Troisième Instruction pour l’application exacte de la Constitution sur la Liturgie
S. Congrégation pour le Culte Divin, 5 sept. 1970.
Les réformes [1] qui ont été accomplies jusqu’à maintenant pour appliquer la Constitution conciliaire sur la Liturgie concernent avant tout la célébration du mystère eucharistique. « Il contient, en effet, tout le trésor spirituel de l’Église, c’est-à-dire le Christ lui-même, notre Pâque et notre pain vivant, lui dont la chair, vivifiée par l’Esprit Saint et vivifiante, donne la vie aux hommes, les invitant et les conduisant à s’offrir eux-mêmes en union avec lui, en même temps que leurs travaux et toute la création » [2]. Par elle-même, la célébration renouvelée du sacrifice de la Messe dans les assemblées liturgiques montre qu’il est le centre de toute la vie de l’Église, centre auquel sont ordonnées les autres activités, si bien que la réforme des rites vise à « promouvoir une action pastorale dont la liturgie soit la source et le sommet, et à faire vivre le mystère pascal du Christ » [3].
Caractères de la nouvelle liturgie
Le travail de la réforme, qui s’est accompli graduellement au cours de six années, a préparé le passage de la liturgie antérieure à celle qui, maintenant, depuis la publication du Missel romain avec l’Ordo Missæ et la Présentation générale introduisant au Missel, se présente d’une manière plus précise et plus complète, de telle sorte - on peut bien le dire - qu’une voie nouvelle s’ouvre désormais à la pastorale liturgique avec de magnifiques perspectives. En outre, le Lectionnaire de la Messe, déjà publié, et l’abondance des formulaires contenus dans le Missel romain ouvrent pour la célébration eucharistique de larges possibilités, en permettant une grande variété.
En effet, la faculté de choisir certains textes et la souplesse des rubriques favorisent certainement une célébration active, attrayante et spirituellement efficace, puisque les possibilités s’accommodent aux diverses situations, ainsi qu’à la mentalité et au degré de préparation des fidèles. C’est pourquoi il sera inutile de recourir à des créations et à des choix arbitraires, qui appauvriraient la célébration.
Résistances et impatiences
Le passage progressif à des formes nouvelles et modernes, qui a tenu compte à la fois du plan général de la réforme et de la grande variété des situations, a été favorablement accueilli par la majorité du clergé et des fidèles [4], bien qu’il ait rencontré parfois certaines résistances et impatiences.
Les uns, en effet, sous prétexte de conserver l’ancienne tradition, ont accueilli les changements avec amertume ; d’autres, devant l’urgence des besoins pastoraux, ont estimé qu’on ne devait pas attendre la publication des dernières réformes. Le résultat est que certains en sont venus à des initiatives personnelles, à des compositions hâtives, parfois fantaisistes, à des créations, des additions ou des simplifications qui sont souvent contraires aux règles fondamentales de la Liturgie. Aussi ont-ils troublé profondément la conscience des fidèles, tout en s’opposant à la cause d’un renouveau équilibré et en le rendant plus difficile.
C’est pourquoi de nombreux évêques, prêtres et laïcs ont fait appel à l’autorité du Siège Apostolique pour que soit maintenue et renforcée dans la liturgie, l’harmonie féconde et tant désirée qui est le caractère propre de la communauté chrétienne rassemblée en présence de Dieu.
En conséquence, ce qui n’a pas semblé opportun de faire, tant que le Consilium de liturgie travaillait à établir la réforme, devient maintenant possible, compte tenu de tout ce qui a été décidé d’une façon stable et définitive. La responsabilité des évêques
Avant tout, il convient de rappeler l’autorité de chacun des évêques, « que l’Esprit Saint a établis pour conduire l’Église de Dieu » [5], eux qui sont les « principaux dispensateurs des mystères de Dieu en tant que chargés, dans l’Église qui leur est confiée, d’organiser toute la vie liturgique, de la promouvoir et de veiller sur elle » [6]. Il leur appartient de régler, diriger, stimuler, parfois même de reprendre, mais toujours de mettre en valeur l’exécution d’une saine réforme, et également de veiller à ce que le corps entier de l’Église puisse progresser, unanime, dans l’unité de la charité, sur les plans diocésain, national et universel. La tâche des évêques en ce domaine est d’autant plus nécessaire et urgente que les rapports sont plus étroits entre la liturgie et la foi, si bien que ce que l’on fait en faveur de l’une rejaillit également sur l’autre.
