem refúlsit et Deus, sic nobis hæc terréna substántia cónferat, quod divínum est. Per eúndem Dóminum.Nous vous en prions, Seigneur, que nos offrandes soient en harmonie avec les mystères de la Nativité que nous célébrons aujourd’hui, et qu’elles répandent toujours la paix dans nos âmes. De même que, dans cet homme qui vient de naître, c’est aussi Dieu qui resplendit, faites que dans ces présents matériels, nous soit apporté le don de Dieu.
Pro S. Anastasia. Secreta.Pour Ste Anastasie. Secrète.
Accipe, quǽsumus, Dómine, múnera dignánter obláta : et, beátæ Anastásiæ Mártyris tuæ suffragántibus méritis, ad nostræ salútis auxílium proveníre concéde. Per Dóminum.Accueillez, Seigneur, les offrandes que nous vous présentons avec respect ; et grâce aux mérites de votre martyre la bienheureuse Anastasie qui intercède en notre faveur, permettez que ces dons deviennent un secours utile à notre salut.
Præfatio de Nativitate Domini. Préface de la Nativité .
Infra actionem : Communicántes et diem sacratíssimum celebrántes.Pendant le canon : Unis dans une même communion et célébrant le jour très saint [**].
Ant. ad Communionem. Zach. 9, 9.Communion
Exsúlta, fília Sion, lauda, fília Ierúsalem : ecce, Rex tuus venit sanctus et Salvátor mundi.Danse de joie, fille de Sion, crie de joie, fille de Jérusalem : voici que vient ton roi, le Saint et le Sauveur du monde.
Postcommunio.Postcommunion
Huius nos, Dómine, sacraménti semper nóvitas natális instáuret : cuius Natívitas singuláris humánam réppulit vetustátem. Per eúndem Dóminum.Faites, Seigneur, que dans sa fraîcheur de Noël, ce sacrement du Christ rajeunisse toujours nos âmes, puisque sa Naissance merveilleuse a fait disparaître de l’humanité toute trace de vieillesse.
Pro S. Anastasia. Postcommunio.Pour Ste Anastasie. Postcommunion.
Satiásti, Dómine, famíliam tuam munéribus sacris : eius, quǽsumus, semper interventióne nos réfove, cuius sollémnia celebrámus. Per Dóminum.Seigneur, vous avez donné votre Corps sacré en nourriture à vos enfants : nous vous demandons, en cette fête de sainte Anastasie et grâce à sa prière, de ranimer toujours notre ferveur.
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Ad tertiam Missam in die Nativitatis Domini

Messe du jour

Statio ad S. Mariam maiorem
Station à Ste-Marie-Majeure
Ant. ad Introitum. Is. 9, 6.Introït
Puer natus est nobis, et fílius datus est nobis : cuius impérium super húmerum eius : et vocábitur nomen eius magni consílii Angelus.Un enfant nous est né, un fils nous est donné : la souveraineté repose sur son épaule : et on l’appellera le Messager d’en haut.
Ps. 97, 1.
Cantáte Dómino cánticum novum, quia mirabília fecit.Chantez au Seigneur un chant nouveau, car il a fait des merveilles.
V/.Glória Patri.
Oratio.Collecte
Concéde, quǽsumus, omnípotens Deus : ut nos Unigéniti tui nova per carnem Natívitas líberet ; quos sub peccáti iugo vetústa sérvitus tenet. Per eúndem Dóminum.Nous vous en prions, Dieu tout puissant, que votre Fils éternel, par sa nouvelle naissance en notre chair, vienne nous délivrer de l’ancien esclavage qui nous maintient sous le joug du péché.
Léctio Epístolæ beáti Páuli Apóstoli ad Hebrǽos.Lecture de l’Epître de Saint Paul Apôtre aux Hébreux
Hebr. 1, 1-12.
Multifáriam, multísque modis olim Deus loquens pátribus in Prophétis : novíssime diébus istis locútus est nobis in Fílio, quem constítuit herédem universórum, per quem fecit et sǽcula : qui cum sit splendor glóriæ, et figúra substántiæ eius, portánsque ómnia verbo virtútis suæ, purgatiónem peccatórum fáciens, sedet ad déxteram maiestátis in excélsis : tanto mélior Angelis efféctus, quanto differéntius præ illis nomen hereditávit. Cui enim dixit aliquándo Angelórum : Fílius meus es tu, ego hódie génui te ? Et rursum : Ego ero illi in patrem, et ipse erit mihi in fílium ? Et cum íterum introdúcit Primogénitum in orbem terræ, dicit : Et adórent eum omnes Angeli Dei. Et ad Angelos quidem dicit : Qui facit Angelos suos spíritus, et minístros suos flammam ignis. Ad Fílium autem : Thronus tuus, Deus, in sǽculum sǽculi : virga æquitátis, virga regni tui. Dilexísti iustítiam et odísti iniquitátem : proptérea unxit te Deus, Deus tuus, óleo exsultatiónis præ particípibus tuis. Et : Tu in princípio, Dómine, terram fundásti : et ópera mánuum tuárum sunt cæli. Ipsi períbunt, tu autem permanébis ; et omnes ut vestiméntum veteráscent : et velut amíctum mutábis eos, et mutabúntur : tu autem idem ipse es, et anni tui non defícient.Après avoir, à plusieurs reprises et en diverses manières, parlé autrefois à nos pères par les Prophètes, Dieu, dans ces derniers temps, nous a parlé par le Fils, qu’il a établi héritier de toutes choses, et par lequel il a aussi créé le monde. Ce Fils, qui est le rayonnement de sa gloire, l’empreinte de sa substance, et qui soutient toutes choses par sa puissante parole, après nous avoir purifiés de nos péchés, s’est assis à la droite de la majesté divine au plus haut des cieux, d’autant plus grand que les anges, que le nom qu’il possède est plus excellent que le leur. Auquel des anges en effet Dieu a-t-il jamais dit : "Tu es mon Fils, aujourd’hui je t’ai engendré" ? Et encore "Je serai pour lui un père, et il sera pour moi un Fils" ? Et lorsqu’il introduit de nouveau dans le monde le Premier-né, il dit : "Que tous les anges de Dieu l’adorent !" De plus, tandis qu’il est dit des anges : "Celui qui fait de ses anges des vents, et de ses serviteurs une flamme de feu," il dit au Fils : "Ton trône, ô Dieu, est éternel ; le sceptre de ta royauté est un sceptre de droiture. Tu as aimé la justice et haï l’iniquité ; c’est pourquoi, ô Dieu, ton Dieu t’a oint d’une huile d’allégresse au-dessus de tous tes compagnons." Et encore : "C’est toi, Seigneur, qui as au commencement fondé la terre, et les cieux sont l’ouvrage de tes mains ; ils périront, mais tu demeures ; ils vieilliront tous comme un vêtement ; comme un manteau tu les rouleras, et ils seront changés ; mais toi, tu restes le même, et tes années ne s’épuiseront point."
Graduale. Ps. 97, 3 et 2.Graduel
Vidérunt omnes fines terræ salutare Dei nostri : iubiláte Deo, omnis terra.Les extrémités de la terre ont vu le Sauveur envoyé par notre Dieu : terre entière, chante à Dieu ta joie.
V/. Notum fecit Dominus salutare suum : ante conspéctum géntium revelávit iustitiam suam.V/. Le Seigneur a fait connaître son œuvre de salut : devant tous les peuples il a montré sa justice.
Allelúia, allelúia. V/. Dies sanctificátus illúxit nobis : veníte, gentes, et adoráte Dóminum : quia hódie descéndit lux magna super terram. Allelúia.Allelúia, allelúia. V/. Un jour saint a brillé sur nous : Nations, venez adorer le Seigneur, car aujourd’hui une grande lumière est descendue sur terre. Alléluia.
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Joánnem.Suite du Saint Évangile selon saint Jean.
Ioann, 1, 1-14.
In princípio erat Verbum, et Verbum erat apud Deum, et Deus erat Verbum. Hoc erat in princípio apud Deum. Omnia per ipsum facta sunt : et sine ipso factum est nihil, quod factum est : in ipso vita erat, et vita erat lux hóminum : et lux in ténebris lucet, et ténebræ eam non comprehendérunt. Fuit homo missus a Deo, cui nomen erat Ioánnes. Hic venit in testimónium, ut testimónium perhibéret de lúmine, ut omnes créderent per illum. Non erat ille lux, sed ut testimónium perhibéret de lúmine. Erat lux vera, quæ illúminat omnem hóminem veniéntem in hunc mundum. In mundo erat, et mundus per ipsum factus est, et mundus eum non cognóvit. In própria venit, et sui eum non recepérunt. Quotquot autem recepérunt eum, dedit eis potestátem fílios Dei fíeri, his, qui credunt in nómine eius : qui non ex sanguínibus, neque ex voluntáte carnis, neque ex voluntáte viri, sed ex Deo nati sunt. (Hic genuflectitur) Et Verbum caro factum est, et habitávit in nobis : et vídimus glóriam eius, glóriam quasi Unigéniti a Patre, plenum grátiæ et veritátis.Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu. Il était au commencement en Dieu. Tout par lui a été fait, et sans lui n’a été fait rien de ce qui existe. En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes, Et la lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point reçue. Il y eut un homme, envoyé de Dieu ; son nom était Jean. Celui-ci vint en témoignage, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous crussent par lui : non que celui-ci fût la lumière, mais il avait à rendre témoignage à la lumière. La lumière, la vraie, celle qui éclaire tout homme, venait dans le monde. Il était dans le monde, et le monde par lui a été fait, et le monde ne l’a pas connu. Il vint chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu. Mais quant à tous ceux qui l’ont reçu, Il leur a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom, qui non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu sont nés. (ici on fléchit le genou) Et le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire, gloire comme celle qu’un fils unique tient de son Père, tout plein de grâce et de vérité.
CredoCredo
Ant. ad Offertorium. Ps. 88,12et 15.Offertoire
Tui sunt cæli et tua est terra : orbem terrárum et plenitúdinem eius tu fundásti : iustítia et iudícium præparátio sedis tuæ.A vous sont les cieux, à vous la terre : c’est vous qui avez posé les fondations de l’univers, et créé ce qu’il renferme : votre trône repose sur le droit et la justice.
Secreta.Secrète
Obláta, Dómine, múnera, nova Unigéniti tui Nativitáte sanctífica : nosque a peccatórum nostrórum máculis emúnda. Per eúndem Dóminum nostrum.Sanctifiez ces offrandes, Seigneur, par la nouvelle naissance de votre Fils unique, et purifiez-nous des souillures de nos péchés.
Præfatio de Nativitate Domini. Préface de la Nativité .
Infra actionem : Communicántes et diem sacratíssimum celebrántes.Pendant le canon : Unis dans une même communion et célébrant le jour très saint.
Ant. ad Communionem. Ps. 97, 3.Communion
Vidérunt omnes fines terræ salutáre Dei nostri.Les extrémités de la terre ont vu le Sauveur envoyé par notre Dieu.
Postcommunio.Postcommunion
Præsta, quǽsumus, omnípotens Deus : ut natus hódie Salvátor mundi, sicut divínæ nobis generatiónis est auctor ; ita et immortalitátis sit ipse largítor : Qui tecum vivit et regnat.Dieu tout puissant, le Sauveur du monde, qui est né aujourd’hui, nous a fait naître à la vie divine. Faites, nous vous en prions, qu’il nous accorde aussi le don de l’immortalité.
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Office

AUX PREMIÈRES VÊPRES.

Ant. 1 Le Roi pacifique * a été glorifié, lui dont toute la terre désire la face. [2]
Ant. 2 Il a été glorifié, * le Roi pacifique au-dessus de tous les rois du monde entier.
Ant. 3 Les jours furent accomplis, * où Marie devait enfanter son fils premier-né. [3]
Ant. 4 Sachez * que le royaume de Dieu est proche, car je vous dis en vérité qu’il ne tardera point. [4]
Ant. 5 Levez la tête : * voici qu’approche votre rédemption. [5]
Capitule. Tit. 3, 4-5.Lorsque la bonté de Dieu, notre Sauveur, et son amour pour les hommes ont paru, il nous a sauvés, non à cause des œuvres de justice que nous aurions faites, mais en vertu de sa miséricorde.

Hymnus Hymne
Iesu, Redémptor ómnium,
Quem lucis ante oríginem
Parem patérnæ glóriæ
Pater suprémus édidit.
O Jésus, Rédempteur de tous les hommes,
vous qu’avant la première aurore,
en sa Paternité suprême,
le Père engendra semblable à sa gloire.
Tu lumen, et splendor Patris,
Tu spes perénnis ómnium,
Inténde quas fundunt preces
Tui per orbem sérvuli.
Vous, lumière et splendeur du Père,
vous, l’éternelle espérance de tous,
écoutez ces prières que vos serviteurs
vous adressent par toute la terre.
Meménto, rerum Cónditor,
Nostri quod olim córporis,
Sacráta ab alvo Vírginis
Nascéndo, formam súmpseris.
Souvenez-vous, ô Créateur du monde,
que vous avez un jour,
en naissant d’une Vierge toute pure,
pris un corps semblable au nôtre.
Testátur hoc præsens dies,
Currens per anni círculum,
Quod solus e sinu Patris
Mundi salus advéneris.
Le jour présent, ce jour
que ramène l’année dans son cours,
atteste que, seul descendu du sein du Père,
vous êtes venu sauver le monde.
Hunc astra, tellus, ǽquora,
Hunc omne, quod cælo subest,
Salútis auctórem novæ
Novo salútat cántico.
Le ciel, la terre, la mer
et tout ce qu’ils renferment,
saluent par un nouveau cantique
l’avènement de l’Auteur d’un salut nouveau.
Et nos, beáta quos sacri
Rigávit unda sánguinis,
Natális ob diem tui
Hymni tribútum sólvimus.
Et nous, qui avons été lavés
par l’effusion de votre sang divin,
nous vous offrons, ô Christ,
le tribut de cette hymne à la gloire de votre jour natal.
Iesu, tibi sit glória,
Qui natus es de Vírgine,
Cum Patre et almo Spíritu,
In sempitérna sǽcula.
Amen.
Gloire soit à vous, ô Jésus !
qui êtes né de la Vierge :
gloire au Père et à l’Esprit-Saint,
dans les siècles éternels.
Ainsi soit-il.

V/.  [6]Demain l’iniquité de la terre sera effacée.
R/. Et il régnera sur nous, le Sauveur du monde.

Ant.au Magnificat [7]Lorsque sera levé * le soleil dans le ciel, vous verrez le Roi des rois qui procède du Père, comme un époux qui sort de son lit nuptial [8].

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A MATINES.

Invitatoire. Le Christ nous est né, * Venez, adorons-le.

Hymne. Iesu, Redémptor ómnium comme aux Vêpres ci-dessus.

Au premier nocturne.

Ant. 1 Le Seigneur m’a dit : * Vous êtes mon Fils, c’est moi qui aujourd’hui vous ai engendré [9]. [10]
Ant. 2 Comme un époux * qui sort de son lit nuptial, ainsi vient le Seigneur. [11]
Ant. 3 Répandue * sur vos lèvres, est la grâce ; c’est pourquoi le Seigneur vous a béni pour l’éternité [12]. [13]

V/. Le Seigneur vient comme un époux. [14]
R/. Qui sort de son lit nuptial.

Les trois leçons suivantes d’Isaïe sont lues sans titre. [15] [16]

Première leçon. Cap. 9, 1-6.
Dans le premier temps a été allégée la terre de Zabulon, ainsi que la terre de Nephthali [17] ; et dans le dernier, a été aggravée la voie de la mer, au-delà du Jourdain, la voie de la Galilée des Nations. Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande lumière [18] ; pour ceux qui habitaient dans la région de l’ombre de la mort, une lumière s’est levée. Vous avez augmenté la nation, et vous n’avez pas agrandi sa joie. Ils [19] se réjouiront devant vous comme ceux qui se réjouissent dans la moisson, et comme exultent les vainqueurs après le butin pris, quand ils partagent les dépouilles. Car le joug de son fardeau, la verge de son épaule, et le sceptre de son exacteur [20], vous en avez triomphé, comme à la journée de Madian ; parce que tout pillage fait dans le tumulte, et tout vêtement souillé de sang sera en combustion et la pâture du feu. Car un enfant nous est né, et un fils nous a été donné ; et sa principauté est sur son épaule [21], et son nom sera appelé Admirable, Conseiller, Dieu, Fort, Père du siècle à venir, Prince de la paix.
R/. Aujourd’hui le Roi des cieux a daigné naître pour nous d’une Vierge, afin de rappeler au royaume céleste, l’homme qui en était déchu.
* L’armée des Anges est dans la joie : car le salut éternel a apparu au genre humain.
V/. Gloire à Dieu dans les hauteurs du ciel ; et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté. [22]
* L’armée des Anges est dans la joie : car le salut éternel a apparu au genre humain.
Gloire au Père. [23]
R/. Aujourd’hui le Roi des cieux a daigné naître pour nous d’une Vierge, afin de rappeler au royaume céleste, l’homme qui en était déchu.
* L’armée des Anges est dans la joie : car le salut éternel a apparu au genre humain.

Deuxième leçon. Cap. 40, 1-8.
Consolez-vous, mon peuple, consolez-vous, dit votre Dieu. Parlez au cœur de Jérusalem, et appelez-la à elle-même ; parce que sa malice est arrivée au terme, son iniquité a été pardonnée ; elle a reçu de la main du Seigneur le double pour tous ses péchés [24]. Voici la voix de celui qui crie dans le désert : Préparez la voie du Seigneur ; rendez droits dans la solitude les sentiers de notre Dieu. Toute vallée sera comblée, et toute montagne et colline sera abaissée ; les chemins tortueux seront redressés, et les raboteux deviendront des voies aplanies [25]. Et la gloire du Seigneur sera révélée, et toute chair verra en même temps que la bouche du Seigneur a parlé. Voici la voix de Celui qui dit : Crie. Et j’ai dit : Que crierai-je ? Toute chair est de l’herbe, et toute sa gloire est comme la fleur du champ. L’herbe s’est desséchée, et la fleur est tombée ; parce que le souffle du Seigneur a soufflé sur elle [26]. Vraiment, l’herbe c’est le peuple. L’herbe s’est desséchée et la fleur est tombée ; mais le Verbe de notre Seigneur demeure éternellement [27].
R/. Aujourd’hui la paix véritable est descendue du Ciel sur nous : * Aujourd’hui, par tout l’univers, les cieux ont distillé le miel. V/. Aujourd’hui a brillé pour nous le jour de la rédemption nouvelle, de l’antique réparation, de l’éternel félicité. * Aujourd’hui.

Troisième leçon. Cap. 52, 1-6.
Lève-toi, lève-toi, revêts-toi de ta force, Sion ; revêts-toi des vêtements de ta gloire, Jérusalem, cité du Saint ; parce qu’il n’y aura plus à l’avenir d’incirconcis qui passera au travers de toi, ni d’impur [28]. Sors de la poussière, lève-toi, assieds-toi, Jérusalem ; romps les fers de ton cou, fille de Sion captive. Parce que voici ce que dit le Seigneur : Pour rien, vous avez été vendus [29], et sans argent, vous serez rachetés. Parce que voici ce que dit le Seigneur Dieu : Mon peuple descendit en Égypte, dans le principe, pour y être colon, et Assur [30], sans aucun sujet, l’a traité avec violence. Et maintenant, qu’ai-je ici pour moi, dit le Seigneur, puisque mon peuple a été enlevé sans motif [31] ? Ses dominateurs agissent iniquement, dit le Seigneur, et sans cesse, tout le jour, mon nom est blasphémé. A cause de cela, mon peuple connaîtra mon nom en ce jour-là : que moi-même qui parlais autrefois, me voici présent.
R/. Qui avez-vous vu, bergers ? dites-le-nous ; apprenez-nous quel est celui qui a paru sur la terre : * Nous avons vu l’Enfant, et les Chœurs des Anges qui louaient ensemble le Seigneur. V/. Dites-nous ce que vous avez vu ? * Nous. Gloire au Père. * Nous.

Au deuxième nocturne.

Ant. 1 Nous avons reçu, * ô Dieu, votre miséricorde, au milieu de votre temple. [32]
Ant. 2 Il s’élèvera dans les jours du Seigneur, une abondance de paix, et il dominera. [33]
Ant. 3 La vérité est sortie de la terre [34], * et la justice a regardé du haut du Ciel. [35]

V/. Vous êtes plus brillant de beauté que les enfants des hommes. [36]
R/. La grâce est répandue sur vos lèvres.

Sermon de saint Léon, Pape.

Quatrième leçon. Notre Sauveur, mes bien-aimés, est né aujourd’hui : réjouissons-nous. Il ne peut y avoir de tristesse au jour où naît la vie, qui, dissipant la crainte de la mort, répand en nos âmes la joie, par la promesse de l’éternité. Il n’y a personne qui n’ait sa part de cette allégresse. Tous ont un même motif de se réjouir, car notre Seigneur, destructeur du péché et de la mort, nous trouvant tous assujettis au péché, est venu pour nous affranchir tous. Qu’il tressaille, celui qui est saint : car la palme approche pour lui. Que le pécheur se réjouisse : voici qu’on l’invite au pardon. Que le Gentil prenne courage : car il est convié à la vie. En effet, le Fils de Dieu, dans la plénitude des temps fixée par les impénétrables profondeurs du conseil divin, a pris la nature humaine, pour la réconcilier avec son auteur, afin que l’inventeur de la mort, le diable, fût vaincu par où il avait triomphé.
R/. O grand mystère ! Admirable merveille ! Des animaux ont vu [37], couché dans une crèche, le Seigneur nouveau-né : * Heureuse est la Vierge dont le sein a mérité de porter le Christ, le Seigneur. V/. Nous vous saluons, Marie, pleine de grâce, le Seigneur est avec vous. [38] * Heureuse.

Cinquième leçon. En ce combat livré pour nous, c’est avec une grande et admirable loyauté qu’on a combattu, puisque le Seigneur tout-puissant a lutté contre ce cruel ennemi, non dans sa majesté, mais dans l’infirmité de notre chair, et lui a opposé la même forme, la même nature, celle de notre mortalité, mais exempte de tout péché. Car ce qu’on lit de tous les hommes : « Nul n’est pur de souillure, pas même l’enfant dont la vie n’est encore que d’un jour sur la terre » [39], ne peut être appliqué à cette nativité. Rien de la concupiscence de la chair ne s’est rencontré dans cette naissance merveilleuse ; rien n’y est provenu de la loi du péché. Une vierge est élue de la tige de David ; une vierge royale qui, devant porter dans son sein le rejeton sacré, conçut spirituellement l’Homme-Dieu par la foi, avant de le concevoir corporellement. Afin que Marie, dans son ignorance du dessein céleste, ne soit pas troublée à une si étonnante nouvelle, elle apprend de son entretien avec l’Ange ce que l’Esprit-Saint doit opérer en elle ; et celle qui va devenir la Mère d’un Dieu, n’a rien à craindre pour sa pudeur.
R/. Heureuse est Marie, la Mère de Dieu, dont le sein n’a rien perdu de sa pureté virginale : * Elle a aujourd’hui enfanté le Sauveur du monde. V/. Bienheureuse celle qui a cru : car tout ce qui lui avait été dit, de la part du Seigneur, s’est accompli en elle. [40] * Elle.

Sixième leçon. C’est pourquoi, mes bien-aimés, rendons grâces à Dieu le Père, par son Fils, dans le Saint-Esprit : de ce que, « nous ayant aimés dans son infinie charité, il a eu pitié de nous, et comme nous étions morts par les péchés, il nous a vivifiés tous en Jésus-Christ » [41], afin que nous fussions en lui une nouvelle créature et un ouvrage nouveau. « Dépouillons donc le vieil homme avec ses œuvres » [42] ; et, admis à participer à la naissance du Christ, renonçons aux œuvres de la chair. Reconnais, ô Chrétien, ta dignité, et, « devenu participant de la nature divine » [43], garde-toi de retomber, par une conduite indigne de cette grandeur, dans ta bassesse première. Souviens-toi de quel chef et de quel corps tu es membre. N’oublie jamais, « qu’arraché à la puissance des ténèbres » [44], tu as été transporté à la lumière et au royaume de Dieu.
R/. O sainte et immaculée virginité, je ne sais par quelles louanges vous exalter : * Car vous avez renfermé dans votre sein, Celui que les cieux ne peuvent contenir. V/. Bénie êtes-vous entre les femmes, et béni est le fruit de votre sein. [45] * Car. Gloire au Père. * Car.

Au troisième nocturne. [46]

Ant. 1 Lui-même m’invoquera, * alléluia ! C’est vous qui êtes mon Père, alléluia. [47]
Ant. 2 Que les Cieux se livrent à la joie, * que la terre exulte devant la face du Seigneur, parce qu’il vient. [48]
Ant. 3 Le Seigneur a fait connaître, * alléluia ! Son salut [49], alléluia. [50]

V/. Lui-même m’invoquera, alléluia. [51]
R/. C’est vous êtes mon père, alléluia.

Lecture du saint Évangile selon saint Luc. Cap. 2, 1-14.
En ce temps-là : Un édit de César Auguste fut publié, pour le recensement de toute la terre. Et le reste.

Bénédiction Que la lecture évangélique nous soit salut et protection.

Homélie de saint Grégoire, Pape.

Septième leçon. Comme nous avons aujourd’hui, grâce à la bonté du Seigneur, à célébrer trois fois les solennels mystères de la Messe, nous ne pouvons vous parler longtemps de la lecture de l’Évangile ; mais nous devons au moins en dire brièvement quelque chose : la nativité de notre Rédempteur nous y oblige. Pourquoi donc, au moment de la naissance du Seigneur, ce dénombrement du monde, si ce n’est pour nous faire comprendre que dans la chair, apparaissait celui qui devait enregistrer les élus dans l’éternité ? D’autre part le Prophète dit des réprouvés : « Qu’ils soient rayés du livre des vivants, et ne soient point inscrits avec les justes. » [52] De plus, il con vient que le Seigneur naisse à Bethléem, d’autant que Bethléem est interprété, Maison du Pain. Et en effet, c’est lui qui a dit : « Je suis le Pain vivant, descendu du ciel. » [53] Ainsi, le lieu où naît le Seigneur a été auparavant appelé Maison du Pain, parce que là devait apparaître dans la chair celui qui, un jour, rassasierait intérieurement les âmes de ses élus. Il naît hors de la maison de ses parents, en un voyage, pour montrer qu’en prenant l’humanité, il naissait comme en un lieu étranger.
R/. Heureuses les entrailles de la Vierge Marie, qui ont porté le Fils du Père éternel, et heureuses les mamelles qui ont allaité le Christ, le Seigneur : * Qui daigne aujourd’hui, pour le salut du monde naître d’une Vierge. V/. C’est un jour vraiment saint qui brille pour nous : venez, Nations, et adorez le Seigneur. * Qui.

Lecture du saint Évangile selon saint Luc. Cap. 2, 15-20.
En ce temps-là : les bergers se dirent entre eux : « Passons donc jusqu’à Bethléem, et voyons cet événement qui est arrivé, et que le Seigneur nous a fait connaître. ». Et le reste.

Bénédiction Que ces dites paroles de l’Évangile détruisent nos péchés.

Homélie de saint Ambroise, Évêque.

Huitième leçon. Considérez les commencements de l’Église naissante : le Christ naît, et déjà les pasteurs veillent, comme pour rassembler dans le bercail du Seigneur les nations qui, jusque-là, vivaient comme des brutes, afin de les garantir, au milieu des ombres de la nuit, de l’incursion de bêtes spirituelles. Il est juste que les pasteurs veillent, étant instruits par le bon Pasteur. Ainsi le troupeau, c’est le peuple ; la nuit, c’est le monde ; les bergers sont les prêtres. Sans doute, il faut bien qu’il soit pasteur, celui auquel on a dit : « Sois vigilant, et confirme les autres. » [54] Mais le Seigneur n’a pas seulement établi les Évêques pour défendre le troupeau, il y a encore destiné ses Anges.
R/. Le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous : * Et nous avons vu sa gloire, sa gloire comme du Fils unique du Père, étant plein de grâce et de vérité. [55] V/. Toutes choses ont été faites par lui, et sans lui rien n’a été fait. [56] * Et. Gloire au Père. * Et.

