Textes de la Messe |
Office |
Dom Guéranger, l’Année Liturgique |
Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum |
Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique |
Fête supprimée en 1960.
La basilique de Saint-Jean-devant la Porte-Latine remonte au début du VIe siècle et l’anniversaire de sa dédicace est attesté par le sacramentaire grégorien. La date fut peut-être choisie en relation avec une fête orientale préexistante. Les Syriens fêtent saint Jean le 7 mai et les Byzantins le 8.
En pays Franc, la fête ne fut plus liée avec l’anniversaire de la dédicace mais au supplice de l’huile bouillante que subit saint Jean (rapporté par Tertullien [1].
La nouvelle fête repassa à Rome au cours du Xe siècle.
Ant. ad Introitum. Ps. 63, 3. | Introït |
Protexísti me, Deus, a convéntu malignántium, allelúia : a multitúdine operántium iniquitátem, allelúia, allelúia. | Vous m’avez protégé, ô Dieu, contre l’assemblée des méchants, contre la multitude de ceux qui commettent l’iniquité, alléluia, alléluia. |
Ps. Ibid., 2. | |
Exáudi, Deus, oratiónem meam, cum déprecor : a timóre inimíci éripe ánimam meam. | Exaucez, ô Dieu, ma prière lorsque je vous implore ; délivrez mon âme de la crainte de l’ennemi. |
V/. Glória Patri. | |
Oratio. | Collecte |
Deus, qui cónspicis, quia nos úndique mala nostra pertúrbant : præsta, quǽsumus ; ut beáti Ioánnis Apóstoli tui et Evangelístæ intercéssio gloriósa nos prótegat. Per Dóminum. | O Dieu, qui nous voyez troublés par les maux qui nous arrivent de toutes parts, faites, nous vous en prions, que la glorieuse intercession du bienheureux Jean, votre Apôtre et Évangéliste, nous serve de protection. |
Léctio libri Sapiéntiæ. | Lecture du livre de la Sagesse. |
Sap. 5, 1-5. | |
Stabunt iusti in magna constántia advérsus eos, qui se angustiavérunt et qui abstulérunt labóres eórum. Vidéntes turbabúntur timore horríbili, et mirabúntur in subitatióne insperátæ salútis, dicéntes intra se, poeniténtiam agéntes, et præ angústia spíritus geméntes : Hi sunt, quos habúimus aliquándo in derísum et in similitúdinem impropérii. Nos insensáti vitam illórum æstimabámus insániam, et finem illórum sine honóre : ecce, quómodo computáti sunt inter fílios Dei, et inter Sanctos sors illórum est. | Les justes se lèveront avec une grande assurance contre ceux qui les auront mis dans l’angoisse, et qui auront ravi le fruit de leurs travaux. A cette vue les méchants seront troublés par une horrible frayeur, et ils seront stupéfaits en voyant tout à coup ceux dont ils n’attendaient pas le salut ; ils diront en eux-mêmes, saisis de remords, et gémissant dans l’angoisse de leur cœur : Voici ceux dont nous avons fait autrefois un objet de risée, et un thème d’outrages. Insensés que nous étions, nous regardions leur vie comme une folie, et leur mort comme une honte ; et voilà qu’ils sont comptés parmi les fils de Dieu, et que leur partage est avec les saints. |
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 91, 13. Iustus ut palma florébit : sicut cedrus Líbani multiplicábitur. | Allelúia, allelúia. V/. Le juste fleurira comme le palmier ; et il se multipliera comme le cèdre du Liban. |
Allelúia. V/. Osee 14, 6. Iustus germinábit sicut lílium : et florébit in ætérnum ante Dóminum. Allelúia. | Allelúia. V/. Le juste germera comme le lis ; et il fleurira éternellement en présence du Seigneur. Alléluia. |
+ Sequéntia sancti Evangélii secúndum Matthǽum. | Lecture du Saint Evangile selon saint Mathieu. |
Matth. 20, 20-23. | |