Les évêques, avec l’aide des commissions liturgiques, s’informeront donc avec soin de la situation religieuse et sociale des fidèles confiés à leur sollicitude, de leurs besoins spirituels et de la meilleure manière de les aider, et ils emploieront toutes les possibilités offertes par les nouveaux rites. Ils pourront ainsi juger ce qui est conforme au véritable renouveau, comme aussi ce qui lui est contraire. Ils pourront aussi, en toute prudence et sagesse, proposer et régler ce qu’il convient de faire de telle sorte que, compte tenu des exigences légitimes, toute l’oeuvre du renouveau puisse s’accomplir selon les normes de la nouvelle législation liturgique.
La même exacte connaissance des faits, que doivent posséder les évêques, sera aussi d’un grand secours aux prêtres dans leur ministère, qu’ils devront évidemment remplir dans la communion hiérarchique [7]. Elle leur facilitera ainsi l’obéissance requise pour une expression plus parfaite du culte et pour la sanctification des fidèles.
C’est pourquoi, afin d’aider les évêques dans leur tâche relative à l’exacte application des lois liturgiques, en particulier celles qui sont données dans la Présentation générale du Missel romain, et afin de restaurer l’ordre et la discipline dans la célébration de l’Eucharistie, qui est de la plus grande importance pour la vie de l’Église en tant que « signe de l’unité et lien de la charité » [8], il a paru opportun de rappeler les règles et recommandations suivantes :
Les nouvelles normes ont simplifié les formules, les gestes et les actions liturgiques, selon ce principe établi par la Constitution sur la Liturgie : « Les rites manifesteront une noble simplicité, seront d’une brièveté remarquable et éviteront les répétitions inutiles ; ils seront adaptés à la capacité des fidèles et, en général, n’exigeront pas de nombreuses explications » [9]. Mais dans ce domaine, il ne faut pas aller au-delà des limites fixées. Ceux qui le font dépouillent la liturgie des signes sacrés et de la beauté propre qui lui sont nécessaires pour que le mystère du salut puisse vraiment s’accomplir dans l’assemblée chrétienne et que, sous le voile des rites visibles et avec l’aide d’une catéchèse adaptée, il soit correctement compris.
La réforme liturgique, en effet, ne vise absolument pas et d’aucune manière à la « désacralisation », et elle ne veut apporter aucun argument au phénomène appelé « sécularisation ». Il faut donc conserver aux rites leur dignité, leur gravité et leur caractère sacré.
L’efficacité des actions liturgiques ne dépend pas de rites soumis à des expériences et à des renouvellements fréquents, même s’ils sont réduits à des formes de plus en plus simples. Elle dépend seulement d’une attention approfondie portée à la parole de Dieu et au mystère célébré, dont la présence est assurée par l’observation des rites de l’Église, et non pas de ceux qu’un prêtre fixe au gré de sa fantaisie.
On aura garde d’oublier ensuite que la reconstitution personnelle des rites sacrés blesse la dignité des fidèles et ouvre la voie aux formes individuelles et privées dans la célébration des actions liturgiques, qui relève directement de toute l’Église.
Puisque le ministère du prêtre est celui de toute l’Église, il ne peut être exercé que dans l’obéissance et la communion à la hiérarchie, et dans le zèle au service de Dieu et des frères. Il est clair que ce caractère hiérarchique de la Liturgie, sa valeur sacramentelle et le respect dû à la communauté des fidèles, exigent que le prêtre remplisse sa fonction cultuelle comme un serviteur fidèle, un « intendant des mystères de Dieu » [10], n’introduisant aucun rite qui ne soit établi et approuvé dans les livres liturgiques.
