Messe après 1942 |
Messe avant 1942 |
Messe au propre Dominicain |
Office |
Dom Guéranger, l’Année Liturgique |
Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum |
Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique |
Mort à Rome le 1er mai 1572. Canonisé par Clément XI en 1712. Fête comme semi-double au 5 mai, premier jour de libre après son natale. Pie VI en fit une fête double en 1775.
Messe après 1942 | |
Missa Si díligis me, de Communi Summorum Pontificum, præter orationem sequentem : | Messe Si díligis me, du Commun des Souverains Pontifes, sauf l’oraison suivante : |
Oratio P | Collecte P |
Deus, qui, ad conteréndos Ecclésiæ tuæ hostes et ad divínum cultum reparándum, beátum Pium Pontíficem Máximum elígere dignátus es : fac nos ipsíus deféndi præsídiis et ita tuis inhærére obséquiis ; ut, ómnium hóstium superátis insídiis, perpétua pace lætémur. Per Dóminum nostrum. | O Dieu, qui, afin d’écraser les ennemis de votre Église, et de réformer le culte divin, avez daigné choisir pour Pontife suprême le bienheureux Pie, faites que nous ressentions le secours de sa protection, et que nous nous attachions à votre service de telle sorte qu’après avoir triomphé de toutes les embûches de nos ennemis, nous goûtions les joies de l’éternelle paix. |
Secreta C 1 | Secrète C 1 |
Oblátis munéribus, quǽsumus, Dómine, Ecclésiam tuam benígnus illúmina : ut, et gregis tui profíciat ubique succéssus, et grati fiant nómini tuo, te gubernánte, pastóres. Per Dóminum. | Grâce à l’offrande de ces presents, accordez Seigneur, la lumière à votre Eglise ; faites prospérer partout votre troupeau, et daignez diriger ses pasteurs pour qu’ils vous soient agréables. |
Postcommunio C 1 | Postcommunion C 1 |
Refectióne sancta enutrítam gubérna, quǽsumus, Dómine, tuam placátus Ecclésiam : ut, poténti moderatióne dirécta, et increménta libertátis accípiat et in religiónis integritáte persístat. Per Dóminum nostrum. | Seigneur, dirigez avec amour votre Eglise qui vient de se nourrir à cette table sainte, pour que, sous votre conduite toute-puissante, elle voie grandir sa liberté, et garde la religion dans toute sa pureté. |
Messe avant 1942 | |
Missa Státuit, de Communi Confessoris Pontificis I loco, præter orationem sequentem : | Messe Státuit, du Commun d’un Confesseur Pontife I, sauf l’oraison suivante : |
Oratio P | Collecte P |
Deus, qui, ad conteréndos Ecclésiæ tuæ hostes et ad divínum cultum reparándum, beátum Pium Pontíficem Máximum elígere dignátus es : fac nos ipsíus deféndi præsídiis et ita tuis inhærére obséquiis ; ut, ómnium hóstium superátis insídiis, perpétua pace lætémur. Per Dóminum nostrum. | O Dieu, qui, afin d’écraser les ennemis de votre Église, et de réformer le culte divin, avez daigné choisir pour Pontife suprême le bienheureux Pie, faites que nous ressentions le secours de sa protection, et que nous nous attachions à votre service de telle sorte qu’après avoir triomphé de toutes les embûches de nos ennemis, nous goûtions les joies de l’éternelle paix. |
Secreta C | Secrète C |
Sancti tui, quǽsumus, Dómine, nos ubíque lætíficant : ut, dum eórum mérita recólimus, patrocínia sentiámus. Per Dóminum. | Que le souvenir de vos Saints nous soit, ô Seigneur, en tous lieux, un sujet de joie, afin que nous ressentions la protection de ceux dont nous célébrons à nouveau les mérites. |
Postcommunio C | Postcommunion C |
Præsta, quǽsumus, omnípotens Deus : ut, de percéptis munéribus grátias exhibéntes, intercedénte beáto Pio Confessóre tuo atque Pontífice, benefícia potióra sumámus. Per Dóminum. | Accordez-nous, s’il vous plaît, ô Dieu tout-puissant, qu’en rendant grâces pour les dons reçus, nous recevions plus de bienfaits encore grâce à l’intercession du bienheureux Pie votre Confesseur et Pontife. |
Leçons des Matines avant 1960
Quatrième leçon. Pie, né dans une ville du Piémont nommée Bosco, de la noble famille des Ghisleri, originaire de Bologne, entra à l’âge de quatorze ans dans l’Ordre des Frères Prêcheurs. On remarquait en lui une admirable patience, une profonde humilité, une très grande austérité de vie, une application continuelle à l’oraison, et le zèle le plus ardent pour l’observance régulière et la gloire de Dieu. Il s’adonna à l’étude de la philosophie et de la théologie, et excella tellement dans ces sciences, qu’il s’acquitta avec un grand succès de la charge de les enseigner. Il fit en plusieurs lieux des conférences sacrées très fructueuses, remplit longtemps avec une force d’âme inviolable les fonctions d’inquisiteur, et préserva, au péril même de sa vie, un grand nombre de villes de l’hérésie qui s’efforçait de les envahir.
