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4ème jour dans l’Octave de l’Épiphanie (9 janvier, avant 1955)

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Sommaire

  Textes de la Messe avant 1955   
  Office avant 1955   
  Dom Guéranger, l’Année Liturgique  
  Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique  

Quatrième jour dans l’Octave de l’Épiphanie, supprimée en 1955 ; lectures patristiques de St Léon et de St Grégoire le Grand.

Textes de la Messe avant 1955

die 9 ianuarii
le 9 janvier
De IV Die infra Octavam Epiphaniæ
Le 4ème jour dans l’Octave de l’Épiphanie
Semiduplex
Semidouble
Missa dicitur ut in Festo, præfatione et Communicántes de Epiphania et dicitur Credo.Messe comme le jour de la Fête avec préface et Communicántes de l’Épiphanie. On dit le Credo.

Office avant 1955

A MATINES.

Invitatoire. Le Christ nous est apparu, * Venez, adorons-le.

Au premier nocturne.

De l’Epître aux Romains. Cap. 13, 1-10

Première leçon. Que toute âme soit soumise aux puissances supérieures, car il n’y a point de puissance qui ne vienne de Dieu ; et celles qui sont ont été établies de Dieu. C’est pourquoi qui résiste à la puissance, résiste à l’ordre de Dieu. Or ceux qui résistent attirent sur eux-mêmes la condamnation ; car les princes ne sont pas à craindre pour les œuvres bonnes, mais pour les mauvaises. Veux-tu donc ne pas craindre la puissance ? fais le bien, et elle te louera. Car elle est le ministre de Dieu pour le bien.
1er répons comme au 7 janvier, les autres répons comme à la fête de l’Epiphanie

Deuxième leçon. Que si tu fais le mal, crains ; car ce n’est pas sans motif qu’elle porte le glaive, puisqu’elle est le ministre de Dieu dans sa colère, contre celui qui fait le mal. Il est donc nécessaire de vous y soumettre, non seulement par crainte de la colère, mais encore par conscience. C’est aussi pour cela que vous payez le tribut ; car les princes sont les ministres de Dieu, le servant en cela même. Rendez donc à tous ce qui leur est dû : à qui le tribut, le tri-•but ; à qui l’impôt, l’impôt ; à qui la crainte, la crainte ; à qui l’honneur, l’honneur.

Troisième leçon. Ne devez rien à personne, sinon de vous aimer mutuellement ; car qui aime le prochain a accompli la loi. En effet : Tu ne commettras point d’adultère, tu ne tueras point, tu ne déroberas point, tu ne porteras point de faux témoignages, tu ne convoiteras point ; et s’il est quelque autre commandement, tout se résume dans cette parole : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. L’amour du prochain n’opère pas le mal. L’amour est donc la plénitude de la loi.

Au deuxième nocturne.

Sermon de saint Léon, Pape.

Quatrième leçon. Nous venons de célébrer l’heureux jour où la Vierge sans tache mit au monde le Sauveur du genre humain : la solennité vénérable de l’Épiphanie nous apporte maintenant, mes très chers frères, une continuation de joies. Ces deux fêtes qui se suivent de si près, et qui nous représentent des mystères dont l’un est comme la suite de l’autre, ne nous permettent point de laisser refroidir la vivacité de notre allégresse, et la ferveur de notre foi. Car c’est en vue du salut de tous les hommes, que l’enfance du médiateur entre Dieu et les hommes était déjà manifestée au monde entier, alors qu’elle demeurait encore renfermée dans une petite bourgade.

Cinquième leçon. En effet, bien que le Sauveur eût choisi le peuple d’Israël et une seule famille de ce peuple pour y prendre la nature de l’humanité entière, il ne voulut cependant pas que les débuts de son apparition sur la terre demeurassent cachés dans les bornes étroites de l’habitation maternelle ; mais décida d’être promptement connu de tous, ayant daigné naître pour tous. Une étoile d’un éclat tout nouveau apparut donc en Orient à trois Mages : plus belle et plus brillante que les autres astres, elle attirait les regards, elle excitait facilement l’attention, et l’on comprenait aussitôt qu’une apparition si extraordinaire devait avoir quelque signification.