Parmi les textes sacrés utilisés dans l’assemblée liturgique, les livres de la Sainte Écriture jouissent d’une dignité particulière, car « Dieu y parle à son peuple et le Christ, présent dans sa parole, annonce l’Évangile » [11]. C’est pourquoi :
a) On célébrera la liturgie de la parole avec le plus grand soin. Il n’est jamais permis de lui substituer d’autres lectures tirées d’auteurs sacrés ou profanes, anciens ou modernes. Le but de l’homélie est d’expliquer aux fidèles la parole de Dieu qu’on vient de proclamer, et de l’adapter à la mentalité actuelle. Il appartient à un prêtre de la prononcer, et les fidèles s’abstiendront de toutes réflexions, dialogues et autres interventions semblables. Il n’est pas permis de faire seulement une lecture.
b) La liturgie de la parole prépare la liturgie eucharistique et elle y conduit, en formant avec elle un seul acte du culte [12]. Il n’est donc pas permis de séparer l’une de l’autre, ni de les célébrer en des lieux et des temps différents.
En ce qui concerne l’union organique d’une action liturgique, ou d’une partie de l’Office divin précédant la Messe, avec la liturgie de la parole, des règles spéciales y pourvoiront, données par les livres liturgiques dans la mesure où cela est nécessaire.
Les textes liturgiques composés par l’Église doivent, eux aussi, être traités avec le plus grand respect. Il n’est donc permis à personne d’y apporter de son propre chef quelque changement, substitution, suppression ou addition [13].
a) On aura pour l’Ordo Missæ un respect tout spécial. Dans les versions officielles, les formules qu’il contient ne peuvent absolument pas être changées, même sous prétexte de Messe chantée. Certaines de ses parties : acte pénitentiel, prières eucharistiques, acclamations, bénédiction finale, peuvent être choisies parmi plusieurs formulaires différents.
b) On peut prendre les antiennes d’entrée et de communion dans le Graduel romain, le Graduale simplex, le Missel romain, ou dans les répertoires approuvés par les Conférences épiscopales. Dans le choix des chants pour la célébration de la Messe, les Conférences veilleront non seulement à leur convenance avec les temps et les diverses circonstances de l’action liturgique, mais aussi aux besoins des fidèles qui les emploient.
c) Il faut favoriser par tous les moyens le chant du peuple, même sous des formes nouvelles, adaptées au génie de chaque peuple et à la mentalité de l’homme d’aujourd’hui. Les Conférences épiscopales établiront un recueil de chants à employer pour les Messes de groupes, par exemple de jeunes et d’enfants, de manière que par les paroles autant que par la musique, le rythme et l’usage des instruments, ces chants soient en harmonie avec la dignité et la sainteté du lieu et du culte divin.
Bien que l’Église n’exclue des actions liturgiques aucun genre de musique sacrée [14], il faut cependant reconnaître que tous les genres de musique, de chants ou d’instruments ne sont pas également aptes à soutenir la prière et à exprimer le mystère du Christ. Parce que leur fonction est ordonnée à la célébration du culte divin, ils doivent être remarquables « par la sainteté et la valeur des formes » [15], être accordés à l’esprit de l’action liturgique et à la nature de chacune de ses parties ; il faut qu’ils n’empêchent pas la participation active de toute l’assemblée [16] et qu’ils orientent les esprits vers les mystères célébrés.
Il appartient aux Conférences épiscopales ou, à défaut de directives générales, aux évêques pour le territoire de leur diocèse [17] de déterminer cette question avec précision. De plus, on choisira soigneusement les instruments de musique et leur nombre en vue de leur convenance avec le lieu et la nature de l’assemblée, de manière qu’ils favorisent la piété sans être trop bruyants. d) Une large possibilité est offerte dans le choix des oraisons : les jours de semaine du temps per annum, en particulier, on peut les prendre soit dans n’importe lequel des trente-quatre formulaires per annum, soit dans les Messes « ad diversa » [18], soit dans les Messes votives.
