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III - L’Antiphonaire

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L’ANTIPHONAIRE

généralités

L’Antiphonaire de la messe ( Antiphonarius, Antiphonale, liber antiphonarius missarum ) contient, en principe, tous les textes destinés à être chantés à la messe, qu’ils soient en recension musicale ou non :
Introïtus avec son psaume
Graduale avec le Responsum
Tractus
Alleluia avec son verset
Offertorium
Ant. ad communionem avec son psaume

En fait, le contenu en est rarement délimité avec précision, et il peut exister des livres spéciaux, véritables subdivisions de l’Antiphonaire.

Les destinataires de ces livres sont les maîtres de chœur car les chantres chantent de mémoire.

Selon Amalaire, on observait à son époque les différences suivantes entre Rome et les Gaules :

Eglises franques Eglise romaine
Cantatorium
( graduel, Trait, Alleluia )
Antiphonarium = Responsoriale
(répons)
Antiphonarium
( antt. ad Introitum et com. )

L’Antiphonaire de la messe sera plus couramment appelé Graduale dans la seconde partie du Moyen-Age. Les documents antiques parlent parfois de tabulæ, surnom dérivant des plaques d’os ou d’ivoire servant pour les reliures.

histoire

Les études montrent qu’Antiphonaire et Lectionnaire ont évolué de concert, aux différents types de Lectionnaires correspondent différents types d’Antiphonaires.

Sources secondaires

A partir du IVè s., on trouve des preuves de l’existence de livres de chants, mais elles sont rares et de valeur inégale.

On peut discerner diverses étapes :

  1. législation conciliaire : en 360, le concile de Laodicée, can. 15, prescrit que les chantres liturgiques chantent “ce qui est sur le parchemin”
  2. Afrique romaine : le chant d’un psaume à l’offertoire et à la communion est introduit au temps de saint Augustin, cf. ses sermons. Victor d’Utique, au Vè s., nous décrit la persécution des Vandales : il raconte la mort d’un chantre lors de l’Alleluia pascal, à l’ambon, percé d’un flèche, il laisse tomber le codex de ses mains.
  3. Liber Pontificalis : Le développement de l’Antiphonaire y est attribué à Damase ( 366-384 ) et à Célestin ( 422-432 ).
  4. Jean, archichantre de saint Pierre ( VIIè s.) : Il nous décrit la collection des chants de la messe et de l’office commencée sous Damase avec l’aide de saint Jérôme et complétée par les différents papes ( Léon, Grégoire...) avec la contribution de certains abbés de saint Pierre.
  5. Egbert de York en 732 : Le responsoriale et l’Antiphonarius romain étaient connus en Angleterre en 732.
  6. Ordo Romanus I ( 750 ) : Après la lecture de l’épître, le chantre monte à l’ambon avec le cantatorium pour le Graduel.
  7. Paul I ( 757-767 ) : écrit à Pépin III : “ Dixerimus itaque excellentissimæ præcellentiæ vestræ et libros quantos reperire potuimus i. e. Antiphonale et responsale...”
  8. Jean Diacre ( 825-880 ) : Biographie de saint Grégoire : il fit un recueil de chants, i.e. l’Antiphonaire. A l’époque de Jean Diacre, on aurait conservé le texte officiel authentique de cette collection.

Il existe beaucoup de discussions sur l’origine grégorienne de l’Antiphonaire, il est probable que Grégoire a réorganisé le chant comme tout le reste [1]. Les VIIIè et IXè siècles voient se réaliser la codification du chant liturgique en Occident, grâce à l’élaboration d’un système de notation et à la multiplication des livres destinés aux chantres.

Le Responsoriale et l’Antiphonarius romain furent introduit officiellement en Gaule avec la romanisation du culte sous Pépin III, mais ils étaient connus avant ( cf. en Angleterre en 732 ).

Au IXè siècle s’individualisent les répertoires propres aux différents rites, chantés sur des mélodies bien particulières.

Sources primaires ( théorie de Dom Chavasse )

Chavasse nous affirme que l’évolution Lectionnaire et Antiphonaire est liée. Cf. l’Antiphonale sextuplex, édité par Hesbert.

En comparant les Lectionnaires, on peut voir les parties les plus anciennes (celles qui sont identiques) et les plus récentes (celles qui sont différentes) :

Chavasse étudie l’Antiphonaire du temps post Pentecosten pour arriver à une conclusion, il confirme que les Antiphonaires sont de même types que les Lectionnaires ( Epistolier + Evangéliaire ) ; dans sa démarche, il procède à reculons en partant de l’étape la plus récente :

- dernière étape : Gél VIII. D : A+B : dans les deux familles la correspondance est rigoureuse : Epistolier - Evangéliaire - Antiphonaire. Les trois livres furent donc mis à jour au même moment, A (famille romaine) étant plus primitif que B. Les 6 manuscrits d’Hesbert correspondent à ce type.