Lecture du saint Évangile selon saint Jean. Cap. 1, 1-14.
En ce temps-là : Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu. Et le reste.

Bénédiction Que Christ Fils de Dieu daigne nous enseigner les paroles du saint Évangile.

Homélie de saint Augustin, Évêque.

Neuvième leçon. Afin que vous n’ayez pas du Verbe une idée basse, comme s’il s’agissait de paroles humaines, écoutez ce qu’il faut en penser : « Le Verbe était Dieu. » Vienne donc je ne sais quel infidèle Arien nous dire : « Le Verbe de Dieu a été fait. » Comment se peut-il que le Verbe de Dieu ait été fait, puisque Dieu a, par le Verbe, fait toutes choses ? Si le Verbe de Dieu, lui aussi, a été fait, par quel autre verbe a-t-il été fait ? Peut-être direz-vous qu’il a été fait par un verbe du Verbe : mais je réponds, moi, que le Verbe est l’unique Fils de Dieu. Si vous n’admettez point un verbe du Verbe, accordez donc qu’il n’a point été fait, celui par qui tout a été fait. Car il n’a pu se faire lui-même, celui par qui tout a été fait. Croyez-en donc l’Évangéliste.

On dit la 1ère Messe.

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A LAUDES.

Ant. 1 Qui avez-vous vu, * bergers ? Dites-le-nous, apprenez-nous quel est celui qui a apparu sur la terre ? Nous avons vu un nouveau-né, et les chœurs des Anges qui louaient le Seigneur, alléluia, alléluia.
Ant. 2 Une jeune mère a enfanté * le Roi, dont le nom est éternel ; elle unit les joies de la mère à l’honneur de la virginité ; avant elle on n’a point vu ce prodige, on ne le verra pas après elle, alléluia.
Ant. 3 L’Ange dit aux bergers : * Je vous annonce une grande joie ; car il vous est né aujourd’hui le Sauveur du mon de, alléluia. [57]
Ant. 4 A l’Ange se joignit * la multitude de t’armée céleste louant Dieu et disant : Gloire à Dieu au plus haut des Cieux, et sur la terre, paix aux hommes de bonne volonté, alléluia. [58]
Ant. 5 Un petit enfant, un fils, * aujourd’hui nous est né, et il sera appelé Dieu, Fort, alléluia, alléluia. [59]

Capitule. Hebr. 1, 1-2.Après avoir, à plusieurs reprises et en diverses manières, parlé autrefois à nos pères par les Prophètes, Dieu, dans ces derniers temps, nous a parlé par le Fils, qu’il a établi héritier de toutes choses, et par lequel il a aussi créé le monde.

HymnusHymne
A solis ortus cárdine
Ad usque terræ límitem,
Christum canámus Príncipem,
Natum María Vírgine.
Du point où le soleil se lève
jusqu’aux limites de la terre,
chantons le Christ Roi,
né de la Vierge Marie.
Beátus auctor sæculi
Servíle corpus índuit :
Ut carne carnem líberans,
Ne pérderet quos cóndidit.
Le bienheureux Auteur du monde
revêt un corps d’esclave,
afin que, délivrant la chair par la chair,
il sauve de leur perte, ceux qu’il a créés.
Castæ Paréntis víscera
Cæléstis intrat grátia :
Venter Puéllæ báiulat
Secréta, quæ non nóverat.
Au sein d’une chaste Mère
descend la grâce céleste,
les flancs d’une Vierge portent un mystère
qu’elle ne connaissait pas.
Domus pudíci péctoris
Templum repénte fit Dei :
Intácta nésciens virum,
Concépit alvo Fílium.
La demeure d’un sein pudique
devient soudain le temple de Dieu ;
la Vierge, intacte et toujours pure,
conçoit un Fils dans ses entrailles.
Enítitur puérpera,
Quem Gábriel prædíxerat,
Quem ventre Matris géstiens,
Baptísta clausum sénserat.
Cette jeune mère enfante
celui qu’annonça Gabriel ;
celui dont Jean, captif encore au sein maternel,
reconnut la présence.
Fœno iacére pértulit :
Præsépe non abhórruit :
Et lacte módico pastus est,
Per quem nec ales ésurit.
Il a souffert de reposer sur du foin ;
il n’a pas eu horreur de la crèche ;
il s’est nourri d’un peu de lait,
lui qui rassasie jusqu’au petit oiseau.
Gaudet chorus cæléstium,
Et Angeli canunt Deo ;
Palámque fit pastóribus
Pastor, Creátor ómnium.
Le chœur des Esprits célestes se réjouit,
et les Anges chantent à Dieu ;
il se manifeste aux bergers,
le Pasteur, le Créateur de tous.
Iesu tibi sit glória,
Qui natus es de Vírgine,
Cum Patre et almo Spíritu,
In sempitérna sǽcula.
Amen.
Gloire soit à vous, ô Jésus !
Qui êtes né de la Vierge :
gloire au Père et à l’Esprit-Saint,
dans les siècles éternels.
Ainsi soit-il.

V/. Le Seigneur a fait connaître, alléluia.
R/. Son salut, alléluia.

Ant. au Bénédictus Gloire à Dieu au plus haut des cieux, * et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté, alléluia, alléluia.

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AUX DEUXIÈMES VÊPRES.

Ant. 1 Avec vous est le principe [60] * au jour de votre puissance, dans les splendeurs des Saints [61] : c’est de mon sein, qu’avant que l’aurore existât, je vous ai engendré. [62]
Ant. 2 Il a envoyé la rédemption * à son peuple : il a établi pour l’éternité son alliance. [63]
Ant. 3 Il s’est élevé * dans les ténèbres une lumière pour les hommes droits [64] : le Seigneur est miséricordieux, compatissant et juste. [65]
Ant. 4 Dans le Seigneur* est la miséricorde, et en lui une abondante rédemption. [66]
Ant. 5 Je mettrai * un fils du fruit de tes entrailles sur ton trône. [67]

Capitule. Hebr. 1, 1-2.Après avoir, à plusieurs reprises et en diverses manières, parlé autrefois à nos pères par les Prophètes, Dieu, dans ces derniers temps, nous a parlé par le Fils, qu’il a établi héritier de toutes choses, et par lequel il a aussi créé le monde.

Hymnus Hymne
Iesu, Redémptor ómnium,
Quem lucis ante oríginem
Parem patérnæ glóriæ
Pater suprémus édidit.
O Jésus, Rédempteur de tous les hommes,
vous qu’avant la première aurore,
en sa Paternité suprême,
le Père engendra semblable à sa gloire.
Tu lumen, et splendor Patris,
Tu spes perénnis ómnium,
Inténde quas fundunt preces
Tui per orbem sérvuli.
Vous, lumière et splendeur du Père,
vous, l’éternelle espérance de tous,
écoutez ces prières que vos serviteurs
vous adressent par toute la terre.
Meménto, rerum Cónditor,
Nostri quod olim córporis,
Sacráta ab alvo Vírginis
Nascéndo, formam súmpseris.
Souvenez-vous, ô Créateur du monde,
que vous avez un jour,
en naissant d’une Vierge toute pure,
pris un corps semblable au nôtre.
Testátur hoc præsens dies,
Currens per anni círculum,
Quod solus e sinu Patris
Mundi salus advéneris.
Le jour présent, ce jour
que ramène l’année dans son cours,
atteste que, seul descendu du sein du Père,
vous êtes venu sauver le monde.
Hunc astra, tellus, ǽquora,
Hunc omne, quod cælo subest,
Salútis auctórem novæ
Novo salútat cántico.
Le ciel, la terre, la mer
et tout ce qu’ils renferment,
saluent par un nouveau cantique
l’avènement de l’Auteur d’un salut nouveau.
Et nos, beáta quos sacri
Rigávit unda sánguinis,
Natális ob diem tui
Hymni tribútum sólvimus.
Et nous, qui avons été lavés
par l’effusion de votre sang divin,
nous vous offrons, ô Christ,
le tribut de cette hymne à la gloire de votre jour natal.
Iesu, tibi sit glória,
Qui natus es de Vírgine,
Cum Patre et almo Spíritu,
In sempitérna sǽcula.
Amen.
Gloire soit à vous, ô Jésus !
qui êtes né de la Vierge :
gloire au Père et à l’Esprit-Saint,
dans les siècles éternels.
Ainsi soit-il.

V/. Le Seigneur à fait connaître, alléluia. [68]
R/. Son salut, alléluia.

Ant. au Magnificat Aujourd’hui * est né le Christ, aujourd’hui le Sauveur est apparu ; aujourd’hui sur la terre chantent les Anges, se réjouissent les Archanges ; aujourd’hui les justes dans les transports de leur joie, répètent : Gloire à Dieu au plus haut des cieux, alléluia.

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Dom Guéranger, l’Année Liturgique

L’heureuse journée de la Vigile de Noël avance vers son terme. Déjà la sainte Église a clos les divins Offices de l’Attente du Sauveur par la célébration du grand Sacrifice. Dans son indulgence maternelle, elle a permis à ses enfants de rompre, dès le milieu du jour, le jeûne de la préparation ; les fidèles se sont assis à la table frugale, avec une joie spirituelle qui leur fait pressentir celle dont leurs cœurs seront inondés en cette nuit qui va leur donner l’Emmanuel.

Mais une aussi grande solennité que celle de demain doit, selon l’usage de l’Église dans ses fêtes, anticiper sur le jour qui la précède. En peu d’instants, l’Office des Premières Vêpres, dans lequel s’offre à Dieu l’encens du soir, va convier les Chrétiens à l’Église ; et la splendeur des cérémonies, la magnificence des chants, ouvriront tous les cœurs aux émotions d’amour et de reconnaissance qui les doivent disposer à recevoir les grâces du moment suprême.

En attendant le signal sacré qui va nous convoquer à la maison de Dieu, employons les instants qui nous restent à bien pénétrer le mystère d’un si grand jour, les sentiments de la sainte Église dans cette solennité, les traditions catholiques à l’aide desquelles nos aïeux l’ont si dignement célébrée.

Et d’abord écoutons la voix des saints Pères qui retentit avec une emphase et un éclat capables de réveiller toute âme vivante. Voici saint Grégoire le Théologien, l’Évêque de Nazianze, qui débute dans son discours trente-huitième, consacré à la Théophanie, ou Naissance du Sauveur : qui pourrait l’entendre et rester froid devant sa parole ?

« Le Christ naît ; rendez gloire. Le Christ descend des cieux ; marchez au-devant de lui. Le Christ est sur la terre ; hommes, élevez-vous. Toute la terre, chantez au Seigneur ! et pour réunir tout dans une seule parole : Que les cieux se réjouissent, et que la terre tressaille, pour Celui qui est, tout à la fois, du ciel et de la terre. Le Christ revêt notre chair, soyez émus de crainte et d’allégresse : de crainte, à cause du péché ; d’allégresse, à cause de l’espérance. Le Christ naît d’une Vierge : femmes, honorez la virginité, afin de devenir mères du Christ. « Qui n’adorerait Celui qui était dès le commencement ? qui ne louerait et ne célébrerait Celui qui vient de naître ? Voici que les ténèbres se dissipent ; la lumière est créée ; l’Égypte demeure sous les ombres, et Israël est éclairé par la colonne lumineuse. Le peuple, qui était assis dans les ténèbres de l’ignorance, aperçoit la lueur d’une science profonde. Les choses anciennes ont fini ; tout est devenu nouveau. La lettre fuit, l’esprit triomphe ; les ombres sont passées, la vérité fait son entrée. La nature voit violer ses lois : le moment est venu de peupler le monde céleste : le Christ commande ; gardons-nous de résister.

« Toutes les nations, battez des mains : car un petit Enfant nous est né, un Fils nous a été donné. La marque de sa principauté est sur son épaule : car la croix sera le moyen de son élévation ; son nom est l’Ange du grand conseil, c’est-à-dire du conseil paternel.

« Que Jean s’écrie : Préparez la voie du Seigneur ! Pour moi, je veux faire retentir aussi la puissance d’un si grand jour : Celui qui est sans chair s’incarne ; le Verbe prend un corps ; l’Invisible se montre aux yeux, l’Impalpable se laisse toucher ; Celui qui ne connaît pas le temps prend un commencement ; le Fils de Dieu est fait fils de l’homme. Jésus-Christ était hier ; il est aujourd’hui ; il sera à jamais. Que le Juif s’en offense ; que le Grec s’en moque ; que la langue de l’hérétique s’agite dans sa bouche impure. Ils croiront quand ils le verront, ce Fils de Dieu, monter au ciel ; et si encore à ce moment ils s’y refusent, ils croiront bien, alors qu’il en descendra, et paraîtra sur son tribunal de juge. »

Écoutons maintenant, dans l’Église Latine, le dévot saint Bernard, qui épanche une douce allégresse dans ces mélodieuses paroles, au sermon VIe pour la Vigile de Noël :

« Voici que nous venons d’entendre une nouvelle pleine de grâce, et faite pour être acceptée avec transport : Jésus-Christ, Fils de Dieu, naît en Bethléhem de Judée. Mon âme s’est fondue à cette parole ; mon esprit bouillonne en moi, pressé que je suis de vous annoncer un tel bonheur. Jésus veut dire Sauveur. Quoi de plus nécessaire qu’un Sauveur à ceux qui étaient perdus, de plus désirable à des infortunés, de plus avantageux à ceux que le désespoir accablait ? Où était le salut, où était même l’espérance du salut, si légère qu’elle fût, sous cette loi de péché, dans ce corps de mort, au milieu de cette perversité, dans ce séjour d’affliction, si ce salut n’était né tout à coup, et contre toute espérance ? O homme, tu désires, il est vrai, ta guérison ; mais, ayant la conscience de ta faiblesse et de ton infirmité, tu redoutes la rigueur du traitement. Ne crains pas : le Christ est suave et doux ; sa miséricorde est immense ; comme Christ, il a reçu l’huile en partage, mais c’est pour la répandre sur tes plaies. Et si je te dis qu’il est doux, ne va pas craindre que ton Sauveur manque de puissance ; car on ajoute qu’il est Fils de Dieu. Tressaillons donc, ruminant en nous-mêmes, et faisant éclater au dehors cette douce sentence, cette suave parole : Jésus-Christ, Fils de Dieu, naît en Bethléhem de Judée ! »

C’est donc véritablement un grand jour que celui de la Naissance du Sauveur : jour attendu par le genre humain durant des milliers d’années ; attendu par l’Église durant ces quatre semaines de l’Avent qui nous laissent de si chers souvenirs ; attendu par la nature entière qui revoit chaque année, sous ses auspices, le triomphe du soleil matériel sur les ténèbres toujours croissantes. Le grand Docteur de l’Église Syrienne, saint Éphrem, célèbre avec enthousiasme le charme et la fécondité de ce jour mystérieux ; empruntons quelques traits à sa divine poésie, et disons avec lui :

« Daignez, Seigneur, nous permettre de célébrer aujourd’hui le propre jour de votre naissance, que la solennité présente nous rappelle. Ce jour est semblable à vous ; il est ami des hommes. A travers les âges, il revient chaque année ; il vieillit avec les vieillards, et il se renouvelle avec l’enfant qui vient de naître. Chaque année, il nous visite et passe ; puis il revient plein de charmes. Il sait que la nature humaine e ne saurait se passer de lui ; comme vous, il vient au secours de notre race en péril. Le monde entier, Seigneur, a soif du jour de votre naissance ; cet heureux jour contient en lui-même les siècles à venir ; il est un, et il se multiplie. Qu’il soit donc, cette année encore, semblable à vous, amenant la paix entre le ciel et la terre. Si tous les jours sont marqués par votre s libéralité, combien est-il juste qu’elle déborde en celui-ci ?

« Les autres jours de l’année empruntent leur beauté de celui-ci, et les solennités qui suivront lui doivent la dignité et l’éclat dont elles brillent. Le jour de votre naissance est un trésor, Seigneur, un trésor destiné à acquitter la dette commune. Béni soit le jour qui nous a rendu le soleil, à nous errants dans la nuit obscure ; qui nous a apporté la divine gerbe par laquelle a été c répandue l’abondance ; qui nous a donné la branche de vigne où est contenue la liqueur du salut qu’elle doit nous fournir en son temps. Au sein de l’hiver qui prive les arbres de leurs fruits, la vigne s’est parée d’une végétation divine ; sous la saison glaciale, le rejeton a poussé de la souche de Jessé. C’est en décembre, en ce mois qui retient encore dans les entrailles de la terre la semence qui lui fut confiée, que l’épi de notre salut s’élève du sein de la Vierge où il était descendu dans les jours du printemps, lorsque les agneaux bondissent dans les prairies. »

Il n’est donc pas étonnant que ce jour qui importe à Dieu même ait été privilégié dans l’économie des temps ; et l’on aime à voir les nations païennes pressentir dans leurs calendriers la gloire que Dieu lui réservait dans la suite des âges. Nous avons vu d’ailleurs que les Gentils n’ont pas été seuls à prévoir mystérieusement les relations du divin Soleil de justice avec l’astre mortel qui éclaire et échauffe le monde ; les saints Docteurs et la Liturgie tout entière ne tarissent pas sur cette ineffable harmonie. Ajoutons que, selon la tradition vénérable de l’antiquité qui place au Vendredi (25 mars) l’Incarnation du Fils de Dieu, la Naissance du Sauveur qui s’est appelé la Lumière du monde a dû avoir lieu un Dimanche (25 décembre) : ce qui donne à la fête de Noël quelque chose de plus sacré encore dans les années où elle se rencontre au Dimanche : jour déjà sanctifié par la création de la lumière à l’origine des choses, et plus tard parla Résurrection de ce Sauveur qui se lève aujourd’hui sur le monde. Saint Sophrone de Jérusalem a magnifiquement traité ce mystère dans sa première Homélie pour la fête de Noël.

Afin de graver plus profondément l’importance d’un jour si sacré dans la mémoire des peuples chrétiens de l’Europe, races préférées dans les conseils de la divine miséricorde, le souverain maître des événements a voulu que le royaume des Francs naquît le jour de Noël, lorsque dans le Baptistère de Reims, au milieu des pompes de cette solennité, Clovis, le fier Sicambre, devenu doux comme l’agneau, fut plongé par saint Rémi dans la fontaine du salut, de laquelle il sortit pour inaugurer la première monarchie catholique parmi les monarchies nouvelles, ce royaume de France, le plus beau, a-t-on dit, après celui du ciel.

Un siècle plus tard, c’était le tour de la race anglo-saxonne. L’Apôtre de l’île des Bretons, le moine saint Augustin, après avoir converti au vrai Dieu le roi Ethelred, s’avançait à la conquête des âmes. S’étant dirigé vers York, il y fait entendre la parole de vie, et un peuple entier s’unit pour demander le Baptême. Le jour de Noël est fixé pour la régénération de ces nouveaux disciples du Christ ; et le fleuve qui coule sous les murs de la cité est choisi pour servir de fontaine baptismale à cette armée de catéchumènes. Dix mille hommes, non compris les femmes et les enfants, descendent dans les eaux dont le courant doit emporter la souillure de leurs âmes. La rigueur de la saison n’arrête pas ces nouveaux et fervents disciples de l’Enfant de Bethléhem, qui, peu de jours auparavant, ignoraient jusqu’à son nom. Du sein des ondes glacées, sort pleine de joie et éclatante d’innocence, toute une armée de néophytes ; et au jour de sa naissance, le Christ compte une nation de plus sous son empire.

Mais ce n’était pas assez encore pour le Seigneur qui tient à honorer le jour de la naissance de son Fils.

Une autre naissance illustre devait encore embellir cet heureux anniversaire. A Rome, dans la basilique de Saint-Pierre, en la solennité de Noël de l’an 800, naissait le Saint-Empire-Romain auquel était réservée la mission de propager le règne du Christ dans les régions barbares du Nord, et de maintenir l’unité européenne, sous la direction du Pontife Romain. En ce jour, saint Léon III plaçait la couronne impériale sur la tête de Charlemagne ; et la terre étonnée revoyait un César, un Auguste, non plus successeur des Césars et des Augustes de la Rome païenne, mais investi de ces titres glorieux par le Vicaire de Celui qui s’appelle, dans les saints Oracles, le Roi des rois, le Seigneur des seigneurs.

Ainsi Dieu a fait luire aux yeux des hommes la gloire du royal Enfant qui naît aujourd’hui ; ainsi a-t-il préparé, de distance en distance, à travers les siècles, de riches anniversaires de cette Nativité qui donne gloire à Dieu et paix aux hommes. La suite des temps apprendra au monde en quelle manière le Très-Haut se réserve encore de glorifier, en ce jour, lui-même et son Emmanuel.

En attendant, les nations de l’Occident, émues de la dignité d’une telle fête, et la considérant avec raison comme le principe de toutes choses dans l’ère de la régénération du monde, comptèrent longtemps leurs années à partir de Noël, comme on le voit sur d’antiques Calendriers, sur les Martyrologes d’Usuard et d’Adon, et sur un si grand nombre de Bulles, de Chartes et de Diplômes. Un concile de Cologne, en 1310, nous montre cette coutume encore subsistante à cette époque. Plusieurs peuples de l’Europe catholique, les Italiens principalement, ont gardé jusqu’aujourd’hui l’usage de fêter le nouvel an à la Nativité du Sauveur. On souhaite le bon Noël, comme, chez nous, au premier janvier, la bonne année. On fait échange de compliments et de cadeaux ; on écrit aux amis absents : précieux restes des anciennes mœurs, dont la foi était le principe et l’invincible rempart.

Mais telle est aux yeux de la sainte Église la joie qui doit remplir les fidèles dans la Naissance du Sauveur, que, s’associant par une insigne indulgence à une si légitime allégresse, elle relâche pour la journée de demain le précepte de l’abstinence de la chair, si Noël tombe le vendredi ou le samedi. Cette dispense remonte au Pape Honorius III, qui siégeait en 1216 ; mais déjà, dès le IXe siècle, saint Nicolas Ier, dans sa réponse aux consultations des Bulgares, avait montre une semblable condescendance, afin d’encourager la joie des fidèles dans la célébration non seulement de la solennité de Noël, mais encore des fêtes de saint Etienne, de saint Jean l’Évangéliste, de l’Épiphanie, de l’Assomption de Notre-Dame, de saint Jean-Baptiste, et de saint Pierre et saint Paul. Mais cette indulgence ne fut point universelle, et la relaxation ne s’est maintenue que pour la fête de Noël dont elle augmente l’allégresse populaire.

Dans le désir de témoigner à sa manière l’importance qu’elle attachait à une fête si chère à toute la chrétienté, la législation civile du moyen âge accordait aux débiteurs la faculté de suspendre le paiement de leurs créanciers durant toute la semaine de Noël, qui pour cela était appelée semaine de rémission, comme celles de Pâques et de la Pentecôte.

Mais suspendons un moment ces renseignements familiers que nous nous plaisons à réunir sur la glorieuse solennité dont l’approche émeut si doucement nos cœurs ; il est temps de diriger nos pas vers la maison de Dieu, où nous appelle l’Office solennel des premières Vêpres. Durant le trajet, portons notre pensée vers Bethléhem, où Joseph et Marie sont déjà arrivés. Le soleil matériel s’abaisse rapidement au couchant ; et le divin Soleil de justice demeure caché pour quelques instants encore sous le nuage, au sein de la plus pure des vierges. La nuit approche ; Joseph et Marie parcourent les rues de la Cité de David, cherchant un asile pour s’y mettre à l’abri. Que les cœurs fidèles soient donc attentifs, et s’unis sent aux deux incomparables pèlerins. Mais l’heure est venue où le chant de gloire et de reconnaissance doit s’échapper de toute bouche humaine. Acceptons avec empressement pour notre organe la voix de la sainte Église : elle n’est pas au-dessous d’une si noble tâche.

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LES PREMIÈRES VÊPRES DE NOËL.

Après l’invocation ordinaire du secours divin, l’Église entonne successivement, sur un chant majestueux, les cinq Antiennes, qui accompagnent les Psaumes.

Après avoir exalté dans ces divins cantiques la génération éternelle, la fidélité, la miséricorde, la grandeur et la vérité de son divin Époux qui approche, et qui dans peu d’instants se laissera voir, la sainte Église se repose un moment en écoutant, au Capitule, les consolantes paroles de l’Apôtre des Gentils sur l’avènement du Dieu Sauveur. « La bénignité et l’humanité de notre Dieu Sauveur ont apparu au monde ; il nous a sauvés, non pour les œuvres de justice que nous avons faites, nous pécheurs, mais pour sa seule miséricorde. » Encouragée de nouveau par ces touchantes paroles, la sainte Église n’emprunte plus le secours de la psalmodie ; elle soupire, du fond de son cœur, un hymne à son Époux, et chante la grandeur et la tendresse du sublime anniversaire qui émeut la nature entière et apporte une si chère allégresse à toutes les âmes qui goûtent l’amour du divin Enfant. Saint Ambroise, l’abeille de Milan, composa cette Hymne touchante qui retentit aujourd’hui avec une si suave mélodie par toute la terre.

Maintenant, c’est la voix de Marie elle-même qui va retentir dans l’assemblée des fidèles. Le doux cantique qu’elle entonna, au jour de la Visitation, lorsque, sublime dépositaire du divin secret, elle célébra dans un hymne ineffable les merveilles de la puissance de Dieu en elle, ce cantique, sans lequel l’Église ne laisse jamais se coucher le soleil, va être chanté avec pompe. L’heure approche, ô Marie, où cette divine maternité pour laquelle toutes les générations vous appelleront Bienheureuse, va être déclarée au ciel et à la terre. Permettez que nos âmes s’unissent à la vôtre pour glorifier le Seigneur, et souffrez que nos cœurs tressaillent avec le vôtre en Dieu leur Sauveur et votre Fils.

La sainte Église résume enfin tous ses désirs dans l’Oraison, qui doit monter à l’oreille de Dieu, non seulement à chaque Heure du jour de Noël, mais encore plusieurs fois le jour, dans tous le cours de l’Octave.

La solennité des premières Vêpres s’achève dans les ténèbres ; car les dernières lueurs du jour ont disparu au ciel, pendant que nous étions attentifs à la sainte psalmodie. Les ministres sacrés se retirent dans la pompe des plus riches ornements ; bientôt ils vont reparaître pour s’asseoir de nouveau au tribunal de la Pénitence, et prêter l’oreille aux pécheurs qui veulent se réconcilier à Dieu pour la Naissance de son Fils. L’Église, qui retentissait, il y a quelques moments, de chants éclatants, retombe dans un silence solennel. Adorons la majesté du Seigneur ; et demandons une dernière fois au Roi des siècles qu’il daigne envoyer cette rosée dont la terre est si altérée. A cette prière de notre espérance, mêlons, pour la dernière fois aussi, un éclair de cette crainte salutaire que la pensée du dernier Avènement nous a fait concevoir, avec toute l’Église, durant le saint Temps de l’Avent.

Pour exprimer dignement ces sentiments, nous empruntons à la Liturgie Gothique ou Mozarabe la belle oraison suivante :

PRIÈRE DU BRÉVIAIRE MOZARABE. (En la Nativité de Notre-Seigneur, à l’Office du Soir, Capitula.)

Cieux, répandez votre rosée, en manifestant enfin le Christ ; que les nuées fassent pleuvoir le Juste en ce moment où tous les saints célèbrent son avènement. Que la terre s’ouvre ; que la Vierge, à la parole de l’Ange, conçoive et enfante le Sauveur. Or, cette rosée qui émane de vous, ô Père tout-puissant, nous vous supplions et vous demandons qu’elle soit la santé des infirmes : cette pluie du matin, daignez faire qu’elle imbibe le sol aride de notre âge ; qu’elle lave, dans l’effusion d’une grâce si abondante, las iniquités passées, qu’elle verse sur les croyants l’éternelle lumière de justice. Que nous tous, contemplant sans alarmes la présence de votre Fils notre Seigneur, et marchant avec les transports de la jubilation au-devant de lui, mêlés au cortège des habitants du ciel, nous fassions entendre en triomphe ce cantique d’allégresse ; Béni soit Celui qui vient au nom du Seigneur ; ce Dieu, ce Seigneur qui a lui sur nous, qui, par son Avènement, nous a rachetés, et par sa Nativité nous a illuminés ; qui, par sa venue, a recherché ceux qui étaient perdus , et éclairé ceux qui languissaient dans les ténèbres. Accordez-nous donc, Père tout-puissant, de célébrer le jour de sa Nativité avec une telle piété et dévotion, que nous mentions de trouver plein de douceur ce souverain Seigneur, au jour de son jugement. Nous avons connu sa bénignité dans la rédemption qu’il nous a offerte ; faites que nous éprouvions sa mansuétude, lorsqu’il siégera sur son tribunal.

