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6ème jour dans l’Octave de l’Épiphanie (11 janvier, avant 1955)

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Sommaire

  Textes de la Messe avant 1955   
  Office avant 1955   
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique  

Sixième jour dans l’Octave de l’Épiphanie, supprimée en 1955 ; lectures patristiques de St Fulgence et de St Ambroise.

On commémore aussi St Hygin, pape et martyr.

Textes de la Messe avant 1955

die 11 ianuarii
le 11 janvier
De VI Die infra Octavam Epiphaniæ
Le 6ème jour dans l’Octave de l’Épiphanie
Semiduplex
Semidouble
Missa dicitur ut in Festo, præfatione et Communicántes de Epiphania et dicitur Credo.Messe comme le jour de la Fête avec préface et Communicántes de l’Épiphanie. On dit le Credo.
Et fit commemoratio S. Hygini Papæ et Mart.Et on fait mémoire de St Hygin, Pape et Martyr.

Office avant 1955

A MATINES.

Invitatoire. Le Christ nous est apparu, * Venez, adorons-le.

Au premier nocturne.

De l’Épître aux Romains. Cap. 15, 1-16.

Première leçon. Nous devons donc, nous qui sommes plus forts, supporter les faiblesses des infirmes, et ne pas nous complaire en nous-mêmes. Que chacun de vous ait de la complaisance pour son prochain en ce qui est bien, pour l’édification. Car le Christ ne s’est point complu en lui-même ; mais, comme il est écrit : « Les outrages de ceux qui vous insultaient sont tombés sur moi [1]. » Car tout ce qui a été écrit a été écrit pour notre instruction, afin que par la patience et la consolation des Écritures nous ayons l’espérance [2].
1er répons comme au 7 janvier, les autres répons comme à la fête de l’Epiphanie

Deuxième leçon. Que le Dieu de patience et de consolation vous donne donc d’être unis de sentiments les uns aux autres, selon Jésus-Christ ; afin que, d’un même cœur et d’une même bouche, vous rendiez gloire à Dieu et au Père de notre Seigneur Jésus-Christ. C’est pourquoi, soutenez-vous les uns les autres, comme le Christ vous a soutenus pour la gloire de Dieu. Car je dis que le Christ Jésus a été le ministre de la circoncision [3], pour justifier la véracité de Dieu et confirmer les promesses faites à nos pères ; et afin que les Nations glorifiassent Dieu de sa miséricorde, selon qu’il est écrit : « C’est pour cela, Seigneur, que je vous confesserai parmi les Nations et que je chanterai votre nom. » L’Écriture dit encore : « Réjouissez-vous, Nations, avec son peuple. » Et ailleurs : « Nations, louez toutes le Seigneur ; peuples, exaltez-le tous. »

Troisième leçon. Et Isaïe dit aussi : « Viendra la racine de Jessé, et celui qui s’élèvera pour gouverner les Nations, c’est en lui que les Nations mettront leur espérance, a Que le Dieu de l’espérance vous remplisse donc de toute joie et de toute paix dans votre foi, afin que vous abondiez dans l’espérance et dans la vertu de l’Esprit-Saint. Pour moi, mes frères, je suis certain, en ce qui vous touche, que vous êtes pleins de charité, remplis de tout savoir, en sorte que vous pouvez vous instruire les uns les autres. Cependant je vous ai écrit ceci, mes frères, avec quelque hardiesse, comme pour réveiller votre mémoire, en vertu de la grâce que Dieu m’a donnée, pour être le ministre du Christ Jésus parmi les Nations ; en prêchant la sainteté de l’Évangile de Dieu, afin que l’oblation des Gentils soit acceptée et sanctifiée dans t’Esprit-Saint.

Au deuxième nocturne.

Sermon de saint Fulgence, Évêque.

Quatrième leçon. Dieu lui-même, qui avait ordonné dans la loi qu’on lui offrît les prémices, s’étant fait homme, demanda aussi les prémices des peuples. Les pasteurs furent les prémices des Juifs ; les Mages devinrent les prémices des Gentils. Ceux-là sont attirés de près, ceux-ci amenés de loin. « Où est, disent-ils, celui qui est né Roi des Juifs ? » Hérode, roi des Juifs, avait déjà des fils. Archélaos était né dans un palais ; le Christ, dans un logis qui ne lui appartenait pas. Archélaos, à sa naissance, fut couché dans un lit d’argent ; mais le Christ nouveau-né est déposé dans une crèche étroite : et cependant on néglige celui qui est né dans un palais, et l’on recherche celui qui est né sous un abri emprunté. Les Mages ne nomment même pas le premier ; mais, ayant trouvé le second, ils se prosternent et l’adorent.