En outre, pour la traduction des textes, les Conférences épiscopales peuvent suivre les règles particulières données à cette fin par l’Instruction sur les traductions liturgiques en langue vivante pour la célébration avec le peuple, Instruction publiée par le Consilium le 25 janvier 1969 [19]. e) En ce qui concerne les lectures, en plus de celles qui sont affectées â chaque dimanche, fête ou jour de semaine, il en est d’autres prévues pour la célébration des sacrements ou pour des circonstances particulières. Pour les Messes de groupes, il est permis de choisir des textes spéciaux, plus adaptés à la célébration, pourvu qu’ils soient tirés d’un Lectionnaire approuvé [20].
f) Au cours de la célébration, le prêtre peut parler à l’assemblée, très brièvement : au commencement, avant les lectures, avant la préface, avant la prière après la communion et aussi avant le renvoi [21]. Toutefois, pendant la liturgie eucharistique, il s’abstiendra d’introduire des monitions. Ces interventions seront brèves, efficaces et toujours préparées, afin de ne pas alourdir la célébration. S’il arrive que d’autres monitions soient encore nécessaires, elles seront confiées au commentateur qui guide l’assemblée, à condition d’éviter toute longueur et de se limiter aux paroles vraiment indispensables. g) Dans la prière universelle, il est bon d’ajouter aux intentions pour l’Église, le monde et ceux qui souffrent, une intention particulière relative à la communauté locale. On se gardera donc d’introduire dans le Canon romain d’autres intentions au Memento des vivants et à celui des défunts. Ces intentions doivent être préparées auparavant, écrites et conformes au style propre de la prière universelle [22]. On pourra confier leur proclamation à un ou plusieurs membres de l’assemblée. Toutes ces possibilités, si elles sont connues et intelligemment appliquées, permettent une souplesse assez grande pour qu’il ne soit nullement nécessaire de recourir à des créations personnelles. Les prêtres seront formés à préparer leur célébration en tenant compte à la fois de la situation et des besoins spirituels des fidèles, agissant en toute sécurité dans les limites fixées par la Présentation générale du Missel romain.
La prière eucharistique, plus que toute autre partie de la Messe, appartient au seul prêtre en raison de sa charge [23]. D’aucune manière, on ne doit donc accepter qu’une partie quelconque en soit prononcée par un ministre inférieur, par l’assemblée ou par un fidèle. Ce serait contraire à la nature hiérarchique de la Liturgie, dans laquelle chacun doit accomplir « seulement et totalement » ce qui lui revient [24]. C’est pourquoi la prière eucharistique doit être dite entièrement par le prêtre, et par lui seul.
Le pain destiné à la célébration de l’Eucharistie doit être de froment et, selon l’usage séculaire de l’Église latine, sans levain [25].
Bien que la vérité du signe exige que ce pain apparaisse comme un véritable aliment et qu’il soit rompu et distribué entre les frères, il faut cependant toujours le faire dans la forme traditionnelle, selon la règle de la Présentation générale du Missel romain [26], qu’il s’agisse des petites hosties pour la communion des fidèles ou des grandes hosties qui seront ensuite fractionnées.
La première exigence de vérité porte plutôt sur la couleur, la saveur et l’épaisseur du pain que sur sa forme. En raison du respect dû au Sacrement, on apportera le plus grand soin à la confection du pain eucharistique, afin que la fraction puisse s’accomplir avec dignité et que la sensibilité des fidèles ne soit pas heurtée dans la manducation. On évitera surtout un pain qui a le goût de pâte insuffisamment cuite, ainsi que celui qui durcit trop vite et devient immangeable.
En outre, on agira avec le plus grand respect, par égard pour le Sacrement [27], au moment de rompre le Pain consacré, comme au moment de consommer ce Pain et de boire le Vin consacré, que ce soit à la communion ou bien après, pour consommer ce qu’il en resterait.
En raison du signe, la participation la plus parfaite des fidèles est exprimée par la Communion sous les deux espèces [28]. Cette manière de communier est accordée seulement dans les limites fixées par la Présentation générale du Missel romain (n. 242 ) et conformément à l’Instruction de la S. Congrégation pour le Culte Divin « Sacramentali Communione » sur une plus large faculté d’administrer la Communion sous les deux espèces, Instruction publiée le 29 juin 1970. En conséquence :
a) Les Ordinaires n’accorderont pas la permission indistinctement, mais ils détermineront avec précision pour quels cas et quelles célébrations, dans les limites fixées par la Conférence épiscopale. On évitera les occasions où se rencontre un grand nombre de communiants. Les groupes devront être bien déterminés, organisés et de même nature.
b) On instruira avec soin les fidèles avant de les admettre à la Communion sous les deux espèces, afin qu’ils en pénètrent plus profondément le sens.
c) Quand on distribuera la Communion au calice, ce seront des prêtres, des diacres ou des acolytes ayant reçu l’ordre de l’acolytat, qui présenteront le calice aux communiants. En leur absence, le célébrant suivra le rite décrit dans la Présentation générale du Missel romain, n. 245.
