Textes de la Messe |
In Octava S. Ioannis |
Octave de Saint Jean |
Office |
Dom Guéranger, l’Année Liturgique |
Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum |
Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique |
Cette Octave fut supprimée en 1955 (voir décret § 14), on dit normalement la Messe des Féries du 2 au 5 janvier, sauf le Dimanche qui est la Fête du Saint Nom de Jésus.
In Octava S. Ioannis |
Octave de Saint Jean |
Missa In médio, ut in Festo ; omittuntur tamen Commemoratio de Nativitáte et Credo, ac dicitur Præfatio de Apostolis. | Messe In médio, comme à la Fête ; on omet cependant la commémoraison de la Nativité et le Credo, et on dit la préface des Apôtres. |
Ant. ad Introitum. Eccli. 15, 5. | Introït |
In médio Ecclésiæ apéruit os eius : et implévit eum Dóminus spíritu sapiéntiæ et intelléctus : stolam glóriæ índuit eum. | Dans l’Eglise, le Seigneur l’a chargé d’enseigner. Il l’a pénétré de l’esprit de sagesse et d’intelligence. Il l’a revêtu d’un vêtement de gloire. |
Ps. 91, 2. | |
Bonum est confitéri Dómino : et psállere nómini tuo, Altíssime. | Qu’il est bon de proclamer sa foi dans le Seigneur et de chanter ton nom Dieu Très Haut. |
V/.Glória Patri. | |
Oratio. | Collecte |
Ecclésiam tuam, Dómine, benígnus illústra : ut, beáti Ioánnis Apóstoli tui et Evangelístæ illumináta doctrínis, ad dona pervéniat sempitérna. Per Dóminum. | Dans votre bonté, Seigneur, accordez la lumière à votre Église, afin qu’éclairée par les enseignements de saint Jean, votre Apôtre et Évangeliste, elle parvienne aux grâces éternelles. |
Lectio libri Sapiéntiæ. | Lecture du Livre de la Sagesse. |
Eccli. 15, 1-6. | |
Qui timet Deum, fáciet bona : et qui cóntinens est iustítiæ, apprehéndet illam, et obviábit illi quasi mater honorificáta. Cibábit illum pane vitæ et intelléctus, et aqua sapiéntiæ salutáris potábit illum : et firmábitur in illo, et non flectétur : et continébit illum, et non confundétur : et exaltábit illum apud próximos suos, et in médio ecclésiæ apériet os eius, et adimplébit illum spíritu sapiéntiæ et intelléctus, et stola glóriæ véstiet illum. Iucunditátem et exsultatiónem thesaurizábit super illum, et nómine ætérno hereditábit illum, Dóminus, Deus noster. | Voilà ce que fait celui qui craint le Seigneur, et celui qui s’attache à la loi obtiendra la sagesse. Elle viendra au-devant de lui comme une mère, Elle le nourrira du pain de l’intelligence, et lui donnera à boire l’eau de la sagesse. Il s’appuiera sur elle et ne fléchira pas, Il s’attachera à elle et ne sera pas confondu. Elle l’élèvera devant ses compagnons, et lui ouvrira la bouche au milieu de l’assemblée. Elle le remplira d’un esprit de sagesse et d’intelligence et le revêtira d’un vêtement de gloire. La joie, une couronne d’allégresse, et un nom éternel seront son partage. |
Graduale. Ioann. 21, 23 et 19. | Graduel |
Exiit sermo inter fratres, quod discípulus ille non móritur : et non dixit Iesus : Non móritur. | Le bruit courut parmi les disciples que Jean ne mourrait pas. Pourtant, Jésus n’a pas dit : il ne mourra pas. |
V/.Sed : Sic eum volo manére, donec véniam : tu me séquere. | Mais seulement : si je veux qu’il demeure jusqu’à mon retour ? toi, suis-moi. |
Allelúia, allelúia. V/.Ibid., 24. Hic est discípulus ille, qui testimónium pérhibet de his : et scimus, quia verum est testimónium eius. Allelúia. | Allelúia, allelúia. V/. C’est ce disciple qui rend témoignage de ces faits, et nous savons que son témoignage est véridique. Alléluia. |
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Joánnem. | Lecture du Saint Evangile selon saint Jean . |
Ioann. 21, 19-24. | |