In illo témpore : Accessit ad Iesum mater filiórum Zebedǽi cum fíliis suis, adórans et petens áliquid ab eo. Qui dixit ei : Quid vis ? Ait illi : Dic, ut sédeant hi duo fílii mei, unus ad déxteram tuam et unus ad sinístram in regno tuo. Respóndens autem Iesus, dixit : Néscitis, quid petátis. Potéstis bíbere cálicem, quem ego bibitúrus sum ? Dicunt ei : Póssumus. Ait illis : Cálicem quidem meum bibétis : sédere autem ad déxteram meam vel sinístram, non est meum dare vobis, sed quibus parátum est a Patre meo. | En ce temps-là : la mère des fils de Zébédée s’approcha de Jésus avec ses fils et se prosterna pour lui faire une demande ; Il lui dit : "Que voulez-vous ?" Elle lui dit : "Ordonnez que mes deux fils, que voici, siègent l’un à votre droite, l’autre à votre gauche, dans votre royaume." Jésus répondit : "Vous ne savez pas ce que vous demandez. Pouvez-vous boire le calice que, moi, je dois boire ? — Nous le pouvons," lui dirent-ils. Il leur dit : "Vous boirez, en effet, mon calice ; quant à siéger à ma droite ou à ma gauche, il ne m’appartient pas de l’accorder ; c’est pour ceux pour qui mon Père l’a préparé." |
Credo | Credo |
Ant. ad Offertorium. Ps. 88, 6. | Offertoire |
Confitebúntur cæli mirabília tua, Dómine : et veritátem tuam in ecclésia sanctórum, allelúia, allelúia. | Les cieux publieront vos merveilles, Seigneur, et votre vérité dans l’assemblée des saints, alléluia, alléluia. |
Secreta | Secrète |
Munéribus nostris, quǽsumus, Dómine, precibúsque suscéptis : et cæléstibus nos munda mystériis, et cleménter exáudi. Per Dóminum nostrum. | Ayant accueilli nos dons et nos prières, nous vous en supplions, Seigneur, purifiez-nous par ces célestes mystères, et exaucez-nous dans votre clémence. |
Præfatio de Apostolis. | Préface des Apôtres . |
Ant. ad Communionem. Ps. 63, 11. | Communion |
Lætábitur iustus in Dómino, et sperábit in eo : et laudabúntur omnes recti corde, allelúia, allelúia. | Le juste se réjouira dans le Seigneur, et espérera en lui ; et tous ceux qui ont le cœur droit se réjouiront, alléluia, alléluia. |
Postcommunio | Postcommunion |
Refécti, Dómine, pane cælésti : ad vitam, quǽsumus, nutriámur ætérnam. Per Dóminum. | Seigneur, nos forces ont été ranimées par le pain céleste : qu’il nous nourrisse, nous vous le demandons, pour la vie éternelle. |
Leçons des Matines avant 1960
Au 1er Noct. on lit le commencement de la 1ère Épître de l’Apôtre Saint Jean, comme au Dimanche dans l’Octave de l’Ascension, à moins qu’on ne lise en ce temps du livre de l’Apocalypse ou une Épitre de ce Saint ; alors on lirait les Leçons de l’Écriture occurrente. Les répons sont toujours pris au Commun des Apôtres au Temps pascal.
Au deuxième nocturne.
Du livre de saint Jérôme, Prêtre, contre Jovinien. Quatrième leçon. L’Apôtre Jean, l’un des disciples du Seigneur, et, à ce que l’on rapporte, le plus jeune des Apôtres, était vierge quand il embrassa la foi du Christ, et il demeura vierge : c’est à cause de cela qu’il fut plus aimé par le Seigneur et qu’il reposa sur la poitrine de Jésus. Ce que Pierre, qui avait été marié, n’ose demander par lui-même, il prie Jean de le demander pour lui. Après la résurrection, Marie-Madeleine étant venue annoncer que le Seigneur est ressuscité, l’un et l’autre coururent vers le sépulcre, mais Jean y parvint le premier. Comme ils étaient sur la barque et péchaient dans le lac de Génésareth, Jésus leur apparut debout sur le rivage, et les Apôtres ne savaient pas qui ils voyaient ; le disciple vierge reconnut seul le Maître vierge, et dit à Pierre : « C’est le Seigneur ».