On n’admettra pas que les communiants se passent le calice de l’un à l’autre ou qu’ils s’approchent directement du calice pour y prendre le Sang du Christ. Dans ce cas, on préférera la Communion par mode d’intinction.
d) La charge de distribuer la Communion revient d’abord au célébrant, puis au diacre et, dans certains cas, à l’acolyte. Le Saint-Siège peut permettre de désigner aussi d’autres personnes, dignes et bien connues, qui auront reçu mandat pour cette fonction. Ceux qui n’auraient pas reçu ce mandat ne peuvent pas distribuer la Communion, ni porter les vases sacrés contenant le Sacrement.
Quant à la manière de distribuer la Communion, on se conformera à la Présentation générale du Missel romain, nn. 244-252, et à l’Instruction du 29 juin 1970 citée ci-dessus. Si, au contraire, on permet une manière de distribuer la Communion différente de la manière traditionnelle, on observera les conditions fixées par le Siège Apostolique.
e) Quand, par manque de prêtres, il arrive que l’évêque désigne, avec l’autorisation du Siège Apostolique, certains fidèles, comme des catéchistes en pays de missions, pour la liturgie de la parole et la distribution de la Communion, ceux-ci ne devront pas dire la prière eucharistique. Mais s’ils estiment opportun de lire le récit de l’Institution de l’Eucharistie, ils le choisiront comme lecture dans la liturgie de la parole. Dans de telles assemblées, après avoir célébré la liturgie de la parole, on dira le Pater noster et on distribuera la Communion selon le rite prescrit.
Quel que soit le mode choisi, on veillera à distribuer la Communion avec dignité, piété et honneur. On évitera tout danger d’irrévérence et on tiendra compte de la nature de chaque assemblée liturgique, ainsi que de l’âge, des conditions et du degré de préparation de ceux qui la reçoivent [29].
Selon les règles traditionnelles de l’Église, il n’est pas permis aux femmes (jeunes filles, femmes mariées, religieuses) de servir le prêtre à l’autel dans les églises, les maisons, les communautés, les collèges et les institutions féminines.
Mais il est permis aux femmes, selon les règles prescrites en cette matière : a) de proclamer les lectures, â l’exception de l’Évangile. En remplissant cette fonction, elles pourront se servir des appareils de la technique moderne, afin d’être entendues de tous. Les Conférences épiscopales pourront préciser davantage de quel lieu plus adapté les femmes pourront annoncer la parole de Dieu dans l’assemblée liturgique ; b) de dire les intentions de la prière universelle ; c) de diriger le chant de l’assemblée et de jouer de l’orgue ou d’autres instruments permis ; d) de lire des monitions ou commentaires pour aider les fidèles à mieux comprendre le rite ; e) de remplir, au service de l’assemblée, certaines fonctions qui sont parfois confiées aux femmes, par exemple : recevoir les fidèles aux portes de l’église, les conduire à leur place, organiser les processions, faire la quête dans l’église [30].
On doit traiter les vases et les objets sacrés avec un respect et un soin particuliers. Si la plus grande liberté est laissée en ce qui concerne leur matière et leur forme, c’est avec l’intention de permettre largement à des artistes nombreux d’appliquer le meilleur de leurs facultés créatrices au service du culte.