Cinquième leçon. Quel est donc ce Roi des Juifs ? Il est pauvre et riche, humble et grand. Quel est donc, ce Roi des Juifs que l’on porte comme un enfant, et que l’on adore comme un Dieu ? Il est petit dans la crèche, immense dans le Ciel : vil dans les langes, et glorieusement manifesté dans le firmament. O Hérode, pourquoi te troubler ainsi ? Ce roi qui est né, ne vient pas pour vaincre les rois en leur faisant la guerre ; mais il va les subjuguer d’une manière merveilleuse en mourant. II n’est pas né pour te succéder ; mais pour que le monde croie fidèlement en lui. Il vient, non pour combattre durant sa vie ; mais pour triompher par sa mort.

Sixième leçon. Cet enfant que les Mages appellent en ce moment le Roi des Juifs, est aussi le Créateur et le Seigneur des Anges. Si tu crains l’enfance muette de ce nouveau-né, tu dois redouter bien davantage sa toute-puissance pour le jour où il sera ton Juge. Ne le crains pas comme un successeur à ton trône, mais redoute en lui le juste Juge qui condamnera ton infidélité. « Allez, leur dit-il, et puis venez me rapporter ce que vous aurez trouvé, afin que moi aussi, j’aille l’adorer. » O ruse artificieuse ! ô incrédulité impie ! ô perversité hypocrite ! Le sang des Innocents que tu as si cruellement répandu, atteste ce que tu voulais faire de cet enfant.

Au troisième nocturne.

Lecture du saint Évangile selon saint Matthieu. Cap. 2, 1-12.
En ce temps-là : Jésus étant né à Bethléem de Judée, aux jours du roi Hérode, voici que des mages d’Orient arrivèrent à Jérusalem, disant : "Où est le roi des Juifs qui vient de naître ?". Et le reste.

Homélie de saint Ambroise, Évêque.

Septième leçon. Quels sont ces présents d’une foi vraie ? De l’or est offert, comme à un Roi ; de l’encens, comme à un Dieu ; de la myrrhe, comme pour un mort. Autre est, en effet, insigne d’un roi ; autre le symbole de la puissance divine ; et autre l’honneur d’une sépulture, qui, loin de laisser corrompre le corps du mort, le conserve. Nous aussi, qui comprenons et lisons ces choses, tirons, mes frères, de nos trésors, de semblables présents. « Car nous avons un trésor dans des vases d’argile. » Et si vous devez estimer ce que vous êtes en vous-mêmes, non comme un bien qui vient de vous, mais comme un don qui vous a été fait par le Christ, combien, à plus forte raison, ne devez-vous pas estimer dans le Christ, ce qui est, non pas à vous, mais au Christ ?

Huitième leçon. Les Mages puisent donc dans leurs trésors pour offrir des présents. Voulez-vous savoir la grâce qu’ils ont méritée ? Ils voient l’étoile ; mais où est. Hérode on ne la voit pas : là où est le Christ on la voit de nouveau, et elle montre le chemin. Cette étoile est donc une voie, et la voie est Jésus-Christ ; car à propos du mystère de l’Incarnation le Christ est appelé étoile : « Il se lèvera une étoile de Jacob et il s’élèvera (un homme) d’Israël. » Assurément là où est le Christ, est aussi l’étoile. Il est lui-même en effet, une étoile resplendissante, l’étoile du matin. Lui-même se désigne donc par sa lumière.

Neuvième leçon. Recevez encore un autre enseignement. Les Mages vinrent par un chemin et s’en retournèrent par un autre, car ils avaient vu le Christ, ils avaient reconnu le Christ ; ils s’en retournèrent certainement meilleurs qu’ils n’étaient venus. Il y a deux voies : l’une qui conduit à la mort, l’autre qui conduit au royaume. L’une est celle des pécheurs et elle mène à Hérode ; l’autre est le Christ lui-même, et par elle on retourne dans sa patrie. Ici-bas, en effet, notre exil est temporaire, selon qu’il est écrit : « Mon âme a beaucoup séjourné dans une terre étrangère. »

A LAUDES

Ant. au Bénédictus Ils viendront à toi * ceux qui te décriaient, et ils adoreront les traces de tes pieds.

AUX DEUXIÈMES VÊPRES.