Cinquième leçon. Paul IV, à qui ses vertus le rendaient cher, le promut d’abord à l’évêché de Népi et Sutri, et, deux ans après, le mit au rang des Cardinaux Prêtres de l’Église romaine. Transféré par Pie IV au siège de Mondovi, dans le Piémont, il reconnut que beaucoup d’abus s’étaient introduits dans cette Église, et fit la visite de son diocèse pour les extirper. Lorsque toutes choses furent remises en ordre, il revint à Rome, où il fut occupé des négociations les plus importantes dans l’expédition desquelles il prit toujours le parti de la justice, et déploya une liberté apostolique et une grande constance. A la mort de Pie IV, il fut élu Pape, contre l’attente générale ; mais, sauf l’extérieur, il ne changea rien à sa manière de vivre. Il eut un zèle incessant pour la propagation de la foi, une sollicitude infatigable pour le rétablissement de la discipline ecclésiastique, une vigilance assidue pour l’extirpation des erreurs, une bienfaisance inépuisable pour soulager les nécessités des indigents, un courage invincible pour défendre les droits du siège apostolique.
Sixième leçon. Le sultan des Turcs, Sélim, dont les succès avaient accru l’audace, ayant réuni une flotte nombreuse près des îles Cursolaires, fut vaincu, grâce à Pie V, et plus encore au moyen des prières adressées à Dieu qu’au moyen des armes. Ce Pontife connut cette victoire par une révélation divine à l’heure même où elle fut obtenue, et il l’annonça aux personnes qui se trouvaient avec lui. Il préparait une nouvelle expédition contre les Turcs lorsqu’il tomba gravement malade ; il supporta avec une grande patience de très cruelles douleurs, et étant arrivé à l’extrémité, reçut les sacrements selon l’usage, puis rendit son âme à Dieu dans une paix profonde, l’an mil cinq cent soixante-douze, âgé de soixante-huit ans, après avoir siégé six ans, trois mois et vingt-quatre jours. Son corps est l’objet d’une grande vénération de la part des fidèles dans la basilique de Sainte Marie-Majeure. Dieu opéra de nombreux miracles en faveur de ceux qui recouraient à l’intercession de Pie V, et ces prodiges ayant été prouvés juridiquement, il a été inscrit au nombre des Saints par le Souverain Pontife Clément XI.
Déjà de nombreux Pontifes ont paru sur le Cycle, où ils forment une éclatante constellation près du Christ ressuscité qui, en ces jours, donna à Pierre leur prédécesseur les clefs du ciel. Anicet, Soter, Caïus, Clet et Marcellin, tenaient en main la palme du martyre ; Léon seul avait combattu sans répandre son sang ; mais son grand cœur n’eût pas reculé devant ce suprême témoignage. Or voici qu’en ce jour un émule de Léon, donné à l’Église dans ces derniers siècles, vient s’unir à lui et se mêler au groupe triomphant. Comme Léon, Pie V a lutté avec ardeur contre l’hérésie ; comme Léon, il a sauvé son peuple du joug des barbares.