Cependant, on n’oubliera pas les règles suivantes :
a) Les objets destinés au culte devront toujours être « d’une matière noble et durable, et bien adaptés à leur usage liturgique » [31]. Il n’est donc pas permis d’employer des objets destinés aux usages profanes.
b) Les calices et les patènes, avant d’être mis en service, devront être consacrés par l’évêque, qui jugera s’ils sont aptes à l’usage auquel on les destine.
c) « L’aube est le vêtement commun aux ministres de tous ordres » [32]. Concélébrer en portant seulement l’étole sur la coule monastique ou sur le vêtement clérical ordinaire est un abus qui doit être réprouvé. Il est absolument interdit de porter seulement l’étole sur l’habit civil pour célébrer la Messe et accomplir d’autres actions sacrées, comme par exemple : imposer les mains pendant les ordinations, administrer les autres sacrements, donner les bénédictions.
d) Il appartient aux Conférences épiscopales de décider s’il est opportun de choisir, pour le vêtement liturgique, d’autres matières en plus de celles qui sont traditionnellement en usage. On devra informer le Siège Apostolique de ces délibérations [33].
En ce qui concerne la forme des vêtements liturgiques, les Conférences épiscopales peuvent déterminer et proposer au Siège Apostolique certaines adaptations répondant aux nécessités et aux coutumes de chaque pays [34].
L’Eucharistie se célèbre normalement dans un lieu sacré [35]. Il n’est pas permis de célébrer en dehors d’une église sans une vraie nécessité, laissée au jugement de l’Ordinaire pour sa juridiction. Si l’Ordinaire le permet, on aura soin de choisir un lieu digne et de célébrer sur une table convenable. On ne célébrera pas, si possible, dans les salles à manger ni sur une table destinée aux repas.
Dans l’application de la réforme liturgique, les évêques veilleront spécialement à la disposition digne et définitive des lieux sacrés, en particulier du « presbyterium » (sanctuaire), conformément aux règles fixées dans la Présentation générale du Missel romain [36] et l’Instruction « Eucharisticum Mysterium » [37].
Les solutions provisoires adoptées au cours de ces années tendent parfois à devenir définitives. Certaines d’entre elles, réprouvées par le Consilium, sont encore en vigueur, alors qu’elles vont contre le sens liturgique, le goût esthétique, la commodité et la dignité des célébrations [38].
Avec l’aide des commissions diocésaines de liturgie et d’art sacré, et également, si nécessaire, avec l’avis des experts et des organismes publics compétents, on examinera le plan des futurs travaux et les solutions provisoires, de telle sorte que dans toutes les églises on arrive à une disposition définitive qui, le cas échéant, respecte les monuments du passé et soit adaptée, autant que possible, aux exigences du présent.
Pour comprendre la liturgie rénovée, il reste encore à faire un grand effort, afin que les livres liturgiques révisés soient traduits soigneusement et publiés en langues vivantes. Ils devront être traduits intégralement et remplacer les autres livres liturgiques particuliers qui étaient en usage auparavant.
Si la Conférence épiscopale juge nécessaire ou opportun d’ajouter d’autres formules ou d’apporter certaines adaptations, celles-ci seront introduites après l’approbation du Saint-Siège, en les distinguant du texte typique latin par des signes typographiques spéciaux.
Dans ce cas, il sera bon de procéder patiemment et sans hâte, en s’aidant de la collaboration de nombreux spécialistes non seulement théologiens et liturgistes, mais aussi linguistes et littérateurs, afin que les traductions soient des textes d’une beauté reconnue qui, par leur dignité, leur rythme, leur élégance, la richesse du discours et du style, puissent promettre un usage prolongé, tout en étant en parfaite harmonie avec la richesse intérieure du contenu [39].
Dans la préparation des livres liturgiques en langues vivantes, on observera la règle traditionnelle de publier les textes sans indiquer les noms des auteurs et des traducteurs. Les livres liturgiques sont, en effet, destinés à la communauté chrétienne ; ils sont préparés et publiés seulement par ordre de la hiérarchie et sous son autorité. De telles éditions ne peuvent donc être soumises au consentement de personnes privées, de quelque manière que se soit, pour ne pas offenser la liberté de l’Autorité et la dignité de la Liturgie.
Les expérimentations liturgiques, quand elles sont nécessaires ou semblent opportunes, sont autorisées uniquement par la S. Congrégation pour le Culte Divin, par écrit, selon des normes précises et définies, et sous la responsabilité de l’autorité locale compétente.