In illo témpore : Dixit Iesus Petro : Séquere me. Convérsus Petrus vidit illum discípulum, quem diligébat Iesus, sequéntem, qui et recúbuit in cena super pectus eius, et dixit : Dómine, quis est qui tradet te ? Hunc ergo cum vidísset Petrus, dixit Iesu : Dómine, hic autem quid ? Dicit ei Iesus : Sic eum volo manére, donec véniam, quid ad te ? tu me séquere. Exiit ergo sermo iste inter fratres, quia discípulus ille non móritur. Et non dixit ei Iesus : Non móritur ; sed : Sic eum volo manére, donec véniam : quid ad te ? Hic est discípulus ille, qui testimónium pérhibet de his, et scripsit hæc : et scimus, quia verum est testimónium eius. | En ce temps là, Jésus dit à Pierre : "Suis-moi". Pierre, s’étant retourné, vit venir derrière lui, le disciple que Jésus aimait, celui qui, pendant la cène, s’était penché sur son sein, et lui avait dit : "Seigneur, qui est celui qui vous trahit ?" Pierre donc, l’ayant vu, dit à Jésus : "Seigneur, et celui-ci que deviendra-t-il ?" Jésus lui dit : " Si je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne, que t’importe ? Toi, suis-moi !" Le bruit courut donc parmi les frères que ce disciple ne mourrait point. Pourtant Jésus ne lui avait pas dit qu’il ne mourrait pas, mais "Si je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne, que t’importe ?" C’est ce même disciple qui rend témoignage de ces choses et qui les a écrites ; et nous savons que son témoignage est vrai. |
Ant. ad Offertorium. Ps. 91, 13. | Offertoire |
Iustus ut palma florébit : sicut cedrus, quæ in Líbano est, mulliplicábitur. | Le Juste s’épanouit comme le palmier ; il s’élève comme le cèdre du Liban. |
Secreta. | Secrète |
Súscipe, Dómine, múnera, quæ in eius tibi sollemnitáte deférimus, cuius nos confídimus patrocínio liberári. Per Dóminum. | Acceptez, Seigneur, les offrandes que nous vous présentons en la solennité de celui dont nous comptons sur l’appui pour notre libération. |
Præfatio de Apostolis. | Préface des Apôtres . |
Ant. ad Communionem. Ioann. 21, 23. | Communion |
Exiit sermo inter fratres, quod discípulus ille non móritur : et non dixit Iesus : Non móritur ; sed : Sic eum volo manére, donec véniam. | Le bruit courut parmi les disciples que Jean ne mourrait pas. Pourtant, Jésus n’a pas dit : il ne mourra pas. Mais seulement : si je veux qu’il demeure jusqu’à mon retour ! |
Postcommunio. | Postcommunion |
Refécti cibo potúque cœlésti, Deus noster, te súpplices deprecámur : ut, in cuius hæc commemoratióne percépimus, eius muniámur et précibus. Per Dóminum. | Seigneur notre Dieu, nous voici réconfortés par le pain et le vin de ce sacrement. Et puisque nous les avons reçus pour célébrer la fête de saint Jean, nous vous demandons aussi le secours de ses prières. |
A MATINES. avant 1955
Au nocturne.
De l’Épître aux Romains. Cap. 6, 1-11 (1-18)
Première leçon. Que dirons-nous donc ? Demeurerons-nous dans le péché, pour que la grâce abonde ? A Dieu ne plaise ! Car nous qui sommes morts au péché, comment y vivrons-nous encore ? Ignorez-vous que nous tous qui avons été baptisés dans le Christ Jésus, nous avons été baptisés en sa mort ? Car nous avons été ensevelis avec lui par le baptême pour mourir, afin que, comme le Christ est ressuscité des morts par ta gloire du Père, nous aussi nous marchions dans une nouveauté de vie. Si, en effet, nous avons été entés en la ressemblance de sa mort, nous le serons aussi en celle de sa résurrection.
R/. Félicitez-moi, vous tous qui aimez le Seigneur : * Parce que, tandis que j’étais petite, j’ai plu au Très-Haut, et de mon sein j’ai engendré un Homme-Dieu. V/. Toutes les nations m’appelleront bienheureuse, parce que Dieu a regardé son humble servante. * Parce que.