La vie entière de Pie V a été un combat. Dans les temps agités où il fut placé au gouvernail de la sainte Église, l’erreur venait d’envahir une vaste portion de la chrétienté, et menaçait le reste. Astucieuse et souple dans les lieux où elle ne pouvait développer son audace, elle convoitait l’Italie ; son ambition sacrilège était de renverser la chaire apostolique, et d’entraîner sans retour le monde chrétien tout entier dans les ténèbres de l’hérésie. Pie défendit avec un dévouement inviolable la Péninsule menacée. Avant d’être élevé aux honneurs du pontificat suprême, il exposa souvent sa vie pour arracher les villes à la séduction. Imitateur fidèle de Pierre Martyr, on ne le vit jamais reculer en présence du danger, et partout les émissaires de l’hérésie s’enfuirent à son approche. Placé sur la chaire de saint Pierre, il sut imprimer aux novateurs une terreur salutaire, il releva le courage des souverains de l’Italie, et, par des rigueurs modérées, il vint à bout de refouler au delà des Alpes le fléau qui allait entraîner la destruction du christianisme en Europe, si les États du Midi ne lui eussent opposé une barrière invincible. Le torrent de l’hérésie s’arrêta. Depuis lors, le protestantisme, réduit à s’user sur lui-même, donne le spectacle de cette anarchie de doctrines qui eût désolé le monde entier, sans la vigilance du Pasteur qui, soutenant avec un zèle indomptable les défenseurs de la vérité dans tous les États où elle régnait encore, s’opposa comme un mur d’airain à l’envahissement de l’erreur dans les contrées où il commandait en maître.
Un autre ennemi, profitant des divisions religieuses de l’Occident, s’élançait en ces mêmes jours sur l’Europe, et l’Italie n’allait être que sa première proie. Sortie du Bosphore, la flotte ottomane se dirigeait avec fureur sur la chrétienté ; et c’en était fait, si l’énergique Pontife n’eût veillé pour le salut de tous. Il sonne l’alarme, il appelle aux armes les princes chrétiens. L’Empire et la France, déchirés par les factions que l’hérésie a fait naître dans leur sein, entendent l’appel, mais ils restent immobiles ; l’Espagne seule, avec Venise et h petite flotte papale, répondent aux instances du Pontife, et bientôt la croix et le croissant se trouvent en présence dans le golfe de Lépante. Les prières de Pie V décidèrent la victoire en faveur des chrétiens, dont les forces étaient de beaucoup inférieures à celles des Turcs. Nous retrouverons ce grand souvenir sur le Cycle, en octobre, à la fête de Notre-Dame du Rosaire. Mais il faut rappeler aujourd’hui la prédiction que fit le saint Pape, sur le soir de la grande journée du 7 octobre 1 571. Depuis six heures du matin jusqu’aux approches de la nuit, la lutte durait entre la flotte chrétienne et la flotte musulmane. Tout à coup le Pontife, poussé par un mouvement divin, regarda fixement le ciel ; il se tint en silence durant quelques instants, puis se tournant vers les personnes qui étaient présentes : « Rendons grâces à Dieu, leur dit-il ; la victoire est aux chrétiens. » Bientôt la nouvelle arriva à Rome ; et dans toute la chrétienté on ne tarda pas à savoir qu’un Pape avait encore une fois sauvé l’Europe. La défaite de Lépante porta à la puissance ottomane un coup dont elle ne s’est jamais relevée ; l’ère de sa décadence date de cette journée fameuse.
Les travaux de saint Pie V pour la régénération des mœurs chrétiennes, l’établissement de la discipline du concile de Trente, et la publication du Bréviaire et du Missel réformés, ont fait de son pontificat de six années l’une des époques les plus fécondes dans l’histoire de l’Église. Plus d’une fois les protestants se sont inclinés d’admiration en présence de ce vigoureux adversaire de leur prétendue réforme. « Je m’étonne, disait Bacon, que L’Église Romaine n’ait pas encore canonisé ce grand homme. » Pie V ne fut, en effet, placé au nombre des Saints qu’environ cent trente ans après sa mort : tant est grande l’impartialité de l’Église Romaine, lors même qu’il s’agit de décerner les honneurs de l’apothéose à ses chefs les plus respectés.