Sixième leçon. Celui qui avait donné ce signe au monde, ouvrit l’intelligence de ceux qui le contemplaient ; ce qu’il fit comprendre, il le fit chercher ; et, étant alors recherché, il s’offrit lui-même à être trouvé. Trois hommes se mettent en chemin sous la conduite de cette lumière céleste ; les yeux fixés sur l’astre qui les précède et suivant la route qu’il leur trace, ils sont amenés par la splendeur de la grâce, à la connaissance de la vérité. Sous l’impression d’un sentiment que leur suggérait la raison humaine, ils s’imaginèrent qu’il fallait chercher dans la cité royale, le Roi nouveau-né ; mais celui qui avait pris la forme du serviteur, et qui était venu non pour juger, mais pour être jugé, préféra Bethléem pour sa naissance, Jérusalem pour sa passion.

Au troisième nocturne.

Lecture du saint Évangile selon saint Matthieu. Cap. 2, 1-12.
En ce temps-là : Jésus étant né à Bethléem de Judée, aux jours du roi Hérode, voici que des mages d’Orient arrivèrent à Jérusalem, disant : "Où est le roi des Juifs qui vient de naître ?". Et le reste.

De l’homélie de S. Grégoire, Pape.

Septième leçon. Les Mages nous donnent une leçon de grande importance, en retournant dans leur pays par un autre chemin. Obéissant ainsi à l’ordre, qui leur avait été donné, ils nous font assurément entendre ce que nous avons à faire. Notre patrie est le Ciel, et maintenant que nous connaissons Jésus, il nous est interdit de reprendre le chemin par lequel nous étions venus. Nous nous sommes éloignés de notre patrie par l’orgueil, par la désobéissance, par l’amour des choses visibles, par la manducation du fruit défendu ; mais il faut que nous nous en rapprochions par les larmes, par l’obéissance, par le mépris des choses visibles et la mortification des appétits de la chair.

Huitième leçon. Nous retournons donc en notre pays par une autre voie ; car, nous qui nous sommes éloignés des joies du paradis en recherchant des plaisirs, nous pouvons y revenir par les gémissements. Il est donc nécessaire, mes très chers frères, que, toujours dans la crainte, toujours sur nos gardes, nous mettions sous les yeux de notre cœur, d’une part nos péchés, et d’autre part la rigueur du dernier jugement. Considérons avec quelle sévérité viendra ce Juge, qui maintenant nous menace du jugement, mais demeure caché ; qui donne aux pécheurs des sujets de trembler, mais néanmoins les supporte encore, et qui ne diffère de venir juger, qu’afin de trouver moins à condamner.

Neuvième leçon. Expions nos fautes par nos larmes, et, selon la parole du Psalmiste : « Prévenons sa présence par la confession. » Ne nous laissons séduire, ni par des voluptés trompeuses ni par de vaines joies ; car il est proche, le Juge qui a dit : « Malheur à vous qui riez maintenant, parce que vous gémirez et vous pleurerez. » Voilà pourquoi Salomon a dit : « Le rire sera mêlé de douleur, et le deuil occupe les extrémités delà joie. » Et encore : « Le rire, je l’ai regardé comme une- erreur, et à la joie, j’ai dit : Pourquoi te séduis-tu inutilement ? » Et en un autre endroit : « Le cœur des sages est où est la tristesse ; et le cœur des insensés où est la joie [1]. » !

A LAUDES

Ant. au Bénédictus Nous avons vu son étoile * en Orient, et nous sommes venus avec des présents pour adorer le Seigneur.

AUX DEUXIÈMES VÊPRES.

Ant. au Magnificat Interrogeant * les Mages, Hérode leur dit : Quel signe avez-vous vu au sujet du Roi nouveau-né ? Nous avons vu une étoile étincelante, dont la splendeur illumine le monde.

Dom Guéranger, l’Année Liturgique

L’Etoile annoncée par Balaam s’étant levée sur l’Orient, les trois Mages, dont le cœur était ouvert à l’attente du Messie libérateur, ont senti tout d’abord l’impression d’amour qui les porte vers lui. Ils reçoivent la nouvelle du joyeux avènement du Roi des Juifs d’une manière mystique et silencieuse, à la différence des bergers de Bethléhem, que la voix d’un Ange convia vers la crèche. Mais le langage muet de l’Etoile était expliqué dans leurs cœurs par l’action même du Père céleste, qui leur révélait son Fils. En cela, leur vocation l’emporta en dignité sur celle des bergers qui, selon la disposition divine dans l’ancienne Loi, ne connurent rien que par le ministère des Anges.