Deuxième leçon. Sachant bien que notre vieil homme a été crucifié avec lui, afin que le corps du péché soit détruit, et que désormais nous ne soyons plus esclaves du péché. Attendu que celui qui est mort est justifié du péché. Si donc nous sommes morts avec le Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec le Christ, sachant bien que le Christ ressuscité d’entre les morts ne meurt plus ; la mort ne dominera plus sur lui. Car s’il est mort pour le péché, il est mort une seule fois ; et s’il vit, il vit pour Dieu. Ainsi pour vous, estimez que vous êtes morts au péché, mais vivants à Dieu dans le Christ Jésus notre Seigneur.
R/. Le cœur de la Vierge a été fortifié ; à la parole de l’Ange elle a conçu les mystères divins ; alors, dans ses chastes entrailles, elle a reçu le plus beau des enfants des hommes * Et, bénie à jamais, elle nous a donné celui qui est Dieu et homme. V/. La demeure d’un sein pudique devient soudain le temple de Dieu ; la Vierge, intacte et pure, conçoit un Fils à la parole de l’Ange. * Et.
Si l’office est de 9 leçons, on dit la troisième suivante, sinon on dit la leçon de ST Augustin plus bas.
Troisième leçon. Que le 1 péché donc ne règne point dans votre corps mortel, en sorte que vous obéissiez à ses convoitises. Et n’abandonnez point vos membres au péché comme des instruments d’iniquité, mais offrez-vous à Dieu comme devenus vivants, de morts que vous étiez, et vos membres à Dieu, comme des instruments de justice. Car le péché ne vous dominera plus, parce que vous n’êtes pas sous la loi, mais sous la grâce. Quoi donc ? Pécherons-nous, parce que nous ne sommes pas sous la loi, mais sous la grâce ? Dieu nous en garde. Ne savez-vous pas que lorsque vous vous rendez esclave de quelqu’un pour lui obéir, vous êtes esclave de celui à qui vous obéissez, soit du péché pour la mort, soit de l’obéissance pour la justice ? Mais grâces soient rendues à Dieu de ce qu’ayant été esclaves du péché, vous avez obéi du fond du cœur à ce modèle de doctrine sur lequel vous avez été formés. Ainsi, affranchis du péché, vous êtes devenus esclaves de la justice.
R/. Vous êtes bénie et digne de tout respect, Vierge Marie, qui, sans rien perdre de votre pureté, vous êtes trouvée ta Mère du Sauveur : * Il était couché dans la crèche, et il brillait dans le Ciel. V/. Seigneur, j’ai entendu votre parole et j’ai craint ; j’ai considéré vos œuvres et j’ai été saisi de frayeur : entre deux animaux. * Il était couché. Gloire au Père. * Il était couché.
Du Traité de S. Augustin, Évêque, sur Saint Jean
Troisième leçon. Des quatre Évangiles, ou plutôt des quatre livres du même Évangile, le plus élevé et le plus sublime, à beaucoup près, est celui de saint Jean. Cet Apôtre a été, justement et dans un sens spirituel, comparé à un aigle ; aussi son livre a-t-il surpassé les trois autres, et, en s’élevant au-dessus d’eux, a-t-il lui-même voulu nous engager- à porter haut nos affections. En effet, les autres Évangélistes semblent marcher sur la terre avec Jésus-Christ considéré comme homme, ils ont dit peu de chose de sa divinité ; mais Jean, comme s’il eût regretté de vivre encore ici-bas, a élevé la voix à tel point que, dès le commencement de son écrit, il s’est placé non seulement au-dessus de la terre, de l’atmosphère et des astres, mais même au-dessus de l’armée des Anges et de toutes les puissances invisibles établies par le Seigneur ; il est ainsi arrivé jusqu’à celui qui a créé toutes choses, car il a dit : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu. »
L’Octave de saint Jean achève aujourd’hui son cours : nous avons un dernier tribut d’hommages à rendre au Disciple bien-aimé. Le Cycle sacré nous ramènera encore sa glorieuse mémoire, au six du mois de Mai, lorsque, parmi les joies de la Résurrection de son Maître, nous célébrerons sa courageuse Confession dans Rome, au milieu des feux de la Porte Latine ; aujourd’hui, acquittons notre reconnaissance envers lui pour les faveurs qu’il nous a obtenues de la miséricorde du divin Enfant, en repassant encore quelques-unes des faveurs qu’il a reçues de l’Emmanuel.