Nous quitterons maintenant le saint temple, et en attendant que l’heure des Matines nous y rappelle pour y célébrer l’instant sacré de la Naissance du Sauveur, nous vaquerons durant quelques heures aux devoirs que notre condition nous impose Mais, avant d’aller célébrer cette grande et sainte veille, il importe que les fidèles soient instruits de tout ce qui peut les mettre à même de la passer d’une manière digne d’un si haut mystère, et profitable pour leurs âmes. Il sera utile, peut-être, de reprendre le cours des renseignements familiers sur la Liturgie de Noël, que nous avons suspendus pour célébrer, avec l’Église, les premières Vêpres de la solennité.

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AVANT L’OFFICE DE LA NUIT.

Les fidèles doivent savoir que, dans les premiers siècles de l’Église, on ne célébrait pas de fête solennelle sans s’y préparer par une Veille laborieuse, durant laquelle le peuple chrétien, renonçant au sommeil, remplissait l’église, et suivait avec ferveur la psalmodie et les lectures dont l’ensemble formait dès lors ce que nous appelons aujourd’hui l’Office des Matines. La nuit était divisée en trois parties, désignées sous le nom de Nocturnes ; et au point du jour, on reprenait les chants avec plus de solennité encore dans l’Office des Louanges qui a retenu le nom de Laudes. Ce divin service, qui remplissait la meilleure partie de la nuit, se célèbre encore chaque jour, quoique à des heures moins pénibles, dans les Chapitres et les Monastères, et il est récité dans le particulier par tous les clercs astreints à l’Office divin, dont il forme la portion la plus considérable. Le relâchement des habitudes liturgiques a peu à peu désaccoutumé les peuples de prendre part à la célébration des Matines ; et dans la plupart des églises paroissiales de France, on a fini par ne les plus chanter que quatre fois par an : savoir, les trois derniers jours de la Semaine Sainte ; encore sont-elles anticipées à la veille dans l’après-midi, sous le nom de Ténèbres ; et enfin, le jour de Noël, où du moins on les solennise à peu près à la même heure qu’on le faisait dans l’antiquité.

L’Office de la nuit de Noël a toujours été célèbre entre tous ceux de l’année, et solennise avec une dévotion spéciale : d’abord à raison de l’heure à laquelle la très sainte Vierge enfanta le Sauveur, et qu’il convient d’attendre dans les prières et les vœux les plus ardents ; ensuite, parce que l’Église ne se contente pas de célébrer en cette nuit l’Office des Matines à l’ordinaire, mais elle y joint, par une exception unique, et pour mieux honorer la divine Naissance, l’offrande du saint Sacrifice de la Messe à l’heure même de minuit, qui est celle où Marie donna son auguste fruit à la terre. Aussi voyons-nous que dans beaucoup de lieux, dans les Gaules principalement, selon le témoignage de saint Césaire d’Arles, les fidèles passaient la nuit entière à l’Église.

A Rome, durant plusieurs siècles, au moins du septième au onzième, il y avait deux Matines dans la nuit de Noël. Les premières se chantaient dans la Basilique de Sainte-Marie-Majeure ; on les commençait aussitôt après le soleil couché ; il n’y avait pas d’Invitatoire, et ce premier Office de la nuit était suivi de la première Messe de Noël que le Pape célébrait à minuit. Aussitôt après, il se rendait avec le peuple à l’Église de Sainte-Anastasie, où il célébrait la Messe de l’Aurore. Le pieux cortège se transportait ensuite, et toujours avec le Pontife, à la Basilique de Saint-Pierre, où commençaient tout aussitôt les secondes Matines. Elles avaient un Invitatoire, et étaient suivies des Laudes ; lesquelles étant chantées, ainsi que les Offices suivants, aux heures convenables, le Pape célébrait la troisième et dernière Messe, à l’heure de Tierce. Amalaire et l’ancien liturgiste du XIIe siècle qu’on a publié sous le nom d’Alcuin nous ont conservé ces détails, qui sont d’ailleurs rendus sensibles par le texte même des anciens Antiphonaires de l’Église Romaine qui ont été publiés parle Bienheureux Joseph-Marie Tommasi et par Gallicioli.

La foi était vive dans ces temps ; le sentiment de la prière étant le lien le plus puissant pour les peuples nourris sans cesse des mystères divins, les heures passaient vite pour eux dans la maison de Dieu. On comprenait alors les prières de l’Église ; les cérémonies de la Liturgie, qui en sont l’indispensable complément, n’étaient point comme aujourd’hui un spectacle muet, ou tout au plus empreint d’une vague poésie : les masses croyaient et sentaient comme les individus. Qui nous rendra cette compréhension des choses surnaturelles, sans laquelle tant de gens aujourd’hui encore se flattent d’être chrétiens et catholiques ?

Mais pourtant, grâces à Dieu, cette foi pratique n’est pas encore tout à fait éteinte chez nous ; espérons même qu’elle reprendra un jour son ancienne vie. Que de fois nous nous sommes plu à en rechercher et à en contempler les traces au sein de ces familles patriarcales, encore nombreuses aujourd’hui dans nos petites villes et nos campagnes des provinces éloignées de la capitale de la France ! C’est là que nous avons vu, et nul souvenir d’enfance ne nous est plus cher, toute une famille, après la frugale et sévère collation du soir, se ranger autour d’un vaste foyer, n’attendant que le signal pour se lever comme un seul homme, et se rendre à la Messe de Minuit. Les mets qui devaient être servis au retour, et dont la recherche simple, mais succulente, devait ajouter à la joie d’une si sainte nuit, étaient là préparés d’avance ; et au centre du foyer, un vigoureux tronc d’arbre, décoré du nom de bûche de Noël, ardait vivement, et dispensait une puissante chaleur dans toute la salle. Sa destinée était de se consumer lentement durant les longues heures de l’Office, afin d’offrir au retour un brasier salutaire pour réchauffer les membres des vieillards et des enfants engourdis par la froidure.

Cependant on s’entretenait avec une vive allégresse du mystère de la grande nuit ; on compatissait à Marie et à son doux Enfant exposés dans une étable abandonnée à toutes les rigueurs de l’hiver ; puis bientôt, on entonnait quelqu’un de ces beaux Noëls, au chant desquels on avait passé déjà de si touchantes veillées dans tout le cours de l’Avent. Les voix et les cœurs étaient d’accord, en exécutant ces mélodies champêtres composées dans des jours meilleurs. Ces naïfs cantiques redisaient la visite de l’Ange Gabriel à Marie, et l’annonce d’une maternité divine faite à la noble pucelle ; les fatigues de Marie et de Joseph parcourant les rues de Bethléhem, alors qu’ils cherchaient en vain un gîte dans les hôtelleries de cette ville ingrate ; l’enfantement miraculeux de la Reine du ciel ; les charmes du Nouveau-Né dans son humble berceau ; l’arrivée des bergers, avec leurs présents rustiques, leur musique un peu rude, et la foi simple de leurs cœurs. On s’animait en passant d’un Noël à l’autre ; tous soucis de la vie étaient suspendus, toute douleur était charmée, toute âme épanouie ; mais soudain la voix des cloches retentissant dans la nuit venait mettre fin à de si bruyants et si aimables concerts. On se mettait en marche vers l’Église ; heureux alors les enfants que leur âge un peu moins tendre permettait d’associer pour la première fois aux ineffables joies de cette nuit solennelle, dont les saintes et fortes impressions devaient durer toute la vie !

Mais où nous entraîne le charme de ces souvenirs trop personnels et d’une nature inconnue peut-être à la plupart de nos lecteurs ? Toutefois, s’il ne nous est pas possible de faire revivre ces chères et touchantes habitudes qui confondaient les saintes émotions de la religion avec les plus intimes jouissances de la famille, nous nous efforcerons de suggérer à ceux qui veulent bien nous lire, afin de remplir utilement les dernier instants qui précèdent le départ pour la maison de Dieu, quelques considérations à l’aide desquelles ils pourront entrer plus avant encore dans l’esprit de l’Église, fixant leur cœur et leur imagination sur des objets réels et consacrés par les mystères de cette auguste nuit.

Or donc, il est trois lieux dans le monde que notre pensée doit rechercher principalement à cette heure. Bethléhem est le premier de ces trois lieux, et dans Bethléhem, c’est la grotte de la Nativité qui nous réclame. Approchons-nous avec un saint respect, et contemplons l’humble asile que le Fils de l’Eternel descendu du ciel a choisi pour sa première résidence. Cette étable, creusée dans le roc, est située hors la ville ; elle a environ quarante pieds de longueur sur douze de largeur. Le bœuf et l’âne annoncés par le prophète sont là près de la crèche, muets témoins du divin mystère que la demeure de l’homme a refusé d’abriter.

Joseph et Marie sont descendus dans cette humble retraite ; le silence et la nuit les environnent ; mais leur cœur s’épanche en louanges et en adorations envers le Dieu qui daigne réparer si complètement l’orgueil de l’homme. La très pure Marie dispose les langes qui doivent envelopper les membres du céleste Enfant, et attend avec une ineffable patience l’instant où ses yeux verront enfin le fruit béni de ses chastes entrailles, où elle pourra le couvrir de ses baisers et de ses caresses, l’allaiter de son lait virginal.

Cependant, le divin Sauveur, près de franchir la barrière du sein maternel, et de faire son entrée visible en ce monde de péché, s’incline devant son Père céleste, et, suivant la révélation du Psalmiste expliquée par le grand Apôtre dans l’Épître aux Hébreux, il dit : « O mon Père ! vous ne voulez plus des hosties grossières que l’on vous offre selon la Loi ; ces oblations vaines n’ont point apaisé votre justice ; mais vous m’avez donné un corps ; me voici, je viens m’offrir ; je viens accomplir votre volonté. » [69]

Tout ceci se passait vers l’heure où nous sommes, dans l’étable de Bethléhem, et les Anges du Seigneur étaient ravis d’admiration pour une si grande miséricorde d’un Dieu envers des créatures révoltées, en même temps qu’ils considéraient avec délices les nobles et gracieux attraits de la Vierge sans tache, attendant, eux aussi, l’instant où la Rose mystique allait s’épanouir enfin et répandre son divin parfum.

Heureuse grotte de Bethléhem qui fut témoin de semblables merveilles ! qui de nous, à cette heure, n’y enverrait pas son cœur ? Qui de nous ne la préférerait aux plus somptueux palais des rois ? Dès les premiers jours du christianisme, la vénération des fidèles l’environna des plus tendres hommages, jusqu’à ce que la grande sainte Hélène, suscitée de Dieu pour reconnaître et honorer sur la terre les traces du passage de l’Homme-Dieu, fit bâtir à Bethléhem la magnifique Basilique qui devait garder dans son enceinte ce trophée de l’amour d’un Dieu pour sa créature.

Transportons-nous par la pensée dans cette Église encore subsistante ; voyons-y, au milieu des infidèles et des hérétiques, les religieux qui desservent ce sanctuaire, s’apprêtant aussi à chanter, dans notre langue latine, les mêmes cantiques que bientôt nous allons entendre. Ces religieux sont des enfants de saint François, des héros de la pauvreté, des disciples de l’Enfant de Bethléhem ; et c’est parce qu’ils sont petits et faibles, que, depuis plus de cinq siècles, ils soutiennent seuls les combats du Seigneur, en ces lieux sacrés de la Terre-Sainte que l’épée des Croisés s’était lassée de défendre. Prions en union avec eux, cette nuit ; et baisons avec eux la terre à cet endroit de la grotte où on lit en lettres d’or ces paroles : HIC DE VIRGINE MARIA JESUS CHRISTUS NATUS EST.

Toutefois, c’est en vain que nous demanderions aujourd’hui à Bethléhem l’heureuse Crèche qui reçut l’Enfant divin. Depuis douze siècles, elle a fui ces contrées frappées de malédiction ; elle est venue chercher un asile au centre de la catholicité, à Rome, l’Épouse favorisée du Rédempteur.

Rome est donc le second lieu du monde que notre cœur doit rechercher en cette nuit fortunée. Mais dans la ville sainte, il est un sanctuaire qui réclame en ce moment toute notre vénération et tout notre amour. C’est la Basilique de la Crèche, la splendide et radieuse Église de Sainte-Marie-Majeure. Reine de toutes les nombreuses Églises que la dévotion romaine a dédiées à la Mère de Dieu, elle s’élève avec magnificence sur l’Esquilin, toute resplendissante de marbre et d’or, mais surtout heureuse de posséder en son sein, avec le portrait de la Vierge Mère peint par saint Luc, l’humble et glorieuse Crèche que les impénétrables décrets du Seigneur ont enlevée à Bethléhem pour la confier à sa garde. Un peuple immense se presse dans la Basilique, attendant l’heureux instant où ce touchant monument de l’amour et des abaissements d’un Dieu apparaîtra porté sur les épaules des ministres sacrés, comme une arche de nouvelle alliance, dont la vue tant désirée rassure le pécheur et fait palpiter le cœur du juste. Dieu a donc voulu que Rome, qui devait être la nouvelle Jérusalem, fût aussi la Bethléhem nouvelle, et que les enfants de son Église trouvassent dans ce centre immuable de leur foi l’aliment multiple et inépuisable de leur amour.

Mais la Basilique de la Crèche n’est pas le seul sanctuaire de Rome qui nous réclame cette nuit. Un mystère profond et imposant s’accomplit à l’heure même où nous sommes, près du sépulcre du Prince des Apôtres, dans l’auguste palais du Vatican. Si l’âge et les forces du Souverain Pontife lui permettent de se rendre cette nuit à Sainte-Marie-Majeure, la cérémonie dont nous allons parler a lieu dans la vaste sacristie de la Basilique.

L’Enfant divin qui va naître est le Dieu fort, le Prince de la Paix ; il porte la marque de la royauté sur son épaule, comme nous le chanterons demain avec l’Église. Pour honorer cette puissance de l’Emmanuel, déjà, ainsi que nous l’avons vu, le Seigneur des armées a amené aux pieds de la Crèche les deux grands chefs de la nation franque, Clovis et Charlemagne ; et voici que le Pontife suprême, le Vicaire de l’Emmanuel, bénit en son nom, dans cette nuit même, une épée et un casque destinés à quelque guerrier catholique dont le bras victorieux a bien mérité de la république chrétienne. Cette épée, dit le grand Cardinal Polus expliquant ce rite dans une lettre célèbre adressée à Philippe II et à la reine Marie, son épouse, est remise à un prince que le Vicaire du Christ veut honorer, au nom du Christ lui-même qui est Roi ; car l’Ange dit à Marie : Dieu lui donnera le trône de David son père. C’est de lui seul que vient la puissance du glaive ; car Dieu dit à Cyrus : Je t’ai ceint de l’épée ; et le Psalmiste dit au Christ : Ceignez-vous du glaive, ô prince très vaillant ! Mais le glaive ne doit se tirer que pour la justice ; et c’est pour cela qu’on le bénit en cette nuit, au milieu de laquelle se lève le divin Soleil de justice. Sur le casque, ornement et protection de la tête, est représentée par un travail de perles l’image de l’Esprit-Saint, afin que le prince connaisse que ce n’est point d’après le mouvement de ses passions, ni pour son ambition, qu’il doit faire usage du glaive, mais uniquement dans la sagesse du divin Esprit et pour étendre le royaume du Christ sur la terre.

Ineffable mélange d’idées et de sentiments forts et tendres, dont on ne retrouve l’expression et en même temps l’harmonie que dans cette Rome chrétienne qui est notre Mère, et qui seule a reçu avec plénitude la lumière et l’amour ! Cette cérémonie s’est conservée jusqu’aujourd’hui ; et ce serait une liste glorieuse que celle des grands capitaines de la chrétienté que le Pontife romain, depuis déjà de longs siècles, a armés ainsi Chevaliers de l’Église et des nations, dans cette nuit où le Messie descend pour soumettre notre ennemi. En nous inclinant avec amour devant son berceau, rendons aussi gloire à sa royauté ; prions-le d’humilier tous les ennemis de son Église, et de terrasser ceux de notre salut et de notre perfection.

Il est temps maintenant de visiter le troisième des sanctuaires où se doit accomplir durant cette nuit le mystère de la naissance du divin Fils de Marie. Or, ce troisième sanctuaire est tout près de nous ; il est en nous : c’est notre cœur. Notre cœur est la Bethléhem que Jésus veut visiter, dans laquelle il veut naître, pour s’y établir et y croître jusqu’à l’homme parfait, comme parle l’Apôtre [70]. S’il visite l’étable de la Cité de David, ce n’est que pour parvenir plus sûrement à notre cœur qu’il a aimé d’un amour éternel, jusqu’à descendre du ciel pour le venir habiter. Le sein virginal de Marie ne l’a conservé que neuf mois ; il veut éternellement résider dans notre cœur.

O cœur du Chrétien, Bethléhem vivante, prépare-toi, et sois dans l’allégresse ! Déjà, tu t’es disposé par l’aveu de tes fautes, par la contrition de tes offenses, par la pénitence de tes méfaits, à cette union que le divin Enfant désire contracter avec toi. Maintenant, sois attentif ; il va venir au milieu de la nuit. Qu’il te trouve donc prêt, comme il trouva l’étable et la crèche et les langes. Tu ne peux lui offrir les pures et maternelles caresses de Marie, les tendres soins de Joseph : présente-lui les adorations et l’amour simple des bergers. Semblable à la Bethléhem des temps actuels, tu habites au milieu des infidèles, de ceux qui ignorent le divin mystère d’amour : que tes vœux soient secrets et sincères comme ceux qui monteront cette nuit, vers le ciel, du fond de la glorieuse et sainte grotte qui réunit autour des fils de saint François les rares fidèles que la céleste miséricorde trouve à glaner encore au sein d’une contrée abrutie par plus de mille ans de servitude. Dans la pompe de cette sainte nuit, deviens semblable à la radieuse Basilique qui garde dans Rome le dépôt de la sainte Crèche et le doux portrait de la Vierge Mère. Que tes affections soient pures comme le marbre blanc de ses colonnes ; ta charité resplendissante comme l’or qui brille à ses lambris ; tes œuvres lumineuses comme les mille cierges qui, dans son heureuse enceinte, illuminent la nuit de toutes les splendeurs du jour. Enfin, ô soldat du Christ ! Apprends qu’il faut combattre pour mériter d’approcher de l’Enfant divin ; combattre pour conserver en soi sa présence pleine d’amour ; combattre pour arriver à l’heureuse consommation qui te fera tout un avec lui dans l’éternité. Conserve donc chèrement ces impressions ; qu’elles te nourrissent, te consolent et te sanctifient, jusqu’au moment où l’Emmanuel va descendre en toi. O Bethléhem vivante ! Répète sans cesse cette douce parole de l’Épouse : Venez, Seigneur Jésus ! venez.

Oui, le voici qui vient, et il est temps d’aller à lui. Levons-nous et nous acheminons vers le saint temple. Avançons-nous à travers la nuit ; le silence est interrompu par le résonnement des cloches, dont la mélodie est si solennelle à cette heure inaccoutumée. Leur son un peu voilé, moins éclatant qu’il ne l’est pendant le jour, annonce l’approche mystérieuse d’un Dieu. C’est dans un berceau, sous les traits de l’enfance, et non à travers l’épaisse fumée d’un nuage terrible comme au Sinaï, qu’il se manifeste. On n’entend pas de foudres mugir ; les éclairs ne sillonnent pas les nuages ; la lune, symbole de la suave beauté que Marie emprunte au divin Soleil, répand au loin sa mystérieuse clarté sur notre route. L’armée des astres scintille au firmament ; et tout à l’heure se lèvera l’Etoile qui doit conduire, d’ici à peu de jours, les Mages à la Crèche de l’Enfant-Dieu.

Nous touchons enfin le seuil de l’Église. La lumière des lampes et des flambeaux qui l’éclairent déborde jusque sous le portique. A la vue de ces feux qui rendent plus splendide encore la décoration de la maison de Dieu, nous nous rappelons le mot de Clovis entrant le même jour, à cette même heure, dans la Basilique de Reims où il devait être régénéré : « Mon Père, s’écria le « Sicambre ébloui , et agité d’une émotion « inconnue, est-ce là le royaume que vous m’avez « promis ? » — « Non, mon Fils, répondit l’apôtre des Francs, ce n’est que l’entrée du chemin qui doit t’y conduire. »

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LES MATINES DE NOËL.

L’Église ouvre l’Office par la supplication matutinale. Vient ensuite, avec son glorieux refrain qui annonce la Nativité du Christ, le Cantique invitatoire par lequel, chaque matin, l’Église convie ses enfants à venir adorer le Seigneur. Cette nuit, ce sont les Anges eux-mêmes qui nous appellent à la crèche de notre Rédempteur. Écoutons leurs voix à travers celles de l’Église et du Roi prophète.

Invitatoire.
Christus natus est nobis : * Veníte, adorémus.Le Christ nous est né : * Venez, adorons-le.

Après l’Invitatoire, l’Église entonne l’Hymne touchante que saint Ambroise a composée pour la naissance du Sauveur, et qui a déjà été chantée aux premières Vêpres. Offrons-la de nouveau à notre libérateur, et goûtons-en de plus en plus la merveilleuse onction.

Ces préludes étant accomplis, commence le solennel Office de la nuit. Il est divisé en trois Veilles, ou Nocturnes, composées chacune de trois Psaumes, de trois lectures appelées Leçons, et de trois Répons en manière d’intermèdes. Le troisième Nocturne cependant n’a, à proprement parler, que deux Répons ; en place du troisième on chante le Te Deum. Les interprètes mystiques de la Liturgie ont reconnu des symboles dans ces trois Nocturnes des Matines de Noël. Le premier signifie le temps qui s’est écoulé pour le genre humain, avant la Loi écrite que Dieu donna à Moïse. Au moyen âge, durant ce Nocturne, l’autel était couvert d’un voile noir, à cause de la condamnation qui fut prononcée contre l’homme pécheur, et de la grande distance qui, à cette époque, séparait le genre humain de son libérateur. Le second Nocturne signifie le temps qui s’est écoulé sous la Loi écrite, et durant ce Nocturne, l’autel était couvert d’un voile blanc ; parce que, sous la Loi, les hommes recevaient une plus grande lumière au moyen des figures de l’Ancien Testament et des oracles prophétiques. Enfin, le troisième signifie le temps de la Loi de grâce, et durant ce Nocturne, l’autel était couvert d’un voile couleur de pourpre, pour signifier l’amour de l’Époux et de l’Épouse, dans cette union ineffable que le Fils de Dieu est venu contracter avec nos âmes.

PREMIER NOCTURNE.

Le premier Psaume des Matines de Noël célèbre la royauté de l’Enfant qui va naître. Toutes les nations lui seront données en héritage, et un jour il viendra juger ces rois qui bientôt vont menacer son berceau. Il est le Fils éternel du Père qui l’a engendré au jour de l’éternité, et qui le manifeste durant cette nuit aux veux du monde.

Le second Psaume chante la beauté des cieux durant la nuit, et relève le magnifique témoignage que rend à la grandeur de Dieu l’innombrable multitude des étoiles. Il passe bientôt à la louange du soleil, dont le lever radieux est semblable à celui de l’Époux sortant de la chambre nuptiale. Ce soleil est le divin Emmanuel ; le sein de Marie est son sanctuaire. Aujourd’hui il ouvre sa course, partant des extrémités de l’abaissement, pour s’élever ensuite au faîte de la gloire. Adorons-le dans son humilité, et humilions-nous avec lui. Il est le législateur et la Loi ; il est notre joie et notre lumière ; il est notre aide et notre Rédempteur : aimons-le et soumettons-nous à lui.

Le troisième Psaume nous montre le Christ vainqueur marchant à la conquête du monde. Sa beauté et sa douceur sont égales à sa vérité et à sa justice ; nul ne pourra résister à la puissance de son amour. A sa droite paraît la Reine du monde, l’auguste Marie, dont le Seigneur a aimé la beauté, et dont la virginité féconde a enfanté toutes ces âmes pures et consacrées qui suivront à jamais l’Agneau. Célébrons, en ce sublime cantique, l’ineffable dignité de notre grand Roi et les doux attraits de notre incomparable Reine.

Les Leçons du premier Nocturne sont tirées du Prophète Isaïe, que l’Église a lu pendant tout l’Avent. Les Répons qui coupent les Leçons aident les fidèles à se livrer à la joie que la lecture des divins oracles fait naître en eux. à cette heure même où ils vont s’accomplir.

DEUXIÈME NOCTURNE.

Le quatrième Psaume des Matines de Noël est un chant de gloire sur l’Église chrétienne, qui commence aujourd’hui et rassemble dans l’étable de Bethléhem les prémices des croyants, dans la personne des bergers. Cette nouvelle Sion qui portera la Cité de Dieu s’élève du côté de l’Aquilon, pour marquer qu’elle sera ouverte aux Gentils. En vain les princes de la terre chercheront, dans leur orgueil et dans leurs calculs, à la renverser. Dieu, qui l’a fondée, la fera triompher ; et seule, elle survivra, dans une jeunesse immortelle, à tous les empires et à toutes les persécutions.

Le cinquième Psaume prophétise le règne pacifique du Fils de David qui vient racheter le faible, et briser l’oppresseur. Sa venue est douce et silencieuse, comme celle de la rosée. C’est cette nuit même que le sein virginal de Marie nous le produit. Il est cette pluie annoncée par les prophètes à la terre haletante. Son règne sera glorieux et éternel. Bientôt les rois se présenteront à ses pieds avec For de l’Arabie et l’encens de Saba. Lui, en retour, donnera à son peuple, pour le nourrir, le pur froment de son corps, et l’Église sera toujours Bethléhem, la Maison du Pain.

Le sixième Psaume est une effusion de reconnaissance pour la bénédiction que vient nous apporter l’Enfant divin. La colère du Tout-Puissant est tombée ; elle s’est dissipée à la vue d’un berceau qui contient Celui qui est à la fois Fils de Dieu et Fils de Marie. Écoutons au fond de nos cœurs la douce parole du nouveau-né. La justice et la paix se donnent le baiser : la Vérité incarnée habite maintenant la terre, et la justice du Père la contemple du haut du ciel.

On ouvre le livre qui contient les Sermons des anciens Pères. Saint Léon le Grand répétera aujourd’hui l’un de ces magnifiques discours qui faisaient tressaillir de joie l’Église romaine au cinquième siècle.

A Rome, si le chevalier auquel ont été destinés le casque et l’épée, qui ont été bénits avant les Matines par le Souverain Pontife, se trouve présent, c’est lui-même qui doit lire la cinquième Leçon, parce qu’il y est parlé du grand combat du Christ contre le démon, dans le glorieux mystère de l’Incarnation. Pendant le chant du Répons O Magnum mysterium, les maîtres des cérémonies le conduisent aux pieds du Pape, en présence duquel il tire son épée, en touche trois fois la terre avec la pointe, la brandit trois fois d’une façon martiale, et enfin l’essuie sur son bras gauche. Il est ensuite conduit au pupitre, ôte son casque, se revêt du pluvial par-dessus son armure, et lit enfin la Leçon. Telles sont les dispositions du Cérémonial de la sainte Église Romaine, dressé à une époque où la force matérielle aimait à s’incliner devant l’idée morale, où le chevalier bardé de fer attestait qu’il voulait marcher à la suite du Christ, vainqueur de Satan.

TROISIÈME NOCTURNE.

Le septième Psaume des Matines de Noël contient les derniers cris du peuple juif vers le Messie libérateur. Juda est tombé sous les coups de la puissance romaine ; le sceptre lui a été enlevé ; Jérusalem est souillée par la présence des Gentils : et cependant le Christ ne paraît pas encore. Le Psaume rappelle au Dieu de Jacob ses promesses, faites à David et à sa race : ce règne éternel qui tarde tant à s’ouvrir, ces oracles prophétiques dont le prompt accomplissement peut seul arrêter les blasphèmes superbes des Gentils. Mais l’heure a sonné ; la Judée et la Gentilité ont assez attendu : c’est à cette heure même que Jéhovah a résolu d’acquitter ses serments.

