Textes de la Messe |
Office |
Dom Guéranger, l’Année Liturgique |
Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum |
Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique |
Après avoir réuni ces jours-ci ses néophytes à St-Jean de Latran, à Ste-Marie-Majeure, à St-Pierre, à St-Paul, à St-Laurent et aux 12 Apôtres, l’Église faisait en ce jour la Station dans la basilique dédiée à tous les martyrs et à leur Reine. C’est là que s’affirme le plus la victoire du Christ sur le paganisme. Le Panthéon, qui était le temple consacré au culte de tous les dieux, fut en effet, au VIIe siècle, consacré à Marie et aux martyrs des catacombes, dont Boniface IV avait fait transporter en grand nombre les ossements dans cette basilique. La fête de la dédicace de cette église devint bientôt notre fête de la Toussaint. La liturgie du Cycle de Pâques nous a montré en Noë (v. Dimanche de la Sexagésime, et 2e Prophétie du Samedi Saint), et en Moïse (v. 4e Dimanche de Carême, 2e Leçon du Vendredi-Saint, 4e Prophétie du Samedi-Saint, et Hymne de Pâques), des figures du mystère pascal. La messe de ce jour complète ce symbole en nous rappelant dans l’Introït, l’Epître et l’Offertoire que l’alliance conclue par Dieu avec Noë et sa famille sauvés des eaux du déluge, puis avec Moïse et son peuple sauvés des eaux de la Mer Rouge qui engloutirent leurs ennemis, est une image de la nouvelle alliance qui introduit les néophytes dans l’adoption des enfants de Dieu, au sortir des eaux baptismales. Sur la croix Jésus a en effet détruit le péché (All., Ep.), et par sa résurrection, dont les Apôtres sont témoins (Év.), il nous a donné la vie de la grâce. C’est le baptême qui a fait ressentir à nos âmes ce double effet de mort et de vie. Soyons-y toujours fidèles.
Ant. ad Introitum. Ps. 77, 53. | Introït |
Edúxit eos Dóminus in spe, allelúia : et inimícos eórum opéruit mare, allelúia, allelúia, allelúia. | Le Seigneur les mena pleins d’espérance, alléluia ; et la mer engloutit leurs ennemis, alléluia, alléluia, alléluia. |
Ps. ibid., 1. | |
Attendite, pópule meus, legem meam : inclináte aurem vestram in verba oris mei. | Mon peuple, écoutez ma loi ; prêtez l’oreille aux paroles de ma bouche. |
V/.Glória Patri. | |
Oratio. | Collecte |
Omnípotens sempitérne Deus, qui paschále sacraméntum in reconciliatiónis humánæ fœdere contulísti : da méntibus nostris ; ut, quod professióne celebrámus, imitémur efféctu. Per Dóminum. | Dieu tout-puissant et éternel, qui, par le mystère pascal, avez formé un pacte de réconciliation avec l’humanité : donnez à nos âmes de reproduire dans nos actes les vérités que nous professons en célébrant ce mystère. |
Léctio Epístolæ beáti Petri Apóstoli. | Lecture de l’Épître du B. Ap. Pierre. |
1. Petri 3, 18-22. | |
Caríssimi : Christus semel pro peccátis nostris mórtuus est, iustus pro iniústis, ut nos offérret Deo, mortificátus quidem carne, vivificátus autem spíritu. In quo et his, qui in cárcere erant, spirítibus véniens prædicávit : qui incréduli fúerant aliquándo, quando exspectábant Dei patiéntiam in diébus Noë, cum fabricarétur arca, in qua pauci, id est octo ánimæ salvæ factæ sunt per aquam. Quod et vos nunc símilis formæ salvos facit baptísma : non carnis deposítio sórdium, sed consciéntiæ bonæ interrogátio in Deum per resurrectiónem Iesu Christi, Dómini nostri, qui est in dextera Dei. | Mes bien-aimés, le Christ est mort une fois pour nos péchés, lui juste pour des injustes, afin de nous offrir à Dieu, ayant été mis à mort quant à la chair, mais rendu à la vie quant à l’esprit ; par lequel aussi il est allé prêcher aux esprits qui étaient en prison, qui autrefois avaient été incrédules, lorsqu’au temps de Noé ils s’attendaient à la patience de Dieu, pendant qu’était préparée l’arche, dans laquelle peu de personnes, savoir huit seulement, jurent sauvées à travers l’eau. Figure à laquelle correspond le baptême, qui nous sauve maintenant, non pas en enlevant tes souillures de la chair, mais par l’engagement d’une bonne conscience envers Dieu, grâce à la résurrection de Jésus-Christ, qui est assis à la droite de Dieu. |