Mais, si la grâce céleste s’adressa directement à leurs cœurs, on peut dire aussi qu’elle les trouva fidèles. Les bergers vinrent en hâte à Bethléhem, nous dit saint Luc. Les Mages parlant à Hérode expriment avec non moins de bonheur la simplicité de leur empressement : « Nous avons vu, disent-ils, son Etoile, et nous sommes venus pour l’adorer. »

Abraham, par sa fidélité à suivre l’ordre que Dieu lui donnait de sortir de la Chaldée, terre de ses aïeux, et de se rendre dans une contrée inconnue pour lui, mérita de devenir le Père des Croyants ; les Mages, par leur foi docile et non moins admirable, ont été jugés dignes d’être les ancêtres de l’Église des Gentils.

Eux aussi sortaient de la Chaldée, au rapport de saint Justin et de Tertullien ; du moins quelqu’un d’entre eux avait-il cette terre pour patrie. Les mêmes auteurs, dont le témoignage est fortifié par d’autres Pères, donnent l’Arabie pour lieu de naissance à l’un ou l’autre de ces pieux voyageurs. Une tradition populaire, admise depuis quelques siècles dans l’iconographie chrétienne, assigne l’Éthiopie pour patrie au troisième. On ne peut nier du moins que David et les Prophètes n’aient signalé les noirs habitants de l’Afrique parmi ceux qui devaient, de bonne heure, devenir l’objet de la prédilection divine. Par la qualité des Mages, il faut entendre la profession que faisaient ces trois hommes d’étudier le cours des astres, et l’attention qu’ils avaient de chercher au ciel l’indice du lever prochain de l’Etoile prophétique vers laquelle ils soupiraient ; car ils étaient du nombre de ces Gentils craignant Dieu, comme le centurion Corneille, qui ne s’étaient pas souillés par le contact des idoles, et conservaient, au milieu de tant de ténèbres, les pures traditions d’Abraham et des Patriarches.

L’Évangile ne dit pas qu’ils aient été rois ; mais l’Église ne leur applique pas sans raison les versets où David parle des Rois d’Arabie et de Saba, arrivant aux pieds du Messie avec des offrandes d’or. Cette tradition s’appuie sur le témoignage de saint Hilaire de Poitiers, de saint Jérôme, du poète Juvencus, de saint Léon et de plusieurs autres ; et il serait impossible de l’attaquer par des arguments d’une valeur sérieuse. Sans doute, nous ne devons pas nous figurer les Mages comme des potentats dont l’empire pût entrer en comparaison, par l’étendue et l’importance, avec la puissance romaine ; mais nous savons que l’Ecriture attribue fréquemment le nom de roi à de petits princes, à de simples gouverneurs de provinces. Il suffit donc que les Mages aient exercé l’autorité sur les peuples ; et d’ailleurs, les ménagements qu’Hérode se croit obligé de garder envers des étrangers qui viennent, jusque dans sa cour, annoncer la naissance d’un Roi des Juifs, auquel ils se montrent si empressés de rendre hommage, témoignent suffisamment de l’importance de ces personnages, de même que le trouble dans lequel leur arrivée jette la ville de Jérusalem démontre jusqu’à l’évidence que leur présence avait été accompagnée d’un extérieur imposant.

Ces rois dociles quittent donc tout d’un coup leur patrie, leurs richesses, leur repos, pour marcher à la suite de l’Etoile ; la puissance de Dieu qui les avait appelés les réunit dans un même voyage comme dans une même foi. L’astre qui les invitait se met en marche devant eux et leur fraie le chemin ; les périls du voyage, les fatigues d’une route dont ils ignorent le terme, la crainte d’éveiller contre eux les soupçons de l’Empire romain, rien ne les fait reculer.

Leur premier repos est à Jérusalem, parce que l’Etoile s’y arrête. C’est dans cette ville sainte, qui bientôt sera maudite, qu’ils viennent, eux Gentils, annoncer Jésus-Christ, déclarer sa venue. Avec toute l’assurance, tout le calme des Apôtres et des Martyrs, ils professent leur désir ferme d’aller l’adorer. Ils contraignent Israël, dépositaire des oracles divins, à confesser un des principaux caractères du Messie, sa naissance à Bethléhem. Le Sacerdoce juif remplit, sans en avoir l’intelligence, son sacré ministère ; Hérode s’agite sur sa couche, et médite déjà des projets de carnage. Mais il est temps pour les Mages de quitter la cité infidèle qui a déjà reçu, par leur présence, l’annonce de sa répudiation. L’Etoile reparaît au ciel, et les sollicite de reprendre leur marche ; encore quelques pas, et ils seront à Bethléhem, aux pieds du Roi qu’ils sont venus chercher.