Le huitième Psaume célèbre avec enthousiasme la venue du Seigneur ; il invite tous les peuples à l’adorer, toute la nature à lui rendre hommage. Il vient régner, ce Messie ; il vient raffermir la création tout entière qui s’écroulait : chantons-lui un Cantique nouveau.

Le neuvième Psaume est aussi un Cantique nouveau à la louange du Sauveur qui arrive, et du Seigneur qui nous l’envoie. Jéhovah s’est ressouvenu de ses miséricordes, et bientôt la terre entière verra l’Emmanuel. Faisons retentir cette sainte nuit des bruyants concerts de l’enthousiasme, et prêtons une voix à toute la nature régénérée par l’heureux avènement de son auteur.

On lit ensuite successivement le commencement des divers textes du saint Évangile qui seront lus plus tard en entier, à chacune des trois Messes par lesquelles l’Église honore la Naissance du Sauveur. Les saints Docteurs commentent ces sublimes mystères dans leurs Homélies.

Le premier texte, qui est de saint Luc, est expliqué par saint Grégoire le Grand. Il rapporte l’édit de l’empereur Auguste pour le dénombrement de l’empire romain. Cette septième Leçon, suivant le Cérémonial de la sainte Église Romaine, doit être lue par l’Empereur lui-même, s’il se trouve à Rome, afin d’honorer la puissance impériale dont les décrets, appelant à Bethléhem Marie et Joseph, procurèrent l’accomplissement des volontés du Très-Haut, manifestées par les Prophètes. L’Empereur est conduit devant le Pape, comme le chevalier qui a chanté la cinquième Leçon ; on le revêt du pluvial ; deux Cardinaux-Diacres lui ceignent l’épée et l’accompagnent au pupitre. La Leçon étant lue, l’Empereur se présente de nouveau devant le Pontife et lui baise le pied, comme au Vicaire du Christ qu’il vient d’annoncer. Ce cérémonial fut encore observé, en 1468, par l’Empereur Frédéric III, en présence du Pape Paul II.

Le second texte de l’Évangile, qui fait le sujet de la huitième Leçon, est encore emprunté à saint Luc, et il est commenté par saint Ambroise. C’est le récit de la venue des bergers à l’étable.

Le troisième texte de l’Évangile, qui fait le sujet de la neuvième Leçon, est le commencement de l’Évangile de saint Jean, et il est expliqué par saint Augustin. C’est la génération éternelle du Verbe.

Après le Cantique d’action de grâces, l’Église clôt l’Office des Matines par l’raison qui résume tous ses vœux dans cette nouvelle Nativité du Fils unique de Dieu.

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A LA MESSE DE MINUIT.

Il est temps, maintenant, d’offrir le grand Sacrifice, et d’appeler l’Emmanuel : lui seul peut acquitter dignement envers son Père la dette de reconnaissance du genre humain. Sur notre autel, comme au sein de la crèche, il intercédera pour nous ; nous l’approcherons avec amour, et il se donnera à nous.

Mais telle est la grandeur du Mystère de ce jour, que l’Église ne se bornera pas à offrir un seul Sacrifice. L’arrivée d’un don si précieux et si longtemps attendu mérite d’être reconnue par des hommages nouveaux. Dieu le Père donne son Fils à la terre ; l’Esprit d’amour opère cette merveille : il convient que la terre renvoie à la glorieuse Trinité l’hommage d’un triple Sacrifice.

De plus, Celui qui naît aujourd’hui n’est-il pas manifesté dans trois Naissances ? Il naît, cette nuit, de la Vierge bénie ; il va naître, par sa grâce, dans les cœurs des bergers qui sont les prémices de toute la chrétienté ; il naît éternellement du sein de son Père, dans les splendeurs des Saints : cette triple naissance doit être honorée par un triple hommage.

La première Messe honore la Naissance selon la chair. Les trois Naissances sont autant d’effusions de la divine lumière ; or, voici l’heure où le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande lumière, et où le jour s’est levé sur ceux qui habitaient la région des ombres de la mort. En dehors du temple saint qui nous réunit, la nuit est profonde : nuit matérielle, par l’absence du soleil ; nuit spirituelle, à cause des péchés des hommes qui dorment dans l’oubli de Dieu, ou veillent pour le crime. A Bethléhem, autour de l’étable, dans la cité, il fait sombre ; et les hommes qui n’ont pas trouvé de place pour l’Hôte divin, reposent dans une paix grossière ; mais ils ne seront point réveillés par le concert des Anges.

Cependant, à l’heure de minuit, la Vierge a senti que le moment suprême est arrivé. Son cœur maternel est tout à coup inondé de délices inconnues ; il se fond dans l’extase de l’amour. Soudain, franchissant par sa toute-puissance les barrières du sein maternel, comme il pénétrera un jour la pierre du sépulcre, le Fils de Dieu, Fils de Marie, apparaît étendu sur le sol, sous les yeux de sa mère, vers laquelle il tend ses bras. Le rayon du soleil ne franchit pas avec plus de vitesse le pur cristal qui ne saurait l’arrêter. La Vierge-Mère adore cet enfant divin qui lui sourit ; elle ose le presser contre son cœur ; elle l’enveloppe des langes qu’elle lui a préparés ; elle le couche dans la crèche. Le fidèle Joseph adore avec elle ; les saints Anges, selon la prophétie de David, rendent leurs profonds hommages à leur Créateur, dans ce moment de son entrée sur cette terre. Le ciel est ouvert au-dessus de l’étable, et les premiers vœux du Dieu nouveau-né montent vers le Père des siècles ; ses premiers cris, ses doux vagissements arrivent à l’oreille du Dieu offensé, et préparent déjà le salut du monde. Au même moment, la pompe du Sacrifice attire tous les regards des fidèles vers l’autel ; les ministres sacrés s’ébranlent, le prêtre sacrificateur est arrivé aux degrés du sanctuaire. Cependant le chœur chante le cantique d’entrée, l’Introït. C’est Dieu même qui parle ; il dit à son Fils qu’il l’a engendré aujourd’hui. En vain, les nations frémiront dans leur impatience de son joug ; cet enfant les domptera, et il régnera ; car il est le Fils de Dieu.

Le chant du Kyrie eleison prélude à l’Hymne Angélique, qui éclate bientôt par ces sublimes paroles : Gloria in excelsis Deo, et in terra pax hominibus bonae voluntatis ! Unissons nos voix et nos cœurs à cet ineffable concert de la milice céleste. Gloire à Dieu ! paix aux hommes ! Les Anges, nos frères, ont entonné ce cantique ; ils sont là autour de l’autel, comme autour de la crèche, et ils chantent notre bonheur. Ils adorent cette justice qui n’a pas donné de rédempteur à leurs frères tombés, et qui nous envoie pour libérateur le propre Fils de Dieu. Ils glorifient cet abaissement si plein d’amour dans Celui qui a fait l’ange et l’homme, et qui s’incline vers ce qu’il y a de plus faible. Ils nous prêtent leurs voix célestes pour rendre grâces à Celui qui, par un si doux et si puissant mystère, nous appelle, nous humbles créatures humaines, à remplir un jour, dans les chœurs angéliques, les places laissées vacantes par la chute des esprits rebelles. Anges et mortels, Église du ciel, Église de la terre, chantons la gloire de Dieu, la paix donnée aux hommes ; et plus le Fils de l’Eternel s’abaisse pour nous apporter de si grands biens, plus ardemment devons-nous chanter d’une voix : Solus Sanctus, solus Dominus, solus Altissimus, Jesu Christe ! Seul Saint, seul Seigneur, seul Très-Haut, Jésus-Christ !

La Collecte vient ensuite réunir tous les vœux des fidèles.

ÉPÎTRE.

Il a donc enfin apparu, dans sa grâce et sa miséricorde, ce Dieu Sauveur qui seul pouvait nous arracher aux œuvres de la mort, et nous rendre la vie. Il se montre à tous les hommes, en ce moment même, dans l’étroit réduit de la crèche, et sous les langes de l’enfance. La voilà, cette béatitude que nous attendions de la visite d’un Dieu sur la terre ; purifions nos cœurs, rendons-nous agréables à ses yeux : car s’il est enfant, l’Apôtre vient de nous dire qu’il est aussi le grand Dieu, le Seigneur dont la naissance éternelle est avant tous les temps. Chantons sa gloire avec les saints Anges et avec l’Église.

ÉVANGILE.

Nous aussi, ô divin Enfant, nous joignons nos voix à celles des Anges, et nous chantons : Gloire à Dieu ! paix aux hommes ! Cet ineffable récit de votre naissance attendrit nos cœurs, et fait couler nos larmes. Nous vous avons accompagné dans le voyage de Nazareth à Bethléhem, nous avons suivi tous les pas de Marie et de Joseph, dans le cours de cette longue route ; nous avons veillé, durant cette sainte nuit, attendant l’heureux moment qui vous montre à nos regards. Soyez loué, ô Jésus, pour tant de miséricorde : soyez aimé, pour tant d’amour. Nos yeux ne peuvent se détacher de cette heureuse crèche qui contient notre salut. Nous vous y reconnaissons tel que vous ont dépeint à nos espérances les saints Prophètes, dont votre Église nous a remis, cette nuit même, les divins oracles sous les yeux. Vous êtes le grand Dieu, le Roi pacifique, l’Époux céleste de nos âmes ; vous êtes notre Paix, notre Sauveur, notre Pain de vie. Que vous offrirons-nous, à cette heure, sinon cette bonne volonté que nous recommandent vos saints Anges ? Formez-la en nous ; nourrissez-la, afin que nous méritions de devenir vos frères par la grâce, comme nous le sommes désormais par la nature humaine. Mais vous faites plus encore dans ce mystère, ô Verbe incarné ! Vous nous y rendez, comme parle votre Apôtre, participants de cette nature divine que vos abaissements ne vous ont point fait perdre. Dans l’ordre de la création, vous nous avez placés au-dessous des Anges ; dans votre incarnation, vous nous faites héritiers de Dieu, et vos propres cohéritiers. Que nos péchés et nos faiblesses ne nous fassent donc pas descendre de ces hauteurs auxquelles vous nous élevez aujourd’hui.

Après l’Évangile, l’Église chante en triomphe le glorieux Symbole de la foi, dans lequel sont racontés tous les mystères de l’Homme-Dieu A ces paroles : Et incarnatus est de Spiritu Sancto ex Maria Virgine, et HOMO FACTUS EST, adorez profondément le grand Dieu qui a pris la forme de sa créature, et rendez-lui par vos plus humbles respects cette gloire dont il se dépouille pour vous. Aux trois Messes d’aujourd’hui, lorsque le chœur est arrivé à ces paroles dans le chant du Symbole, le Prêtre se lève de son siège, et vient rendre gloire, à genoux, au pied de l’autel. Unissez en ce moment vos adorations à celles de toute l’Église représentée par le sacrificateur.

Pendant l’offrande du pain et du vin, l’Église célèbre la joie du ciel et de la terre pour l’arrivée du Seigneur. Encore un peu de temps, et sur cet autel qui ne porte encore que le pain et le vin, nous posséderons le corps et le sang de notre Emmanuel.

La Préface vient ensuite réunir les actions de grâces de tous les fidèles, et se termine par l’acclamation au Seigneur trois fois Saint. Au moment de l’élévation des sacrés Mystères, au sein de ce silence religieux durant lequel le Verbe divin descend sur l’autel, ne voyez plus que la crèche de l’Enfant qui tend ses bras vers son Père et vous offre ses caresses, et Marie qui l’adore avec un amour de mère, et Joseph qui verse des pleurs de tendresse, et les saints Anges qui s’anéantissent dans l’étonnement. Donnez votre cœur au nouveau-né, afin qu’il y inspire tous ces sentiments ; demandez lui de venir en vous, et faites-lui place au-dessus de toutes vos affections.

Après la Communion, l’Église, qui vient de s’unir au Dieu-Enfant par la participation de ses Mystères, chante encore une fois la gloire de l’éternelle génération de ce Verbe divin qui est sorti du sein de son Père avant toute créature, et qui, cette nuit, a apparu au monde avant le lever de l’étoile du matin.

La sainte Église conclut les supplications de ce premier Sacrifice, en demandant la grâce d’une indissoluble union avec le Sauveur qui a daigné apparaître.

La nuit miraculeuse poursuit son cours ; le chant du coq se fait entendre. Bientôt l’heure sera venue d’offrir le second Sacrifice, qui doit sanctifier l’aurore. Chaque jour, l’Église est en prière à ce moment qui précède le lever du soleil, et qui rappelle si vivement le mystère du Verbe divin descendu pour illuminer le monde. Cet Office est tout entier consacré à la louange et à la jubilation ; et, pour cette raison, il a reçu le nom de Laudes. Aujourd’hui l’Église l’anticipe, afin de réserver pour l’instant où l’aurore paraîtra au ciel un sacrifice de louange plus complet, plus divin, l’Hostie Eucharistique qui acquitte toutes les dettes de la terre.

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LES LAUDES DE NOËL.

L’Office des Laudes est aussi solennel que celui des Vêpres, et présente avec lui de grandes analogies. L’un et l’autre rappellent magnifiquement le divin Soleil de justice, dont les Laudes représentent le lever glorieux, tandis que les Vêpres, nous montrant l’astre du jour à son couchant et la nuit qui arrive avec ses ombres, engagent nos cœurs à soupirer après le jour éternel qui n’aura point de déclin, et dont l’Agneau est l’immortel flambeau. Les Laudes sont l’encens du matin, comme les Vêpres sont l’encens du soir : les mystères de la journée liturgique s’accomplissent entre ces deux termes solennels.

Le premier Psaume des Laudes nous montre le Seigneur dans sa force et son infinie grandeur. Sa naissance merveilleuse vient raffermir la terre ébranlée. Il naît dans le temps ; mais il est avant les siècles. La voix des grandes eaux est imposante ; mais la puissance d’Emmanuel est plus irrésistible que l’Océan dans ses élancements. Marchons en sa présence, dans une sainteté digne de sa Maison qu’il est venu nous ouvrir.

Le Psaume suivant convoque tous les habitants de la terre à entrer dans la maison du Seigneur, cette Bethléhem où éclate en ce moment sa présence. Il est le souverain Pasteur, et nous sommes ses brebis. Bien qu’il soit le Dieu fort, il est doux et miséricordieux : célébrons sa venue dans l’allégresse et la reconnaissance.

Les deux Psaumes suivants, que l’Église réunit en un seul [71], sont le cri de l’âme fidèle vers le Seigneur, au moment où l’aurore paraît au ciel. Dès son réveil, le chrétien a soif du grand Dieu qui l’a créé et qui l’a délivré de ses ennemis. A l’heure où nous sommes, ce Dieu plein de miséricorde est devant nous, dans son berceau ; il vient nous nourrir de sa substance : réjouissons-nous donc en lui. Bientôt, le soleil paraîtra au ciel ; mais déjà l’Agneau, Soleil de justice, nous illumine de ses doux rayons. Qu’il daigne épancher sa lumière sur toutes les nations ; que la terre le bénisse, ce fruit divin qu’elle a produit.

Le Cantique, dans lequel les trois enfants de la fournaise de Babylone appelaient toutes les créatures de Dieu à bénir son Nom, est chanté par l’Église dans toutes les solennités, à l’Office des Laudes. Il prête une voix à toute la nature, et convie l’œuvre de Dieu tout entière à louer son auteur : n’est-il pas juste que les cieux et la terre s’unissent aujourd’hui pour rendre hommage au grand Dieu qui vient, par sa présence, relever son œuvre tombée par le péché ?

Ces trois derniers Psaumes que l’Église réunit en un seul [72], sont aussi les derniers du Psautier. Ils renferment la louange du Seigneur, et convoquent toutes les créatures à le célébrer. Le premier offre un grand rapport avec le Cantique des trois enfants ; le deuxième convie les Saints à chanter le Seigneur qui les a glorifiés et associés à ses justices ; le troisième invite tout ce qui respire à former, en l’honneur de l’Emmanuel, le plus brillant et le plus harmonieux concert.

Le Capitule qui vient ensuite est le début de l’Épître de saint Paul aux Hébreux ; nous le retrouverons avec la suite, à la Messe du Jour.

Sédulius, poète chrétien du IV siècle, est l’auteur de la gracieuse Hymne qui suit : A solis ortus cardine

On entonne ensuite le Cantique de Zacharie, par lequel l’Église salue, chaque matin, le lever du soleil. Il célèbre la visite du Seigneur, l’accomplissement des promesses de Dieu, l’apparition du divin Orient au milieu de nos ténèbres.

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LA MESSE DE L’AURORE.

L’Office des Laudes est achevé, les cantiques de réjouissance par lesquels l’Église remercie le Père des siècles de ce qu’il a fait lever son Soleil de justice sont épuisés : il est temps d’offrir le second Sacrifice, le Sacrifice de l’aurore. La sainte Église a glorifié, par la première Messe, la naissance temporelle du Verbe, selon la chair ; à cette heure, elle va honorer une seconde naissance du même Fils de Dieu, naissance de grâce et de miséricorde, celle qui s’accomplit dans le cœur du chrétien fidèle.

Voici que, dans ce moment même, des bergers invités par les saints Anges arrivent en hâte à Bethléhem ; ils se pressent dans l’étable, trop étroite pour contenir leur foule. Dociles à l’avertissement du ciel, ils sont venus reconnaître le Sauveur qu’on leur a dit être né pour eux. Ils trouvent toutes choses telles que les Anges les leur ont annoncées. Qui pourrait dire la joie de leur cœur, la simplicité de leur foi ? Ils ne s’étonnent point de rencontrer, sous les livrées d’une pauvreté pareille à la leur, Celui dont la naissance émeut les Anges mêmes. Leurs cœurs ont tout compris ; ils adorent, ils aiment cet Enfant. Déjà ils sont chrétiens : l’Église chrétienne commence en eux ; le mystère d’un Dieu abaissé est reçu dans les cœurs humbles. Hérode cherchera à faire périr l’Enfant ; la Synagogue frémira ; ses docteurs s’élèveront contre Dieu et contre son Christ ; ils mettront à mort le libérateur d’Israël ; mais la foi demeurera ferme et inébranlable dans l’âme des bergers, en attendant que les sages et les puissants s’abaissent à leur tour devant la crèche et la croix.

Que s’est-il donc passé au cœur de ces hommes simples ? Le Christ y est né, il y habite désormais par la foi et l’amour. Ils sont nos pères dans l’Église ; et c’est à nous de leur devenir semblables. Appelons donc, à notre tour, le divin Enfant dans nos âmes ; faisons-lui place, et que rien ne lui ferme plus l’entrée de nos cœurs. C’est pour nous aussi que parlent les Anges, c’est à nous qu’ils annoncent l’heureuse nouvelle ; le bienfait ne doit pas s’arrêter aux seuls habitants des campagnes de Bethléhem. Or, afin d’honorer le mystère de la venue silencieuse du Sauveur dans les âmes, le Prêtre va tout à l’heure remonter au saint autel, et présenter, pour la seconde fois, l’Agneau sans tache aux regards du Père céleste qui l’envoie.

Que nos yeux soient donc fixés sur l’autel, comme ceux des bergers sur la crèche ; cherchons-y, comme eux, l’Enfant nouveau-né, enveloppé de langes. En entrant dans l’étable, ils ignoraient encore Celui qu’ils allaient voir ; mais leurs cœurs étaient préparés. Tout à coup ils l’aperçoivent, et leurs yeux s’arrêtent sur ce divin Soleil. Jésus, du fond de la crèche, leur envoie un regard de son amour ; ils sont illuminés, et le jour se fait dans leurs cœurs. Méritons qu’elle s’accomplisse en nous, cette parole du prince des Apôtres : « La lumière luit dans un lieu obscur, jusqu’à ce que le jour vienne à briller, et que l’étoile du matin se lève dans vos cœurs. » [73]

Nous y sommes arrivés, à cette aurore bénie ; il a paru, le divin Orient que nous attendions, et il ne se couchera plus sur notre vie : car nous voulons craindre par-dessus tout la nuit du péché dont il nous délivre. Nous sommes les enfants de la lumière et les fils du jour [74] ; nous ne connaîtrons plus le sommeil de la mort ; mais nous veillerons toujours, nous souvenant que les bergers veillaient quand l’Ange leur parla, et que le ciel s’ouvrit sur leurs têtes. Tous les chants de cette Messe de l’Aurore vont nous redire la splendeur du Soleil de justice ; goûtons-les comme des captifs longtemps enfermés dans une prison ténébreuse, aux yeux desquels une douce lumière vient rendre la vue. 11 resplendit, au fond de la crèche, ce Dieu de lumière ; ses divins rayons embellissent encore les augustes traits de la Vierge-Mère qui le contemple avec tant d’amour ; le visage vénérable de Joseph en reçoit aussi un éclat nouveau ; mais ces rayons ne s’arrêtent pas dans l’étroite enceinte de la grotte. S’ils laissent dans ses ténèbres méritées l’ingrate Bethléhem, ils s’élancent par le monde entier, et allument dans des millions de cœurs un amour ineffable pour cette Lumière d’en haut qui arrache l’homme à ses erreurs et à ses passions, et l’élève vers la sublime fin pour laquelle il a été créé.

Mais, à ce moment, la sainte Église, au milieu de tous ces mystères du Dieu incarné, nous présente, au sein même de l’humanité, un autre objet d’admiration et d’allégresse. Au souvenir si cher et si glorieux de la Naissance de l’Emmanuel, elle unit, dans ce Sacrifice de l’Aurore, la mémoire solennelle d’une de ces âmes courageuses qui ont su conserver la Lumière du Christ, en dépit de tous les assauts des ténèbres. Elle honore, à cette heure même, une pieuse veuve romaine qui, en ce jour de la naissance du Rédempteur, naquit à la vie céleste, par la croix et la souffrance, sous la persécution de Dioclétien.

Anastasie, épouse d’un Romain nommé Publius, eut beaucoup à souffrir de la brutalité de ce païen, qui s’irritait de sa générosité envers les serviteurs de Dieu. Après de cruels traitements endurés avec patience, elle fut enfin affranchie du joug qui l’accablait ; mais s’étant vouée à la visite et au soulagement des confesseurs de la foi qui remplissaient les prisons de Rome durant cette affreuse persécution, elle fut arrêtée elle-même comme chrétienne, liée à un poteau et brûlée vive. Son Église, à Rome, bâtie sur l’emplacement de sa maison, est le lieu de la Station pour la Messe de l’Aurore ; et autrefois le Souverain Pontife y venait célébrer cette seconde Messe. Léon XII l’a encore pratiqué en ce siècle.

Admirons ici la délicatesse maternelle de la sainte Église, qui, voulant associer le nom d’une sainte à la gloire de cette solennité dans laquelle triomphe si merveilleusement la virginité de Marie, a choisi de préférence une sainte veuve, afin de montrer que l’état du mariage, quoique inférieur en sainteté et en dignité à celui de la continence, n’est cependant pas déshérité des bénédictions que le divin enfantement a méritées à la terre. En ce même jour, une vierge, sainte Eugénie, a souffert à Rome un cruel et courageux martyre, sous la persécution de Gallien ; cependant, l’épouse de Publius, Anastasie, a été préférée. Cette attention, si pleine d’intelligence maternelle de la part de l’Église, rappelle tout naturellement ces belles paroles de saint Augustin dans son IXe Sermon pour la fête de Noël :

« Triomphez, vierges du Christ : la Mère du Christ est votre compagne. Vous n’avez pas enfanté le Christ ; mais, pour le Christ, vous avez renoncé aux douceurs delà maternité ; Celui qui n’est pas né de vous, est né pour vous. Cependant, si vous vous souvenez de sa parole, n’êtes-vous pas vous-mêmes ses propres mères, puisque vous faites la volonté de son Père ? car il a dit : Celui qui fait la volonté de mon Père, celui-là est mon frère, ma sœur, ma mère.

« Triomphez, veuves du Christ ; car vous avez voué une sainte continence à Celui qui a rendu féconde la virginité. Triomphez aussi, chasteté nuptiale, vous toutes qui vivez dans la fidélité à vos époux ; ce que vous perdez selon la chair, vous le gardez dans votre cœur. Que votre conscience demeure vierge, par cette foi qui fait que l’Église est vierge tout entière. Le Christ est Vérité, Paix et Justice : concevez-le par la foi, enfantez-le par les œuvres ; ce que le sein de Marie a fait pour la chair du Christ, que votre cœur le fasse pour la loi du Christ. Comment n’auriez-vous pas votre part dans l’enfantement de la Vierge, puisque vous êtes les membres du Christ ? Marie a enfanté Celui qui est le Chef ; l’Église vous a enfantées, vous qui êtes les membres. Car elle aussi est mère et vierge : mère par ses entrailles de charité, vierge par l’intégrité de la foi et de la piété. »

Mais il est temps de lever les yeux vers le saint autel, où le Sacrifice commence. L’Introït célèbre le lever du divin Soleil. L’éclat de son aurore annonce déjà les splendeurs de son midi. Il a en partage la force et la beauté ; ils s’est armé pour sa victoire, et son nom est le Prince de la Paix.

La prière de l’Église, en cette Messe de l’Aurore, est pour implorer l’effusion des rayons du Soleil de justice sur lésâmes, afin qu’elles deviennent fécondes en œuvres de lumière, et que les anciennes ténèbres ne reparaissent plus.

ÉPÎTRE.

Le Soleil qui s’est levé sur nous, c’est un Dieu Sauveur, dans toute sa miséricorde. Nous étions loin de Dieu, dans les ombres de la mort ; il a fallu que les divins rayons descendissent jusqu’au fond de l’abîme où le péché nous avait précipités ; et voilà que nous en sortons régénérés, justifiés, héritiers de la vie éternelle. Qui nous séparera maintenant de l’amour de cet Enfant ? Voudrions-nous rendre inutiles les merveilles d’un amour si généreux, et redevenir encore les esclaves des ténèbres de la mort ? Gardons bien plutôt l’espérance de la vie éternelle, à laquelle de si hauts mystères nous ont initiés.

ÉVANGILE.

Imitons l’empressement des bergers à aller trouver le nouveau-né. A peine ont-ils entendu la parole de l’Ange, qu’ils partent sans aucun retard, et se rendent à l’étable. Arrivés en présence de l’Enfant, leurs cœurs déjà préparés le reconnaissent ; et Jésus, par sa grâce, prend naissance en eux. Ils se réjouissent d’être petits et pauvres comme lui ; ils sentent qu’ils lui sont unis désormais, et toute leur conduite va rendre témoignage du changement qui s’est opéré dans leur vie. En effet, ils ne se taisent pas, ils parlent de l’Enfant, ils s’en font les apôtres ; et leur parole ravit d’admiration ceux qui les entendent. Glorifions avec eux le grand Dieu qui, non content de nous appeler à son admirable lumière, en a placé le foyer dans notre cœur, en s’unissant à lui. Conservons chèrement en nous le souvenir des mystères de cette grande nuit, à l’exemple de Marie, qui repasse sans cesse dans son très saint Cœur les simples et sublimes événements qui s’accomplissent par elle et en elle. Pendant l’offrande des dons sacrés, l’Église relève la puissance de l’Emmanuel, qui, pour raffermir ce monde déchu, s’est abaissé jusqu’à n’avoir, pour former sa cour, que d’humbles bergers, mais qui n’en est pas moins assis sur son trône de gloire et de divinité, à jamais, et avant tous les siècles.

Après la communion du Prêtre et du peuple, la sainte Église, tout illuminée de la douce lumière de son Époux auquel elle vient de s’unir, s’applique à elle-même ces paroles du Prophète Zacharie annonçant la venue du Roi Sauveur.

Le second Sacrifice achevé, et la Naissance de grâce ayant été célébrée par cette nouvelle immolation de l’immortelle victime, les fidèles se retirent de l’église, et vont réparer leurs forces par le sommeil, en attendant la célébration du troisième Sacrifice.