La gloire des miracles couronna dès ce monde le vertueux Pontife : nous rappellerons ici deux de ses prodiges les plus populaires. Traversant un jour, avec l’ambassadeur de Pologne, la place du Vatican, qui s’étend sur le sol où fut autrefois le cirque de Néron, il se sent saisi d’enthousiasme pour la gloire et le courage des martyrs qui souffrirent en ce lieu dans la première persécution. Il se baisse, et prend dans sa main une poignée de poussière dans ce champ du martyre, foulé par tant de générations de fidèles depuis la paix de Constantin. Il verse cette poussière dans un linge que lui présente l’ambassadeur ; mais lorsque celui-ci, rentré chez lui, ouvre le linge, il le trouve tout imprégné d’un sang vermeil que l’on eût dit avoir été versé à l’heure même : la poussière avait disparu. La foi du Pontife avait évoqué le sang des martyrs, et ce sang généreux reparaissait à son appel pour attester, en face de l’hérésie, que l’Église Romaine, au XVIe siècle, était toujours celle pour laquelle ces héros avaient donné leur vie sous Néron.
La perfidie des hérétiques tenta plus d’une fois de mettre fin à une vie qui laissait sans espoir de succès leurs projets pour l’envahissement de l’Italie. Par un stratagème aussi lâche que sacrilège, secondés par une odieuse trahison, ils enduisirent d’un poison subtil les pieds du crucifix que le saint Pontife avait dans son oratoire, et sur lequel il collait souvent ses lèvres. Pie V, dans la ferveur de sa prière, se prépare à donner cette marque d’amour au Sauveur des hommes sur son image sacrée ; mais tout à coup, ô prodige ! Les pieds du crucifix se détachent de la croix, et semblent fuir les baisers respectueux du vieillard. Pie V comprit alors que la malice de ses ennemis avait voulu transformer pour lui en instrument de mort jusqu’au bois qui nous a rendu la vie.
Un dernier trait encouragera les fidèles, par l’exemple du grand Pontife, à cultiver la sainte Liturgie dans le temps de l’année où nous sommes. Au lit de la mort, jetant un dernier regard sur l’Église de la terre qu’il allait quitter pour celle du ciel, et voulant implorer une dernière fois la divine bonté en faveur du troupeau qu’il laissait exposé à tant de périls, il récita d’une voix presque éteinte cette strophe des Hymnes du Temps pascal : « Créateur des hommes, daignez, en ces jours remplis des allégresses de la Pâque, préserver votre peuple des assauts de la mort [1]. » Ayant achevé ces paroles sacrées, il s’endormit paisiblement dans le Seigneur. Saint Pie V est une des premières gloires de l’Ordre de Saint-Dominique ; nous emprunterons donc au Bréviaire de ce saint Ordre les Répons et les Hymnes qu’il consacre à la louange de l’illustre Pontife.
RÉPONS.
R/. Au moment où ce nouveau Moïse priait Dieu, les mains étendues, sur la colline, Amalec si perfide envers Israël était battu sur la mer près de Lépante ; * Et la victoire remportée était révélée à Pie, alléluia. V/. Il étendit la verge du Rosaire, et les cruels ennemis furent submergés. * Et la victoire remportée était révélée à Pie, alléluia.
R/. Les Agneaux de cire blanche qui ont reçu la bénédiction de Pie apportent la santé aux malades ; les armes meurtrières reculent devant eux : * Ceux qui les portent évitent l’atteinte du plomb mortel, alléluia. V/. Leur présence multiplie la farine, arrête la flamme des incendies, apaise la fureur des flots. * Ceux qui les portent évitent l’atteinte du plomb mortel, alléluia.
R/. Parcourant le cirque où combattirent les anciens martyrs de Rome, il opère un miracle éclatant * Sous les veux d’un peuple nombreux, alléluia. V/. Il prend sur le sol du Vatican une poignée de poussière, et la présente tout imbibée de sang à un ambassadeur chrétien, * Sous les yeux d’un peuple nombreux, alléluia.