Ant. au Magnificat Les Mages ayant été avertis * en songe, revinrent dans leur pays par un autre chemin.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

Les Mages ne se contentèrent pas d’adorer le grand Roi que Marie présentait à leurs hommages. A l’exemple de la Reine de Saba qui vint honorer le Roi pacifique, en la personne du sage et opulent fils de David, les trois Rois de l’Orient ouvrirent leurs trésors et en tirèrent de riches offrandes. L’Emmanuel daigna agréer ces dons mystérieux ; mais, à l’exemple de Salomon son aïeul, il ne laissa point partir les Princes sans les combler lui-même de présents qui dépassaient infiniment en richesse ceux qu’il avait daigné agréer. Les Mages lui présentaient les offrandes de la terre ; et Jésus les comblait des dons célestes. Il confirmait en eux la foi, l’espérance et la charité ; il enrichissait, en leurs personnes, son Église tout entière qu’ils représentaient ; et les paroles du divin Cantique de Marie recevaient leur accomplissement sur eux, et aussi sur la Synagogue qui les avait laissés seuls marcher à la recherche du Roi d’Israël : « Ceux qui avaient faim, il les a remplis de biens ; et ceux qui étaient opulents, il les a renvoyés dans la disette. »

Mais considérons ces présents des Mages, et reconnaissons, avec l’Église et les Pères, les Mystères qu’ils exprimaient. Ces dons étaient au nombre de trois, afin d’honorer le nombre sacré des Personnes dans l’Essence divine ; mais le nombre inspiré trouvait une nouvelle application dans le triple caractère de l’Emmanuel. Ce Fils de Dieu venait régner sur le monde : il convenait de lui offrir l’Or qui marque la puissance suprême. Il venait exercer le souverain Sacerdoce, et réconcilier, par sa médiation, le ciel et la terre : il convenait de lui présenter l’Encens qui doit fumer dans les mains du Prêtre. Sa mort pouvait seule le mettre en possession du trône préparé à son humanité glorieuse ; cette mort devait inaugurer le Sacrifice éternel de l’Agneau divin : la Myrrhe était là pour attester la mort et la sépulture d’une victime immortelle. L’Esprit-Saint qui inspira les Prophètes avait donc dirigé les Mages dans le choix de ces mystérieuses offrandes ; et c’est ce que nous dit éloquemment saint Léon, dans un de ses Sermons sur l’Épiphanie : « O admirable foi qui mène à la science parfaite, et qui n’a point été instruite à l’école d’une sagesse terrestre, mais éclairée par l’Esprit-Saint lui-même ! Car où avaient-ils découvert la nature inspirée de ces présents, ces hommes qui sortaient de leur patrie, sans avoir encore vu Jésus, sans avoir puisé dans ses regards la lumière qui dirigea si sûrement le choix de leurs offrandes ! Tandis que l’Etoile frappait les yeux de leur corps, plus pénétrant encore, le rayon de la vérité instruisait leurs cœurs. Avant d’entreprendre les fatigues d’une longue route, ils avaient déjà connu Celui à qui étaient dus, par l’Or, les honneurs de Roi ; par l’Encens, le culte divin ; par la Myrrhe, la foi dans sa mortalité. » Si ces présents représentent merveilleusement les caractères de l’Homme-Dieu, ils ne sont pas moins remplis d’enseignements par les vertus qu’ils signifient, et que le divin Enfant reconnaissait et confirmait dans l’âme des Mages. L’Or signifie pour nous, comme pour eux, la charité qui unit à Dieu ; l’Encens, la prière qui appelle et conserve Dieu dans le cœur de l’homme ; la Myrrhe, le renoncement, la souffrance, la mortification, par lesquels nous sommes arrachés à l’esclavage de la nature corrompue. Trouvez un cœur qui aime Dieu, qui s’élève à lui par la prière, qui comprenne et goûte la vertu de la croix : vous aurez en ce cœur l’offrande la plus digne de Dieu, celle qu’il agréera toujours.

Nous ouvrons donc aussi notre trésor, ô Jésus ! et nous mettons à vos pieds nos présents. Après avoir confessé votre triple gloire de Dieu, de Prêtre et d’Homme, nous vous supplions d’agréer le désir que nous avons de répondre par l’amour à l’amour que vous nous témoignez ; nous osons môme vous dire que nous vous aimons, ô Dieu ! ô Prêtre ! ô Homme ! Augmentez cet amour que votre grâce a fait naître. Recevez aussi notre prière, tiède et imparfaite, mais cependant unie à celle de votre Église. Enseignez-nous à la rendre digne de vous, et proportionnée aux effets que vous voulez qu’elle produise ; formez-la en nous, et qu’elle s’élève sans cesse de notre cœur, comme un nuage de parfums. Recevez enfin l’hommage de nos cœurs contrits et pénitents, la volonté que nous avons d’imposer à nos sens le frein qui les règle, l’expiation qui les purifie.