Graduale. Ps. 117, 24 et 26-27. | Graduel |
Hæc dies, quam fecit Dóminus : exsultémus et lætémur in ea. | Voici le jour que le Seigneur a fait ; passons-le dans l’allégresse et dans la joie. |
V/. Benedíctus, qui venit in nómine Dómini : Deus Dóminus, et illúxit nobis. | V/. Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ; le Seigneur est Dieu et Il a fait briller sur nous sa lumière. |
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 95, 10. Dícite in géntibus : quia Dóminus regnávit a ligno. | Allelúia, allelúia. V/. Dites parmi les nations : le Seigneur a régné par le bois. |
Sequentia. | Séquence. |
Víctimæ pascháli laudes ímmolent Christiáni. | A la victime pascale, que les Chrétiens immolent des louanges. |
Agnus rédemit oves : Christus ínnocens Patri reconciliávit peccatóres. | L’Agneau a racheté les brebis : le Christ innocent a réconcilié les pécheurs avec son Père. |
Mors et vita duéllo conflixére mirándo : dux vitæ mórtuus regnat vivus. | La vie et la mort se sont affronté en un duel prodigieux : l’Auteur de la vie était mort, il règne vivant. |
Dic nobis, María, quid vidísti in via ? | Dis-nous, Marie, qu’as-tu vu en chemin ? |
Sepúlcrum Christi vivéntis et glóriam vidi resurgéntis. | J’ai vu le tombeau du Christ vivant, et la gloire du ressuscité. |
Angélicos testes, sudárium et vestes. | J’ai vu les témoins angéliques, le suaire et les linceuls. |
Surréxit Christus, spes mea : præcédet vos in Galilǽam. | Il est ressuscité, le Christ, mon espérance : il vous précèdera en Galilée. |
Scimus Christum surrexísse a mórtuis vere : tu nobis, victor Rex, miserére. Amen. Allelúia. | Nous le savons : le Christ est ressuscité des morts : ô Vous, Roi vainqueur, ayez pitié de nous. Amen. Alléluia. |
+ Sequéntia sancti Evangélii secúndum Matthǽum. | Lecture du Saint Evangile selon saint Mathieu. |
Matth. 28, 16-20. | |
In illo témpore : Undecim discípuli abiérunt in Galilǽam, in montem, ubi constitúerat illis Iesus. Et vidéntes eum adoravérunt : quidam autem dubitavérunt. Et accédens Iesus locútus est eis, dicens : Data est mihi omnis potéstas in cælo et in terra. Eúntes ergo, docéte omnes gentes, baptizántes eos in nómine Patris, et Fílii, et Spíritus Sancti : docentes eos serváre ómnia, quæcúmque mandávi vobis. Et ecce, ego vobíscum sum ómnibus diébus usque ad consummatiónem sǽculi. | En ce temps-là : les onze disciples s’en allèrent en Galilée, sur la montagne que Jésus leur avait indiquée. Et le voyant, ils L’adorèrent. Cependant, quelques-uns eurent des doutes. Et Jésus s’approchant, leur parla ainsi : Toute puissance m’a été donnée dans le ciel et sur la terre. Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, et leur enseignant à observer tout ce que je vous ai commandé. Et voici que je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la consommation des siècles. |
Credo | |
Ant. ad Offertorium. Exodi 12, 14. | Offertoire |
Erit vobis hæc dies memoriális, allelúia : et diem festum celebrábitis sollémnem Dómino in progénies vestras : legítimum sempitérnum diem, allelúia, allelúia, allelúia. | Vous conserverez le souvenir de ce jour, alléluia ; et vous le célébrerez par une fête solennelle en l’honneur du Seigneur ; vous le célébrerez de génération en génération ; c’est une institution perpétuelle, alléluia, alléluia, alléluia. |
Secreta. | Secrète |
Hóstias, quǽsumus, Dómine, placátus assúme : quas et pro renatórum expiatióne peccáti deférimus, et pro acceleratióne cæléstis auxílii. Per Dóminum. | Recevez favorablement, nous vous en supplions, Seigneur, ces hosties que nous vous offrons, et pour l’expiation du péché en ceux qui vous doivent une nouvelle naissance et pour obtenir promptement le secours céleste. |
Præfatio, Communicántes et Hanc ígitur, ut in die Paschæ.. | Préface, Communicantes et Hanc igitur du jour de Pâques |
Ant. ad Communionem. Matth. 28,18-19. | Communion |
Data est mihi omnis potéstas in cælo et in terra, allelúia : eúntes, docéte omnes gentes, baptizántes eos in nómine Patris, et Fílii, et Spíritus Sancti, allelúia, allelúia. | Toute puissance m’a été donnée dans le ciel et sur la terre, alléluia : Allez, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, alléluia, alléluia. |