R/. Il veut un jour baiser les pieds du Christ sur son crucifix ; mais l’image retire ses pieds pour conserver la vie au pieux serviteur du Christ ; * Elle refuse de recevoir ses baisers dans l’endroit qu’une main perfide a souillé de poison, alléluia. V/. Je ne cherche ma gloire que dans la croix du Seigneur ; à elle seule je prodigue les marques de mon amour. * L’image refuse de recevoir ses baisers dans l’endroit qu’une main perfide a souillé de poison, alléluia.
L’Hymne suivante est exposée, près du tombeau de saint Pie V, à Sainte-Marie-Majeure, pour servir d’expression à la piété des pèlerins envers le saint Pape.
Pontife du Dieu vivant, vous avez été sur la terre « le mur d’airain, la colonne de fer [2] », dont parle le Prophète ; et votre constance indomptable a préservé de la violence et des embûches de ses nombreux ennemis le troupeau qui vous avait été confié. Loin de désespérer à la vue des dangers, votre courage s’est élevé comme la digue que l’on bâtit toujours plus haute, à mesure que les eaux de l’inondation arrivent plus menaçantes. Par vous les flots envahissants de l’hérésie se sont enfin arrêtés ; par vous l’invasion musulmane a été refoulée, et l’orgueil du croissant abaissé. Le Seigneur vous fit l’honneur de vous choisir pour être le vengeur de sa gloire et le libérateur du peuple chrétien ; recevez, avec nos actions de grâces, l’hommage de nos humbles félicitations. Par vous l’Église, au sortir d’une crise terrible, recouvra sa beauté. La vraie réforme, celle qui s’accomplit par l’autorité, fut appliquée sans faiblesse par vos mains aussi fermes qu’elles étaient pures. Le culte divin, renouvelé par la publication des livres de la sainte Liturgie, vous dut son progrès et sa restauration ; et tant d’œuvres si fécondes s’accomplirent dans les six années de votre court et laborieux pontificat.
Maintenant, ô saint Pontife, écoutez les vœux de l’Église militante dont les destinées furent un moment déposées entre vos mains. En mourant vous imploriez pour elle, au nom du Sauveur ressuscité, la protection contre les périls auxquels elle était encore exposée ; voyez à quel état le débordement de l’erreur a réduit de nos jours la chrétienté presque tout entière. Pour faire face à tous les ennemis qui l’assiègent, l’Église n’a plus que les promesses de son divin fondateur ; tous les appuis visibles lui manquent à la fois ; il ne lui reste plus que les mérites de la souffrance et les ressources de la prière. Unissez, ô saint Pontife, vos supplications aux siennes, et montrez que vous aimez toujours le troupeau de votre Maître. Protégez dans Rome la Chaire de votre successeur, en butte aux plus violentes et aux plus astucieuses attaques. Les princes et les peuples conspirent d’accord contre le Seigneur et contre son Christ ; déjouez les projets d’une usurpation sacrilège, d’une impiété qui prétend faire mentir les oracles divins. Détournez les fléaux qui menacent l’Europe si ingrate envers sa mère, si indifférente aux attentats commis contre celle à qui elle doit tout. Illuminez les aveugles, confondez les pervers ; obtenez que la foi éclaire enfin tant d’intelligences égarées qui prennent l’erreur pour la vérité, les ténèbres pour la lumière.
Au milieu de cette nuit si sombre et si menaçante, vos regards, ô saint Pontife, discernent les brebis fidèles ; bénissez-les, soutenez-les, accroissez leur nombre. Attachez-les au tronc de l’arbre qui ne peut périr, afin qu’elles ne soient pas dispersées par la tempête. Rendez-les toujours plus fidèles à la foi et aux traditions de la sainte Église : c’est leur seule force au milieu de ces courants d’erreur qui menacent de tout entraîner. Maintenez toujours dans l’unité sacrée nos Églises de France, qui ont donné au monde un si noble exemple de fidélité à l’esprit catholique, en répudiant les œuvres malheureuses d’une époque de confusion, pour embrasser de nouveau les rites que vous aviez sanctionnés de votre autorité suprême. Conservez à l’Église le saint Ordre dans lequel vous fûtes élevé pour de si hautes destinées ; propagez dans son sein la race de ces hommes puissants en œuvres et en paroles, zélés pour la foi et pour la sanctification des âmes, tels que nous les admirons dans ses annales, tels que nous les vénérons sur les autels. Enfin, souvenez-vous, ô Pie, que vous avez été le Père du peuple chrétien, et continuez d’exercer encore cette noble prérogative sur la terre, par votre puissante intercession, jusqu’à ce que le nombre des élus soit arrivé à son complément.