Dans l’étable de Bethléhem, Marie et Joseph veillent auprès de la crèche. La Vierge-Mère prend respectueusement dans ses bras le nouveau-né et lui présente le sein. Le Fils de l’Eternel, comme un simple mortel, s’abreuve à cette source de la vie. Saint Éphrem essaye de nous initier aux sentiments qui se pressent alors dans l’âme de Marie, et il nous traduit ainsi son langage :

« Par quelle faveur ai-je enfanté Celui qui étant simple se multiplie partout, Celui que je tiens petit dans mes bras et qui est si grand, Celui qui est à moi ici tout entier, et qui tout entier est aussi en tous lieux ? Le jour où Gabriel descendit vers ma faiblesse, de servante que j’étais, je devins princesse. Toi, le Fils du Roi, tu fis de moi tout à coup la fille de ce Roi éternel. Humble esclave de ta divinité, je devins la mère de ton humanité, ô mon seigneur et mon fils ! De toute la descendance de David, tu es venu choisir cette pauvre jeune fille et tu l’as entraînée jusque dans les hauteurs du ciel où tu règnes. Oh ! quelle vue ! un enfant plus ancien que le monde ! son regard cherche le ciel ; ses lèvres ne s’ouvrent pas ; mais dans ce silence, c’est avec Dieu qu’il converse. Cet œil si ferme n’indique-t-il pas Celui dont la Providence gouverne le monde ? Et comment osé-je lui donner mon lait, à lui qui est la source de tous les êtres ? comment lui servirai-je la nourriture, à lui qui alimente le monde entier ? comment pourrai-je manier ces langes qui enveloppent Celui qui est revêtu de la lumière [75] ? »

Le même saint Docteur du IVe siècle nous montre saint Joseph remplissant auprès de l’Enfant divin les touchants devoirs du père. Il embrasse, dit-il, le nouveau-né, il lui prodigue ses caresses, et il sait que cet enfant est un Dieu. Hors de lui, il s’écrie : « D’où me vient cet honneur que le Fils du Très-Haut me soit ainsi donné pour fils ? O enfant, je fus alarmé, je le confesse, au sujet de ta mère : je songeais même à m’éloigner d’elle. L’ignorance où j’étais du mystère m’avait été un piège. En ta mère cependant résidait le trésor caché qui devait faire de moi le plus opulent des hommes. David mon aïeul ceignit le diadème royal, moi j’étais descendu jusqu’au sort de l’artisan ; mais la couronne que j’avais perdue est revenue à moi, lorsque, Seigneur des rois, tu daignes te reposer sur mon sein. [76] » Au milieu de ces colloques sublimes, la lumière du nouveau-né, devant laquelle pâlit celle du soleil qui se lave, remplit toujours la grotte et ses alentours ; mais, les bergers étant partis, les chants des Anges étant suspendus, le silence s’est fait dans ce mystérieux asile. En prenant notre repos sur notre couche, songeons au divin Enfant, et à cette première nuit qu’il passe dans son humble berceau. Pour se conformer aux nécessités de notre nature qu’il a adoptée, il clôt ses tendres paupières, et un sommeil volontaire vient parfois endormir ses sens ; mais, au milieu de ce sommeil, son cœur veille et s’offre sans cesse pour nous. Parfois aussi, il sourit à Marie qui tient ses yeux attachés sur lui avec un ineffable amour ; il prie son Père, il implore le pardon des hommes ; il expie leur orgueil par ses abaissements ; il se montre à nous comme un modèle de l’enfance que nous devons imiter. Prions-le de nous donner part aux grâces de son divin sommeil, afin que, après avoir dormi dans la paix, nous puissions nous réveiller dans sa grâce, et poursuivre avec fermeté notre marche dans la voie qui nous reste à parcourir.

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LA JOURNÉE DE NOËL.

Le son des cloches, qui annonce l’approche de la troisième Messe, de la Messe du Jour, est venu interrompre joyeusement notre sommeil. Elles semblent répéter, avec l’Église, ces belles paroles qui ont ouvert les chants de la longue veille de cette nuit : Le Christ nous est né ; venez, adorons-le !

Le soleil luit au ciel, non point avec les feux qu’il versera au solstice d’été ; mais sa lumière pâle n’annonce pas moins la victoire. Aujourd’hui, il a vaincu les ombres, et il monte dans le ciel comme un conquérant assuré du triomphe. Adorons, sous son emblème, le Soleil de Justice, Jésus notre doux Sauveur, qui débute aussi dans sa glorieuse carrière.

En attendant le moment de partir pour l’église, puisons l’aliment de notre prière matutinale dans les chants divers des Liturgies antiques. Tous sont pleins de joie et de tendresse ; tous célèbrent le triomphe de la lumière, l’amour du nouveau-né, la gloire de sa Mère.

Lisons d’abord ces gracieuses strophes de Prudence, le prince des poètes chrétiens, dans son Hymne qui a pour titre : VIII. Kal. Januarias.

HYMNE.
Pourquoi, abandonnant son cours si restreint naguère, le soleil remonte-t-il à l’horizon ? N’est-ce point que sur la terre est né le Christ, qui ouvre une voie plus large à la lumière ?
Oh ! quel pâle et fugitif éclat dans ces jours si prompts à s’enfuir ! Comme le ilambeau du jour, presque éclipsé, éteignait peu à peu ses vacillantes lueurs !
Aujourd’hui, que le ciel s’épanouisse dans sa joie ; que la terre, en son allégresse, tressaille : voici que, pas à pas, le jour remonte à ses plus brillantes phases.
C’est toi, c’est ta naissance, Enfant divin , que saluent les éléments inertes et aveugles ! C’est pour toi que le roc dompté fléchit, et couvre ses âpres flancs de verdure.
Déjà le miel coule à flots de la pierre ; déjà l’yeuse, de son tronc aride, distille les larmes odorantes de l’amôme ; déjà le baume naît sur les bruyères.
Qu’elle est sainte, ô Roi de l’éternité, cette crèche qui te sert de berceau, que les peuples et les siècles vénèrent, que même les animaux muets entourent avec sollicitude !

Entendons maintenant les diverses Églises, de l’Orient, plus voisines à commencer par celles des lieux où le grand événement s’accomplit. Voici d’abord l’Église de Syrie, ayant pour chantre saint Éphrem, qui entonne son Cantique :

Le Fils étant né, la lumière a brillé ; les ténèbres du monde se sont évanouies, et l’univers a été illuminé ; qu’il rende gloire à l’Enfant qui l’illumine.
Il est né du sein de la Vierge, et à sa vue les ombres se sont enfuies : les ténèbres de l’erreur étant dissipées par sa présence, tout l’univers a été dans la lumière : que l’univers le glorifie.

L’Église Arménienne fait à son tour entendre sa voix ; elle chante, dans l’action même du saint Sacrifice :

Une nouvelle fleur sort aujourd’hui de la tige de Jessé, et la fille de David enfante le Fils de Dieu.
La multitude des Anges et de la milice céleste descendant des cieux, avec le Roi Fils unique, chantaient et disaient : C’est ici le Fils de Dieu. Disons tous : Cieux, tressaillez ; fondements delà terre, réjouissez-vous : car le Dieu éternel a apparu sur la terre, et a conversé avec les hommes, pour sauver nos âmes.

L’Église Grecque, dans la pompe de son langage, s’écrie :

Venez , réjouissons-nous dans le Seigneur, célébrant le mystère de ce jour. Le mur de division a été renversé, le glaive de feu est détourné ; le Chérubin ne défend plus l’approche de l’arbre de vie. Et moi je deviens participant des délices du Paradis, d’où, par désobéissance, j’avais été chassé. L’image immuable du Père, le type de son éternité, prend la forme d’un esclave, naissant d’une Vierge-Mère, sans souffrir nul changement ; car il est demeuré ce qu’il était : Dieu véritable ; il a pris ce qu’il n’était pas, devenu homme par amour pour les hommes. Crions vers lui : O toi qui es né de la Vierge ! aie pitié de nous.

La sainte Église Romaine, par la bouche de saint Léon, dans son Sacramentaire, célèbre ainsi le mystère de la Lumière divine :

C’est une chose digne et juste, équitable et salutaire, de vous rendre grâces, ô Dieu éternel ! Car aujourd’hui, la lumière véritable, la lumière de notre Sauveur s’est levée et a manifesté toutes choses à notre intelligence et à notre vue ; et non seulement elle dirigera par sa splendeur nos pas dans la vie présente ; mais elle doit nous amener jusqu’à contempler la gloire même de votre immense Majesté.

La même sainte Église Romaine, dans le Sacramentaire de saint Gélase, fait cette demande au Père céleste qui nous a envoyé son Fils :

Dieu tout-puissant et éternel, qui avez consacré ce jour par l’incarnation de votre Verbe, et par l’enfantement de la bienheureuse Vierge, accordez à vos peuples, dans cette joyeuse solennité, de devenir vos enfants par l’adoption, comme ils sont rachetés par votre grâce.

Par l’organe de saint Grégoire le Grand, dans son Sacramentaire, la même sainte Église Romaine implore la Lumière du Christ pour ses enfants :

Faites, Dieu tout-puissant, que le Sauveur que vous nous envoyez en ce jour où les cieux renouvellent leur lumière, et qui descend en cette solennité pour le salut du monde, se lève à jamais en nos cœurs pour les régénérer.

L’Église de Milan, dans sa Liturgie Ambrosienne chante aussi la Lumière nouvelle et les joies de la Vierge-Mère :

Le Seigneur, par sa venue. a dissipé toutes les ombres de la nuit ; là où la lumière n’était pas, la splendeur s’est répandue, et le jour a paru.
Réjouissez-vous et tressaillez, ô vous, la joie des Anges ! réjouissez-vous, Vierge du Seigneur, allégresse des Prophètes. Réjouissez-vous, ô vous qui, à la parole de l’Ange, avez reçu en vous Celui qui est la joie du monde ! Réjouissez-vous, ô vous qui avez enfanté votre Créateur et votre Maître ! Réjouissez-vous d’avoir été trouvée digne d’être la Mère du Christ.

L’ancienne Église des Gaules épanche son allégresse dans ces joyeuses Antiennes, que l’Église Romaine lui emprunta pendant plusieurs siècles :

Aujourd’hui la Vierge immaculée nous a donné un Dieu, sous les membres délicats d’un enfant ; elle a eu l’honneur de l’allaiter. Adorons tous le Christ qui vient nous sauver.

Réjouissons-nous tous, ô fidèles ! Notre Sauveur est né en ce monde. Aujourd’hui a paru le rejeton de la Majesté sublime, et la pudeur de la mère est demeurée intacte.

O Dame du monde, fille de race royale, le Christ est sorti de votre sein, comme l’époux de la chambre nuptiale ; il est étendu dans la crèche, Celui qui régit les astres.

L’Église Gothique d’Espagne, dans son Bréviaire Mozarabe, salue, avec toutes les autres Églises, le lever du divin Soleil :

Aujourd’hui, la lumière du monde s’est levée ; aujourd’hui, le salut de la terre a brillé ; aujourd’hui, le Sauveur d’Israël est descendu des hauteurs du ciel pour délivrer tous les captifs que l’antique ennemi, le ravisseur, avait enchaînés par le péché du premier homme, et pour rendre, par sa grâce, la lumière aux intelligences aveugles et l’ouïe aux sourds. En réjouissance du bienfait opéré par ce grand mystère, les montagnes et les collines bondissent, et les éléments du monde, avec une joie ineffable, exécutent en ce jour une mélodie sublime. Nous aussi, d’une humble prière, nous implorons la clémence du miséricordieux Rédempteur ; enveloppés des ténèbres de nos péchés, nous le prions de nous purifier par cette acclamation de nos cœurs, afin que, sa présence se manifestant dans nos âmes, l’éclat de sa gloire s’accroisse de plus en plus en nous, avec la félicité qu’elle apporte, et que les joies du salut deviennent pour nous pleines de douceur, à jamais.

Terminons notre excursion pieuse dans les antiques Liturgies, par cette Antienne de l’Église d’Irlande , au septième siècle, que nous empruntons à l’Antiphonaire de Benchor, publié par Muratori. Elle célèbre aussi le triomphe de la lumière du Soleil, image du Christ naissant.

C’est aujourd’hui que la nuit commence à perdre son empire ; le jour croit, les ténèbres sont diminuées, la splendeur augmente, et les pertes que fait la nuit profitent au développement de la lumière.

Il en est temps, chrétiens ; montons à la maison de Dieu, et préparons-nous à célébrer le troisième Sacrifice. L’Église y prélude par le chant de l’Office de Tierce.

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LA MESSE DU JOUR.

Le mystère que l’Église honore, en cette troisième Messe, est la Naissance éternelle du Fils de Dieu au sein de son Père. Elle a célébré, à minuit, le Dieu-Homme naissant du sein de la Vierge dans l’étable ; à l’aurore, le divin Enfant prenant naissance dans le cœur des bergers ; en ce moment, il lui reste à contempler une naissance bien plus merveilleuse que les deux autres, une naissance dont la lumière éblouit les regards des Anges, et qui est elle-même l’éternel témoignage de la sublime fécondité de notre Dieu. Le Fils de Marie est aussi le Fils de Dieu ; notre devoir est de proclamer aujourd’hui la gloire de cette ineffable génération qui le produit consubstantiel à son Père, Dieu de Dieu, Lumière de Lumière. Elevons donc nos regards jusqu’à ce Verbe éternel qui était au commencement avec Dieu, et sans lequel Dieu n’a jamais été ; car il est la forme de sa substance et la splendeur de son éternelle vérité.

La sainte Église ouvre les chants du troisième Sacrifice par l’acclamation au Roi nouveau-né.

Elle célèbre la puissante principauté qu’il possède, en tant que Dieu, avant tous les temps, et qu’il recevra, comme homme, par le moyen de la Croix qui un jour doit charger ses épaules. Il est l’Ange du grand Conseil, c’est-à-dire l’envoyé du ciel pour accomplir le sublime dessein conçu par la glorieuse Trinité, de sauver l’homme par l’Incarnation et la Rédemption. Dans cet auguste Conseil, le Verbe a eu sa divine part ; et son dévouement à la gloire de son Père, joint à son amour pour les hommes, lui en fait prendre sur lui l’accomplissement.

L’Église demande, dans la Collecte, que la nouvelle Naissance que le Fils éternel de Dieu a daigné prendre dans le temps, ne soit pas privée de son effet, mais qu’elle obtienne notre délivrance.

ÉPÎTRE.

Le grand Apôtre, dans ce magnifique début de son Épître à ses anciens frères de la Synagogue, relève l’éternelle Naissance de l’Emmanuel. Pendant que nos yeux sont tendrement fixés sur le doux Enfant de la Crèche, il nous invite à les élever jusqu’à la suprême Lumière, au sein de laquelle le même Verbe qui daigne habiter retable de Bethlehem, entend le Père éternel lui dire : Vous êtes mon Fils, je vous ai engendré aujourd’hui ; et cet aujourd’hui est le jour de l’éternité, jour sans soir ni matin, sans lever ni couchant. Si la nature humaine qu’il daigne prendre dans le temps le place au-dessous des Anges, son élévation au-dessus d’eux est infinie par le titre et la qualité de Fils de Dieu qui lui appartiennent par essence. Il est Dieu, il est le Seigneur, et les changements ne l’atteignent pas. Enveloppé de langes, attaché à la croix, mourant dans les angoisses, selon son humanité, il reste impassible et immortel dans sa divinité ; car il a une Naissance éternelle.

ÉVANGILE.

Fils éternel de Dieu ! en présence de la crèche où vous daignez vous manifester aujourd’hui pour notre amour, nous confessons, dans les plus humbles adorations, votre éternité, votre toute-puissance, votre divinité. Dans le principe, vous étiez ; et vous étiez en Dieu, et vous étiez Dieu. Tout a été fait par vous, et nous sommes l’ouvrage de vos mains. O Lumière infinie ! ô Soleil de justice ! nous ne sommes que ténèbres ; éclairez-nous. Trop longtemps nous avons aimé ces ténèbres, et nous ne vous avons point compris ; pardonnez-nous notre erreur. Trop longtemps vous avez frappé à la porte de notre cœur, et nous ne vous avons pas ouvert. Aujourd’hui du moins, grâce aux admirables inventions de votre amour, nous vous avons reçu ; car, qui ne vous recevrait, Enfant divin, si doux, si plein de tendresse ? Mais, demeurez avec nous ; consommez cette nouvelle naissance que vous avez prise en nous. Nous ne voulons plus être ni du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu, par vous et en vous. Vous vous êtes fait chair, ô Verbe éternel ! afin que nous fussions nous-mêmes divinisés. Soutenez notre faible nature qui défaille en présence d’une si haute destinée. Vous naissez du Père, vous naissez de Marie, vous naissez dans nos cœurs : trois fois gloire à vous pour cette triple naissance, ô Fils de Dieu si miséricordieux dans votre divinité, si divin dans vos abaissements !

A l’Offrande, la sainte Église rappelle à l’Emmanuel que l’univers est son ouvrage ; car il a créé toutes choses. Les dons sont offerts, au milieu des nuages de l’encens. La pensée de l’Enfant d la Crèche domine toujours les sentiments de l’Église ; mais ses cantiques insistent sur la puissance et la grandeur du Dieu incarné.

Pendant la Communion, le chœur chante le bonheur de la terre qui a vu aujourd’hui son Sauveur, par la miséricorde du Verbe, devenu visible dans la chair, sans perdre rien de l’éclat de sa gloire. L’Église ensuite, par la bouche du Prêtre, implore pour ses enfants, nourris de la chair de l’Agneau virginal, la participation à l’immortalité du Christ, qui a daigné leur donner aujourd’hui les prémices d’une vie toute divine, en prenant lui-même une naissance humaine dans Bethléhem.

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LES SECONDES VÊPRES DE NOËL.

La louange du soir appelle les fidèles à la maison de Dieu, pour terminer saintement cette mémorable journée. Le soleil matériel avance sa course à grands pas ; mais le Soleil de justice ne s’éteindra pas dans les cœurs qui l’ont reçu. Allons nous joindre à la sainte Église et célébrer avec elle, par les chants du Roi-Prophète, le bonheur de la terre qui a enfanté son Sauveur, les grandeurs de ce nouveau-né, et les miséricordes qu’il nous apporte. Ne laissons pas refroidir nos cœurs ; le Christ est né en nous : que notre bouche le chante avec transport ; que nos vœux si admirablement formulés par la sainte Église, dans la divine Liturgie, montent vers lui purs et sincères.

Le premier Psaume des secondes Vêpres de Noël est celui qui ouvre l’Office du soir, le dimanche et dans toutes les solennités. Il célèbre la génération éternelle du Verbe, et prophétise ses souffrances et son triomphe.

Le second Psaume chante l’alliance que Dieu vient de contracter avec son peuple, la Rédemption qu’il lui envoie aujourd’hui. Le genre humain languissait dans sa misère ; le Dieu de miséricorde, fidèle à ses promesses, lui donne, en Bethléhem, celui qui est le Pain de vie, la nourriture céleste qui préserve de la mort.

Le troisième psaume chante la félicité du juste jour de la Naissance du Messie. Au sein des ténèbres, la Lumière de l’Emmanuel s’est levée tout à coup ; cette Lumière si douce et si radieuse, c’est le Seigneur de miséricorde. Elle illumine les cœurs droits ; malheur au pécheur qui la méprise !

Le quatrième Psaume exprime le cri de détresse que le genre humain, du fond de l’abîme de la dégradation, envoyait à son Libérateur. Mais ce cri était aussi un cri d’espérance ; car la parole de Dieu était engagée. Enfin, le Seigneur, dont la miséricorde est infinie, a daigné descendre, et notre Rédemption commence aujourd’hui.

Le cinquième Psaume chante l’Arche du Seigneur qui s’est reposée en Ephrata. Marie est l’Arche véritable dont l’autre n’était que la figure ; en elle le Seigneur a fait sa demeure ; elle a été le trône de sa Majesté. Qu’il se lève donc, le Seigneur, et qu’il prenne possession de son Église qui commence aujourd’hui en Bethléhem ; qu’il se lève et qu’il nous régisse avec Marie, la Reine de miséricorde. Désormais, il va habiter au milieu de nous ; il consolera toutes les douleurs, il rassasiera tous ceux qui ont faim d’un Pain immortel ; il honorera le Sacerdoce nouveau ; il brillera, comme un flambeau d’immuable vérité, dans son Église ; il triomphera de tous ses ennemis ; le diadème qui orne le front de cet Enfant ne tombera jamais, et tous les autres pâliront devant lui.

La grande journée a terminé son cours, et la nuit approche durant laquelle le sommeil achèvera de réparer les saintes fatigues que nous ont causées les veilles de la glorieuse Nativité. Avant de prendre notre repos, envoyons un souvenir pieux aux saints Martyrs dont l’Église a renouvelé la mémoire en ce jour dans le livre du Martyrologe. Dioclétien et ses collègues dans l’empire venaient de publier le fameux édit de persécution qui déclarait à l’Église la plus sanglante guerre qu’elle ait jamais subie. L’édit affiché à Nicomédie, résidence de l’empereur, avait été déchiré par un chrétien qui paya cet acte d’une sainte audace par un glorieux martyre. Les fidèles prêts à la lutte osèrent braver la puissance impériale, en continuant de fréquenter leur église condamnée à la démolition. On était arrivé au jour de Noël. Ils s’assemblèrent au nombre de plusieurs milliers dans le saint temple, afin d’y célébrer une dernière fois la Naissance du Rédempteur. A cette nouvelle, Dioclétien envoya un de ses officiers avec ordre de fermer les portes de l’église, et d’allumer aux quatre angles de l’édifice le feu qui devait le consumer. Ces mesures ayant été prises, les sons de la trompette se firent entendre par les fenêtres de la basilique, et les fidèles ouirent la voix d’un crieur qui leur disait de la part de l’empereur que ceux d’entre eux qui voudraient avoir la vie sauve pouvaient encore sortir, à la condition d’offrir de l’encens sur un autel de Jupiter que l’on avait dressé près de la porte de l’église ; qu’autrement ils allaient être tous la proie des flammes. Un chrétien répondit au nom de la pieuse assemblée : « Nous sommes tous chrétiens ; nous honorons le Christ, comme le seul Dieu et le seul Roi ; et nous sommes prêts à lui sacrifier notre vie en ce jour. » Sur cette réponse, les soldats reçurent ordre d’allumer les feux ; et dans un instant l’église ne fut plus qu’un immense bûcher, dont les flammes montaient vers le ciel, envoyant en holocauste au Fils de Dieu, qui daigna en ce jour commencer une vie humaine, l’offrande généreuse de ces milliers de vies qui rendaient témoignage à sa venue en ce monde. Ainsi fut glorifié, en l’année 3o3, à Nicomédie, l’Emmanuel descendu des cieux pour habiter parmi les hommes. Unissons, avec la sainte Église, l’hommage de nos vœux à celui de ces courageux chrétiens dont la mémoire se conservera, par la sainte Liturgie, jusqu’à la fin des siècles.

Ramenons encore une fois nos pensées et nos cœurs dans l’heureuse étable où Marie et Joseph forment l’auguste compagnie de l’Enfant divin. Adorons encore ce nouveau-né, et demandons-lui sa bénédiction. Saint Bonaventure exprime, avec une tendresse digne de son âme séraphique, dans ses Méditations sur la vie de Jésus-Christ, les sentiments du Chrétien admis auprès du berceau de Jésus naissant : « Et toi aussi, dit-il, qui as tant différé, fléchis le genou, adore le Seigneur ton Dieu ; vénère la Mère d’icelui et salue révéremment le saint vieillard Joseph ; ensuite, baise les pieds de l’Enfant Jésus, gisant en sa couchette, et prie Notre-Dame de te le donner ou de te permettre de le prendre. Prends-le en tes bras, retiens-le et considère bien son aimable face ; baise-le révéremment, et délecte-toi confidemment en icelui. Tu peux faire cela ; parce que c’est vers les pécheurs qu’il est venu pour leur salut, et qu’il a humblement conversé avec eux, et que, finalement, il s’est abandonné à iceux pour nourriture. Partant, sa bénignité se laissera patiemment toucher, selon ton vouloir, et n’imputera pas cela à la présomption, ains à l’amour [77]. »

Nous placerons, à la fin de cette journée de Noël, deux chants joyeux inspirés à la piété du moyen âge par l’allégresse de cette solennité. Le premier est une Séquence que l’on rencontre dans tous les Missels Romains-Français ; elle a été longtemps attribuée à saint Bernard ; mais nous l’avons trouvée déjà sur un manuscrit du XI° siècle.

SÉQUENCE.
Que le chœur des fidèles, dans son allégresse, tressaille de joie. Alleluia.
Le sein de la Vierge pure a produit le Roi des rois : prodige admirable !
L’Ange du Conseil est né de la Vierge : le Soleil de l’Etoile.
Soleil sans couchant, Etoile à jamais scintillante, radieuse à jamais. .
L’étoile produit son rayon ; la Vierge enfante son Fils d’une même manière.
Ni l’étoile par le rayon, ni la Vierge par son Fils ne perd rien de son pur éclat.
Le haut cèdre du Liban vient ramper, avec l’hysope, dans notre humble vallée.
Le Verbe, Sagesse du Très-Haut, daigne se revêtir d’un corps ; il se fait chair.
Isaïe l’avait chanté, la Synagogue s’en souvient, et pourtant n’a point cessé d’être dans l’aveuglement.
Qu’elle en croie, sinon ses Prophètes, au moins ceux de la gentilité ; les vers de la Sybille ont annoncé le mystère :
« Peuple malheureux, hâte-toi : crois enfin les antiques oracles ; pourquoi serais-tu réprouvé, peuple « infortuné ?
« L’Enfant qu’annonce la lettre prophétique, vois-le aujourd’hui : une Vierge l’a mis au monde. »
Amen.

La seconde pièce est une Séquence en l’honneur de la très sainte Mère de Dieu. Elle appartient au XVe siècle. C’est une de ces nombreuses imitations de la Séquence de Pâques, Victimae paschali, que l’on rencontre dans les Missels Romains-Français des XVe et XVIe siècles.

SÉQUENCE.
A la Vierge Marie que les Chrétiens entonnent un cantique.
Ève, malheureuse mère, nous perdit ; mais Marie nous a donné un Fils qui a racheté les pécheurs.
La mort et la vie se sont rencontrées dans une alliance merveilleuse : Celui qui est Fils de Marie est un Dieu, il règne.
Dis-nous, ô Marie, Vierge douce et clémente :
Comment es-tu devenue mère, étant la créature de Celui qui naît de toi ?
— L’Ange en est le témoin envoyé des cieux vers moi.
De moi est né Celui qui est mon espérance ; mais la Judée est demeurée incrédule.
— Mieux vaut croire au seul Gabriel, l’Ange de Force, qu’à la perverse race des Juifs.
Oui, nous savons que le Christ est Fils de Marie en vérité ; vous, ô Roi, né pour nous, soyez-nous miséricordieux.
Amen.

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Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum

Introduction.

La date historique de la nativité temporelle du Sauveur étant inconnue dans les premiers temps, une antique tradition, inaugurée peut-être au début du IIe siècle, célébrait les diverses théophanies du Christ dans sa nature mortelle, c’est-à-dire sa naissance, sa manifestation aux Mages et son baptême dans le Jourdain, peu après le solstice d’hiver, dans les dix premiers jours de janvier. Cette date conventionnelle avait déjà trouvé crédit dans toutes les Églises, quand, on ne sait comment, Rome dédoubla pour son compte la fête des Théophanies, anticipant au 25 décembre l’anniversaire de la naissance temporelle du Sauveur.

Quand et comment l’Église-mère arriva-t-elle à établir cette date ? Nous l’ignorons, puisque, sauf un texte très douteux du commentaire d’Hippolyte sur Daniel, le plus ancien document qui fixe Noël au 25 décembre est le calendrier philocalien de 336, qui porte cette indication : VIII Kal. ian. natus Christus in Betleem Iudee. Évidemment, le chronographe n’annonce rien de nouveau, mais il se fait l’écho de la tradition romaine antérieure, qui, dans le Liber Pontificalis prétend remonter jusqu’au pape Télesphore. Dans le discours fait à Saint-Pierre par le pape Libère donnant, le jour de Noël, le voile des vierges à Marcelline, sœur de saint Ambroise, on ne relève aucune allusion à la nouveauté de la fête, mais, au contraire, tout le contexte donne l’impression qu’il s’agit d’une solennité de vieille date, à laquelle le peuple a coutume d’accourir en foule, en vertu d’une ancienne habitude. La fête de Noël fut, au début, propre au siège apostolique. Saint Jean Chrysostome qui l’introduisit à Antioche vers 375, en appelle précisément à l’autorité de la capitale du monde latin, où, à son avis, seraient encore conservés les actes du recensement de Quirinus, avec la date précise de la naissance du Christ à Bethlehem le 25 décembre. D’Antioche, la fête passa à Constantinople. Sous l’évêque Juvénal, entre 424 et 458, elle fut introduite à Jérusalem, puis, vers 430, fut admise à Alexandrie, et, de ces célèbres sièges patriarcaux, elle se répandit aussi peu à peu dans les diocèses qui en dépendaient. Actuellement, seuls les Arméniens monophysites célèbrent encore la naissance du Christ à sa date primitive, le 6 janvier.