Postcommunio. | Postcommunion |
Réspice, quǽsumus, Dómine, pópulum tuum : et, quem ætérnis dignátus es renováre mystériis, a temporálibus culpis dignánter absólve. Per Dóminum. | Regardez, nous vous en supplions, Seigneur, votre peuple, et comme vous avez daigné le renouveler par des mystères préparés dès l’éternité, daignez l’absoudre avec bonté des fautes que l’on commet dans le temps. |
¶ Post Dóminus vobíscum dicitur : Ite, Missa est, allelúia, allelúia. | ¶ Après Dóminus vobíscum on dit : Ite, Missa est, allelúia, allelúia. |
R/. Deo grátias, allelúia, allelúia. | R/. Deo grátias, allelúia, allelúia. |
A MATINES
Invitatorium | Invitatoire |
Surréxit Dóminus vere, * Allelúia. | Le Seigneur est vraiment ressuscité, * Alléluia. |
Psaume 94 (Invitatoire) | |
Hymni et capitula non dicuntur in aliqua horarum, nec versiculi, nisi in Nocturno. | On ne dit les hymnes et les capitules à aucune heure, ni les verts sauf au Nocturne. |
Ant. 1 Ego sum qui sum * et consílium meum non est cum ímpiis, sed in lege Dómini volúntas mea est, allelúia. | Ant. 1 Je suis celui qui suis [1], * et mon conseil n’est pas avec les impies [2], mais ma volonté est dans la loi du Seigneur [3], alléluia. |
Psaume 1 | |
On répète l’antienne du psaume après chaque psaume. | |
Ant. 2 Postulávi Patrem meum, * allelúia : dedit mihi Gentes, allelúia, in hereditátem, allelúia. | Ant. 2 J’ai demandé à mon Père, * alléluia : il m’a donné les nations, alléluia, en héritage, alléluia [4]. |
Psaume 2 | |
Ant. 3 Ego dormívi, * et somnum cepi : et exsurréxi, quóniam Dóminus suscépit me, allelúia, allelúia. | Ant. 3 Moi je me suis endormi, * j’ai sommeillé ; et je me suis levé parce que le Seigneur m’a pris sous sa protection [5]. |
Psaume 3 | |
V/. Surréxit Dóminus vere, allelúia. | V/. Le Seigneur est vraiment ressuscité, alléluia. |
R/. Et appáruit Simóni, allelúia. | R/. Et il est apparu à Simon, alléluia. |
Lectio i | 1ère leçon |
Léctio sancti Evangélii secundum Matthǽum. | Lecture du saint Évangile selon saint Matthieu. |
Cap. 28, 16-20. | |
In illo témpore : Undecim discípuli abiérunt in Galilǽam in montem, ubi constitúerat illis Iesus. Et réliqua. | En ce temps-là : les onze disciples s’en allèrent en Galilée, sur la montagne que Jésus leur avait indiquée. Et le reste. |
Homilía sancti Hierónymi Presbýteri. | Homélie de saint Jérôme, Prêtre. |
Liber 4 Comment. in Matth., in fine | |
Post resurrectiónem Iesus in monte Galilǽæ conspícitur, ibique adorátur ; licet quidam dúbitent, et dubitátio eórum nostram áugeat fidem. Tunc maniféstius osténditur Thomæ, et latus láncea vulnerátum, et manus fixas demónstrat clavis. Accédens Iesus locútus est eis, dicens : Data est mihi omnis potéstas in cælo et in terra. Illi potéstas data est, qui paulo ante crucifíxus, qui sepúltus in túmulo, qui mórtuus iacúerat, qui póstea resurréxit. In cælo autem et in terra potéstas data est : ut qui ante regnábat in cælo, per fidem credéntium regnet et in terris. | Après sa résurrection, Jésus se fait voir sur une montagne de la Galilée, et il y est adoré, bien que quelques-uns doutent encore, mais leur doute augmente notre foi. C’est alors qu’il montre très manifestement à Thomas et lui présente son côté ouvert par la lance, et ses mains percées par les clous. « Jésus, s’approchant, leur parla, disant : Toute puissance m’a été donnée dans le ciel et sur la terre. » La puissance a été donnée à celui qui, peu auparavant, était attaché à la croix, déposé dans le sépulcre ; à celui qui reposait mort dans le tombeau, et qui ensuite ressuscita. Et la puissance lui a été donnée dans le ciel et sur la terre, afin que régnant déjà dans le ciel, il régnât aussi sur la terre par la foi de ceux qui croiraient en lui. |
R/. Surgens Iesus Dóminus noster, stans in médio discipulórum, suórum, dixit : * Pax vobis, allelúia : gavísi sunt discípuli viso Dómino, allelúia. | R/. Notre Seigneur Jésus, ressuscité, se tenant au milieu de ses disciples, leur dit : [6] * Paix à vous, alléluia : Les disciples se réjouirent à la vue du Seigneur, alléluia. |