Le nom de Frère Michel Ghislieri — Pie V — orne le frontispice du Missel et du Bréviaire romains, parce que c’est sous son autorité que s’acheva la révision des livres liturgiques expressément réservée au Saint-Siège par le Concile de Trente. Outre ces mérites dans le domaine de la liturgie, saint Pie V a la gloire d’avoir été le Pape de la réforme que depuis deux siècles déjà, appelaient en vain les Pontifes ses prédécesseurs, les conciles, un grand nombre d’évêques et de saints de cette époque si complexe qu’on appelle communément la Renaissance.
Saint Pie V est donc le Pape de la réforme ecclésiastique ; non pas en ce sens qu’il fût le premier à la vouloir et à l’inaugurer, puisque, quand il monta sur le trône de saint Pierre, le Concile de Trente était déjà terminé depuis un certain temps. Mais il fut le Pape de la réforme en tant que, par son autorité et par son exemple, il mit définitivement la Curie romaine et l’épiscopat tout entier sur la voie de ce réveil salutaire de l’esprit ecclésiastique, que plusieurs de ses prédécesseurs, tout en le désirant dans leur cœur, n’avaient pas su soutenir, faute de courage et de constance.
On s’étonne que saint Pie V, de famille modeste, et pauvre religieux dominicain, ait pu s’élever si haut pour le bien de l’Église. Mais c’était un saint, et les instruments de sa puissance étaient la recherche de la seule gloire de Dieu et la prière assidue. Par celle-ci surtout il triompha de l’insolence des Turcs, et il sanctifia le peuple confié à ses soins.
Le saint Pontife sortit pour la dernière fois du Vatican le 21 avril 1572, huit jours avant sa mort, et ce fut une scène admirable.
Quoique malade, il voulut en ce jour visiter pour la dernière fois les sept basiliques principales de Rome, dans l’espérance, disait-il, d’en revoir sous peu les martyrs au ciel. De la basilique de Saint-Paul, il parcourut à pied presque tout le long et mauvais chemin qui conduit à Saint-Sébastien. Arrivé enfin, à bout de forces, à Saint-Jean, ses familiers le supplièrent de monter en litière, ou de remettre le reste du pèlerinage au lendemain. Il répondit en latin : Qui fecit totum, Ipse perficiat opus, et continua sa route.
Il arriva le soir seulement au Vatican, où, s’étant reposé quelque peu, il se fit lire les sept psaumes de la pénitence et le récit de la Passion du Seigneur, n’ayant même plus la force d’enlever son camauro [3] quand il entendait prononcer le saint Nom de Jésus.
Le 28 avril, il essaya de célébrer la messe mais n’y parvint pas. Muni des sacrements, il rendit sa sainte âme à. Dieu le soir du Ier mai, et ses dernières paroles furent une invocation liturgique du Bréviaire :
La messe est celle du Commun des Confesseurs Pontifes, Státuit [4]. Seule la première collecte, trop sensiblement marquée de préoccupations historiques, est propre.
Saint Pie V avait coutume de répéter cette belle oraison jaculatoire, en baisant son crucifix, au milieu des souffrances de la maladie qui le conduisit au tombeau : Domine, adauge dolorem, dum adaugeas et patientiam.