Cinquième leçon. Jean est Apôtre, Évangéliste et Prophète : Apôtre, parce qu’il écrivit aux Églises comme docteur ; Évangéliste, puisqu’il composa l’un des Évangiles, ce que ne fit aucun autre des douze à l’exception de Matthieu ; Prophète, car dans l’île de Pathmos, où l’empereur Domitien l’avait relégué à cause du témoignage qu’il avait rendu au Seigneur, il écrivit cette Apocalypse qui renferme une infinité de mystères prophétiques. Tertullien rapporte qu’à Rome, Jean, ayant été plongé dans une chaudière d’huile bouillante, en sortit plus sain et plus vigoureux qu’il n’y était entré.
Sixième leçon. Son Évangile lui-même s’élève de beaucoup au-dessus des autres. Matthieu commence ainsi, comme parlant d’un homme : « Livre de la généalogie de Jésus-Christ, fils de David, fils d’Abraham ». Luc commence par le sacerdoce de Zacharie ; Marc par la prophétie, de Malachie et d’Isaïe. Le premier des trois a pour attribut la figure d’un homme, à cause de cette même généalogie ; le deuxième, celle d’un taureau, à cause du sacerdoce ; le troisième, celle d’un lion, à cause de la voix qui crie dans le désert : « Préparez les voies du Seigneur, rendez droits ses sentiers » ; notre Jean, lui, vole dans les hauteurs comme un aigle, et parvient au Père lui-même, quand il dit : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu. »
Au troisième nocturne.
Lecture du saint Évangile selon saint Matthieu. Cap. 20, 20-23.
En ce temps-là : la mère des fils de Zébédée s’approcha de Jésus avec ses fils et se prosterna pour lui faire une demande. Et le reste.
Homélie de saint Jérôme, Prêtre.
Septième leçon. Où la mère des fils de Zébédée puise-t-elle une pareille idée du royaume de Jésus-Christ, pour demander en faveur de ses enfants la gloire du triomphe, quand le Seigneur déclare que « le Fils de l’homme sera livré au prince des prêtres et aux Scribes, qu’ils le condamneront à mort, et qu’ils le livreront aux Gentils pour être moqué, et flagellé, et crucifié » ; quand il révèle à ses disciples épouvantés l’ignominie de sa passion ? C’est, je pense, parce que le Seigneur ajoute : « Et le troisième jour, il ressuscitera ». Cette femme imagine alors qu’il commencera à régner aussitôt après sa résurrection, que les prédictions concernant le second avènement vont s’accomplir dans le premier, et avec un empressement tout féminin, oubliant l’avenir, elle veut s’assurer du présent.
Huitième leçon. C’est la mère qui fait la demande, c’est aux enfants que le Seigneur répond ; car il comprend que la mère n’a demandé qu’à l’instigation des enfants. « Pouvez-vous boire le calice que je vais boire » ? Dans les divines Écritures, le mot calice a le sens de passion, selon cette parole : « Mon Père, s’il est possible, que ce calice passe loin de moi », et d’après celle-ci du Psalmiste : « Que rendrai-je au Seigneur pour tous les biens qu’il m’a faits ? Je prendrai le calice du salut, et j’invoquerai le nom du Seigneur ». Et il indique aussitôt après quel est ce calice : « Précieuse en présence du Seigneur, est la mort de ses saints ».