En ce qui concerne la Messe, toutes les permissions d’expérimenter, accordées en vue de la réforme, sont tenues pour abolies. Depuis l’édition du nouveau Missel romain, les règles et la forme de la célébration eucharistique sont celles données par la Présentation générale du Missel romain et l’Ordo Missæ.
Les Conférences épiscopales décideront d’abord sur les adaptations déjà prévues par les livres liturgiques et les proposeront ensuite au Saint-Siège pour confirmation.
Si des adaptations plus larges devenaient nécessaires, la Conférence épiscopale, conformément à la Constitution « Sacrosanctum Concilium », n. 40, ferait étudier attentivement la question, en examinant la mentalité et les traditions de chaque peuple, ainsi que les besoins pastoraux particuliers. S’il paraît opportun de faire quelque expérimentation, on veillera attentivement à ce qu’elle soit bien déterminée et limitée. On la fera avec des groupes préparés, sous la responsabilité de personnes prudentes, expressément désignées à cette fin par mandat spécial. On ne fera pas, pour cela, de grandes célébrations et on n’en donnera pas de publicité. Les expérimentations seront limitées en nombre et en durée : au maximum pour une année. Puis on proposera les conclusions au Saint-Siège. Dans l’attente de sa réponse, il n’est pas permis d’appliquer aussitôt les adaptations demandées.
S’il s’agit de modifier la structure des rites ou la disposition des parties prévue par les livres liturgiques, d’introduire des textes ou quelque élément entièrement nouveaux, il faut en présenter le schéma détaillé au Siège Apostolique avant d’entreprendre toute expérimentation.
Telle est la pratique voulue par la Constitution « Sacrosanctum Concilium » [40] et exigée par l’importance de la question.
On doit enfin se rappeler que l’Église entière est concernée par la réforme liturgique décidée par le Concile. Cela exige qu’on poursuive dans les sessions pastorales toute une étude d’ensemble, théorique et pratique, en vue de l’éducation du peuple chrétien, afin que la liturgie devienne vivante, attrayante et adaptée.
La réforme actuelle s’efforce de présenter la prière liturgique, née de l’antique et vivante tradition spirituelle ; dans cette présentation, la liturgie doit apparaître comme l’oeuvre de tout le peuple de Dieu, structuré selon la variété des ordres et des ministères [41].
C’est seulement dans cette unité de tout le corps de l’Église que se trouve l’assurance de l’efficacité et de l’authenticité.
Les pasteurs, avant tout, par l’observation généreuse des lois et des prescriptions de l’Église, mus par l’esprit de foi qui leur fera rejeter préférences individuelles et goûts personnels, seront donc les serviteurs de la Liturgie commune par leur propre exemple, leur étude approfondie, leur enseignement intelligent et persévérant. Ils prépareront ainsi le renouveau florissant que l’on espère d’une liturgie désormais ouverte aux exigences de notre époque, mais qui doit rester étrangère à des formes profanes et arbitraires qui la compromettraient gravement. Par mandat du Souverain Pontife, la S. Congrégation pour le Culte Divin a rédigé cette Instruction, que le Pape Paul VI a approuvée et confirmée de son autorité, ordonnant de la publier pour qu’elle soit observée par tous ceux qu’elle concerne.
Rome, 5 septembre 1970.
Benno, Card. Gut, Préfet
A. Bugnini, Secrétaire
[1] les références à la Présentation Générale du Missel Romain se reportent à l’edition typica prima
[2] Concile Vatican II, Décret sur le ministère et la vie des prêtres, Presbyterorum Ordinis, n. 5 : A.A.S. 58 (1966), p. 997.
[3] Cf. S.C.R., Instruction Inter Oecumenici, 26 septembre 1964, nn. 5-6 ; A.A.S. 56 (1964), p. 878.
[4] Cf. Paul VI, Allocution à l’audience générale du 20 août 1969 : L’Osservatore Romano, 21 août 1969.
[5] Cf. Actes 20, 28.
[6] Concile Vatican II, Décret sur la charge des évêques, Christus Dominus, n. 15 : A.A.S. 58 (1966), pp. 679-680 ; Constitution sur la Liturgie, Sacrosanctum Concilium, n. 22 : A.A.S. 56 (1964), p. 106.