Illuminés par les hauts mystères qui nous révèlent la profondeur de notre misère et l’immensité de votre amour, nous sentons qu’il nous faut, plus que jamais, nous éloigner du monde et de ses convoitises, et nous attacher à vous. L’Etoile n’aura pas lui en vain sur nous ; elle ne nous aura pas en vain conduits jusqu’à Bethléhem, où vous régnez sur les cœurs. Quand vous vous donnez vous-même, ô Emmanuel ! Quels trésors pourrions-nous avoir que nous ne devions être prêts à déposer à vos pieds ?

Protégez notre offrande, ô Marie ! Celle des Mages, accompagnée de votre médiation, fut agréable à votre Fils ; la nôtre, présentée par vous, trouvera grâce, malgré son imperfection. Aidez notre amour par le vôtre ; soutenez notre prière par l’intervention de votre Cœur maternel ; fortifiez-nous dans la lutte avec le monde et la chair. Pour assurer notre persévérance, obtenez-nous de ne jamais oublier les doux mystères qui nous occupent présentement ; qu’à votre exemple, nous les gardions toujours gravés dans notre cœur. Qui oserait offenser Jésus dans Bethléhem ? Qui pourrait refuser quelque chose à son amour, en ce moment où, sur vos genoux maternels, il attend notre offrande ? O Marie ! ne nous laissez jamais oublier que nous sommes les enfants des Mages, et que Bethléhem nous est toujours ouverte.

Pour épancher les sentiments de joie et d’admiration que nous causent de si ineffables merveilles, empruntons la voix de la Liturgie ; et chantons d’abord cette Hymne de la Naissance que nous a laissée le saint Évêque de Poitiers, Venance Fortunat :

HYMNE.
Que le monde entier se réjouisse en apprenant l’arrivée de Celui qui est la récompense de vie ; après le joug d’un ennemi farouche , la rédemption nous apparaît.
Ce qu’avait chanté Isaïe, s’accomplit dans la Vierge : l’Ange lui a annoncé le mystère ; l’Esprit-Saint l’a remplie de sa vertu.
Marie conçoit dans ses entrailles ; sa foi dans la parole a été féconde ; Celui que le monde entier ne peut contenir est contenu au sein d’une Vierge.
La tige de Jessé a fleuri, la branche a porté son fruit ; la Mère féconde a mis au jour son Fils, et la Vierge a gardé son intégrité.
Il s’est laissé placer dans une crèche, Celui qui est l’auteur de la lumière ; avec son Père il a créé les cieux ; la main de sa Mère l’a enveloppé de langes.
Celui qui donna la Loi au monde, Celui qui promulgua les dix préceptes, a daigné, devenu homme, se placer sous le joug de la Loi.
La souillure du vieil Adam, le nouvel Adam l’a lavée ; ce que le premier, dans son orgueil, avait renversé, le second, dans son humilité, le relève.
La lumière et le salut viennent de naître, la nuit s’enfuit, la mort est vaincue ; venez, nations, visiter avec foi le Dieu que Marie nous enfante.
Amen.

Nous donnerons ensuite cette éloquente prière du Bréviaire Mozarabe :

ORATIO.

O Dieu ! Fils de Dieu, ineffable Vertu du Père, qui, par le lever d’un nouvel astre, apparaissez aux Gentils comme le puissant Roi des rois, et manifestez votre gloire dans l’heureuse Cité ; vous, devant qui tremblent les îles de la terre, à qui les princes et les nations des Gentils obéissent : en ce jour où tous les royaumes s’abaissent devant vous, et les diadèmes des rois sont déposés à vos pieds, daignez, par votre grâce, vous montrer miséricordieux à nos âmes, et apparaître visible dans nos œuvres, afin que, possédant les prémices de l’Esprit, nous puissions vous offrir les présents par lesquels nos cœurs, devenus agréables à vos yeux, mériteront d’entrer en l’heureuse Jérusalem, où nous pourrons vous présenter l’or très pur de nos œuvres, et devenir participants de votre royaume. Amen.