Nous aussi, ô Emmanuel ! Nous vous suivons, nous marchons à votre lumière ; car vous avez dit dans la Prophétie du Disciple bien-aimé : « Je suis l’étoile étincelante et matinale. » (XXII, 16.) L’astre qui conduit les Mages n’est que le symbole de cette Etoile immortelle. Vous êtes l’Etoile du matin ; car votre naissance annonce la fin des ténèbres, de l’erreur et du péché. Vous êtes l’Etoile du matin ; car, après avoir subi l’épreuve de la mort et du sépulcre, vous sortirez tout à coup des ombres, à l’aube matinale du jour de votre glorieuse Résurrection. Vous êtes l’Etoile du matin ; car vous nous annoncez, par votre Naissance et par les mystères qui vont la suivre, le jour sans nuage de l’éternité. Oh ! Que votre lumière soit toujours sur nous ! Que nous soyons toujours dociles à tout quitter, comme les Mages, pour la suivre ! Au sein de quelles ombres ne l’avez-vous pas fait luire, en ce jour où vous nous avez appelés à votre grâce ! Nous aimions les ténèbres, et vous nous avez fait aimer la lumière. Conservez en nous cet amour de la lumière, ô Christ ! Que le péché, qui n’est que ténèbres, n’approche pas de nous. Que les perfides lueurs de la fausse conscience ne viennent pas nous séduire. Éloignez de nous l’aveuglement de Jérusalem et de son roi, pour qui l’Etoile ne luit pas ; mais qu’elle nous guide toujours, qu’elle nous conduise à vous, notre Roi, notre paix et notre amour.

Nous vous saluons aussi, Marie, Etoile de la mer, qui luisez sur les vagues de ce monde pour les calmer, et pour protéger ceux qui crient vers vous dans la tempête. Vous fûtes favorable aux Mages à travers le désert ; guidez aussi nos pas, et dirigez-nous jusqu’à Celui qui repose entre vos bras et vous illumine de sa lumière éternelle.

Terminons cette journée par des chants de louange, dont les livres de l’antique Liturgie nous fourniront l’expression. Nous achèverons d’abord, avec Prudence, son beau cantique sur la vocation des Gentils.

HYMNE.
O Bethlehem ! Plus grande que les plus illustres cités ! à toi l’honneur d’avoir produit l’auteur du salut, incarné par un mystère céleste.
Ton nourrisson est l’héritier unique du Père souverain ; il s’est fait homme .par la vertu de l’Esprit de Celui qui lance le tonnerre ; il est toujours un Dieu sous des membres humains.
Les Prophètes sont ses témoins ; ils le désignèrent aux siècles à venir ; son Père le proclame, et lui a donné l’ordre de prendre possession du royaume :
Ce royaume, qui comprend toutes choses, le ciel, la mer, la terre, qui s’étend du lever du soleil à son couchant, des abîmes de l’Enter aux sommets de l’Empirée.
Il est le Roi de ces antiques chefs qui régirent la race de Jacob, le Prince de l’Église maîtresse, et du nouveau temple et de l’ancien.
C’est lui qu’adorent les enfants d’Ephraïm, la maison sainte de Manassé ; lui que reconnaissent toutes les tribus, issues des douze frères, enfants de Jacob.
La race dégénérée elle-même, celle qui, livrée à des rites absurdes, fondait la statue de son cruel Baal dans des fourneaux enflammés,
Abandonne, pour honorer le Christ, les dieux enfumés de ses pères, la pierre, le métal, le bois que sculptèrent ses mains.
Réjouissez-vous, ô nations ! Judée, Rome, Grèce, Egypte, Thrace, Perse, Scythie ! un Roi unique règne sur vous.
Célébrez votre Prince, ô vous tous, justes et pécheurs, vivants, infirmes et morts ; désormais, nul ne mourra plus.

Cette belle prière du Missel Mozarabe nous aidera à célébrer dignement le triple Mystère de l’Épiphanie :