L’Apostolat de Jean fut fécond en œuvres de salut pour les peuples vers lesquels il fut envoyé. La nation des Parthes reçut de lui l’Évangile, et il fonda la plupart des Églises de l’Asie-Mineure : entre lesquelles sept ont été choisies avec leurs Anges par le Christ lui-même dans la divine Apocalypse, pour figurer les diverses classes de pasteurs, et peut-être, comme plusieurs l’ont pensé, les sept âges de l’Église elle-même. Nous ne devons pas oublier que ces Églises de l’Asie-Mineure, encore toutes remplies de la doctrine de saint Jean, députèrent des Apôtres dans les Gaules, et que l’illustre Église de Lyon est une des conquêtes de cette pacifique expédition. Bientôt, dans ce saint Temps de Noël lui-même, nous honorerons l’héroïque Polycarpe, l’Ange de Smyrne, disciple de saint Jean, et dont fut disciple lui-même saint Pothin, qui fut le premier évêque de Lyon.
Mais les travaux apostoliques de saint Jean ne le détournèrent pas des soins que sa tendresse filiale et la confiance du Sauveur lui imposaient à l’égard de la très pure Marie. Aussi longtemps que le Christ la jugea nécessaire à l’affermissement de son Église, Jean eut l’insigne faveur de jouir de sa société, de pouvoir l’environner des marques de sa tendresse, jusqu’à ce que, après avoir habité Ephèse avec lui, elle retourna dans sa compagnie à Jérusalem, d’où elle s’éleva du désert de ce monde jusqu’au ciel, comme chante l’Église, semblable à un léger nuage de myrrhe et d’encens. Jean eut encore à survivre à cette seconde séparation, et attendit, dans les labeurs de l’apostolat, le jour où il lui serait donné à lui-même de monter vers cette région fortunée où son divin Ami et son incomparable Mère l’attendaient.
Les Apôtres, ces vives lumières établies sur le chandelier parla main du Christ lui-même, s’éteignaient successivement par la mort du martyre ; et lui, restait seul debout dans l’Église de Dieu. Ses cheveux blancs, comme nous l’apprennent les anciens, étaient ceints d’une lame d’or pour marquer sa qualité de Pontife ; les Églises recueillaient les paroles de sa bouche inspirée comme la règle de leur foi ; et sa prophétie de Pathmos montrait que les secrets de l’avenir de l’Église étaient dévoilés à ses yeux. Au milieu de tant de gloire, Jean était humble et simple comme l’Enfant de Bethléhem, et l’on se sent attendri par ces antiques récits qui nous le montrent pressant dans ses mains sacrées un oiseau qu’il caressait avec tendresse.
Ce vieillard qui, dans ses jeunes années, avait reposé sur la poitrine de Celui dont les délices sont d’être avec les enfants des hommes ; lui, le seul des Apôtres qui l’avait suivi jusqu’à la Croix, et qui avait vu ouvrir parla lance ce Cœur qui a tant aimé le monde, se plaisait surtout à parler de la charité fraternelle. Sa miséricorde pour les pécheurs était digne de l’ami du Rédempteur, et l’on connaît cette poursuite évangélique qu’il entreprit contre un jeune homme dont il avait aimé l’âme d’un amour de père, et qui s’était livré, pendant l’absence du saint Apôtre, à tous les désordres. Malgré son grand âge, Jean l’atteignit dans les montagnes, et le ramena pénitent au bercail. Mais cet homme si merveilleux dans la charité, était inflexible contre l’hérésie qui anéantit la charité dans sa source, en ruinant la foi. C’est de lui que l’Église a reçu sa maxime de fuir l’hérétique comme la peste : Ne lui donnez pas même le salut, dit cet ami du Christ dans sa seconde Épître ; car celui qui le salue communique à ses œuvres de malice. Un jour, étant entré dans un bain public, il sut que l’hérésiarque Cérinthe s’y trouvait avec lui, et il en sortit à l’instant comme d’un lieu maudit. Aussi les disciples de Cérinthe tentèrent-ils de l’empoisonner dans une coupe dont il se servait ; mais le saint Apôtre ayant fait le signe de la croix sur le breuvage, il en sortit un serpent qui témoigna de la malice des sectaires et de la sainteté du disciple du Christ. Cette fermeté apostolique dans la garde du dépôt de la foi le rendit la terreur des hérétiques de l’Asie, et, par là, il justifia ce nom prophétique de Fils du Tonnerre que le Sauveur lui avait donné, ainsi qu’à son frère Jacques le Majeur, l’Apôtre du royaume Catholique.