La Prose qui suit est tirée du Missel de Paris de 1584 :

SÉQUENCE.
Dans les hauteurs on chante : Gloire au Roi nouveau-né, qui vient rétablir la concorde entre le ciel et la terre.
Tout nous invite à célébrer le jour natal du Christ, jour qui donne naissance à la grâce de la loi nouvelle.
Le médiateur qui nous est donné pour la rançon de notre salut, veut partager notre nature, sans être pécheur comme nous.
L’étoile, lançant son rayon, ne diminue pas sa clarté, ni Marie, enfantant son Fils, ne donne atteinte à sa pureté.
Quelle est cette pierre, sans la main de l’homme, détachée de la montagne ? C’est Jésus qui, sortant de la lignée des Rois,
Sans le secours de la chair, procède du sein d’une Vierge-mère.
Que la solitude tressaille, que le désert se couvre de fleurs : la tige de Jessé a fleuri.
La tige produit la branche, et la branche la fleur ; la Vierge produit le Sauveur : ainsi la Loi l’avait chanté.
La tige figurait David, la branche annonçait la Mère qui est sortie du sang royal.
La fleur est l’Enfant qui pour nous est né, digne d’être comparé à la fleur, pour sa douceur merveilleuse.
Il est couché dans la crèche, Celui dont la naissance est célébrée par des concerts célestes.
Les habitants du ciel chantent avec allégresse, et les pasteurs veillent dans le silence de la nuit.
Tout retentit de louanges sur l’enfantement de la Vierge.
La Loi et les Psaumes s’unissent dans leurs oracles aux écrits des Prophètes.
Les Anges et les pasteurs, les astres et les Mages proclament le nouveau-né.
Prémices des Gentils, les Rois accourent de l’Orient à la crèche de cet Enfant.
Jésus, enfant immortel, devenu mortel et terrestre, arrachez-nous par votre puissance aux maux de cette vie.
Après cette vie mourante, cette mort vivante, restituez-nous, par votre clémence, l’immortelle vie.
Amen.

Le saint Diacre d’Édesse continue (Voir le début au commentaire de Dom Guéranger la veille) son admirable dialogue des Mages avec la Mère de l’Enfant divin.

Faites-moi connaître, ô Princes ! Dites-moi, par bienveillance, tout le mystère qui s’est accompli dans votre contrée : quelle voix vous a appelés et vous fait venir jusqu’ici ?
— Une étoile immense nous a apparu, plus éclatante que tous les astres ; sa splendeur a illuminé notre région, et nous a appris que le Roi est né.
— De grâce, ô Princes ! ne parlez pas de ces choses dans notre contrée, de peur que les Rois de la terre ; l’ayant appris, ne dressent des embûches, dans leur envie, à cet enfant.
— Ne craignez point, ô Vierge ! c’est votre Fils qui brisera tous les diadèmes, il les anéantira ; et l’envie des princes ne lui pourra jamais nuire.
— Je crains Hérode, ce loup impur, je crains qu’il ne me suscite des chagrins, qu’il ne tire le glaive, et ne coupe cette douce grappe non mûre encore.
— Ne craignez pas Hérode ; votre Fils renversera son trône ; ce tyran régnera peu, il sera brisé, et son diadème roulera à terre.
— Un torrent de sang coule à Jérusalem, les hommes les plus vertueux sont immolés : si donc le tyran apprend ces choses, il tendra des pièges à mon Fils. De grâce, ô Princes ! gardez le secret ; évitez le tumulte.
— Tous les torrents seront arrêtés dans leur cours par votre Fils ; sa main contiendra l’effort des lances ; le glaive de Jérusalem demeurera suspendu, et il ne tombera que si votre Fils le permet.
— Les scribes et les prêtres de Jérusalem, qui ont coutume de répandre le sang dans leurs intrigues, exciteront peut-être quelque débat sanglant contre moi et mon Fils ; de grâce, Mages, gardez le silence.
— L’envie des scribes et des prêtres ne saurait nuire à votre Fils ; c’est lui qui doit abolir leur sacerdoce ; par lui cesseront leurs solennités.
— Un Ange m’a apparu, au jour où je conçus cet Enfant ; il me dit, comme à vous, que mon Fils est Roi, que son diadème est d’en haut, et qu’il est indestructible.
— L’Ange dont vous parlez, ô Vierge, est le même qui nous a apparu sous la forme d’une étoile ; c’est de lui que nous savons que votre Fils est plus grand que les astres, et qu’il les surpasse en splendeur.
— Je vous déclare un autre mystère pour confirmer votre foi : sachez donc que, demeurant vierge, j’ai enfanté un fils, le Fils de Dieu ; allez et annoncez sa gloire.
— Déjà l’étoile nous avait instruits ; par elle nous savions que la naissance de votre Fils était supérieure à toute chose, et qu’il est le Fils même de Dieu.
— Rapportez la paix en votre contrée ; que la paix s’étende sur tous vos royaumes ; soyez les fidèles messagers de la vérité sur toute votre route.
— Que la paix de votre Fils nous ramène sains et saufs dans notre région, comme elle nous a conduits ici ; et quand son empire sera manifesté au monde, qu’il visite notre terre et qu’il la bénisse.
— Que la Perse se réjouisse à la nouvelle que vous apportez ; que l’Assyrie tressaille à votre retour ; quand le royaume de mon Fils apparaîtra, lui-même il placera son étendard au milieu de votre contrée.