Neuvième leçon. On se demande comment les deux fils de Zébédée, Jacques et Jean, ont bu le calice du martyre. L’Apôtre saint Jacques seul ayant eu, au rapport de l’Écriture, la tête tranchée par Hérode, et saint Jean ayant quitté cette vie par une mort naturelle. Mais si nous lisons l’histoire ecclésiastique, nous trouverons que saint Jean lui aussi a rendu témoignage au Christ, qu’il a été pour cela plongé dans une chaudière d’huile bouillante, que ce vaillant athlète du Christ en sortit pour recevoir la couronne, et fut aussitôt après relégué dans l’île de Pathmos ; et nous en conclurons que ni le courage ni la volonté ne lui manquèrent pour le martyre, et qu’il a bu lui aussi le calice de la souffrance que les trois enfants ont bu dans la fournaise ardente, bien que le persécuteur n’ait point répandu leur sang.
AUX VÊPRES.
Ant. au Magnificat Jeté dans une chaudière d’huile bouillante, le bienheureux Apôtre Jean, protégé par la grâce divine, en sortit sain et sauf, alléluia.
Jean, le disciple bien-aimé, que nous avons prévus du berceau de l’enfant de Bethléhem reparaît en ce jour sur le Cycle pour faire sa cour au glorieux triomphateur de la mort et de l’enfer. Couvert de la pourpre du martyre, il marche d’un pas égal avec Philippe et Jacques, dont la double palme a réjoui nos regards au début de ce mois si fécond en héros.
Dans son ambition maternelle, Salomé avait un jour présenté ses deux fils à Jésus, demandant pour eux les deux premières places de son royaume. Le Sauveur avait alors parlé du calice qu’il devait boire, et prédit qu’un jour ces deux disciples le boiraient à leur tour. L’aîné, Jacques le Majeur, a le premier donné à son Maître cette marque de son amour ; nous célébrerons sa victoire sous le signe du Lion ; Jean, le plus jeune, a été appelé aujourd’hui à sceller de sa vie le témoignage qu’il a rendu à la divinité de Jésus.
Mais il fallait au martyre d’un tel Apôtre un théâtre digne de lui. L’Asie-Mineure, évangélisée par ses soins, n’était pas une contrée assez illustre pour porter dignement la gloire d’un tel combat. Home seule, Rome où Pierre a déjà transféré sa chaire et répandu son sang, où Paul a courbé sous le glaive sa tête vénérable, méritait l’honneur de voir dans ses murs l’auguste vieillard, le disciple que Jésus aima, le dernier survivant du Collège apostolique, s’avancer vers le martyre avec cette majesté et cette douceur qui forment le caractère de ce vétéran de l’Apostolat.
Domitien régnait en tyran sur Rome et sur le monde. Soit que Jean ait entrepris librement le voyage de la cité reine pour y saluer l’Église principale, soit qu’un édit impérial ait amené chargé de chaînes dans la capitale de l’empire l’auguste fondateur des sept Églises de l’Asie-Mineure, Jean a comparu en présence des faisceaux de la justice romaine. Il est convaincu d’avoir propagé dans une vaste province de l’empire le culte d’un Juif crucifié sous Ponce-Pilate. Il doit périr ; et la sentence porte qu’un supplice honteux et cruel débarrassera l’Asie d’un vieillard superstitieux et rebelle. S’il a su échapper à Néron, du moins il ne fuira pas la vengeance du césar Domitien.
En face de la Porte Latine, une chaudière remplie d’huile brûlante a été préparée ; un ardent brasier fait bouillonner dans le vase immense la liqueur homicide. L’arrêt porte que le prédicateur du Christ doit être plongé dans ce bain affreux. Le moment est donc arrivé où le fils de Salomé va participer au calice de son Maître. Le cœur de Jean tressaille de bonheur à la pensée que lui, le plus aimé et cependant le seul des Apôtres qui n’ait pas souffert la mort pour ce Maître divin, est enfin appelé à lui donner ce témoignage de son amour. Après une cruelle flagellation, les bourreaux saisissent le vieillard, ils le plongent avec barbarie dans la chaudière mortelle ; mais, ô prodige ! L’huile brûlante a perdu tout à coup ses ardeurs ; aucune souffrance ne se fait sentir aux membres épuisés de l’Apôtre ; bien plus, lorsqu’on l’enlève enfin de la chaudière impuissante, il a recouvré toute la vigueur que les années lui avaient enlevée. La cruauté du Prétoire est vaincue, et Jean, martyr de désir, est conservé à l’Église pour quelques années encore. Un décret impérial l’exile dans l’île sauvage de Pathmos, où le ciel doit lui manifester les futures destinées du christianisme jusqu’à la fin des temps.