ORATIO

O Dieu, qui, pour charmer les travaux de cette vie, avez distribué les consolations et les joies par le souvenir de vos bienfaits, dont chaque année nous célébrons le solennel anniversaire ; nous vous offrons, dans la présente fête, les vœux et les hommages de votre Église. Naguère nous avons honoré la Naissance de notre Seigneur et Sauveur, qui, né pour nous dans le temps, est né de vous sans le temps, qui précède tous les siècles et tous les temps, et qui les a créés. Nous avons fêté ensuite, par de solennels sacrifices, ce huitième jour de la Circoncision, tout brillant de la lumière de votre Fils unique et digne de notre culte. Aujourd’hui, nous célébrons le jour de l’Épiphanie, qui a révélé la divinité dans l’homme, et nous proclamons les trois merveilles qui manifestent l’avènement de notre Seigneur Jésus-Christ, votre Fils, en ce monde : soit qu’il envoie du ciel l’étoile messagère de sa naissance, qui précède et conduit les Mages étonnés jusqu’au berceau de son enfance dans la chair ; soit que, voulant sanctifier les eaux par son baptême, pour laver toutes les nations, il entre dans le lit du Jourdain, où vous avez montré qu’il est votre Fils unique et bien-aimé, par l’Esprit-Saint volant sur en forme de colombe, pendant que vous proclamez ce mystère d’une voix paternelle ; soit qu’il opère son premier miracle en Cana de Galilée, en changeant les eaux en vin dans le festin nuptial, nous apprenant, par un haut et admirable mystère, que Celui qui devait s’unir à l’Église qu’il s’était fiancée depuis des siècles, était enfin arrivé, et que l’humble foi dans la vérité des promesses devait se changer en le vin de la sagesse, à la spirituelle saveur. Ainsi, dans ces trois merveilles qui sont l’objet mystérieux de la solennité d’aujourd’hui, notre Seigneur Jésus-Christ, votre Fils, opère tout à la fois les prodiges de votre puissance et la préparation de notre salut. Faites donc, Seigneur, selon la forme de ces trois grands mystères, que l’intégrité de votre grâce spirituelle demeure en nous ; que la saveur du vin de votre sagesse se répande dans nos cœurs ; que l’étoile de votre justice brille dans nos œuvres. Amen.

L’ancien Missel de Paris de 1584 contient cette pieuse Séquence, à l’un des jours de l’Octave :

SÉQUENCE.
L’astre de la croix s’est levé ; à sa lumière, cherchons le Roi des rois.
Cherchons-le avec humilité : c’est alors qu’il se manifeste aux cœurs de ceux qui le cherchent.
Il a quitté son trône céleste ; couché dans la crèche, il y réside dans la pauvreté.
Pour l’exemple de ceux qui le cherchent, il apprend à mépriser la terre, à aimer les choses célestes.
Abandonnons Hérode, suivons en hâte les Mages ; offrons nos vœux avec les leurs.
A la suite de l’étoile, ils courent vers ce Roi dont ils annoncent le règne éternel.
Offrons-lui mystiquement les dons que leur munificence lui présenta réellement :
De l’encens comme au Dieu suprême, de la myrrhe comme à l’homme véritable, de l’or comme à un Roi.
Lis de pureté ! par ces dons, rendez nous votre Fils propice, ce Fils rempli de douceur ;
Et qu’un jour il nous soit donné de vivre avec lui, au sein de la gloire du Paradis, dans une liberté parfaite.
Amen.

Nous continuons d’emprunter à saint Éphrem une partie des chants si mélodieux qu’il a consacrés à la divine Naissance :

HYMNE.
Que tu es doux, ô Enfant ; mais que la force de tes jugements est entraînante et invincible ! qu’il est suave, qu’il est doux ton amour ! qui pourra te résister ?
Ton Père habite les cieux ; ta mère rampe sur la terre ; qui jamais pourra te comprendre ? Si l’homme terrestre cherche ta nature élevée au-dessus de la portée humaine, c’est au vaste sein de la divinité qu’il la trouve, au plus haut des cieux.
S’il veut connaître ta nature sensible, la voici sur la terre ; issue de l’étroite demeure du sein de Marie, elle est visible à tous les yeux. L’intelligence confondue est flottante ; elle se perd à supputer les divers modes de ton être plein de richesses.
Ta divinité, qu’on croirait inaccessible sous des verrous redoublés, n’en est pas moins une mer immense, un océan qu’on ne saurait sonder, depuis même que tu as réduit ta grandeur à la mesure de notre petitesse Si nous cherchons à te voir, c’est un homme que nous apercevons, nous qui espérions voir un Dieu ; si en toi nous voulons contempler l’homme, tout aussitôt une éclatante splendeur de divinité vient éblouir nos regards.
Qui te prendrait pour l’héritier du trône de David, toi qui, au lieu du riche ameublement de ce grand roi, n’as qu’une crèche ; au lieu de ses vastes palais, qu’une caverne ; qu’un âne en place de ses nombreux coursiers ?
Mais, ô Enfant ! que tu es aimable, accessible, et gracieux pour tous ceux qui t’approchent ! Ton amour est vraiment l’amour de Celui qui désire les hommes, comme celui qui a faim désire le pain.
Tu ne fais point de distinction entre tes parents et les étrangers, entre ta mère et de vils esclaves, accueillant l’impure prostituée comme la vierge qui te nourrit de son lait. Quoi donc ? Est-ce l’extrême facilité de ton cœur, qui te porte à cet excès d’indulgence, ou plutôt cette charité qui fait que tu ne hais rien de ce que tu as fait ?
Quel motif te porte à descendre ainsi vers le riche comme vers le pauvre, à courir à eux, même lorsqu’ils ne t’appellent pas ? d’où te vient ce si grand amour de la nature humaine ?
Quelle est cette charité que tu as si grande, que si l’on te blasphème, tu ne t’enflammes pas ; si Fonte menace, tu n éclates pas ; si l’on agit cruellement avec toi, ton front ne s’empreint pas de colère ? C’est que ta charité est au-dessus de cette loi, en vertu de laquelle l’homme poursuivait son ennemi et vengeait son injure.