Chantons Marie, et offrons à sa gloire ce cantique de l’Église Grecque, où respire la tendre piété de l’Hymnographe saint Joseph.

XV DIE JANUARII
Agité et fatigué par les assauts de mes passions, comme par une tempête, battu par les flots de mes péchés, je me réfugie avec amour sous ton infatigable protection, ô Vierge digne de toute louange ! Aie pitié de moi et sauve-moi, ô toujours Vierge !
Celui qui est la pureté même te rencontra dans le vallon comme une rose odorante, ô immaculée ! il voulut habiter au milieu de toi, lui qui embaume le genre humain de ses suaves parfums.
Dirige les mouvements de mon âme, ô très pure, selon les divins préceptes de Celui qui s’est levé de ton sein avec splendeur ; par ton intercession, sauve-moi de la tempête des scandales de cette vie.
Vierge-mère, sans le secours de l’homme, tu as enfanté le Seigneur de tous, l’Emmanuel, et tu es demeurée Vierge après l’enfantement ; ne cesse de supplier ton Fils de délivrer de l’incursion de leurs ennemis ceux qui se réfugient sous ta protection.
Tu as revêtu d’un corps, ô très chaste, et possédé dans tes entrailles le Verbe égal à son Père en œuvres et en majesté, qui, pour son ineffable miséricorde, a daigné prendre toute notre nature.
Nous louons, ô bénie ! ton Fils, par qui nous sommes rachetés de la damnation éternelle ; nous te proclamons bienheureuse, ô toi qui es comblée des félicités divines, toi qu’a aimée uniquement Celui qui est béni et glorieux par-dessus toutes choses !
Tu épanches sur nous, qui recourons à toi, un fleuve intarissable, ô très chaste ! Nous nous y désaltérons dans les flots abondants de la grâce ; nous louons ton enfantement, ô immaculée ! nous l’exaltons dans tous les siècles.
Ton sein est devenu le séjour de la Lumière, qui est venue éclairer ceux qui étaient assis dans les ténèbres ; c’est pourquoi, d’une voix incessante, nous te louons à jamais, ô Mère de Dieu ! et nous te vénérons avec amour comme l’espoir de nos âmes.

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

Par un autre chemin.

1. Prière des Heures. Au second Nocturne, nous entendons un sermon très instructif de saint Fulgence, évêque de la petite ville maritime de Ruspe dans l’Afrique du Nord : « Dieu qui, dans l’Ancien Testament, a ordonné de lui offrir les prémices, a consacré lui-même, quand il est devenu Homme, les prémices des Gentils à son culte. Les bergers étaient les prémices -du judaïsme, les Mages furent les prémices de la gentilité. Les premiers furent amenés du voisinage, les autres furent ramenés des pays lointains. « Où est », demandent-ils, « le Roi des Juifs qui vient de naître ? » A Hérode, le roi des Juifs, plusieurs fils étaient déjà nés. Archelaüs naquit dans un palais, le Christ dans un abri de passage. Archelaüs fut placé à sa naissance dans un berceau d’argent, le Christ dans une étroite crèche ; et pourtant celui qui est né dans un palais est négligé, celui qui est né dans un abri de passage est recherché ; le premier n’est même pas nommé par les Mages, mais le Christ, dès qu’ils l’ont trouvé, est adoré humblement et à genoux. Qui est ce Roi des Juifs ? Il est pauvre et riche, abaissé et sublime. Qui est ce Roi des Juifs que l’on porte dans les bras comme un nourrisson et qui est adoré comme Dieu, petit dans sa crèche, immense dans les cieux, sans apparence dans ses langes, glorifié parmi les étoiles ? D’où vient, Hérode, que tu te troubles tant ? Ce Roi qui vient de naître, ne vient pas dans le monde pour vaincre les rois, dans le combat, mais pour les subjuguer merveilleusement par sa mort. Il n’est pas né pour être ton successeur, mais pour que le monde croie fidèlement en lui. Il ne vient pas pour exposer sa vie dans les combats, mais pour triompher dans sa mort. Ce petit Enfant que les Mages nomment le Roi des Juifs est aussi le Créateur et le Seigneur des anges. Tu trembles à la venue d’un enfant qui ne parle pas encore, il te faut pourtant craindre bien davantage la toute-puissance du Juge. Ne crains pas en lui le successeur de ton royaume, mais le juste Juge qui condamnera ton incrédulité. »