Il ne faut pourtant pas négliger une coïncidence. Le calendrier civil du recueil philocalien note au 25 décembre le Natalis invicti, la naissance du soleil, et cette naissance coïncide justement avec le solstice d’hiver. A l’époque où, grâce aux mystères de Mithra, le culte de l’astre du jour avait pris un tel développement que, au dire de saint Léon, même les fidèles qui fréquentaient la basilique Vaticane, se permettaient d’y pratiquer le rite superstitieux de saluer d’abord, de l’atrium de l’Apôtre, le disque solaire, il n’est pas improbable que le siège apostolique, en anticipant au 25 décembre la naissance du Christ, ait voulu opposer au Sol invictus, Mithra, le vrai Soleil de justice, cherchant ainsi à détourner les fidèles du péril idolâtre des fêtes païennes. Dans une autre occasion, tout à fait semblable, c’est-à-dire pour la fête des Robigalia le 25 avril, Rome adopta une identique mesure de prudence, et, au cortège païen du pont Milvius, elle substitua la procession chrétienne qui parcourait le même trajet. Toutefois de la voie Flaminienne et du pont Milvius le clergé se rendait ensuite à la basilique Vaticane, pour l’offrande du divin sacrifice sur le tombeau de l’Apôtre.

Dans le rit romain, la caractéristique de la fête de Noël est l’usage des trois messes, une au premier chant du coq, — ad galli cantum, — l’autre vers l’aurore, et la troisième en plein jour. Cette habitude nous est déjà attestée par saint Grégoire, mais elle est sûrement plus ancienne, puisque l’auteur de la biographie du pape Télesphore, dans le Liber Pontificalis, prétend savoir que ce fut ce Pontife qui introduisit le premier le chant du Gloria in excelsis à la messe de la nuit de Noël.

La pannuchis de Noël, que terminait la messe, fut suggérée, non seulement par la solennité, mais aussi, d’une certaine manière, par le fait de la naissance du Christ à Bethlehem au cœur de la nuit ; et l’on voulut reproduire à Rome, comme on le faisait à Jérusalem, cette scène nocturne d’une façon liturgique, d’autant plus que Sixte III avait édifié à Sainte-Marie-Majeure un somptueux oratoire ad Praesepe qui, dans la conception romaine, devait être comme une reproduction de celui de Bethlehem.

Cette messe de vigile ne constituait pourtant pas, comme aujourd’hui, une caractéristique de la solennité de Noël ; c’était le sacrifice habituel qui mettait régulièrement fin aux veilles sacrées. Et même, si nous devons juger du concours des fidèles par la grandeur du lieu où se célébrait la station, il faut conclure que le petit hypogée ad Praesepe contenait une réunion très restreinte de personnes ; si restreinte, qu’une certaine nuit de Noël, tandis que Grégoire VII y célébrait la messe, il y fut arrête par les sbires de Cencius, postés là aux aguets, tiré hors de Sainte-Marie-Majeure et traîné en prison dans une tour du Parione, sans que le peuple romain se doutât, sinon le lendemain matin, de ce qui était arrivé au Pape pendant la station.

La vraie messe solennelle de Noël, in die sancto, était celle qui se célébrait en plein jour à Saint-Pierre. Ce fut justement durant cette messe que, au témoignage de saint Ambroise, le pape Libère donna le voile des vierges à Marcelline devant une grande foule du peuple. A cette occasion, le Pontife fit un célèbre discours qui nous a été conservé par le saint dans le De Virginibus, et dont il suffit de rapporter ces paroles : « Tu as désiré des noces très sublimes, ô ma fille ; tu vois quelle foule de peuple est accourue pour l’anniversaire de la naissance de ton époux, et comment personne ne s’en retourne à jeun. » Si toute cette foule communiait à la messe papale, cela indique que les fidèles venus à la messe de la vigile et à celle de l’aurore avaient été bien peu nombreux.

Le jour de Noël 431, le pape Célestin reçut les lettres qui l’informaient de l’heureuse issue du Concile d’Éphèse. Il les fit lire devant « la réunion de tout le peuple chrétien à Saint-Pierre ».

Entre la messe de vigile à la Crèche, et la messe stationnais au Vatican, et en faveur de la colonie byzantine résidant à Rome, s’introduisit, vers le Ve siècle, une autre synaxe eucharistique au pied du Palatin. Elle avait pour objet de célébrer le natale de la martyre de Sirmium, Anastasie, dont le corps avait été transporté à Constantinople sous le patriarche Gennadius (458-471). On choisit à Rome le titulus Anastasiae parce que les Actes identifiaient la martyre avec la fondatrice de l’église.

Les Byzantins ayant disparu, la popularité de la dévotion à sainte Anastasie diminua aussi, mais la station survécut ; et, au lieu de la fête (dies natalis) de la martyre, comme au début, elle comporta une seconde messe matutinale pour vénérer le mystère de la naissance corporelle du Seigneur.

Primitivement, la triple célébration du divin Sacrifice le jour de Noël était propre au Pape, ou à celui qui présidait la synaxe stationnale ; il faut dire d’ailleurs que cela n’était pas absolument insolite à Rome. La fête des apôtres Pierre et Paul avait l’honneur des trois messes ; celle des fils de sainte Félicité en comportait quatre, et, en général, toutes les autres grandes solennités des martyrs admettaient autant de messes qu’il y avait de sanctuaires en vénération. Il y avait au moins deux messes, celle ad corpus, à l’hypogée du saint, et l’autre, la missa, publica, comme on l’appelait, dans la basilique supérieure. Cette discipline présente une certaine analogie avec celle qui règle actuellement la célébration des messes conventuelles dans les chapitres collégiaux. Nombreux sont les jours où le calendrier assigne deux ou même trois messes conventuelles ; cela ne veut toutefois pas dire que le même prêtre doive offrir le saint Sacrifice une seconde et une troisième fois le même jour, et moins encore que, hors du chœur, tout prêtre soit autorisé ces jours-là à célébrer plusieurs messes. Cela indique seulement le nombre des Sacrifices auxquels le chapitre collégial est tenu d’assister. Ainsi en était-il jadis pour les jours dont nous avons parlé ; on officiait dans les divers sanctuaires rappelant l’éponyme de la fête, et souvent le Pape en personne y présidait, offrant alors le divin Sacrifice. Mais en dehors des sanctuaires mêmes où l’on célébrait la fête, tout s’accomplissait selon le mode habituel décrit dans les sacramentaires, et la messe n’était célébrée qu’une fois, par les prêtres attachés aux divers titres de la ville.

Les liturgistes du bas moyen âge se sont plu à rechercher les raisons intimes pour lesquelles on célèbre trois messes le jour de Noël ; toutefois au lieu d’explorer le champ de l’archéologie, où ils auraient certainement retrouvé la trace des trois différents sanctuaires romains dans lesquels on devait officier le 25 décembre, ils s’arrêtèrent à des motifs ascétiques et mystiques, beaux il est vrai, et très propres à nourrir la dévotion, mais tout à fait étrangers à la première institution de cette triple liturgie romaine dont les Orientaux n’ont pas l’idée.

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À la première messe au cœur de la nuit.

Station à Sainte-Marie à la Crèche.

La messe de minuit — les anciens l’appelaient ad galli cantum, parce que, dès le temps de saint Ambroise, à cette heure seulement commençait l’office matutinal quotidien — rappellerait la naissance éternelle du Verbe de Dieu au sein des splendeurs de la gloire paternelle ; celle de l’aurore célèbre son apparition temporelle dans l’humilité de la chair, et enfin la troisième, à Saint-Pierre, symbolise son retour final au jour de la parousie, quand il siégera comme juge des vivants et des morts.

Selon l’Ordo Romanus XI, la nuit de Noël, au temps de Célestin II, on célébrait encore à Sainte-Marie-Majeure, et avec l’assistance du Pape, les deux synaxes vigiliales distinctes dont parle Amalaire. Dans la première les leçons étaient chantées par les chanoines, les cardinaux et les évêques, précisément comme au troisième dimanche de l’A vent à Saint-Pierre ; après l’office on célébrait la Messe ad Praesepe, suivie des secondes matines et des laudes.

Au XVe siècle, le Pontife intervenait aux vigiles avec une chape de laine écarlate, munie d’un capuchon qui se nouait sous la barbe propter frigus, selon la description de l’Ordo Romanus XIV [78]. Si l’empereur y assistait aussi, il était revêtu du pluvial et, brandissant l’épée, il devait chanter la cinquième leçon, la neuvième étant réservée au Pape. Durant la messe, toutes les offrandes que le peuple déposait sur l’autel ou aux pieds du Pontife, appartenaient aux chapelains, sauf le pain, qui revenait aux acolytes. Contrairement à l’usage, la nuit de Noël, le Pape communiait non pas au trône, mais à l’autel, et pour boire au Calice sacré, il n’employait pas l’habituel chalumeau d’or ; quant au clergé, il attendait le matin pour recevoir la sainte Communion.

L’introït est tiré du psaume 2, et peut s’appliquer aux diverses générations du Verbe ; à celle, éternelle et divine, dans le sein du Père ; à celle, humble et passible, dans le sein virginal de Marie, et enfin à celle, glorieuse, des entrailles de la terre, quand, le jour de Pâques, II ressuscita pour triompher définitivement du péché et de la mort. Durant le saint temps de Noël, il est à propos de réconforter souvent notre foi par cette énergique profession de la divinité qui se cache sous les pauvres apparences du petit Enfant de Bethlehem. Le Verbe nous a créés par sa puissance, et II nous a rachetés par sa faiblesse, mais cette faiblesse n’aurait servi de rien si n’y avait été jointe l’invincible vertu divine, grâce à l’union hypostatique.

Dans la collecte, nous rappelons que le Seigneur a éclairé les ténèbres de cette nuit sainte par les splendeurs de son ineffable lumière ; qu’il nous accorde donc, après avoir été initiés ici-bas au mystère de son Incarnation, de pouvoir un jour être participants de Sa gloire. Le lien est intime en effet : ici-bas, la foi ; là-haut, la lumière ; ici-bas, la grâce ; là-haut, la gloire. Avant la venue du Verbe de Dieu sur la terre, l’homme marchait à tâtons dans les ténèbres du péché et de l’ignorance ; Jésus venu, la grâce de l’Esprit Saint a éclairé les âmes, et l’humanité, au moyen de la révélation chrétienne conservée intacte dans l’Église catholique, vit désormais, et se nourrit, de la lumière de l’éternelle Sagesse.

La lecture est tirée de la lettre à Tite (II, 11-15), et il importe de noter que, lorsqu’à Rome on lisait aussi le texte grec, le premier mot apparuit, epiphánê, rappelait justement le nom d’Épiphanie donné primitivement à la solennité de Noël.

L’Apôtre met en pleine évidence le caractère tout à fait gratuit de l’incarnation du Fils de Dieu, dont le motif doit être cherché exclusivement, non pas dans nos prières ou nos bonnes œuvres, mais dans l’infinie miséricorde du Seigneur. Nous sommes encore à Noël, mais déjà commence le Sacrement pascal, comme disaient les anciens Pères. Le gracieux Enfant de Bethlehem est l’innocente victime pour les péchés du monde. Avant que nous arrivions à la fraction des Mystères, il y aura au moins trente-trois années ; mais le sacrifice commence aujourd’hui, et le Pontife éternel est déjà à l’introït de sa messe.

Le répons-graduel vient du psaume 109, qui décrit d’abord, en traits rapides, l’éternel aujourd’hui où le Père a engendré, engendre et engendrera toujours’ e Verbe, sans commencement, ni succession aucune de temps, et sans fin. Le psalmiste parle ensuite de la mission temporelle du Christ, qui est d’assujettir à sa puissance tous ses ennemis, qui sont aussi les ennemis de Dieu. Il remportera sur eux la victoire finale et les mettra comme un escabeau sous ses sandales d’or, en tant qu’il les jugera au jour de la parousie, non seulement comme Dieu, mais aussi comme Premier-Né de la création. Quand il aura conduit captifs à Dieu tous les rebelles, alors, comme l’explique l’Apôtre, la mission temporelle du Christ sera accomplie et cessera, pour que Dieu soit omnia in omnibus.

Le verset alléluiatique, qui devait jadis suivre la seconde lecture avant l’Évangile, répète la strophe du psaume 2 : « Yahweh m’a dit : Tu es mon Fils, parce qu’aujourd’hui je t’ai engendré. » Cela le Verbe le répète, non point dans les splendeurs du ciel, quand les anges lui chantent alléluia, mais dans l’infirmité de sa chair, au milieu des calomnies et des blasphèmes de ses ennemis. C’est en effet contre eux que Jésus doit invoquer assez souvent ses prérogatives messianiques, et c’est pourquoi il recourt au témoignage infaillible de Celui qui l’a engendré déjà une première fois dans l’éternité, puis donna au Verbe Sa sainte humanité, qui lui est hypostatiquement unie.

La lecture de l’évangile selon saint Luc (II, 1-14), décrit la naissance de Jésus au cœur de la nuit à Bethlehem. Le Saint-Esprit Lui-même a daigné commenter ce texte sacré par l’intermédiaire de l’évangéliste saint Jean, et nous lirons ses paroles aujourd’hui à la troisième messe. Toute autre explication humaine serait donc superflue. Jésus naît dans une étable, II érige son trône et sa chaire dans une mangeoire entre deux vils animaux. Viens, chrétien, agenouille-toi au pied de cette crèche. C’est de là que Jésus condamne ton faste, ton orgueil, ta sensualité, et t’apprend au contraire l’obéissance, l’humilité, la pénitence, la mortification.

Le verset d’offertoire est tiré du psaume 95, où sont invités à se réjouir et les cieux et la terre, parce que le Seigneur est venu. En effet, la venue de Jésus sur la terre a consacré le monde, comme s’exprimait hier l’Église dans sa liturgie. Cette consécration se reflète aussi en partie sur les créatures sans raison et insensibles, soit parce que le Verbe incarné a voulu s’en servir durant sa vie passible, soit encore parce que certaines d’entre elles, comme l’eau, le vin, le pain, l’huile, ont été élevées à la dignité de matière des divins sacrements, et qu’en général toutes aident l’homme à la facile obtention de sa fin dernière surnaturelle.

Dans la prière d’introduction à la préface — le véritable commencement de l’antique anaphore eucharistique — nous demandons au Seigneur que par les mérites du divin Sacrifice, comme Jésus a voulu devenir consubstantiel à nous dans la nature humaine, nous aussi, nous ayons le bonheur de Lui ressembler, au moyen de l’habitus surnaturel de la grâce, qui nous confère précisément la conformité intérieure au Christ.

Durant ce temps de Noël, selon ce que le Pape Vigile écrivit à Profuturus de Braga, l’on insère dans la préface une période où est commémoré le mystère de l’Incarnation. En voici le texte : « Une lumière nouvelle environna aujourd’hui les yeux intérieurs de l’âme à cause de la mystérieuse incarnation de votre Verbe. Aussi, tandis que nous contemplons un Dieu rendu visible, notre cœur est ravi, grâce à lui, à la contemplation des choses invisibles. »

Dans la première partie des diptyques, on fait également mémoire de la naissance du Sauveur : « Commémorant le jour très saint où la virginité sans tache de Marie donna le jour au Sauveur du monde. » Ces insertions sont très anciennes et remontent au moins au IVe siècle.

L’antienne pour la Communion est tirée du psaume 109, indubitablement messianique. Le Père a engendré le Verbe dans les splendeurs de sa sainteté, en sorte que ce tendre Enfant qui revêt aujourd’hui dans la crèche, les livrées du serviteur et du pécheur, Lui est coéternel et consubstantiel. Dans une abbaye grecque, un peintre du moyen âge a très ingénieusement exprimé cette coéternité du Verbe incarné, le représentant sous la figure d’un enfant sur les genoux du Père, mais avec barbe abondante et blanche, ainsi que le prophète Daniel nous décrit l’Antiquus dierum avec la barbe et la chevelure devenus blancs comme de la laine.

Dans la collecte d’action de grâces, nous demandons au Seigneur que la réception des saints Mystères en mémoire de sa nativité temporelle, nous mérite la grâce d’exprimer ces mystères par notre vie, pour pouvoir obtenir au ciel la récompense. C’est en effet le but de la sainte Communion, nous faire participer à la vie du Christ, nous greffer sur l’arbre de sa passion, afin que nous ne vivions plus pour nous mais pour Lui ; bien plus, pour que nous Le vivions, Lui.

Saint Alphonse, après avoir considéré toutes les tendresses de l’amour que Jésus-Enfant nous montre dans la grotte de Bethlehem, termine son célèbre cantique par cette exclamation : « Ah ! Combien il t’a coûté de nous avoir aimés ! » Au pied de la sainte crèche on ne peut dire mieux. Quand un Dieu se consume d’amour pour ses créatures, au point de s’anéantir lui-même, d’affronter l’extrême pauvreté, les persécutions, la mort la plus honteuse et la plus cruelle, on ne saurait faire autrement que pleurer de reconnaissance à ses pieds, procidamus ante eum, ploremus coram Domino, et déplorer de l’avoir aimé si tard et si mal, s’écriant avec saint Augustin : Sera te amavi, pulchritudo tam antiqua, sera te amavi.

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A la deuxième Messe à l’Aurore

Station à Sainte-Anastasie.

Comme c’est aujourd’hui le dies natalis de sainte Anastasie, dont le culte prit une grande importance à Rome, spécialement durant la période byzantine, l’Église institua cette station solennelle dans sa basilique au pied du Palatin. Le sacramentaire Léonien mentionne bien sainte Anastasie dans la liste des fêtes de décembre, mais étant donné l’état mutilé de ce document, il n’est pas possible d’en déduire rien d’autre. Dans le Sacramentaire gélasien, il n’y a rien, tandis que dans le grégorien — les noms de Léonien, gélasien et grégorien ne garantissent point le contenu qu’il recouvrent — les collectes de la célèbre martyre de Sirmium précèdent celles de la seconde messe de Noël.

Quoique le Sacramentaire qui porte le nom de saint Grégoire, reflète une période relativement tardive de la floraison liturgique à Rome — vers le pontificat d’Hadrien Ier — la station de ce jour à Sainte-Anastasie donne pourtant l’impression de remonter à une respectable antiquité, avant que la Nativité du Seigneur eût acquis une si grande solennité à Rome, et quand il était d’usage de célébrer le même jour, par des stations différentes, plusieurs martyrs localisés en des sanctuaires distincts. Il est certain qu’en un temps postérieur, la fête de sainte Anastasie aurait été transférée à un autre jour.

Parmi les sermons de saint Léon Ier, il en est un contre l’hérésie d’Eutychès, prononcé dans la basilique anastasienne. L’argument est parfaitement christologique, tel qu’il convient en effet pour cette fête de Noël ; mais, faute de preuves, on ne peut affirmer avec certitude que l’auteur l’ait prononcé lors de la station de ce jour de Noël, en la basilique de la martyre de Sirmium.

A l’origine — comme on peut encore le voir dans le sacramentaire grégorien — la messe stationnale à Sainte-Anastasie était tout entière en l’honneur de la martyre de ce nom ; mais plus tard, à mesure que la fête de Noël augmenta d’importance, sainte Anastasie dut se contenter d’une simple collecte commémorative.

L’heure matinale où se célébrait à Rome cette station, n’avait primitivement aucune signification mystique en relation avec la naissance du Sauveur, comme on le pensa au moyen âge. La messe solennelle à Saint-Pierre devant se célébrer à l’heure de tierce, il ne demeurait de libre, pour le rendez-vous au pied du Palatin, que la toute première heure de la matinée, à peine terminé l’office vigilial dans la basilique Libérienne. C’est pourquoi la rubrique actuelle du missel : ad secundam missam in Aurora n’est pas du tout exacte archéologiquement, tout comme celle de la messe à minuit qui, en réalité, était célébrée au premier chant du coq.

Les Ordines Romani prescrivaient que le Pape, quand il était à Rome, célébrât lui-même la station à Sainte-Anastasie ; en cas d’absence, il était remplacé par le presbyter tituli, ou par le premier des cardinaux-prêtres. Le dernier qui se conforma, au siècle dernier, à cette règle antique, fut le pape Léon XII.

Au moyen âge, quand la messe était terminée dans la crypte ad Praesepe, le Pontife, sans même déposer la paenula, se rendait immédiatement au titre d’Anastasie ; au XIVe siècle au contraire, quand l’antique discipline stationnale était déjà presque tombée en désuétude à cause des somptueuses fêtes papales célébrées dans la chapelle du palais pontifical, l’usage s’introduisit de mettre un peu d’intervalle entre l’une et l’autre cérémonie. Dans les années qui précédèrent 1870, Pie IX célébrait la messe in nocte à Sainte-Marie-Majeure, aux premières heures de la soirée, de façon à pouvoir retourner au palais pour le souper avant minuit. La communion des cardinaux et du clergé romain, qui, à l’origine, se faisait à Saint-Pierre à la troisième messe de Noël, avait lieu au XIVe siècle à la messe matinale célébrée à Sainte-Anastasie, et, avec les cardinaux, y prenaient part les autres prélats de curie non revêtus de la dignité épiscopale.

La messe s’inspire de l’astre du jour qui commence à dissiper les ténèbres de la nuit. Puis elle s’élève à la contemplation de Celui que le Père engendra, lumière de lumière, du sein de la Divinité, avant le lever de l’aurore.

L’introït est tiré d’Isaïe (IX). Un peuple qui marchait au milieu des ténèbres, la malheureuse gentilité non éclairée par la révélation mosaïque et par les prophéties, a vu aujourd’hui une grande lumière, puisque Celui qui est né est justement le Père de la nouvelle génération, le Prince de la paix, dans le royaume de qui il n’y a ni différences de castes, ni prérogatives de familles : quiconque accueille sa parole devient fils de Dieu et citoyen du nouveau royaume messianique. L’antienne prophétique vient ensuite, c’est le psaume 92, qui est proprement le psaume pascal, mais il s’adapte fort bien aussi à Noël, puisque, si la Résurrection marque le triomphe final du Sauveur sur la mort et sur le péché, sa Nativité annonce l’aurore de ce beau jour de victoire.

On rappelle dans la collecte que l’incarnation du Verbe est venue illuminer la terre par les splendeurs divines, splendeurs non pas matérielles ou purement abstraites et de caractère spéculatif ; non, les sublimes vérités de la foi doivent se traduire en acte par les œuvres, et le chrétien étant une image vivante du Verbe éternel, en tant qu’il accueille et fait sienne la connaissance du Père que Jésus lui révèle au moyen du saint Évangile, revit le Christ et agit en Lui et pour Lui.

On ajoute la commémoraison de la martyre titulaire de la basilique stationnale en demandant la grâce d’expérimenter les effets de sa puissante intercession. Les saints sont confirmés dans la charité, ils sont donc toujours pleins de compassion pour tous nos besoins, pour lesquels ils prient incessamment le Seigneur.

Dans le passage de la lettre à Tite qui se lit après les collectes, l’Apôtre explique le caractère spontané et entièrement généreux et gratuit de la Rédemption. Il emploie à ce propos un mot qui est maintenant bien profané, mais qui, dans la pensée de saint Paul, exprime tout ce qu’il y a de plus suave, de plus condescendant et d’ineffable dans le mystère de notre rachat : Dieu qui aime l’homme ; voilà l’humanitas des latins, et la philanthopía des grecs.

Cet amour est éternel, comme est éternel l’Esprit Saint, mais l’effet visible, nous pourrions dire le baiser de Dieu, qui témoigne de sa philanthropie, a été concédé novissime, diebus istis selon le mot de saint Paul, au moyen de la théophanie messianique. Le Christ reviendra à la fin du monde, juge inexorable pour les vivants et pour les morts, mais maintenant, dans sa première venue, la justice est reléguée comme au fond de la scène, là où l’on voit Satan et la mort enchaînés, pour ne laisser paraître que la bénignité et la « philanthropie » du divin Sauveur.

Le répons-graduel emprunte au psaume 117 l’acclamation joyeuse des rachetés, au Christ qui fait sa première entrée dans le monde. « Béni Celui qui vient au nom de Yahweh ! » Le jour des Rameaux, les enfants et la foule sortirent au-devant de Jésus qui entrait triomphalement à Jérusalem, en chantant ce salut du psaume, et leur dévotion plut tant au Sauveur qu’il déclara à la Synagogue qu’il l’abandonnait désormais définitivement à son sort, jusqu’à ce que, reconnaissant sa dignité messianique, elle le saluât : « Béni Celui qui vient au nom de Yahweh ! » Venir au nom de Yahweh signifie venir en Envoyé de Dieu, et, plus proprement, comme le Prophète par excellence, déjà prédit par Moïse, et à qui Israël aurait dû prêter cette obéissance qu’il avait rendue jadis à celui qui le délivra de la servitude du pharaon.

Le verset alléluiatique est tiré du psaume pascal 92 : « Le Seigneur s’est revêtu de force et de grâce pour inaugurer son royaume messianique. » Il s’est revêtu de grâce envers les hommes auxquels il montre sa nature humaine, en tout semblable aux fils d’Adam, ut sit ipse primogenitus in multis fratribus ; de force envers le démon, qu’il combat par la puissance de la divinité, brisant ses armes et détruisant son règne.

Le passage de l’évangile de saint Luc (II, 15-20) nous raconte la visite des pasteurs à la crèche, leurs pieuses impressions et l’attitude de la sainte Vierge devant le grand mystère qui se déroulait sous ses yeux. Tandis que les bergers font déjà œuvre d’apôtres, narrant à leurs compagnons ce qu’ils avaient vu et entendu, Marie est élevée à la plus sublime contemplation et dans le secret de son cœur elle prélude aux Évangiles. Quand, un demi-siècle plus tard, les quatre heureux évangélistes seront mus par l’Esprit Saint à entreprendre la narration de la vie et de la doctrine du Christ, la divine Mère répandra dans ces écrits la plénitude de son cœur, c’est-à-dire ce qu’elle avait médité et aimé depuis plus de dix lustres. La rédaction des saints Évangiles date sûrement de la seconde moitié du Ier siècle, mais l’œuvre était déjà conçue, pensée et contemplée depuis le premiers jours de Bethlehem, dans le cœur très saint de la Mère de Dieu.

L’antienne à l’offertoire vient, elle aussi du psaume 92 qui est aujourd’hui le psaume de circonstance. Cet Enfant qui en ce jour vagit au berceau, a une histoire aussi ancienne que les siècles. Dieu a donné la stabilité à la terre pour qu’elle ne soit pas ébranlée, et serve d’escabeau au trône du Messie nouveau-né. Ce trône est réservé au Premier-Né de la création de toute éternité, car, si dans sa nature humaine il ne compte encore que quelques heures de vie, dans sa nature divine pourtant il est appelé par les Écritures Y Ancien des jours et coéternel au Père.

Nous demandons à Dieu, dans la collecte sur les oblations, que celles-ci soient bien dignes du Mystère que nous célébrons, et nous réconcilient avec lui ; et de même que l’Enfant qui est venu aujourd’hui à la lumière est tout à la fois Dieu et homme, qu’ainsi les éléments eucharistiques, extérieurement semblables à toute autre substance terrestre, nous confèrent quod divinum est, c’est-à-dire Jésus-Christ, la divinité même, avec tous ses trésors de mérites et de grâces.

On ajoute la commémoraison de sainte Anastasie, priant le Seigneur d’agréer l’oblation qui lui est justement offerte, afin que, par les mérites de la martyre, Il nous donne son aide pour arriver au salut éternel.