En mémoire du miracle que nous venons de rapporter, la tradition des arts catholiques a donné pour emblème à saint Jean un calice duquel sort un serpent ; et, dans plusieurs provinces de la chrétienté, en Allemagne principalement, le jour de la fête de cet Apôtre, on bénit solennellement du vin avec une prière qui rappelle cet événement. On a aussi, dans ces contrées, l’usage de boire, à la fin du repas, un dernier coup qu’on appelle le coup de saint Jean, comme pour mettre sous sa protection la réfection qu’on vient de prendre.
La place nous manque pour raconter en détail diverses traditions sur notre Apôtre, auxquelles il est fait allusion dans plusieurs des pièces liturgiques du moyen âge que nous avons citées : on peut les voir dans les légendaires ; nous nous bornerons à dire ici quelque chose au sujet de sa mort.
Le passage de l’Évangile qu’on lit à la Messe de saint Jean a été souvent interprété dans ce sens que le Disciple bien-aimé ne devait pas mourir ; cependant il faut bien reconnaître que le texte s’explique sans recourir à cette interprétation. L’Église Grecque, comme nous l’avons vu dans ses Offices, professe la croyance au privilège de l’exemption de la mort accordé à saint Jean ; et ce sentiment de plusieurs anciens Pères est reproduit dans quelques-unes des Séquences ou Hymnes des Églises d’Occident que nous avons données, ou que nous avons cru devoir promettre. L’Église Romaine semblerait y incliner dans le choix des paroles de l’une des Antiennes des Laudes de la Fête ; cependant on doit reconnaître qu’elle n’a jamais favorisé ce sentiment, bien qu’elle n’ait pas cru devoir l’improuver. D’un autre côté, le tombeau du saint Apôtre a existé à Éphèse ; les monuments de la tradition en font mention, et aussi des prodiges d’une manne miraculeuse qu’on en a retirée pendant plusieurs siècles.
Il est surprenant toutefois que le corps de saint Jean n’ait été l’objet d’aucune translation ; aucune Église ne s’est jamais vantée de le posséder ; et quant aux reliques particulières de cet Apôtre, elles sont en très petit nombre dans l’Église, et leur nature est demeurée toujours assez vague. A Rome, lorsqu’on demande des reliques de saint Jean, on n’en obtient jamais que de son sépulcre. Il est impossible, après tous ces faits, de ne pas reconnaître quelque chose de mystérieux dans la disparition totale du corps d’un personnage si cher à toute l’Église, tandis que les corps de tous ses autres collègues dans l’Apostolat ont une histoire plus ou moins suivie, et que tant d’Églises se les disputent, par parties ou en entier. Le Sauveur a-t-il voulu glorifier, avant le jour du jugement, le corps de son ami ? L’a-t-il soustrait à tous les regards, comme celui de Moïse, dans les desseins impénétrables de sa sagesse ? Ces questions ne seront probablement jamais résolues sur la terre ; mais on ne saurait s’empêcher de reconnaître, avec tant de saints docteurs, dans le mystère dont le Seigneur s’est plu à environner le corps virginal de saint Jean, comme un nouveau signe de l’admirable chasteté de ce grand Apôtre.
Le Bréviaire Mozarabe contient cette belle prière, en l’Office de saint Jean l’Evangéliste :
CAPITULE.
Les sources vives de votre cœur, Seigneur, sont ineffables, ces sources auxquelles votre bien-aimé disciple, appuyé sur votre sein, a mérité de se désaltérer ; accordez-nous donc de nous attacher étroitement à vos traces, par la mortification de nos sens, et faites, par l’intercession de saint Jean, que le feu de votre amour nous brûle et nous consume, jusqu’à nous rendre un holocauste complet et agréable à vos yeux.