L’Église Romaine, dont les fastes conservent entre ses plus glorieux souvenirs le séjour et le martyre de Jean, a marqué par une Basilique le lieu où l’Apôtre rendit à la foi chrétienne son noble témoignage. Cette Basilique est située près de la Porte Latine, et un Titre cardinalice y est attaché.
A la gloire du grand Apôtre de la charité nous consacrerons cette Séquence attribuée à Adam de Saint-Victor.
Avec quel bonheur nous vous voyons reparaître, disciple chéri de notre divin Ressuscité ! Autrefois vous nous apparûtes près de la crèche où dormait paisiblement le Désiré des nations, le Sauveur promis. Nous repassions alors tous vos titres de gloire : Apôtre, Évangéliste, Prophète, Aigle au vol sublime, Vierge, Docteur de charité, et, par-dessus toutes ces grandeurs, Disciple bien-aimé de Jésus. Aujourd’hui, c’est comme Martyr que nous vous saluons ; car si l’ardeur de votre amour a vaincu celle du tourment qu’on vous avait préparé, vous n’en aviez pas moins accepté de toute l’énergie de votre dévouement le calice que Jésus vous avait annoncé dans vos jeunes années. En ces jours du Temps pascal qui s’écoulent si rapidement, nous vous voyons sans cesse près de ce divin Sauveur, qui vous comble de ses dernières caresses. Qui pourrait s’étonner de sa prédilection envers vous ? Ne vous êtes-vous pas trouvé, seul de ses disciples, au pied de la croix ? N’est-ce pas à vous qu’il a remis sa mère, désormais la vôtre ? N’étiez-vous pas présent lorsque son cœur fut ouvert par la lance sur la croix ? Lorsque vous êtes allé au Sépulcre avec Pierre, au matin de la Pâque, n’avez vous pas, par votre foi, avant tous les disciples, rendu hommage à la résurrection de votre Maître que vous n’aviez pas vu encore ? Jouissez donc auprès de ce Maître ineffable des délices dont il est prodigue envers vous ; mais priez-le aussi pour nous, bienheureux Apôtre ! Nous devons l’aimer pour tous les bienfaits qu’il a répandus sur nous ; et nous reconnaissons avec confusion que nous sommes tièdes dans son amour. Vous nous avez fait connaître Jésus enfant, vous nous avez dépeint Jésus crucifié ; montrez-nous Jésus ressuscité, attachez-nous à ses pas dans ces dernières heures de son séjour sur la terre ; et quand il sera monté au ciel, fortifiez notre cœur dans la fidélité, afin qu’à votre exemple nous soyons prêts à boire le calice des épreuves qu’il nous a préparé.
Rome a été le théâtre de votre glorieuse confession, ô saint Apôtre ! Aimez-la toujours ; et à l’heure de sa tribulation, unissez-vous à Pierre et à Paul pour la protéger. Si la palme du martyre brille en votre main à côté de la plume de l’évangéliste, souvenez-vous que c’est devant la Porte Latine que vous l’avez conquise. L’Orient vous a possédé pendant votre vie presque tout entière ; mais l’Occident revendique l’honneur de vous compter au premier rang de ses martyrs. Bénissez nos Églises, ranimez chez nous la foi, réchauffez la charité, et délivrez-nous de ces antechrists que vous signaliez aux fidèles de votre temps, et qui causent parmi nous tant de ravages. Fils adoptif de Marie, qui contemplez maintenant votre mère dans toute sa gloire, présentez-lui nos vœux durant ce mois que nous lui consacrons, et obtenez pour nous de sa bonté maternelle les grâces que nous osons lui demander.