Honorons la Vierge-Mère, en lui présentant ces strophes consacrées à sa gloire par saint Joseph l’Hymnographe, dans les Menées de l’Église Grecque :

IV DIE JANUARII.
Honorons le divin palais du Roi, dans lequel il a habité selon son désir ; célébrons la Mère de Dieu, la Vierge, l’unique, par qui nous sommes élevés jusqu’à Dieu.
Pure avant l’enfantement, dans l’enfantement, après l’enfantement : ainsi tu as paru à nos regards, ô Vierge-Mère ! c’est toi qui as enfanté le Dieu qu’annonce le Collège Apostolique.
Le très heureux chœur des Prophètes, inspiré de l’Esprit-Saint, t’appela divinement, dans ses sacrés oracles, la Porte et la Montagne ombragée, ô très chaste !
Illumine, ô Vierge ! les yeux de mon cœur, brille sur moi par un rayon de componction ; délivre-moi des ténèbres éternelles, Porte de la lumière, Refuge de tous les chrétiens qui chantent ta louange avec fidélité.
Je te loue, ô toi la seule digne de toute louange ; je te rends gloire, ô toi que Dieu lui-même glorifie ; je te proclame heureuse, ô Vierge, de cette félicité divine que proclament les générations qui célèbrent ta béatitude.
O très pure ! tu es le propitiatoire de ceux qui pèchent souvent ; dépassant toutes les lois de la nature, tu as enfanté le Christ, qui ôte les péchés du monde, et vers qui nous prions : Tu es béni, Seigneur, Dieu de nos pères !
O prodige qui surpasse tous les prodiges ! tu enfantes et tu demeures vierge, très chaste épouse de Dieu ! Tu a mis au jour le Verbe coéternel au Père, Celui que nous célébrons dans ce cantique : Œuvres du Seigneur, louez et exaltez le Seigneur dans tous les siècles.
La splendeur de ton enfantement a éclaté avec gloire ; elle a inondé l’univers d’une joyeuse lumière ; elle a terrassé le prince des ténèbres, ô Mère de Dieu très pure, la gloire des Anges, le salut de tous les hommes qui te célèbrent, sans se lasser, par leurs concerts.

Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique

Notre encens.

1. Prières des Heures. — Au second Nocturne, nous lisons un sermon très surnaturel du pape saint Léon I. Il nous est d’autant plus précieux qu’il fut prêché dans un centre très liturgique, à Saint-Pierre, pendant la célébration de l’antique fête de l’Épiphanie. « Récemment, nous avons célébré le jour où la Vierge très pure enfanta le Rédempteur. Aujourd’hui, il nous est donné, mes très chers, par la solennité vénérable de l’Épiphanie du Seigneur, de continuer notre joie, afin qu’au milieu des mystères semblables de fêtes apparentées, la force de notre joie et l’ardeur de notre foi ne soient pas diminuées. Le salut de tous les hommes nous est indiqué par ce fait que l’enfance du Médiateur entre Dieu et les hommes fut manifestée au monde, alors qu’il était encore caché dans une petite ville chétive... C’est pourquoi apparut alors. aux trois Mages, en Orient, une étoile d’une clarté nouvelle, qui, plus brillante et plus belle que les autres. astres, attirait facilement le regard et l’esprit des observateurs... Celui qui avait donné un signe du ciel accorda aussi à ceux qui le voyaient la grâce de le connaître. Et ce qu’il faisait connaître il le fit aussi chercher et, après les recherches, il le fit trouver. Les trois hommes suivent la conduite de la lumière céleste. Avec une attention soigneuse, ils suivent le signe qui leur montre le chemin et les précède. Par l’illumination de la grâce, ils furent conduits à la connaissance de la vérité. Ils croyaient que cette naissance du Roi que leur signalaient des renseignements. humains, ils devaient aussi la chercher dans la ville royale. Mais Celui qui avait pris la forme de l’esclave et qui n’était pas venu pour juger mais pour être jugé, avait choisi Bethléem pour sa naissance et Jérusalem pour ses souffrances. »