- époque intermédiaire : les trois livres sont organisés différemment : P est organisé en premier, puis mis à jour, donnant alors L et S. Alcuin est réalisé après P. L’Antiphonaire correspondrait à l’Evangéliaire, mais nous n’avons pas de manuscrit.

Chavasse continue : les manuscrits d’Antiphonaire sont tous du Gél. franc, cette identité profonde avec l’Evangéliaire P nous conduit alors à voir l’œuvre de saint Grégoire. Nous aurions donc les traces d’un Antiphonaire hypothétique correspondant à P. Nous pourrions dire, qu’à ce niveau intermédiaire, et l’Antiphonaire, et l’Evangéliaire et le Sacramentaire portent la signature de saint Grégoire.

- niveau primitif : saint Grégoire disposait de sources pour son travail d’organisation. Chavasse trouve des traces d’un Antiphonaire hypothétique correspondant au Gél., c’est-à-dire à l’Evangéliaire P hypothétique.

Les textes de l’Antiphonaire nous sont parvenus par le dernier niveau à partir duquel ils intégrent le Missel plénier puis les Missels Romains et enfin le Missale Romanum de 1970.

Caractéristiques de l’Antiphonaire romain

L’Antiphonaire romain se caractérise par une stabilité exceptionnelle. Il commence avec l’Avent ( alors que Sacramentaires et Lectionnaires commencent avec la vigile de Noël ).

Pendant l’Avent et après l’Epiphanie, il mêle Temporal et Sanctoral.

De la septuagésime à Pâque, tout Sanctoral est exclu.

Après Pâque et après la Pentecôte, Temporal et Sanctoral sont séparés.

Témoins :

la musique

On peut distinguer cinq périodes [2] :

Période classique V-VIIIè s.

Il n’y a pas d’indications musicales avant le Xè s. : la musique faisait partie de la tradition orale.

On trouve trois types de chants pour la messe :

- psalmiste :

- schola cantorum :

- assemblée :

La diversification des rites amène un changement des chants.

Au VIIIè s. Charlemagne fait mettre au premier plan le chant romain, on assiste à une fusion des chants romains et gallicans qui mène au grégorien actuel. Le chant romain pur est donc perdu.

Période post-classique IX-XIIè s.

Perfectionnement des manuscrits, selon l’ordre chronologique :

Nouvelles formes musicales :

Développement des tons modernes ( mineur / majeur ) face aux 8 modes du grégorien.

Décadence

A la fin du MA, le niveau de la musique liturgique est très bas. Au Concile de Trente, la discussion fut très brève sur la musique sacrée.

1614, édition Medicea de Grégoire XIII : mutilation des mélodies pour avoir plus de clarté ! reédité par Pustet en 1883 !!! La décadence dure jusqu’au XIXè s.

Restauration

- SOLESMES

- S. PIE X

Période post conciliaire

Ecclesia cantum gregorianum agnoscit ut liturgiæ romanæ proprium : qui ergo in actionibus liturgicis, ceteris paribus, principem locum obtineat. Alia genera Musicæ sacræ, præsertim vero polyphonia, in celebrandis divinis Officiis minime excluduntur, dummodo spiritui actionis liturgicæ respondeant... [3]

Compleatur editio typica librorum cantus gregoriani ; immo paretur editio magis critica librorum iam editorum post instaurationem sancti Pii X. Expedit quoque ut paretur editio simpliciores modos continens, in usum minorum ecclesiarum.  [4]

On assiste à un abandon de l’Antiphonaire dans la pratique. Nous avons besoin d’un nouveau mouvement liturgique pour récupérer ce que nous avons perdu ( cf. Mt 13,52 ).

- Graduale Romanum 1974
- Graduale simplex 1988
- Iubilate Deo 1974, 1987

[1] La présence du prologue “Gregorius præsul” composé vraisemblablement vers 800 dans les plus anciens graduels atteste de la croyance dans la tradition grégorienne au Moyen-Age ; la critique actuelle s’explique fort bien cette attribution dans la prespective de la réforme carolingienne qui avait besoin de l’argument d’autorité pour imposer un document. cf. PALAZZO, p. 91.

[2] Cf. Alberto TURCO, Il canto gregoriano, 1987.

[3] Sacrosanctum Concilium § 116

[4] Sacrosanctum Concilium § 117