L’antienne de la Communion est prise dans Zacharie (IX, 9) qui invite les filles de Sion et de Jérusalem à aller joyeusement au-devant du Christ Jésus qui vient, plein de la douceur et de la mansuétude que symbolise l’âne sur lequel Il est assis, pour prendre possession de son royaume. Cette prophétie se rapporte directement, comme le remarque saint Matthieu, à l’entrée du Rédempteur dans la Cité sainte le jour des Rameaux, mais l’Église trouve de frappantes analogies d’humilité, de mansuétude et de condescendance, entre cette entrée de Jésus en Jérusalem et sa première apparition en ce monde. Dans la grotte de Bethlehem comme aux portes de Jérusalem, tout était pauvre et respirait la grâce et la miséricorde. Jésus n’était pas assis sur l’ânon, mais celui-ci, de son haleine, réchauffait ses membres délicats, tout engourdis par le froid.

Dans la collecte d’action de grâces, nous demandons au Seigneur que le renouvellement annuel de ce sacrifice de Noël nous rénove aussi spirituellement, puisque l’admirable Nativité du Seigneur a ouvert une ère nouvelle pour l’humanité vieillie dans la malédiction du péché.

Il faut distinguer avec les Pères une triple parousie, esquissée très heureusement dans la liturgie de Noël. La première fois, Jésus naît pauvre, victime d’expiation pour le péché, et le trône d’où Il condamne l’orgueil et la sensualité est la mangeoire de la crèche. La seconde fois, Il s’élève, rayonnant de gloire, de l’humiliation du sépulcre, et, par l’envoi du Paraclet sur les Apôtres, Il répand dans l’Église, avec l’« esprit de résurrection » intime et spirituelle, tous les trésors de grâce et de sainteté. La troisième fois, Il apparaîtra à la fin des siècles sur un trône flamboyant de sainteté et de justice, dans la majesté de juge suprême des vivants et des morts, quand Il assujettira définitivement à Dieu toute la création, et que sera enfin terminée la lutte épique qui embrasse toute l’histoire angélique et humaine entre Satan et le Christ. Entre ces trois parousies il y a une liaison intime, qui fait que l’Église, dans sa liturgie, ne les sépare jamais : Pâques est le couronnement de Noël, et- la fête de tous les saints est le fruit du dimanche de la Résurrection.

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A la troisième Messe au jour de Noël

Station à Sainte-Marie-Majeure (à Saint-Pierre).

Jusqu’au temps de Grégoire VII, la troisième station de Noël, selon l’usage à Rome aux jours les plus solennels, sa faisait à Saint-Pierre, pour célébrer cette fête en famille autour de la mensa Petri, du Père et Pasteur commun. Mais la brièveté des journées hivernales et la difficulté de se rendre processionnellement au Vatican en ces jours troublés, où le Pape avait même été arraché de l’autel ad Praesepe pendant la messe de minuit, et traîné en prison par la faction adverse, firent préférer la basilique Libérienne, plus voisine du Latran, d’autant plus qu’au XIe siècle Saint-Pierre fut plusieurs fois au pouvoir des schismatiques et de leurs antipapes. L’usage imposé alors par la tristesse des temps finît par faire loi, et la station à Sainte-Marie-Majeure remplaça celle de Saint-Pierre, avec cette différence pourtant, que la messe de minuit est dans l’oratoire ad Praesepe, — où pouvait être admis seulement un cercle restreint de personnes, — tandis que la troisième se célèbre dans la vaste salle de Sicininus, décorée par Libère et par Sixte III.

Quand le Pontife entrait dans l’église, selon la description des anciens Ordines Romani, les cubiculaires le recevaient sous une espèce de baldaquin, et il mettait le feu, avec une petite cire enroulée à l’extrémité d’une canne, à l’étoupe tressée sur les chapiteaux des colonnes.

Ce rite qui ne s’accomplit plus aujourd’hui qu’à l’occasion du couronnement du Souverain Pontife, symbolisait la joie de la fête, et voulait être aussi comme une figura finis mundi per ignem [79], mais cette seconde signification symbolique est postérieure. A une époque plus récente, le sens primitif a subi une nouvelle modification, et au Pontife qui, dans toute sa gloire, s’approche de l’autel de Saint-Pierre pour ceindre la tiare papale, un cérémoniaire dit, en lui montrant l’étoupe ardente : Pater Sancte, sic transit gloria mundi. La leçon est profonde, mais les humanistes de la Renaissance, qui l’introduisirent, semblent n’avoir pas compris l’inconvenance de sa proclamation devant le souverain Maître de la Foi, au moment de sa prise de possession du trône pontifical.

Mais revenons à notre fête de Noël : Le cortège étant arrivé au presbyterium, le primicier retirait au Pape sa mitre et le baisait sur l’épaule ; celui-ci à son tour, ayant baisé le livre des Évangiles, échangeait le baiser de paix avec le doyen des cardinaux-évêques, et, entouré de ses sept diacres, commençait l’action liturgique.

Après la collecte, les clercs inférieurs, sous la direction de l’archidiacre, exécutaient une série d’acclamations en forme de litanie — toujours en usage lors du couronnement pontifical — en l’honneur du Pape ; celui-ci les récompensait de ce compliment par trois sous d’argent pour chacun. A l’offertoire sept autres des évêques et prêtres cardinaux montaient à l’autel et concélébraient avec le Pape ; ce rite de concélébration eucharistique se maintint longtemps à Rome pour la messe papale solennelle.

Après le divin sacrifice, le Pontife était couronné du regnum par l’archidiacre — la seconde et la troisième couronne ont été ajoutées pendant la période d’Avignon — et le-splendide cortège à cheval rentrait au Latran pour le déjeuner. Avant de descendre de selle, les cardinaux se rangeaient devant la petite basilique de Zacharie, et, — comme le Polichronion de la cour byzantine en la fête de Noël — l’archiprêtre de Saint-Laurent entonnait lui aussi : Summo et egregio ac ter beatissimo papae N. vita. Ses collègues répondaient par trois fois : Deus conservet eum. L’archiprêtre reprenait : Salvator mundi, ou Sancta Maria, omnes Sancti et, à chaque invocation, le chœur répondait : Tu illum adiuva. Le Pape remerciait du souhait et distribuait à chacun des cardinaux trois pièces d’argent. Les juges les remplaçaient alors et le primicier entonnait : Hunc diem ; les autres acclamaient à plusieurs reprises : Multos annos. Le chef reprenait : Tempora bona habeas, et le chœur : Tempora bona habeamus omnes.

Alors le Pape descendait enfin de cheval, et, étant entré dans une des salles, et continuant l’antique tradition des Césars, il faisait l’habituelle distribution d’argent à ses clients. — Il est souverainement intéressant de voir comment la cour pontificale du moyen âge avait conservé tant de traditions de la période impériale de Rome et de Byzance. — Outre la gratification commune à tous, le préfet de la ville recevait vingt pièces ; les juges et les évêques, quatre ; les prêtres et les diacres cardinaux, trois ; les clercs inférieurs et les chantres, deux. Tous contents du don obtenu, prenaient place à une table préparée dans le grand triclinium de Léon III, dont la mosaïque absidale existe encore sur la place du Latran, en une reconstruction postérieure accomplie sous Benoît XIV.

Autour du Pape, s’asseyaient à table, revêtus des ornements sacrés, à droite les cardinaux évêques et prêtres, à gauche l’archidiacre, le primicier avec les hauts officiers de cour. Au centre de la salle était le pupitre avec l’homiliaire, où, au milieu du banquet, un diacre lisait un passage des saints Pères. Mais la lecture ne durait pas longtemps : le Pontife envoyait un acolyte inviter la schola à exécuter quelque séquence de son répertoire en l’honneur de Noël, — voici la place réservée à la séquence, comme chant pieux et populaire, mais extra-liturgique, à Rome, — et, après que les chantres avaient fait preuve de leur talent musical, ils étaient admis à baiser le pied du Pape, qui offrait avec bonté à chacun d’eux une coupe de vin et un besant. Quelle poésie dans ces anciennes cérémonies de la Rome papale, et surtout quelle influence la sainte liturgie exerçait sur toute la vie religieuse du peuple !

L’introït vient d’Isaïe (IX, 6). Voici que nous est né un enfant, qu’un fils nous a été donné, lequel, malgré l’état d’anéantissement où il se réduit, est l’Éternel, le Créateur de l’univers ; Celui qui, par la puissance de sa parole, dirige et gouverne tout ; sur l’épaule de qui repose la divine et universelle monarchie. Lui, comme splendeur et image du Père, Le dira aux hommes, et sera donc pour eux le messager de la Trinité sacrosainte, l’envoyé ou l’ange de l’heureuse nouvelle de la Rédemption. Le psaume 97 qui suit, invite à entonner à Yahweh un cantique nouveau, en remerciement du nouveau prodige de miséricorde qu’il a opéré dans l’incarnation de son Verbe.

Dans la collecte, nous demandons à Dieu que la nouvelle naissance temporelle de son Fils unique nous délivre de l’antique servitude du péché.

Dans la lecture de l’Épître aux Hébreux (I, 1-12) grâce à une profonde exégèse des anciens textes scripturaires, nous est démontrée la divinité du Messie et sa supériorité infinie sur les anges, qui, en effet, l’adorent et lui offrent en tremblant leurs services. Bien que dans la crèche Il paraisse comme un petit enfant, Il est néanmoins l’Éternel ; dans le monde, tout passe et se succède, et Il remplace les formes anciennes par les nouvelles, comme on change un vêtement usé ; mais Lui est immuablement le même, et ses années ne passent pas.

Le graduel est emprunté au psaume 97. Le Seigneur a manifesté au monde le divin Sauveur, et tous les peuples ont participé à cette révélation. Ce n’est plus la seule Judée qui est invitée à louer Yahweh, qu’au début elle seule connaissait. La nouvelle rédemption doit être universelle, comme a été universel le péché, et devant Dieu ne compteront plus les barrières nationales qui divisent les Hébreux, les Grecs et les Romains ; l’Église sera une et catholique, c’est-à-dire universelle.

Le verset alléluiatique est pris dans la liturgie byzantine. Aujourd’hui brille pour nous un jour saint. Comme de toute éternité le Père engendra son Verbe au sein des splendeurs de sa sainteté substantielle, ainsi aujourd’hui la Bienheureuse Vierge donne le jour au Rédempteur, qui, par son incarnation, consacre le monde et sanctifie l’Église. Aujourd’hui une grande lumière est descendue sur la terre, lumière non seulement matérielle, mais aussi spirituelle. Jésus-Christ, lumière de lumière, est venu pour dissiper les ténèbres du monde. — II faut rappeler que l’antique fête de Noël, chez les Orientaux, était unie à l’Épiphanie, appelée par eux solennité des saintes Lumières, en sorte que l’image de la lumière et de la clarté est tout à fait naturelle en ce jour. Cette influence des liturgies orientales sur la liturgie romaine rappelle l’âge d’or du monachisme à Rome : alors, dans la capitale du monde catholique, s’élevaient, à côté des monastères romains, des couvents grecs, syriens, de Cilicie, d’Arménie, etc., et tous prenaient part aux solennités papales.

La lecture de l’Évangile (IOAN., I, 14) est peut-être la page la plus sublime de toute la sainte Écriture. Il y est question de la double génération du Verbe dans sa nature divine et dans sa nature humaine. Comme image de l’Artisan suprême, le Verbe est encore l’idée archétype et exemplaire de la création, mais en Lui Cette image s’identifie avec sa substance même, en sorte qu’en Lui tout est vie. Comme créature, la naissance de Jésus procède non de volonté humaine ou de désir de la chair ; mais l’immaculée Vierge Marie l’a conçu par la vertu de l’Esprit de Dieu ; génération divine à la participation de laquelle nous sommes admis nous aussi, autant que, au moyen de la foi, nous accueillons Jésus dans notre âme. Lui, se faisant homme, et établissant sa tente parmi nous, ne perd rien de ses attributs divins, en sorte que, à travers le voile de son humanité nous voyons tout le plérome divin, — il faut retenir ce mot contre la fausse gnose que combat l’Évangéliste, — la grâce infinie et la vérité.

L’antienne de l’offertoire est tirée du psaume 88 : « A vous sont les cieux, à vous la terre et l’univers que vous avez créés ; la justice et l’équité préparent votre trône. » Qu’elle est belle cette insistance de l’Église à exalter les attributs divins de l’Enfant de Bethlehem, en ce jour où, par une condescendance infinie vis-à-vis de notre misère, Il daigne en cacher les splendeurs sous les pauvres langes qui enveloppent ses membres transis.

Dans la collecte sur l’oblation, nous prions Dieu de la sanctifier, en mémoire de la naissance temporelle de son Fils unique, afin que nous aussi soyons purifiés de toute souillure du péché.

Dans l’antienne pour la Communion, tirée du psaume 97, nous remercions le Seigneur de ce qu’il a révélé le divin Sauveur devant toutes les nations. La générosité, la magnificence, la lumière, tel est toujours le caractère des œuvres divines. Le péché se commet ordinairement dans l’obscurité et le secret, car l’impie hait la lumière ; mais la Rédemption s’est accomplie sur le Calvaire à la vue de tout le monde, afin que les nations, grâce aux splendeurs de la foi, reconnaissent et adorent le Sauveur crucifié.

La prière d’action de grâces après la Communion vient, ensuite, et nous y demandons que l’Enfant qui vient de naître soit, non seulement l’auteur de notre renaissance dans la sublimité de la régénération divine, mais aussi le rémunérateur généreux de nos mérites dans la gloire de l’éternité.

Jésus naît de la femme, pour que nous cessions une bonne fois d’être fils de la femme, nous élevant à la dignité de la filiation divine ; le Verbe associe à sa personne notre nature humaine, pour nous rendre participants de la grâce de Dieu. Il s’abaisse jusqu’à la poussière, pour élever la créature au plus haut des cieux. Quelles mystérieuses antithèses ! Quelle force d’éloquence dans ce dénuement apparent qui entoure la crèche de Jésus ! Ces membres engourdis par le froid, cette étable, cette paille, cette pauvreté et cette grande humiliation, quelle condamnation pour notre sensualité et pour notre orgueil !

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Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

A l’Office du soir, les Vêpres nous font déjà entendre les premiers accents de la fête de Noël. L’attente est devenue la certitude heureuse de la possession. Il y a dans les antiennes comme un désir apaisé et un calme majestueux : « Le Roi pacifique est glorifié, lui dont toute la terre désire voir le visage. » — « Les jours sont accomplis où Marie devait enfanter son Fils premier-né. » — « Sachez que le royaume de Dieu est proche, en vérité, je vous le dis, il ne tardera pas. » — « Levez la tête, voici que votre Rédemption est proche. »

Dans sa certitude, l’Église chante, au coucher du soleil : « Lorsque le soleil se sera de nouveau levé dans le firmament, vous verrez le Roi des rois qui procède du Père comme un Époux qui sort de la chambre nuptiale » (Ant. Magn.).

Le temps de Fête

Les deux cycles festivaux de l’année liturgique sont construits de la même manière : il y a d’abord une montée qui est la préparation, ensuite un cheminement sur les hauteurs pendant le temps des fêtes, puis une descente dans la plaine pendant le temps où s’achève le cycle. Le temps de préparation du cycle d’hiver est l’Avent que nous venons d’achever. Maintenant que ce temps est achevé, nous restons étonnés devant les richesses de poésie symbolique et dramatique que l’Église a réunies. Intentionnellement nous avons laissé la liturgie elle-même parler dans ses chants et ses leçons, afin de pouvoir admirer cette richesse. Nous pouvons affirmer qu’aucun temps de l’année liturgique ne possède une telle surabondance de cantiques, de versets, de chants. Comme d’une corne d’abondance la liturgie nous verse la profusion variée de ses chants.

Maintenant suit, sans solution de continuité, comme une émanation naturelle de l’Avent, la fête de Noël. Le temps festival des deux cycles a encore ceci de commun qu’il comprend, dans l’un et l’autre cas, deux grandes fêtes, qui sont comme les piles du pont qui supportent tout le temps festival. Dans le cycle d’hiver, nous avons Noël et l’Épiphanie ; dans le cycle d’été, Pâques et la Pentecôte. Il y a cependant une différence entre ces deux couples de fêtes. Pâques et la Pentecôte représentent un développement organique de la même pensée de salut, Noël et l’Épiphanie sont la répétition de la même pensée. La célébration de ces deux fêtes ne s’explique que par des raisons historiques. Noël est la fête de la Nativité de l’Occident et l’Épiphanie celle de l’Orient. L’Occident a adopté l’Épiphanie. et l’Orient Noël. Ces deux fêtes de l’Orient et de l’Occident sont un monument vénérable de l’union qui régnait autrefois entre les deux Églises, union que nous voudrions voir renaître, après une séparation millénaire. L’union malgré toute la différence d’idées et de sentiments !

Les circonstances historiques qui ont fait de ces deux fêtes des doublets nous aideront à comprendre bien des particularités et à résoudre bien des difficultés qui résultent de ce double emploi. Pour nous autres Occidentaux, la fête de Noël paraîtra toujours plus importante que celle de l’Épiphanie, malgré le rang plus élevé de cette dernière. Noël est et demeure notre fête, l’Épiphanie nous touche de moins près. Après quatre semaines où le désir a tendu fortement notre esprit, Noël est le véritable accomplissement de l’Avent. Il faut cependant avouer qu’entre l’Avent et l’Épiphanie la parenté de pensées est plus étroite. Noël est cependant bien la clôture de l’Avent. Il suffit de parcourir les textes de la Vigile. Nous reprenons toujours ce chant : Demain le péché originel sera détruit. Noël est la fête de la Rédemption. Par contre, il nous faut attendre jusqu’à l’Épiphanie pour voir se réaliser la glorieuse visite du Roi dont la pensée domine l’Avent.

D’ailleurs Noël et l’Épiphanie ne sont pas de simples doublets. L’Église Occidentale a reçu de l’Église Orientale sa fête de la Nativité avec son contenu spirituel oriental et elle l’a développée selon son génie propre. Elle l’a magnifiquement fécondée et enrichie. Son regard s’est élevé du cercle historique étroit de la naissance du Seigneur jusqu’à la perspective de la royauté du Christ qui domine les temps. L’Avent de l’Occident et sa fête de Noël ont bénéficié de cet élargissement de vues. Finalement les deux fêtes de la Nativité sont devenues deux solennités distinctes avec un objet indépendant et une progression intérieure. Nous avons désormais quelque chose d’analogue à ce que nous voyons dans le cycle de Pâques. A Pâques le soleil de la Résurrection se lève et éclaire le monde de ses rayons brillants. A la Pentecôte, ce soleil est à son midi et sa chaude lumière crée la vie et la fécondité. A Noël, le soleil de la Nativité se lève sur les plaines de Bethléem, à l’Épiphanie « la gloire du Seigneur » rayonne sur Jérusalem. A Noël nous naissons et renaissons avec le Christ notre frère, à l’Épiphanie le Christ célèbre avec l’Église et l’âme ses noces mystiques. A Noël « le Christ nous est né » ; c’est comme une fête intime de famille à laquelle ne participent que quelques privilégiés avec Marie et les bergers ; à l’Épiphanie, « le Christ nous est apparu », c’est-à-dire il a manifesté son apparition au monde.

Les événements historiques comme la Nativité, l’adoration des Mages, le Baptême ne sont ici que des témoignages et des preuves de ce fait heureux que l’Homme-Dieu est le Sauveur du monde.

Les deux fêtes complètement séparées de Noël et de l’Épiphanie, constituent une première et une seconde solennités. Noël a une vigile que nous avons considérée comme faisant encore partie de l’Avent, ainsi qu’une Octave qui admet, il est vrai, la célébration d’autres fêtes (par exemple : saint Thomas, saint Silvestre) ; cette Octave se clôture par une fête indépendante : la Circoncision de Notre Seigneur. Une particularité de la fête de Noël, ce sont les trois fêtes adjointes (Saint-Étienne, Saint-Jean, les Saints-Innocents). Le dimanche dans l’Octave de Noël a son pendant dans l’Octave après l’Épiphanie, mais originairement il servait de transition entre Noël et l’Épiphanie.

L’Épiphanie a également une vigile : son Octave privilégiée n’admet pas les fêtes de rang moyen, ce qui permet de se consacrer sans distraction à une méditation plus profonde du mystère. Récemment, on a fixé au dimanche après l’Épiphanie la fête de la Sainte-Famille. La messe antique et riche de sens de ce dimanche a été renvoyée à un jour de la semaine. Les progrès de la liturgie feront sans doute disparaître cette anomalie.

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La Sainte Nuit. Roi et Enfant

L’ami de la liturgie fera bien de préparer quelques jours auparavant l’Office de nuit, particulièrement les Matines de Noël ; une si grande fête mérite une préparation de plusieurs jours.

Les Matines. Un Office religieux pendant la Nuit ! L’ancienne Église en avait fait une institution permanente. La nuit ne devait pas être consacrée seulement au sommeil, mais encore à la prière et à la méditation. Les vigiles (veilles de nuit) ou matines étaient, dans l’ancienne Église, la prière nocturne de la Parousie, dans laquelle on attendait celui « qui se lève sur les hauteurs », c’est-à-dire le retour du Seigneur. Dans l’esprit de la liturgie, l’Heure de prière des matines est encore assignée à la nuit et il y a des Religieux qui, toutes les nuits, se lèvent de leur couche, pour prier et chanter au nom de l’Église. Mais, en fait, pour le peuple, il ne subsiste qu’un Office de nuit, celui de la nuit de Noël. Nous devons d’autant plus l’apprécier. Vers dix heures et demie ou onze heures, les cloches de Noël nous appellent à Matines. Les amis de la liturgie tiendront à réciter les Matines pendant la nuit, autant que possible en commun.

Après l’Invitatoire solennel : « Le Christ est né, venez, adorons-le » et le chant de l’hymne, commencent les trois Nocturnes. Les trois psaumes du premier Nocturne, malgré leur caractère et leur contenu différents, se ramènent à une seule idée : la naissance du Christ. Psaume 2 : Engendré éternellement par le Père, né dans le temps de la Vierge Marie. Psaume 18 : Le divin Soleil quitte comme un Époux la chambre nuptiale et vient nous éclairer de ses rayons (ce psaume:nous est connu, nous l’avons rencontré pendant l’Avent). Psaume 44 : La divinité et l’humanité célèbrent leur union dans le divin Enfant qui vient de naître.

Dans les Leçons, le prophète de l’Avent, Isaïe, achève ses prophéties, il annonce le rétablissement du royaume de Dieu par le Christ (première leçon), il console Jérusalem (l’Église) et l’exhorte à revêtir des vêtements de fête, car l’Époux royal vient pour célébrer ses noces (troisième leçon).

« Lève-toi, lève-toi, prends ta parure, Ô Sion, Prends tes vêtements de gloire, Jérusalem, cité sainte, Lève-toi de la poussière, Jérusalem captive, Déliées sont les chaînes de ton cou, Sion captive ! »

Les répons sont d’une grande beauté, tout remplis de l’impression immédiate et de l’expression lyrique de la merveille de Noël, les deux premiers avec la répétition constante de « hódie », aujourd’hui, et le troisième avec son dialogue dramatique. (C’est là qu’il faut chercher l’origine des mystères médiévaux de Noël et de la Crèche).

« Aujourd’hui la véritable paix est descendue pour nous du ciel,
Aujourd’hui, par tout l’univers, les cieux ont distillé du miel,
Aujourd’hui a brillé pour nous le jour de la Rédemption nouvelle, de la réparation depuis longtemps annoncée, de l’éternelle félicité (Rép.).
« Qui avez-vous vu, bergers ?
Dites-le-nous, annoncez-nous qui a paru sur la terre.
C’est un Enfant que nous avons vu et les chœurs des anges qui louaient le Seigneur.
Dites-nous ce que vous avez vu,
Annoncez-nous la naissance du Christ.
C’est un Enfant que nous avons vu... » (Rép.).

Le premier Nocturne considérait la naissance du Christ, le second nous entretient de ce que le Christ veut nous apporter : le royaume de Dieu, la paix, la Rédemption, la réconciliation avec Dieu. Ces pensées apparaissent dans plusieurs passages des psaumes. Dans le psaume 47, la ville de Dieu, qui fête aujourd’hui la fête de la Nativité de son Roi, rend grâces dans une procession solennelle, pour sa délivrance du pouvoir des ennemis ; le psaume 71, un vrai psaume de Noël et de l’Épiphanie, chante le Roi pacifique, le dispensateur de la justice, le Père des pauvres, dans l’Enfant royal qui vient de naître. Le psaume 84 est un chant de joie saluant la Rédemption (nous connaissons déjà ce psaume, cf. p. 111).

Les Leçons nous apportent une homélie de Noël du pape saint Léon. Ses discours éloquents causèrent dans l’Église de Rome, au cinquième siècle, une grande joie. Dans les répons, l’Église commence par s’étonner devant le mystère de la Crèche, puis elle fait entendre un chant de gloire en l’honneur de Marie, qui retentit à travers quatre répons.

Dans le troisième Nocturne, la psalmodie après une méditation calme de la miséricorde de Dieu et de sa fidélité, s’abandonne à la joie : le psaume 88 raconte d’une manière saisissante les promesses faites à David, promesses qui se réalisent aujourd’hui : le descendant de David doit être Roi éternellement. Ensuite les deux derniers psaumes terminent dans la joie les Matines. D’ordinaire les leçons du troisième Nocturne sont une explication scripturaire de l’Évangile qui est rappelé par une seule phrase, mais à Noël, comme on célèbre trois messes et qu’on lit par conséquent trois Évangiles, ces trois Évangiles sont ici brièvement expliqués. Trois grands docteurs de l’Église prennent la parole : Grégoire le Grand, Ambroise et Augustin. Ainsi, en comptant saint Léon le Grand, au second Nocturne, quatre docteurs de l’Église latine nous adressent la parole aux Matines de Noël.

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Les messes de Noël

Le saint jour de Noël est caractérisé par un triple Sacrifice eucharistique. L’ancienne Église de Rome a, en cela, suivi l’exemple vénérable de l’Église de Jérusalem. Les fidèles se rassemblaient, la nuit, dans la grotte de la Nativité et sanctifiaient l’heure de la naissance du Seigneur par la célébration de la messe. A la fin de cette messe ils retournaient à Jérusalem. Que pouvaient-ils faire de mieux que de commémorer l’heure de la Résurrection, dans l’église de la Résurrection, et d’y célébrer en même temps Noël avec les bergers ? C’était la seconde messe. Pendant le jour, ils se réunissaient dans l’Église pour l’Office solennel. Ainsi naquit l’usage de célébrer trois messes le jour de Noël. Cet usage fut imité à Rome. La première Messe était célébrée pendant la nuit dans l’église de la Crèche de Sainte-Marie Majeure (Sainte-Marie Majeure était considérée comme le Bethléem des Romains) : la seconde messe était célébrée dans l’église romaine de la Résurrection, dans l’église palatine grecque dont le nom était Anastasis (c’est-à-dire Résurrection). La troisième était célébrée dans la basilique de Saint-Pierre. De Rome l’usage se répandit dans tout l’Occident. Depuis que les prêtres occidentaux célèbrent la messe tous les jours, la coutume s’est établie que chaque prêtre puisse célébrer la messe trois fois, à Noël.

Trois considérations s’unissent dans chaque messe ; la divine lumière, le temps correspondant du jour ou de la nuit et l’événement évangélique de ce temps. Il y a, dans les trois messes, un développement progressif de la pensée de la fête. L’impression de l’Avent se remarque encore dans la première messe. Le Dieu de Majesté, environné de lumière, s’y manifeste, des anges lumineux volent au-dessus de la terre, et la Mère. la Vierge très pure, est le seul être terrestre qui approche l’enfant divin. L’humanité est encore dans l’attente dans les ombres de la nuit. La pensée de Noël progresse à la seconde messe qui est célébrée à l’aurore, au lever du soleil. La lumière divine qui a paru mystérieusement sur la terre, sous les voiles de la nuit, s’élève pour nous comme un soleil d’une force créatrice puissante, elle entre en relation active avec nous comme « notre Sauveur ». Dans la troisième messe, la pensée de Noël atteint son développement le plus élevé et se manifeste dans toute son efficacité « à tous les hommes ».