Il est dit dans la relation faite par les auditeurs de Rote en vue de procéder à sa canonisation, qu’un témoin oculaire et quatre témoins auriculaires rapportèrent le fait suivant : Un jour, un ambassadeur du roi de Pologne, sur le point de rentrer dans son pays, rencontra saint Pie V sur la place de Saint-Pierre et lui demanda des reliques qu’il lui avait promises. Le Pape descendit alors de sa litière et, ayant ramassé un peu de terre, l’enveloppa dans un mouchoir qu’il remit au diplomate. Celui-ci, croyant à ure moquerie, ne dit rien, mais, arrivé chez lui, dénoua le linge et le vit tout taché de sang. Effrayé de ce prodige, il courut de nouveau chez le Pontife pour lui raconter ce qui était arrivé. Saint Pie V répondit : « Nous savions bien que le sol Vatican est tout détrempé du sang des martyrs, et c’est pourquoi nous avons défendu qu’on donne ici des jeux publics. » — Il ne suffit pas de résider à Rome, il faut y vivre avec foi, si l’on veut en goûter toute la beauté sacrée.
La chrétienté doit à saint Pie V le missel et le bréviaire.
Saint Pie V. — Jour de mort : 1er Mai 1572. Tombeau : dans l’église Sainte-Marie-Majeure, à Rome. Vie : Pie V (précédemment frère Michel Ghislieri) est le dernier pape qui ait été canonisé. Il fut d’abord dominicain et travailla beaucoup pour le maintien de la pureté de la foi. Il fut élevé en 1566 sur la Chaire de Saint-Pierre. Il travailla sans relâche à faire appliquer les réformes du concile de Trente. Grande aussi est son importance dans le domaine de la sainte liturgie. Il publia en 1566 le catéchisme romain, ouvrage important qui se trouve aujourd’hui dans les mains de tous les prêtres. Par la publication du bréviaire (1567) et du missel (1570), il établit l’unité de la liturgie dans l’Église romaine. On sait que, grâce à ses efforts et surtout à ses prières, la flotte chrétienne remporta sur les Turcs la victoire de Lépante (6 octobre 1570). C’est à cette occasion que fut instituée la fête du Rosaire. Dans sa vie privée, saint Pie V fut un modèle de piété et d’ascèse. — La messe est du commun des Souverains Pontifes (Si diligis). L’oraison propre fait ressortir que « Dieu a choisi le saint pape Pie pour la rénovation du culte divin ». Nous pouvons, aujourd’hui, placer le travail de l’apostolat liturgique sous le patronage du saint pape, ami de la liturgie.
Sa dernière sortie — Rien n’est émouvant comme la dernière sortie du saint pape. Il franchit la porte du Vatican, la dernière fois, le 21 avril 1572, dix jours avant sa mort. Bien que déjà malade, il voulut visiter les sept églises principales de Rome. Il espérait, comme il le disait, voir bientôt les martyrs au ciel. Il suivit à pied la longue et mauvaise route qui va de Saint-Paul à Saint-Sébastien. Quand il arriva enfin, épuisé, au Latran, son entourage le pria de monter dans une chaise à porteurs ou bien de remettre la fin de son pèlerinage au lendemain. Il répondit : Qui fecit totum, ipse perficiat opus (que celui qui a tout fait achève l’œuvre), et il continua son chemin. Ce n’est que vers le soir qu’il rentra au Vatican. Il se fit encore lire les sept psaumes de la pénitence et l’histoire de la Passion de Jésus. Il n’avait plus la force, en entendant le nom de Jésus, d’enlever sa camaura (calotte). Le 28 avril, il essaya de célébrer la sainte messe, mais il ne le put pas. Muni des derniers sacrements, il rendit son âme à Dieu, le 1er mai. Ses dernières paroles furent une prière du bréviaire.
[1] Voici la strophe telle que la prononça saint Pie V, et telle qu’elle était de son temps dans le Bréviaire :
Quaesumus, auctor omnium,
In hoc paschali gaudio,
Ab omni mortis impetu
Tuum defende populum.
Dans la correction des Hymnes sous Urbain VIII, cette strophe a été totalement changée : Ut sis perenne mentibus, etc.
[2] Jerem. I, 18.
[3] Coiffure spéciale du Pape, appelée aussi clémentine ou papaline.
[4] Avant le nouveau Commun des Souverains Pontifes en 1942.