Au troisième Nocturne, nous entendons la quatrième et dernière partie du sermon de saint Grégoire (ainsi donc deux sermons historiques pour la fête de l’Épiphanie à Saint-Pierre, l’un vers 450, l’autre vers 600 ; transportons-nous par la pensée, en lisant ces sermons, dans ce temps vénérable). Le saint docteur nous parle de l’autre chemin ».

« Les Mages nous donnent une leçon importante par ce fait qu’ils « rentrèrent dans leur pays par un autre chemin ». En agissant ainsi sur l’ordre d’en-haut, ils nous indiquent ce que nous devons faire nous-mêmes. Notre patrie est le Paradis, mais après avoir connu Jésus nous ne pouvons pas y parvenir en prenant « le chemin par où nous sommes venus ». Nous nous sommes éloignés de notre patrie par l’orgueil et la désobéissance en aimant ce qui est sensuel et en goûtant au fruit défendu. Nous devons donc « retourner » dans les larmes, dans l’obéissance, dans le mépris des sens et l’assujettissement de la chair. Nous revenons alors « par un autre chemin dans notre patrie ». Chassés des joies du Paradis à cause de la jouissance défendue, nous y sommes rappelés par les larmes. — Il est nécessaire par conséquent, mes très chers frères, que, dans une sainte crainte constante et dans une défiance salutaire, nous ayons toujours devant les yeux, d’une part, nos méfaits et, d’autre part, la sentence du dernier jugement. Songeons que le Juge sévère apparaîtra, le Juge qui nous menace de son jugement, mais nous en cache le jour ; le Juge qui inspire de la terreur aux pécheurs et cependant attend avec tant de mansuétude et ne retarde son retour que pour trouver en nous moins de sujet de condamnation. Punissons par des larmes de pénitence nos délits et, pour citer un psaume (psaume 94), allons au-devant de son retour avec la confession de nos fautes. Ne nous laissons aucunement prendre au piège des passions, ne nous laissons pas tenter par la joie malsaine du monde, il est toujours tout proche, le Juge qui a dit : « Malheur à vous qui riez maintenant car vous serez dans le deuil et vous pleurerez » (Luc, VI, 23).

Au lever du soleil, nous chantons : « Nous avons vu son étoile en Orient et nous sommes venus avec des présents l’adorer. »

Au coucher du soleil, nous chantons : « Hérode demanda aux Mages : « Quel signe avez-vous vu qui vous indique le Roi nouveau-né ? » — « Nous avons vu une étoile brillante dont l’éclat éclaire le monde. »

2. La messe. — C’est un tableau riche en couleur et de sens profond que le Prophète Isaïe déploie devant nous à la leçon de la messe. Nous voyons au-dessus de la ville de Jérusalem se lever le divin soleil, la gloire du Seigneur. Le Prophète éveille la cité de son sommeil nocturne, il l’invite à illuminer ses maisons. Il montre que toute la région environnante est plongée dans les ténèbres d’une nuit profonde ; au-dessus de Jérusalem seule se lève le soleil. De nouveau, il s’adresse à la ville. Lève tes yeux et vois : En troupes, voici qu’accourent les païens, ce seront tes nouveaux fils et tes nouvelles filles. Tu te réjouiras et t’étonneras de cette affluence. Ils viennent vers toi dans les costumes les plus divers : toutes les races et toutes les nations sont représentées ; un flot de chameaux et de dromadaires approche. Ces peuples ne viennent pas les mains vides, ils apportent de l’or et de l’encens.

Telle est l’image. Nous savons ce qu’elle signifie. L’arrivée des Mages n’est que le premier accomplissement symbolique de cette prophétie. Jérusalem est la sainte Église que le Christ vient de fonder. Pendant que le reste du monde est plongé dans les ténèbres du paganisme, du péché et de l’ignorance, brille au-dessus de l’Église la divine lumière. Et maintenant commence la conversion des païens pour la joie de l’Église. Combien de fils et de filles lui naissent chaque année ! Ne voyons-nous pas que l’Épiphanie est la fête de l’Église des Gentils ? Le merveilleux tableau se complète sans cesse depuis la première Pentecôte jusqu’à la fin du monde. Heureux sommes-nous de faire partie de cette troupe élue qui, des ténèbres du monde, est venue à la lumière de l’Église. Ouvrons toutes grandes les portes de notre cœur et laissons y pénétrer les rayons de ce divin Soleil, qu’il en éclaire tous les recoins les plus intimes. Cependant ne venons pas les mains vides. Que l’or et l’encens soient nos présents royaux. L’or est notre vocation, notre travail ; l’encens notre prière et notre culte. Deux mots résument notre présent de fête : Ora et labora, prie et travaille.