[7] Cf. Concile Vatican II, Décret sur le ministère et la vie des prêtres, Presbyterorum Ordinis, n. 15 : A.A.S. 58 (1966), pp. 1014-1015.
[8] Concile Vatican II, Constitution sur la Liturgie, Sacrosanctum Concilium, n. 47 : A.A.S. 56 (1964), p. 113.
[9] Ibid., n. 34 : A.A.S. 56 (1964), p. 109.
[10] Cf. 1 Cor. 4, 1
[11] Cf. Concile Vatican II, Constitution sur la Liturgie, Sacrosanctum Concilium, nn. 7, 33 : A.A.S. 56 (1964), pp. 100-101, 108.
[12] Cf. Ibid., n. 56 : A.A.S. 56 (1964), p. 115.
[13] Cf. Ibid., n. 22, 3 : A.A.S. 56 (1964) p. 106.
[14] Cf. S.C.R., Instruction sur la Musique sacrée, Musicam sacram, 5 mars 1967, n. 9 : A.A.S. 59 (1967), p. 303 ; Concile Vatican II, Constitution sur la Liturgie, Sacrosanctum Concilium, n. 116 : A.A.S. 56 (1964), p. 131.
[15] Cf. S.C.R., Instruction sur la Musique sacrée, Musicam sacram, n. 4 : A.A.S. 59 (1967), p. 301.
[16] Cf. Concile Vatican II, Constitution sur la Liturgie, Sacrosanctum Concilium, nn. 119-120, A.A.S. 56 (1964) n. 130.
[17] Cf. S.C.R., Instruction sur la Musique sacrée, Musicam sacram, n. 9 : A.A.S. 59 (1967), p. 303.
[18] Cf. Présentation générale du Missel romain, n. 323
[19] Cf. Notitiæ 5 (1969), pp. 9-10 ; cf. aussi nn. 21-24 : ibid., pp. 7-8.
[20] Cf. S. Congrégation pour le Culte Divin, Instruction sur la Messe pour les groupes particuliers, Actio pastoralis, du 15 mai 1969, n. 6 e : A.A.S. 61 (1969), p 809.
[21] Cf. Présentation générale du Missel romain, n. 11
[22] Cf. Ibid., nn. 45-46
[23] Cf. Ibid., n. 10
[24] Cf. Concile Vatican II, Constitution sur la Liturgie, Sacrosanctum Concilium, n. 28 : A.A.S. 56 (1964), p. 107.
[25] Présentation générale du Missel romain, n. 282
[26] Cf. Ibid., n. 283
[27] Cf. S.C.R., Instruction sur le culte du Mystère eucharistique, Eucharisticum mysterium, du 25 mai 1967, n. 48 : A.A.S. 59 (1967), p. 566.
[28] Cf. Présentation générale du Missel romain, n. 240
[29] Cf. S. Congrégation pour le Culte Divin, Instruction sur une plus large faculté d’administrer la communion sous les deux espèces, Sacramentali Communione, du 29 juin 1970, n. 6 : A.A.S. 62 (1970) p. 665.
[30] Cf. Présentation générale du Missel romain, n. 68
[31] Cf. Ibid., n. 288
[32] Ibid., n. 298
[33] Cf. Concile Vatican II, Constitution sur la Liturgie, Sacrosanctum Concilium, n. 128 : A.A.S. 56 (1964), pp. 132-133.
[34] Cf. Présentation générale du Missel romain, n. 304
[35] Cf. Ibid., n. 260
[36] Cf. Ibid., nn. 253-280
[37] Cf. nn. 52-57 : A.A.S. 59 (1967), pp. 567-569.
[38] Cf. Lettre de Son Éminence le Cardinal Jacques Lercaro, Président du Consilium, aux Présidents des Conférences épiscopales, du 30 juin 1965 : Notitiæ 1 (1965), pp. 261-262.
[39] Paul VI, Allocution aux Commissions liturgiques d’Italie, du 7 février 1969 : L’Osservatore Romano, 8 février 1969.
[40] Cf. n. 40 : A.A.S. 56 (1964), p. 111.
[41] Cf. Présentation générale du Missel romain, n. 58