L’Antienne de Benedictus a aujourd’hui un accent inattendu : « Ils viendront vers toi ceux qui te blasphèment et ils adoreront la trace de tes pas » (Is. LX, 14). Nous songeons à la conversion des païens, mais aussi à celle des persécuteurs du Christ, par exemple : de Saul. Le soir nous chantons : « Les Mages, avertis dans leur sommeil, s’en retournèrent dans leur pays par un autre chemin. »

2. La messe. — Hier nous avons vu que la démarche des Mages symbolisait l’Offrande des fidèles. Mais dans la secrète, l’Église nous donne une interprétation plus profonde des « dons royaux ». Ils symbolisent l’Offrande ta plus précieuse, le Fils de Dieu. Quelle est donc notre véritable offrande à la messe ? Ce ne sont pas les dons de l’Offrande, le pain et le vin, mais le corps et le sang de Jésus-Christ dans lesquels sont changés le pain et le vin. Les fidèles n’offraient ces dons que pour exprimer par là que le corps et le sang du Christ étaient leur sacrifice. Oui, telle est l’essence du Saint-Sacrifice de la messe : le corps du Seigneur sacrifié dans la mort, l’Agneau immolé est placé dans nos mains, nous pouvons l’offrir au Père céleste en expiation de nos fautes, pour le remercier de ses bienfaits, pour lui demander ses grâces. Et cet Agneau du sacrifice y est symbolisé par les dons des trois Mages. Il est l’or. Y a-t-il quelque chose de plus précieux pour nous sur la terre ? Il convient de lui offrir de l’or, car il est le Roi des rois. Il est l’encens qu’on offre à Dieu en sacrifice. Le Christ n’est pas seulement l’Agneau du sacrifice, il est aussi le grand Prêtre dont la prière s’élève comme un encens. Il est la myrrhe, car la chair qui fut vraiment immolée et le sang qui coula vraiment sur la Croix sont devant nous sur l’autel.

Les trois parties du Sacrifice de la Messe trouvent aussi un beau symbole dans les trois dons. L’Offertoire est l’or. La signification de l’Offrande est en effet le don de soi-même et ce don doit être vrai et pur comme l’or. La Consécration ressemble à l’encens ; c’est en effet l’action sacerdotale par excellence tant pour les prêtres consacrés que pour le sacerdoce général des fidèles. Car le peuple exerce en premier lieu son sacerdoce royal par la participation active à la messe. La Communion enfin ressemble à la myrrhe. Le corps du Seigneur fut jadis déposé, avec de la myrrhe, dans le tombeau taillé dans le roc. Aujourd’hui le même corps descend dans le tombeau de notre cœur, conservé par la myrrhe de la grâce, pour ressusciter dans notre vie vertueuse et chrétienne.

3. Considérons aujourd’hui la démarche des Mages et comparons-la avec celle que nous faisons pour aller à l’église. Le voyage des Mages, tant à l’aller qu’au retour, leur ménagea des joies et des peines. Ce ne fut certes pas une décision facile que de quitter leur pays pour s’en aller dans des pays étrangers, inconnus et dangereux et de se confier à la conduite d’une étoile. Ce voyage dura peut-être des semaines et rencontra bien des difficultés, quand ce ne serait que le séjour auprès d’Hérode. Quelle dut être l’impression des Mages quand, à Jérusalem, l’étoile disparut et qu’Hérode prit une attitude si énigmatique ! Mais leur joie n’en fut que plus grande quand ils revirent l’étoile qui les conduisit au but désiré : « ils se réjouirent d’une très grande joie. » Leur retour dans leur pays ne fut pas, non plus, exempt de difficultés (Saint Jean Chrysostome décrit, dans le bréviaire, les difficultés de la foi) ; le retour précipité, la fuite devant Hérode, dont ils avaient trompé l’attente, rendit leur retour pénible. Mais la joie du grand événement, ils la portèrent continuellement, toute leur vie, dans leur cœur.