3. Notre encens. — Offrons aujourd’hui au Seigneur avec le second Mage, de l’encens. L’encens est dans la liturgie, le symbole de l’adoration du Christ. A la grand’messe, à l’Évangile comme à l’Élévation, on offre de l’encens à Notre Seigneur ; de même dans le culte extra-liturgique de l’Eucharistie, on emploie l’encens comme un témoignage d’adoration. En offrant l’encens, la communauté chrétienne veut aujourd’hui manifester sa foi vivante à la divinité de Jésus-Christ. et à la présence réelle de l’Homme-Dieu dans nos saints mystères. Il ne faut pas que ce soit une foi théorique. mais cette foi chaude et vivante qui devient brûlante au Saint-Sacrifice. A l’Évangile, le Christ est au milieu de nous et nous parle et, pendant le Canon, caché sous les voiles eucharistiques, il est réellement présent. Voilà quel est notre encens.

Mais l’encens est aussi le symbole de la prière : « Que ma prière s’élève vers toi, comme la fumée de l’encens », chante chaque soir l’Église avant le Magnificat. Offrons donc aujourd’hui au Seigneur le don de notre prière. La prière est, il est vrai, quelque chose de tout personnel, s’élevant de notre âme vers l’Esprit de Dieu, et plus elle sort des profondeurs de l’âme, meilleure elle est. Mais la prière est aussi le service de cour que nous devons à la divine Majesté. Notre Mère l’Église nous en apprend l’étiquette dans sa liturgie. La prière la plus agréable à Dieu est toujours la prière de l’Église et avec l’Église, parce que cette prière est, en dernière analyse, la prière du Christ, du Christ mystique dont l’Église est précisément le corps. Ainsi nous offrons aujourd’hui au Seigneur, avec l’encens, la prière liturgique.

Enfin nous mettons dans ce sacrifice d’offrande toute notre vie religieuse, notre piété au sens le plus large, nous offrons avec l’Apôtre (Rom. XII, 1) notre corps comme un sacrifice vivant, agréable à Dieu, c’est notre culte raisonnable ».

4. Lecture d’Écriture. — Au premier Nocturne de Matines, saint Paul, dans son Épître à l’Église des Gentils (Rom. Chap. XIII et XIV), parle de nos relations avec l’État et l’autorité séculière : « Que tous soient soumis à l’autorité. Car il n’y a aucune autorité qui ne vienne de Dieu ; là où il en existe une, elle a été établie par Dieu. Celui, par conséquent, qui se soulève contre l’autorité résiste à l’ordre de Dieu... C’est pourquoi on doit lui être soumis non seulement à cause du châtiment mais encore à cause de la conscience. Pour ce motif, payez-lui aussi les impôts, car ceux qui sont chargés de ce service sont les ministres de Dieu. Rendez à chacun ce qui lui est dû, l’impôt à qui est dû l’impôt, le tribut à qui est dû le tribut, la crainte à qui est due la crainte, l’honneur à qui est dû l’honneur. » Ces quelques mots règlent toute notre attitude envers les pouvoirs publics ; ce passage est un commentaire de la parole célèbre du Sauveur : « Rendez à César ce qui appartient à César et à Dieu ce qui appartient à Dieu. » 5. Saints du jour. On lit dans le martyrologe : « A Arezzo en Toscane (Italie centrale), le bienheureux pape Grégoire X. Il était originaire de Plaisance (Haute Italie) et avait été archidiacre à Liége (Belgique) avant d’être élevé sur le Siège Apostolique. Il tint le second concile de Lyon. Là il parvint à amener une union avec les schismatiques Orientaux et à mettre fin au conflit qui divisait les peuples chrétiens. Il employa beaucoup de zèle à recouvrer la Terre Sainte. Ainsi son gouvernement fut animé des plus nobles intentions. »

[1] Saint Grégoire dit que les justes sont dans la tristesse en ce sens qu’ils n’admettent aucune joie mondaine, soupirant après Dieu et après le bonheur céleste.