Une fête de saint Jean Évangéliste apparaît déjà en ce jour dans le Missel gothique mais sans aucune indication topographique. A Rome au contraire, après le IXe siècle, on assigna cette solennité à une basilique située près de la Porte Latine, la faisant ainsi bénéficier de ce que raconte Tertullien de saint Jean qui, jeté à Rome dans une chaudière d’huile bouillante, en sortit indemne et plus robuste qu’auparavant. Ce récit du martyre de saint Jean mérite toute confiance, car Tertullien était parfaitement au courant des traditions romaines du IIIe siècle ; quant à la localisation du dolium bouillant dans l’église située devant la Porte Latine, elle est loin d’être démontrée, d’autant plus que la Porte Latine appartient à l’enceinte des murailles de la Ville construites sous Aurélien. Quoi qu’il en soit, ce n’est pas à une question de lieu que s’attache la liturgie de cette fête, mais, quelques jours après l’antique natalis de Jacques, frère de Jean, décapité vers la fête de Pâques, elle entend célébrer le martyre de l’Évangéliste qui, selon la prédiction du Sauveur, dut, lui aussi, comme son frère, boire au calice de la Passion pour avoir droit à l’un des trônes les plus élevés du royaume messianique qu’avait réclamés leur mère. La messe est celle du Commun des Martyrs au temps pascal : Protexisti.
Le premier verset alléluiatique, Iustus ut Palma, reproduit celui de la fête de saint Nicolas, le 6 décembre ; le second lustus germinabit, est celui de la fête de saint Paul, premier ermite, le 15 janvier. Dans l’un et l’autre, le saint Apôtre, en raison de sa pure et virginale fraîcheur, est comparé à un arbre verdoyant et à une fleur suave qui ne se flétrit jamais.
La lecture évangélique (Matth., XX, 20-23) contient la prophétie du Sauveur relativement au martyre de Jean ; il faut y noter que la première condition posée par Jésus à une âme aspirant à entrer dans son royaume est que cette âme boive d’abord avec Lui au calice de la Passion. Cette condition n’admet pas d’exceptions ; le Père éternel n’en dispensa point son Fils unique, et celui-ci ne veut pas que le Disciple bien-aimé lui-même en soit exempt. Il faut donc prendre courage. S’il s’agissait d’un calice amer quelconque, la répugnance de la nature serait peut-être insurmontable. Mais Jésus nous dit que ce calice est le sien, dont lui-même a approché ses lèvres et a bu à longs traits. Ce qui reste maintenant pour nous est donc bien peu de chose, et a été -en outre sanctifié par la bénédiction du Sauveur.
La prière sur l’oblation est tirée du Commun des Martyrs non pontifes : « Recevez, ô Dieu, nos prières et nos oblations ; purifiez-nous au moyen des divins Mystères et, dans votre clémence, acceptez notre vœu. » La préface est celle des Apôtres.
Après la Communion, la prière d’action de grâces est la suivante : « Nous avons été fortifiés, Seigneur, par le pain céleste, faites que nous en soyons nourris pour la vie éternelle. Par notre Seigneur, etc. »
Les anciennes collectes du Missel romain, après la sainte Communion, sont d’une concision et d’une brièveté admirables. Il ne faut pas oublier que, primitivement, elles étaient destinées seulement à conclure la prière privée que chacun, à l’invitation du ministre sacré, faisait d’abord pour son compte. La collecte sacerdotale ne faisait que mettre fin à cette oraison particulière, condensant en une brève formule les vœux des fidèles pour les présenter à Dieu. En outre, les fidèles avaient autrefois un temps convenable pour s’adonner à la prière immédiatement après la Communion, tandis que le prêtre vaquait à la distribution des divins Mystères à tout le peuple. Cette cérémonie demandait toujours un certain temps, en sorte que la collecte eucharistique du prêtre indiquait vraiment la fin de l’Action sacrée, après que tous avaient communié et que les vases sacrés avaient été purifiés et remis à leur place.