Nous aussi, nous faisons souvent, peut-être tous les jours, un voyage semblable pour aller à l’église et pour en revenir : ce voyage a bien des rapports avec celui des Mages. Pour nous aussi, le voyage pour aller à l’Église nous demande des sacrifices mais nous apporte aussi beaucoup de joie. Il s’agit de se lever à temps, de marcher parfois par le vent et le mauvais temps, par la pluie et la neige, le froid et l’obscurité. Il y a souvent un Hérode qui veut nous retenir : notre propre paresse qui nous empêche de nous lever, notre famille qui trouve insensé d’aller tous les jours à la messe. Cependant si nous triomphons de tous ces obstacles, nous goûterons quelque chose de la « très grande joie » des Mages. Estimons notre voyage vers l’église, c’est un voyage liturgique. Dans l’ancienne Église, les fidèles se réunissaient dans l’ecclesia collecta et de là se rendaient en procession, en priant et en chantant, à l’église de station où avait lieu le Saint-Sacrifice. Nous pouvons nous représenter quelque chose de semblable. Notre demeure est l’église de réunion, nous l’avons justement fait bénir le jour de l’Épiphanie, comme une église, avec de l’encens et de l’eau bénite. Là, nous nous sommes rassemblés en esprit, maintenant commence la procession. Malgré notre isolement nous ne sommes pas seuls ; notre ange gardien nous accompagne et les saints nous précèdent. C’est donc une vraie procession. — En chemin, méditons l’Introït qui nous donnera le symbolisme de notre démarche. Récitons l’un ou l’autre verset du psaume : « Comme mon cœur s’est réjoui à la joyeuse nouvelle, c’est à la maison de Dieu que nous allons ! » Pensons aux dons royaux que nous déposerons sur l’autel, à l’intention pour laquelle on offrira le Saint-Sacrifice. Cette démarche doit être une démarche sainte. Notre retour aussi doit être recueilli, rempli du bonheur de la visite du divin Roi, accompagné de réflexions sur l’œuvre journalière qui commence. Établissons un pont d’or entre le mystère du jour et nos obligations quotidiennes. Le souvenir constant du voyage des Mages sanctifiera celui que nous faisons pour nous rendre à l’église.

4. Lecture d’Écriture. — Saint Paul continue d’exposer ses idées sur le support mutuel (Rom. XV, 1-16). (Ces pensées sont particulièrement opportunes en cette fête de la réconciliation générale des peuples qu’est l’Épiphanie). L’exemple du Christ éclaire ces pensées. « Nous devons, nous qui sommes forts, supporter les faiblesses des faibles, sans chercher à nous plaire à nous-mêmes. Chacun de nous doit chercher à faire plaisir à son prochain pour le bien et pour l’édification. Car le Christ lui-même ne rechercha pas son bon plaisir comme il est écrit : les injures de ceux qui t’injuriaient sont tombées sur moi. » Dans la suite nous entendons l’Apôtre expliquer les relations des Juifs et des Gentils avec le Christ. Nous avons déjà : entendu ce passage, comme Épître, le second dimanche de l’Avent, nous le lisons ici dans une nouvelle lumière : « Le Christ a été Juif à cause de la fidélité de Dieu (car telle était la promesse). Quant aux Gentils, ils peuvent louer Dieu à cause de sa miséricorde parce que, sans mérites et sans promesses, ils ont été appelés. » Paul est arrivé à la conclusion de son Épître, il développe maintenant ses plans d’avenir. Après son travail missionnaire dans l’Orient, il aspire à se rendre dans l’Occident lointain. « J’espère, quand je me mettrai en route pour l’Espagne, vous voir en passant et, après avoir un peu joui de votre présence, prendre congé de vous pour aller là-bas... Mais je sais que si je viens vers vous j’y viendrai avec l’abondance des bénédictions du Christ. »

[1] « Le Christ n’a pas cherché sa propre satisfaction, mais il a exposé sa vie pour notre salut, et c’est ainsi que nous, chrétiens, nous devons agir pour le salut de nos frères. Le Christ a voulu restituer à son Père l’honneur que lui enlevait le péché, et apaiser la colère divine irritée contre les hommes, en offrant dans ce double but, ses satisfactions. » (Corn. a Lap.).

[2] La patience, dont nous trouvons les enseignements et les exemples dans l’Écriture ; la consolation qu’elle nous donne par les récompenses qu’elle promet.

[3] C’est-à-dire qu’il a été le dispensateur et le ministre de l’Évangile à l’égard des Juifs circoncis.