Nous emprunterons aussi la prière suivante au Missel de la même Église Gothique d’Espagne :
ORATIO
Voyez, voyez, ô Dieu ! les péchés qui nous accablent, et comment, tous les jours, nos œuvres produisent en nous un poison, et nous méritent des supplices, souillés que nous sommes par le venin journalier de notre chair, sans songer à réparer nos forces par l’amendement d’une vie meilleure. O vous qui êtes toujours clément ! vous voyez ces choses, et vous attendez que nous revenions à vous par une humble confession ; c’est pourquoi nous implorons l’intercession de Jean votre Apôtre, qui, ayant bu un poison mortel, non seulement en fut délivré par l’invocation de votre Nom,mais encore ressuscita ceux que ce breuvage avait fait périr. Eloignez de nous la licence enflammée de notre chair, et le venin des suggestions de l’ancien ennemi, afin que, nous qui vous honorons dans la foi, soyons délivrés du poison secret de nos vices, comme l’Apôtre Jean demeura intact du venin qu’on lui avait présenté.
Voici encore quelques strophes tirées des Menées des Grecs, en l’honneur de l’Apôtre :
Le moyen âge des Églises Latines a été fécond sur la louange de saint Jean, et nous a laissé de nombreuses Séquences en son honneur. Nous en donnerons deux seulement, en commençant par celle d’Adam de Saint-Victor, que nous choisissons comme la plus belle des quatre que le grand lyrique du moyen âge nous a laissées.
Le beau Cantique qui suit est tiré des anciens Missels des Églises d’Allemagne :
Nous vous saluons aujourd’hui, le cœur plein de reconnaissance, ô bienheureux Jean ! qui nous avez assistés avec une si tendre charité dans la célébration des mystères de la Nativité de votre divin Roi. En relevant vos ineffables prérogatives, nous rendons gloire à Celui qui vous en a décoré. Soyez donc béni, ô vous l’ami de Jésus, le Fils de la Vierge ! Mais avant de nous quitter, recevez encore nos prières.
Apôtre de la charité fraternelle, obtenez que nos cœurs se fondent tous dans une sainte union ; que les divisions cessent ; que la simplicité de la colombe, dont vous avez été un exemple si touchant, renaisse au cœur du chrétien de nos jours. Que la foi, sans laquelle la charité ne saurait exister, se maintienne pure dans nos Églises ; que le serpent de l’hérésie soit écrasé, et que ses affreux breuvages ne soient plus présentés aux lèvres d’un peuple complice ou indifférent ; que l’attachement à la doctrine de l’Église soit ferme et énergique dans les cœurs catholiques ; que les mélanges profanes, la lâche tolérance des erreurs ne viennent plus affadir les mœurs religieuses de nos pères ; que les enfants de lumière se tranchent d’avec les enfants de ténèbres.
Souvenez-vous, ô saint Prophète, de la sublime vision dans laquelle vous fut révélé l’état des Églises de l’Asie-Mineure : obtenez pour les Anges qui gouvernent les nôtres cette fidélité inviolable qui mérite seule la couronne et la victoire. Priez aussi pour les contrées que vous avez évangélisées, et qui méritèrent de perdre la foi. Assez longtemps elles ont souffert l’esclavage et la dégradation ; il est temps qu’elles se régénèrent par Jésus-Christ et son Église Du haut du ciel, envoyez la paix à votre Église d’Éphèse, et à ses sœurs de Smyrne, de Pergame, de Thyatire, de Sardes, de Philadelphie et de Laodicée ; qu’elles se réveillent de leur sommeil ; qu’elles sortent de leurs tombeaux ; que l’Islamisme achève promptement ses tristes destinées ; que le schisme et l’hérésie qui dégradent l’Orient s’éteignent, et que tout le troupeau se réunisse dans l’unique bercail. Protégez la sainte Église Romaine qui fut témoin de votre glorieuse Confession, et l’a enregistrée parmi ses plus beaux titres de gloire, à la suite de celles de Pierre et de Paul. Qu’elle reçoive, de nos jours où la moisson blanchit de toutes parts, une nouvelle effusion de lumière et de charité. Enfin, ô Disciple bien-aimé du Sauveur des hommes, obtenez que nous soyons admis, au dernier jour, à contempler la gloire de votre corps virginal ; et après nous avoir présentés sur cette terre à Jésus et à Marie, en Bethléhem, présentez-nous alors à Jésus et à Marie, dans les splendeurs de l’éternité.
La messe est identique à celle de la fête, mais on dit la préface des apôtres.
C’est le bienheureux Évangéliste et Apôtre Jean qui eut la grâce, Par suite du privilège de son amour spécial, d’être estimé par le Seigneur plus que tous les autres Apôtres (Rép.).