Noël est une fête de lumière. Ce qui le montre déjà c’est son origine. La date (25 Décembre) n’est pas le jour historique de la naissance du Seigneur (ce jour nous est inconnu). Si on a choisi pour cette fête le solstice d’hiver ce fut plutôt pour supplanter la fête païenne de la naissance du dieu Soleil (sol invictus) et lui substituer Une fête chrétienne. Le Christ est le vrai Dieu-Soleil qui lutte contre les ténèbres de l’enfer et en triomphe. C’est pourquoi la fête de sa naissance est très bien placée au moment où le soleil recommence son ascension. La pensée de la lumière, qui trouve aussi chez le peuple chrétien une touchante expression dans l’arbre de Noël illuminé, se poursuit à travers les trois messes. Le symbolisme de la lumière est particulièrement saisissant pendant la messe de minuit ; à la seconde messe le soleil qui se lève nous offre un -symbole vivant et c’est pourquoi l’Introït chante avec. allégresse : « Une lumière brille aujourd’hui pour nous. » A la troisième messe le symbole de la lumière se trouve dans l’Évangile lui-même : « La lumière brille dans les ténèbres ».

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La messe de minuit (Dominus dixit).

La pensée principale de la messe de minuit est celle-ci : L’Enfant de Bethléem, né de la Vierge Marie, est le Fils consubstantiel de Dieu, engendré de toute éternité, en un mot : la naissance éternelle et la naissance temporelle du Seigneur. Nous sommes réunis en esprit avec tout la chrétienté dans le petit sanctuaire de Sainte-Marie Majeure dont la crypte, derrière l’autel, représente la grotte de Bethléem. L’Introït fait pendant à l’Évangile. L’Évangile nous dit : « Marie enfanta son Fils premier-né » ; l’Introït chante : « Le Père a dit : dans l’éternel aujourd’hui, je t’ai engendré de mon essence. » Le Gloria convient particulièrement aujourd’hui. La Collecte remercie Dieu de la divine lumière dans la foi, mais elle demande aussi la jouissance de cette lumière dans la vision béatifique. L’éclat lumineux des anges et l’illumination de l’église ne sont qu’une faible image de la splendeur de la divinité que nous contemplerons au ciel. — La prière liturgique s’est élevée de la nuit de l’Avent (Kyrie) jusqu’aux plus hautes lumières du ciel. Maintenant, dans l’Épître, l’Apôtre des nations s’adresse à nous. Il a connu la nuit de l’Avent et la lumière de Noël autant que personne au monde. C’est le don de Dieu fait homme, le Sauveur lui-même, qui lui apparut sur le chemin de Damas. Depuis ce jour, il n’y a plus de nuit dans son âme mais la claire lumière. La lumière demande une vie de lumière et c’est ce qu’il nous recommande. L’Épître et l’Évangile nous parlent de l’humanité du Christ. Intercalé entre les deux, le Graduel chante de nouveau le Fils éternel de Dieu. La nuit avant le lever de l’étoile du matin est l’image de l’éternité. Nous sommes dans « la lumière du sanctuaire », environnés des ombres de la nuit. Voici maintenant le point culminant de l’avant-messe, le merveilleux Évangile de la nuit sainte : la naissance du Seigneur. Les bergers font la garde de nuit (nous aussi ; tout l’Office est en réalité une garde de nuit, une vigile). La clarté céleste les environne, elle nous environne, nous aussi, au moment de l’apparition de l’ange. L’Offertoire nous est déjà connu par les Matines, c’est un écho de l’Évangile. Les anges du ciel entourent la crèche et se réjouissent, mais la terre elle-même encore plongée dans l’obscurité tressaille de joie. C’est dans ces sentiments que nous nous approchons de l’autel : donnons joyeusement en cette fête où nous recevons le don de Dieu. La secrète nous parle d’un merveilleux échange ; Dieu s’est fait Homme pour que l’homme devienne semblable à Dieu. Puis le mystère de la fête se réalise dans le sacrifice. Le Christ naît de nouveau pour nous et en lui nous renaissons. A la table du Seigneur, nous entendons chanter l’éternelle naissance du divin Pontife et notre propre renaissance (Psaume 109, Communion).

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La triple nuit de la naissance.

Les grands actes de l’histoire du monde et de l’humanité s’accomplissent d’ordinaire en jour et le monde en fête aussi le souvenir en plein jour. L’Église, par contre, a préféré, dès le début, le silence solennel de la nuit et, dans l’antiquité, elle a célébré toutes ses fêtes pendant la nuit. En agissant ainsi elle se rappelait les saintes prières de son divin Fondateur qui se prolongeaient pendant toute la nuit. La nuit était aussi le symbole de son éloignement du monde et de son ardent désir de la Parousie. Et c’est pourquoi, aujourd’hui encore, elle fait, de sa plus longue prière, une prière nocturne. Ce sont les Matines. Elle sait aussi que les plus grands événements de la Rédemption se sont accomplis dans l’obscurité de la nuit, loin des regards du monde. Et même la figure de la Rédemption : la délivrance de la servitude d’Égypte, la mort des premiers-nés, l’immolation et la manducation de l’agneau pascal, était déjà une vraie nuit sainte. Le Christ, Notre Seigneur, a institué son sacrement d’amour, l’Eucharistie, le soir, c’est-à-dire déjà dans la nuit. Sans doute, il est mort pendant le jour, sur le Golgotha ; mais le soleil s’obscurcit, ce fut la nuit pendant le jour. C’est avant l’aurore du matin de Pâques, alors qu’il était nuit encore, qu’il ressuscita. Quand il vint au monde, il ne choisit pas la clarté du jour, mais la nuit. La liturgie le dit d’une manière très belle : « Pendant que le silence enveloppait la terre et que la nuit était au milieu de son cours, ta « Parole » toute-puissante, Seigneur, est descendue du ciel, du trône royal. » Quand les chrétiens devinrent plus tièdes, l’Église romaine abandonna l’office de nuit, qui consistait dans la vigile, et passa à l’Office de jour. Même la vigile des vigiles, la nuit de Pâques, n’est plus célébrée actuellement. Mais il nous est resté une nuit sainte, avec tout son charme : c’est cette nuit que nous appelons la nuit de Noël, la nuit de la naissance du Sauveur. Et si cette nuit impressionne si fortement les hommes qui ne connaissent le christianisme que par l’extérieur, que ne doit-elle pas être pour nous, chrétiens, qui pouvons retrouver les pensées et les sentiments de l’Église dans sa liturgie ! Les matines ont rempli la nuit de chants sacrés. Nous avons entendu les prophéties et assisté à leur accomplissement ; nous avons écouté les paroles des quatre Pères de l’Église les plus illustres, qui nous ont expliqué la grandeur de cette nuit. Et maintenant nous sommes sur le point de réaliser en nous tout ce qui a été annoncé dans l’office de la parole de Dieu. La messe nocturne d’aujourd’hui nous parle d’une triple naissance, disons d’une triple naissance nocturne.

1. La première nuit. — L’Église nous conduit dans l’éternité, dans la nuit, avant que se levât « l’étoile du matin ». Dans cette nuit de l’éternité, la seconde Personne divine procède substantiellement du sein du Père. « Dieu de Dieu, lumière de lumière, vrai Dieu de vrai Dieu. » La petite intelligence humaine reste stupéfaite devant ce mystère insondable : le Fils de Dieu né du Père avant tous les temps. Et pourtant cette éternité s’approche maintenant mystérieusement de nous, car, dans la sainte Eucharistie, ce Fils éternel est tout près de nous, l’éternité entre dans notre temps. Oui, dans cette nuit, nous sommes remplis d’un saisissement sacré en face de cette nuit éternelle de la naissance du Fils de Dieu.

2. Cependant le souvenir de cette nuit éternelle n’est que le prélude de cette seconde nuit de naissance qui se passa dans le temps et que nous célébrons. Notre sainte Mère l’Église nous prend par la main et nous conduit dans l’étable de Bethléem ; elle nous montre, au milieu de la nuit, le petit Enfant nouveau-né, qui est en même temps le Roi de la paix ; elle nous montre la Vierge-Mère dans son bonheur maternel. Mais maintenant, à la messe, il y a plus qu’un souvenir et une image de cette sainte nuit de naissance. Le mystère de la messe de minuit c’est que ce Roi, ce Fils de Dieu éternellement engendré, paraît aujourd’hui devant nous comme nouveau-né ; bien plus, choisit notre cœur pour crèche et nous permet de participer aux joies maternelles de Marie.

3. Mais où se trouve la troisième nuit de naissance ? La première était la naissance dans la nuit de l’éternité ; la seconde, la naissance temporelle à Bethléem ; tolites les deux rendues présentes. La troisième naissance est notre renaissance. Chrétiens, cela est si émouvant ! Le Christ s’est fait Homme pour faire de nous ses frères et ses sœurs, afin que nous devenions avec lui des enfants de Dieu, des régénérés. Aujourd’hui c’est la nuit de notre renaissance. Pâques est notre nuit baptismale. Mais, tous les ans, à Noël, l’Église voit se lever de nouveau notre nuit de naissance spirituelle. Nous sommes redevenus de nouveau des enfants de Dieu, après avoir crié vers le ciel, pendant quatre semaines, comme des non rachetés : « Cieux répandez votre rosée, faites pleuvoir le Juste. » Aujourd’hui, à la Communion, quand notre cœur est devenu ta crèche, l’Église ne pense pas seulement au Christ quand elle dit : « Dans les splendeurs de ma sainteté. je t’ai engendré avant l’étoile du matin » ; elle pense aussi à nous et fait entendre à chacun : Dans la nuit de l’éternité, tu as été choisi par le Père ; dans la sainte nuit de la naissance du Christ, tu avais place dans le Cœur du Fils de Dieu nouveau-né qui faisait de toi son frère ou sa sœur ; et maintenant le Père te presse de nouveau sur son sein en te disant : Avec mon Fils qui est né dans l’étable, tu es devenu mon enfant bien-aimé. Tu célèbres, avec le Christ, ta nuit de naissance, une vraie nuit sainte.

Les Laudes.

La première prière du matin qui suit maintenant immédiatement la messe de minuit est, à proprement parler, une préparation à la seconde messe, « la messe de l’aurore ». Les Laudes et la messe se complètent, la messe est une louange eucharistique, c’est pourquoi nous chantons comme psaume principal le psaume 92. Les antiennes des Laudes nous racontent dans un dialogue dramatique l’histoire des bergers pendant la nuit sainte.

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La messe de l’aurore ou messe des bergers (Lux fulgebit)

« L’aurore » indique le temps mais aussi le symbole de la seconde messe. Les deux pensées principales de la messe sont le lever du soleil de Noël et J’événement historique des premières heures du matin (les bergers à la Crèche). A l’Introït, nous contemplons avec étonnement, au lever du soleil, le Roi du monde -qui vient de naître (le psaume 92 convient tout à fait ici : à l’arrière-plan, Dieu nous apparaît mettant un frein à la fureur des flots). L’Oraison est une magnifique prière de lumière. « Environnés des flots de la nouvelle lumière du Verbe incarné », nous demandons la lumière dans la foi et dans les œuvres. L’Épître complète l’oraison. Le bon Sauveur, le Dieu fait homme, est la lumière qui nous a été communiquée au Baptême. Au Graduel, nous louons ce divin Sauveur « qui est venu, qui brille devant nous et qui est admirable à nos yeux », lui le Maître de tout. Puis à l’Évangile, nous suivons, pleins de joie, les bergers dans l’étable. A l’Offrande, nous sommes nous-mêmes les bergers qui nous approchons du Roi nouveau-né que nous sommes admis à contempler. Avec les bergers, nous lui offrons nos présents (ce n’est pas en vain que, dans les représentations des bergers, on les montre les mains chargées de présents) et nous nous retirons le cœur rempli de la joie de Dieu. L’antienne de la Communion nous montre le Roi nouveau-né faisant son entrée dans son Église, dans l’âme. L’attente de l’Avent est remplie : « Tressaille de joie, fille de Sion, jubile, fille de Jérusalem, voici que ton Roi vient, le Saint, le Sauveur du monde. » Cette messe est toute remplie de cette pensée de la lumière et c’est une des plus belles de l’année liturgique.

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L’Office solennel : La troisième messe (Puer natus est)

La messe « du jour » est la messe proprement dite de la fête. L’église de Station était primitivement et est encore, conformément à l’idée de la messe, l’église des Gentils, Saint-Pierre de Rome. Cette église est pour les Romains le symbole de la domination du Christ sur le monde païen. Telle est aussi la pensée dominante de la messe : la royauté universelle du Christ.

A l’Introït, nous chantons le petit Enfant dans sa crèche comme l’Imperator (au sens de la Rome antique) du monde, celui « sur les épaules duquel repose la souveraineté ». Au psaume 97 que nous avons déjà rencontré aux Matines, nous chantons : « Le Seigneur a manifesté son salut, devant les yeux des Gentils, il a dévoilé sa justice. » « Toutes les régions de la terre voient maintenant le salut de notre Dieu. » Dans l’Oraison, nous demandons que « la nouvelle naissance » nous fasse secouer « l’antique joug du péché » et nous donne la liberté. Epître s’adapte merveilleusement à la pensée principale. Devant nos yeux apparaît l’image du souverain de l’univers : « Dieu l’a établi héritier et Seigneur du monde qu’il a créé par lui. Comme splendeur de la gloire du Père et image de sa divine essence, le Fils porte et soutient l’univers par sa parole toute-puissante... maintenant il siège dans le ciel, à la droite de la majesté divine. Le Père dit à son Fils : ton trône, ô Dieu, est établi d’éternité en éternité, un sceptre d’équité est le sceptre de ta royauté... » L’Alleluia est un prélude à l’Évangile de lumière, c’est un chant de lumière : le jour sacré a brillé. Le soleil, le symbole du Sauveur du monde, est, au ciel, dans tout son éclat. Nous entendons alors l’Évangile. Quel n’est pas alors l’effet du Prologue de saint Jean ! Le Logos est la divine lumière qui brille dans les ténèbres du monde, mais le monde ne la comprend pas. Mais pour nous, les enfants de Dieu, elle brille aujourd’hui ; bien plus, elle établit aujourd’hui sa demeure parmi nous. L’Offertoire développe le thème de la souveraineté universelle du Christ : « A toi est le ciel, à toi est la terre..., le droit et la justice sont les soutiens de ton trône. » Quand maintenant, à l’Offrande, nous nous approchons de l’autel, nous venons devant son trône et nous chantons la puissance du grand Roi. A la Communion, nous chantons une fois encore le psaume de l’Introït (psaume 97) : « Toutes les régions de la terre voient maintenant (dans l’Eucharistie) le salut de notre Dieu. » Dans la Postcommunion, après avoir rappelé l’un des objets importants de la fête : « Le Sauveur du monde qui vient de naître est l’auteur de notre naissance divine », nous appuyons sur cette considération notre demande : qu’il nous accorde aussi l’immortalité. Le dernier Évangile est déjà une transition avec l’Épiphanie. Nous avons ainsi dans les trois messes un développement progressif de la pensée de Noël : La nuit — l’aurore — le soleil de midi Marie seule — les bergers (quelques privilégiés) — le monde entier Le Rédempteur — notre Rédempteur — le Rédempteur du monde.

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L’Office solennel : Les Vêpres

les Vêpres sont les derniers échos de la fête. Ces secondes Vêpres de Noël prêtent leur psalmodie à toute l’Octave. Quelles en sont les pensées dominantes ? J’en trouve deux.

a). La personne du Christ. – « Engendré du sein du Père avant l’étoile du matin », « la lumière qui s’est levée dans les ténèbres », « le Seigneur miséricordieux et juste ». La promesse faite à David que son descendant occuperait son trône royal s’est accomplie dans le Christ (psaume 131 ; c’est pour la même raison qu’on trouve le psaume 88 à Matines).

b). La Rédemption. — Noël est la fête de la Rédemption : « Il a envoyé la Rédemption à son peuple, il a conclu avec lui une alliance éternelle. » Ce qui nous surprend le plus dans ces Vêpres, c’est le sombre psaume « De profundis ». Nous avons coutume de le chanter à l’Office des morts et il faut en faire aujourd’hui un psaume de fête et de joie ? La raison de son choix est la pensée de l’ »abondante Rédemption ». Cependant il faut nous efforcer de voir son rapport organique avec la fête. La prière chorale est la prière du Christ mystique. Le Christ crie des profondeurs de l’humiliation où il est descendu « à cause de nous, les hommes » ; petit Enfant, il crie de sa Crèche, il crie du sein de la misère humaine, au nom de l’humanité qui a besoin d’être rachetée : Des profondeurs, je crie vers toi, Seigneur ». On s’en rend compte alors : le Roi a revêtu ses haillons. La belle antienne de Magnificat résume toute la fête : « Aujourd’hui le Christ est né, aujourd’hui le Sauveur est apparu ; aujourd’hui les anges chantent sur la terre, les archanges tressaillent ; aujourd’hui les justes exultent et chantent : Gloire à Dieu dans les hauteurs, Alléluia. »

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Les Saints du jour

Sainte Anastasie. A la seconde messe, on fait mémoire de cette Sainte. On lit dans le martyrologe : « Jour de mort de sainte Anastasie. Elle vécut au temps de l’empereur Dioclétien. Elle eut à souffrir de la part de son mari Publius des traitements durs et cruels, mais elle fut maintes fois consolée et encouragée par le confesseur du Christ Chrysogone. Plus tard elle fut emprisonnée longtemps par le légat d’Illyrie Florus. Enfin on lui lia les mains et les pieds et on l’attacha à un poteau autour duquel on alluma du feu. Elle mourut ainsi de la mort du martyre. Cela se passait dans l’île Palmaria. »

Martyrs de Noël. — « A Nicomédie (Asie Mineure), mémoire de la mort de plusieurs milliers de martyrs. Ils s’étaient rassemblés, le jour de la Nativité de Notre Seigneur, pour célébrer la sainte Eucharistie. Alors l’empereur Dioclétien fit fermer les portes de la maison de Dieu et entasser tout autour des matières inflammables. Devant l’entrée on plaça un trépied avec un brûle-parfums et le héraut fut chargé d’annoncer : « Ceux qui veulent échapper à la mort par le feu doivent sortir et brûler de l’encens devant Jupiter. » Mais tous, d’une seule voix, répondirent qu’ils aimaient mieux mourir pour Jésus-Christ ; alors on alluma le feu qui devait les faire mourir. Ils eurent ainsi le bonheur de naître à la gloire du ciel le jour même où le Christ avait daigné naître comme Sauveur sur la Terre » (Martyrologe).

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[1] les Octaves de Pâques et de la Pentecôte étaient de 1er ordre, celles de l’Épiphanie et de la Fête-Dieu de 2nd ordre, et enfin celles de Noël, de l’Ascension et du Sacré Cœur de 3ème ordre, acceptant les fêtes de saints.

[*]

Communicántes, et noctem sacratíssimam celebrántes, quo beátæ Maríæ intemeráta Virgínitas huic mundo édidit Salvatórem, sed et memóriam venerántes, in primis eiúsdem gloriósæ semper Vírginis Maríæ, Genitrícis Dei et Dómini nostri Iesu Christi :Unis dans une même communion et célébrant la nuit très sainte où la bienheureuse Marie gardant sa virginité sans tâche mit au monde le Sauveur, et honorant la mémoire tout d’abord de la glorieuse Marie toujours Vierge, Mère du même Jésus-Christ notre Dieu et Seigneur...

[**]

Communicántes, et diem sacratíssimum celebrántes, quo beátæ Maríæ intemeráta Virgínitas huic mundo édidit Salvatórem, sed et memóriam venerántes, in primis eiúsdem gloriósæ semper Vírginis Maríæ, Genitrícis Dei et Dómini nostri Iesu Christi :Unis dans une même communion et célébrant le jour très saint où la bienheureuse Marie gardant sa virginité sans tâche mit au monde le Sauveur, et honorant la mémoire tout d’abord de la glorieuse Marie toujours Vierge, Mère du même Jésus-Christ notre Dieu et Seigneur...

[2] 3 Reg. 10, 23.

[3] Luc. 2, 6.

[4] Luc. 21, 31.

[5] Luc. 21, 28.

[6] Dan. 9, 24.

[7] Ps. 18, 6.

[8] « L’époux, c’est le Verbe du Père ; l’épouse, c’est la chair humaine, avec laquelle il est sorti de son lit nuptial, c’est-à-dire du sein de lu Vierge. » (Saint Jérôme).

[9] « Comme aujourd’hui indique le présent et que, dans l’éternité, il n’y a ni passé, ni futur, cette Antienne peut s’appliquer au jour de la naissance temporelle de J.-C. ; mais il vaut mieux ; l’entendre de la génération ininterrompue de la puissance et de la sagesse de Dieu, qui est son Fils unique. » (Saint Augustin).

[10] Ps. 2, 7.

[11] Ps. 18, 6.

[12] « Dieu n’a pas de lèvres ; ce langage suppose l’Incarnation. Il s’agit de cette grâce qui inspirait et accompagnait la prédication de Jésus et ses miracles. Il n’est pas de grâce qui n’ait été répandue dans ce temple de la chair du Christ et nous avons tous reçu de sa plénitude. Il a assumé nos malédictions, afin que nous fussions comblés de bénédictions. » (Saint Chrysostome).

[13] Ps. 44, 2.

[14] Ps. 18, 6.

[15] « Les Leçons du 1er Nocturne se lisent aujourd’hui sans titre, soit parce que l’on en connaît l’auteur puisqu’on a lu Isaïe dans tout l’Avent, soit parce qu’à Noël Dieu nous parle, non plus par les Prophètes, mais par son Fils. » (Maugère).

[17] « Cette contrée fut d’abord allégée du fardeau des péchés parce qu’elle vit à Cana le premier miracle de Jésus, et qu’il commença la prédication de l’Évangile dans le pays de ces deux tribus (voyez Saint Mat., 4, 12, et Saint Jean, 2, 11). Là demeuraient les Apôtres, nos chefs dans la foi. » (Saint Jérôme).

[18] La lumière de l’Évangile. « Entre la mort et l’ombre de la mort, il y a, je crois, cette différence, que la mort s’entend de ceux qui, avec leurs œuvres mortes, sont déjà descendus dans la tombe ; tandis que l’ombre de la mort s’entend des pécheurs qui ne sont pas sortis de cette vie et .peuvent faire pénitence, s’ils le veulent. (Saint Jérôme).

[19] « Les Apôtres, quand la famille des chrétiens aura été assemblée d’entre les Nations. » (Saint Jérôme).

[20] « C’est-à-dire du diable, qui commandait aux Nations et les opprimait. Le feu détruira les vêtements souillés, butin du démon ; et il sera obligé de rendre, avec leur parure primitive, les âmes qu’il avait dépouillées de leur robe d’innocence, c’est-à-dire de la grâce de Dieu. > (Saint Jérôme).

[21] La croix que le Sauveur a portée sur ses épaules, comme marque de sa royauté.

[22] Luc. 2, 14.

[23] On ajoute aujourd’hui à ce Répons le Gloria Patri, pour remercier Dieu du grand bienfait qui vient d’être annoncé.

[24] Le double, c’est-à-dire un double châtiment, suivant quelques interprètes ; une double grâce, suivant les autres.

[25] « Nous devons rendre droits les sentiers de nos cœurs pour Dieu, nous remplir de vertus, nous abaisser dans l’humilité ; il nous faut redresser ce qui est tortu et adoucir toutes les aspérités, et nous mériterons ainsi de voir le salut de Dieu. » (Saint Jérôme).

[26] « La juste colère de Dieu a soufflé sur la chair qui porte l’image de l’Adam terrestre ; quant à l’homme qui a et qui garde la céleste ressemblance, il est la chair qui voit le salut de Dieu, et qui, chaque jour, se renouvelle dans la connaissance de son Créateur. » (Saint Jérôme).

[27] « Quelle espérance peut avoir ce qui n’est que de l’herbe ? Quelle durée peut avoir une fleur ? Pour nous attacher à Lui et pour ne pas nous laisser passer comme la fleur de l’herbe, le Verbe de Dieu a pris une chair sans se changer en chair ; restant ce qu’il était, Il s’est uni à ce qu’il n’était pas. Le Verbe de Dieu couvre cette herbe d’une gloire qui n’est point passagère, en conférant l’immortalité à la chair. » (Saint Augustin. Sermon 124e sur saint Jean.).

[28] « Il ne s’agit pas ici d’incirconcision de la chair, mais d’impureté ou de pureté des œuvres. En effet, quelle union peut-il y avoir entre la justice et l’iniquité ? Ces promesses étaient faites conditionnellement au peuple choisi. » (Saint Jérôme).

[29] En se livrant au péché, ils n’en ont retiré aucun bénéfice, et ils n’ont rien fait de méritoire qui puisse être le prix de leur rachat ; c’est le sang de N. S. qui a payé notre délivrance.

[30] C’est-à-dire les rois d’Assyrie, auxquels succédèrent les rois de Chaldée.

[31] De la voie droite, pour être vendu à ses péchés.

[32] Ps. 47, 9

[33] Ps. 71, 6

[34] « Le Christ, lui qui est la Vérité éternelle, est né d’une femme, afin que les hommes fussent justifiés par la grâce divine. » (Saint Augustin).

[35] Ps. 84, 11.

[36] Ps. 44, 2.

[37] Cf. Is. 1, 3.

[38] Luc. 1, 28.

[39] Job. 14, 4 (version des Septante).

[40] Luc. 1, 42.

[41] Ephés. 2, 4. Col. 3, 9.

[42] Col. 3, 9.

[43] 2 Petr. 1, 4.

[44] Col. 1, 13.

[45] Luc. 1, 28.

[46] On multiplie les alléluias aux Antiennes, parce que le troisième Nocturne signifie le temps de grâce, dans lequel nous devons exprimer la joie qui nous est apportée par la naissance du Christ. Il y a trois Évangiles, pour correspondre à l’Évangile de chacune des trois Messes. « L’Église veut ainsi nous montrer que l’une et l’autre nature se trouvent réunies dans le Christ. » (Durand de Mende).

[47] Ps. 88, 26.

[48] Ps. 95, 12.

[49] « Le salut de Dieu, c’est notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ. » (Saint Augustin). « ans l’hébreu, on lit : Le Seigneur a fait connaître son Jésus ; car partout où se trouve le mot de Sauveur, l’hébreu met le nom de Jésus. » (Saint Jérôme).

[50] Ps. 97, 3.

[51] Ps. 88, 26.

[52] Ps. 68, 29.

[53] Johna. 6, 51.

[54] Apoc. 3, 2.

[55] Johan. 1, 14.

[56] Ibid., 3.

[57] Luc. 2, 10.

[58] Luc. 2, 13.

[59] Is. 9, 6

[60] Principe, c’est-à-dire, suivant la plupart des Pères, la domination, la principauté. « Elle est avec le Fils de Dieu, c’est-à-dire dans son essence, dans sa nature, ce qui n’a pas lieu pour les rois, car leur domination ne peut se passer d’un appui étranger. La domination n’est pas chez le Christ une chose venue du dehors, il est né tel, lorsqu’il est venu en ce monde supprimer la malédiction originelle et détruire tout ce triste héritage de maux que nous avait légué le temps passé. » (Saint Chrysostome).

[61] C’est-à-dire de toute éternité, puisque la génération et le règne de J.-C., comme Dieu, sont éternels ; ou encore, suivant saint Augustin, saint Chrysostome et d’autres Pères, au jour où J.-C., entouré de ses Anges et de ses Saints, viendra juger le monde.

[62] Ps. 109, 3.

[63] Ps. 110, 9.

[64] « Les ténèbres couvraient la terre et l’océan, l’erreur était répandue partout : alors, d’en bas, se leva le soleil de justice. En effet, comme les hommes d’alors, oubliant le Ciel, cherchaient Dieu sur la terre, c’est là qu’il leur apparut dans sa condescendance pour leur faiblesse, afin de les élever aux plus sublimes hauteurs. » (Saint Chrysostome).

[65] Ps. 111, 4.

[66] Ps. 129, 7.

[67] Ps. 131, 11.

[68] Ps. 97, 2.

[69] Hebr. X, 7.

[70] Ephes. IV, 13.

[71] Dom Guéranger décrit les Laudes telles qu’avant la réforme du psautier de St Pie X.

[72] Cf. note précédente.

[73] II Petr. I, 19.

[74] I Thess. V , 5.

[75] In Natalem Domini, V, § 4.

[76] Ibid. § 3.

[77] Méditations sur la Vie de Jésus-Christ, par saint Bonaventure. Traduction du R. P. Dom François Le Bannier.

[78] P. L., LXXVIII, col. 1181.

[79] Ord, Bened. Canonici ; P. L., LXXVIII, col. 1032.