Cette brièveté nous révèle en outre l’admirable esprit de discrétion de l’Église qui, dans ses pratiques générales de piété, sait tenir compte même de la faiblesse des petits, en sorte que personne ne soit détourné du service de Dieu par la difficulté de l’œuvre, mais qu’au contraire, la simplicité même et la facilité des moyens attirent et gagnent des âmes au ciel.
« Jeté dans une chaudière d’huile bouillante, le saint Apôtre Jean, protégé par la grâce céleste, en sortit sain et sauf, Alléluia »
Nous célébrons aujourd’hui une fête secondaire d’Apôtre : Saint Jean devant la Porte Latine. C’est le jour anniversaire de la consécration de l’église située près de la Porta Latina, la porte sud-est de Rome. C’est là, d’après la tradition, qu’eut lieu le martyre de saint Jean.
Saint Jean. — A son disciple bien-aimé et son frère Jacques, le Christ avait promis « son calice », c’est-à-dire le martyre. « Pouvez-vous boire le calice que je boirai ? » « Nous le pouvons. » Le Seigneur leur dit : « Quant à mon calice, vous le boirez... ». Par ailleurs, le Christ dit de saint Jean, après sa Résurrection : « Si je veux qu’il reste ainsi jusqu’à mon retour... » (Jean XXI, 22). Aux temps apostoliques, on interprétait cette parole en ce sens que l’Apôtre ne mourrait pas. Mais saint Jean rectifia lui-même cette opinion en expliquant que le Seigneur avait parlé de sa mort naturelle à la différence de la mort violente de Pierre. La tradition raconte que, durant la persécution de Domitien, vers l’an 100 ap. J.-C., saint Jean fut martyr de volonté et d’intention. Il fut jeté dans une chaudière d’huile bouillante devant la Porte Latine et rendit ainsi témoignage au Christ. Il resta cependant sain et sauf et sortit de la chaudière plus vigoureux qu’avant. Cette fête est en relations avec l’ancienne fête de saint Jacques le Majeur (1er mai). On voulait, après le martyre de saint Jacques, célébrer le martyre non sanglant de son frère Jean.
L’Évangile est propre ; il contient le beau passage où le Christ promet le martyre à son Apôtre bien-aimé : « Quant à mon calice, vous le boirez ». Maintenant, le désir de saint Jean a été accompli. Il règne là-haut, assis à côté du Christ.
Dans la prière des Heures, saint Jérôme décrit, d’une manière brève et exacte, l’importance de l’Apôtre. Il parle aussi de son martyre : « Jean était Apôtre, évangéliste et prophète. Il était Apôtre, car il écrit à la communauté chrétienne comme un docteur. Il était évangéliste, ce que n’a été aucun Apôtre sauf Matthieu. Il fut prophète, car, dans l’île de Patmos où il fut exilé par l’empereur Domitien à cause de sa foi au Christ, il eut la vision de l’Apocalypse dans laquelle il prédit de nombreux événements futurs. A son sujet, Tertullien raconte (De praescriptione 36) qu’il fut jeté, à Rome, dans une chaudière d’huile bouillante d’où il sortit plus jeune et plus vigoureux. Son évangile aussi a plusieurs avantages sur les trois autres. Matthieu commence l’histoire de Jésus comme celle d’un homme quand il écrit : Livre de la génération de Jésus-Christ, fils de David, fils d’Abraham. Luc commence au sacerdoce de Zacharie ; Marc à la prophétie de Malachie et d’Isaïe. Le premier a comme symbole la figure d’un homme, à cause de la généalogie ; le second la face d’un taureau, à cause du sacerdoce ; le troisième la figure d’un lion, à cause de la voix qui crie dans le désert : « Préparez les voies du Seigneur, rendez droits ses sentiers ». Quant à notre Jean, il s’envole comme un aigle jusqu’aux hauteurs célestes et parvient jusqu’au Père lui-même quand il dit : « Au commencement était le Verbe et le Verbe était Dieu ».
[1] De prescriptione haeriticorum, c. 36 ; P.L. 2, col. 59.