1. Le jour de la fête, nous avons vu saint Jean surtout dans la suite du Roi portant l’étendard des âmes virginales. Aujourd’hui, au jour de son Octave, nous contemplons sa personne et son importance pour l’Église. Il est vraiment le grand docteur dont le Seigneur « a ouvert la bouche au milieu de l’Église » (Intr.). Saint Jean a exercé, dans la suite, une grande influence sur la constitution de la liturgie. Son portrait du Christ est celui de notre liturgie : « Parmi les quatre Évangiles, ou pour mieux dire, les quatre livres du même Évangile, saint Jean, qui, à cause de son élévation de pensée, est à bon droit comparé à un aigle, a donné une doctrine plus élevée et plus sublime que les trois autres. Et il veut que, dans sa sublimité, nos cœurs aussi s’élèvent... Car les trois autres Évangélistes ont, pour ainsi dire, suivi l’Homme (le Christ) dans son cheminement terrestre et ne nous ont dit que peu de choses de sa divinité. Quant à saint Jean, comme s’il dédaignait de marcher sur la terre, il s’est élevé dès le début de son Évangile non seulement au-dessus de la terre et de toutes les sphères de l’air et du ciel, mais encore au-dessus des phalanges angéliques... et est arrivé, ainsi, jusqu’à Celui par qui tout a été fait » (Saint Augustin ; au bréviaire d’aujourd’hui).
La liturgie nous montre presque chaque jour Notre Seigneur en trois images que saint Jean a tracées : le Verbe (le Logos), l’Agneau et le Roi. Chaque jour à la messe, nous lisons le Prologue de saint Jean qui nous élève jusqu’aux hauteurs inaccessibles de la divinité dont nous scrutons les profondeurs, et à la fin nous tombons à genoux à cette parole : « Et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous ». Chaque jour, au Gloria in excelsis et à l’Agnus Dei., nous chantons l’Agneau divin qui « enlève les péchés du monde ». Saint Jean a recueilli cette image du Seigneur qui lui est chère des lèvres de son premier maître Jean-Baptiste, comme un précieux héritage que, toute sa vie, il a gardé fidèlement, comme nous pouvons nous en rendre compte dans l’Apocalypse. Cette image est le plus parfait symbole du Christ s’immolant au Saint-Sacrifice de la messe. L’image du Christ-Roi se trouve également chez d’autres auteurs sacrés (saint Paul, saint Pierre). Cependant c’est saint Jean qui la présente de la façon la plus constante dans son Évangile et dans son Apocalypse.. Rappelons-nous que cette image apparaît dans chaque conclusion d’oraison :»qui vit et règne ». Dans nos prières d’aujourd’hui, demandons une étincelle de cet amour du Christ qui animait le disciple de l’amour.
2. Lecture d’Écriture (Rom. chap. VI). — Saint Paul explique maintenant que le chrétien n’a plus rien à faire avec le péché, car 1° le vieil homme a été enseveli au Baptême avec le Christ et un homme nouveau est sorti de l’eau, 2° il a été crucifié avec le Christ et est ressuscité avec lui. Il s’ensuit qu’il est mort pour toujours au péché. « Comment pouvons nous, nous qui sommes morts au péché, vivre encore dans le péché ? Ou bien ne savez-vous pas que nous tous, qui avons été baptisés dans le Christ, avons été baptisés dans sa mort ? Nous avons été ensevelis avec lui par le Baptême dans sa mort, afin que, de même que le Christ est ressuscité des morts, nous marchions dans la nouveauté de vie par la gloire du Père... Car si nous avons été greffés sur lui dans l’imitation de sa mort nous le serons aussi dans la ressemblance de sa résurrection. Alors nous reconnaissons que notre vieil homme a été crucifié avec lui afin que le corps de péché soit détruit et que nous ne servions plus le péché... Mais si nous sommes morts avec le Christ, de même, nous le croyons, nous vivrons avec lui... » (Dans ce verset se trouve le germe de la liturgie de Pâques). Saint Paul complète son exposé par l’image de la situation d’esclave. Auparavant nous étions les esclaves du tyran qu’est le péché, les fruits étaient des actes dont nous devons rougir, la fin en était la mort. Maintenant nous devons nous placer tout à fait dans le nouveau service. Les fruits en sont une vie sainte et la fin en est la béatitude éternelle : « Car le salaire du péché est la mort, mais le don de la grâce de Dieu est la Vie éternelle dans le Christ Jésus Notre Seigneur. »