V/. Una ergo sabbatórum, cum fores essent clausæ, ubi erant discípuli congregáti, venit Iesus, et stetit in médio eórum, et dixit eis. | V/. Le premier jour de la semaine, comme les portes du lieu où les disciples se trouvaient assemblés, étaient fermées, Jésus vint et se tint au milieu d’eux, et leur dit. |
R/. Pax vobis, allelúia : gavísi sunt discípuli viso Dómino, allelúia. | R/. Paix à vous, alléluia : Les disciples se réjouirent à la vue du Seigneur, alléluia. |
Lectio ii | 2e leçon |
Eúntes autem docéte omnes Gentes, baptizántes eos in nómine Patris, et Fílii, et Spíritus Sancti. Primum docent omnes Gentes, deínde doctas intíngunt aqua. Non enim potest fíeri, ut corpus baptísmi recípiat sacraméntum, nisi ante ánima fídei suscéperit veritátem. Baptizántur autem in nómine Patris, et Fílii, et Spíritus Sancti : ut quorum una est divínitas, una sit largítio : noménque Trinitátis, unus Deus est. | « Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. » Les Apôtres instruisent d’abord toutes les nations, puis lorsqu’elles sont instruites, ils les baptisent dans l’eau. Il ne se peut faire, en effet, que le corps reçoive le sacrement de baptême, si l’âme n’a d’abord embrassé les vérités de la foi. Elles sont baptisées au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, pour rappeler que la grâce du baptême est à la fois le don des trois personnes dont la divinité est une, et dont le nom est un seul Dieu. |
R/. Expurgáte vetus ferméntum, ut sitis nova conspérsio : étenim Pascha nostrum immolátus est Christus : * Itaque epulémur in Dómino, allelúia. | R/. Purifiez-vous du vieux levain, afin que vous soyez une pâte nouvelle : car notre Pâque, le Christ, a été immolé : [7] * C’est pourquoi mangeons la Pâque dans le Seigneur, alléluia. |
V/. Mórtuus est propter delícta nostra, et resurréxit propter iustificatiónem nostram. | V/. Il est mort pour nos péchés, et il est ressuscité pour notre justification. [8] |
* Itaque epulémur in Dómino, allelúia. Glória Patri. * Itaque epulémur in Dómino, allelúia. | * C’est pourquoi mangeons la Pâque dans le Seigneur, alléluia. Gloire au Père. * C’est pourquoi mangeons la Pâque dans le Seigneur, alléluia. |
Lectio iii | 3e leçon |
Docéntes eos serváre ómnia, quæcúmque mandávi vobis. Ordo præcípuus : iussit Apóstolis, ut primum docérent univérsas Gentes, deínde fídei intíngerent sacraménto, et post fidem ac baptísma, quæ essent observánda præcíperent. Ac ne putémus lévia esse, quæ iussa sunt, et pauca, áddidit : Omnia quæcúmque mandávi vobis : ut quicúmque credíderint, qui in Trinitáte fúerint baptizati, ómnia fáciant, quæ præcépta sunt. Et ecce ego vobíscum sum usque ad consummatiónem sǽculi. Qui usque ad consummatiónem sǽculi cum discípulis se futúrum esse promíttit, et illos osténdit semper esse victúros, et se numquam a credéntibus recessúrum. | « Leur apprenant à garder tout ce que je vous ai commandé. » Enchaînement remarquable : le Sauveur a ordonné à ses Apôtres d’instruire d’abord toutes les nations, puis de leur donner le baptême qui est le sacrement de la foi, et lorsqu’elles auraient reçu la foi et le baptême, de leur prescrire tout ce qu’il faut observer. Et pour que nous ne regardions pas comme peu importantes et peu nombreuses les choses qui nous sont ordonnées, il a ajouté : « Tout ce que je vous ai commandé. » Ainsi, quels que soient ceux qui auront cru, et auront été baptisés au nom des trois personnes de la sainte Trinité, ils doivent accomplir tous les préceptes. « Et voici que je suis avec vous jusqu’à la consommation du siècle. » Celui qui promet à ses disciples d’être avec eux jusqu’à la consommation du siècle, leur montre à la fois qu’ils seront toujours victorieux, et que lui-même ne se séparera jamais des fidèles. |
Te Deum | |
A LAUDES.
Ant. 1 Angelus autem Dómini * descéndit de cælo, et accédens revólvit lápidem, et sedébat super eum, allelúia, allelúia. | Ant. 1 Un Ange du Seigneur * descendit du ciel, et s’approchant, il renversa la pierre et s’assit dessus, alléluia, alléluia [9]. |
Psaume 92 | |
Ant. 2 Et ecce terræmótus * factus est magnus : Angelus enim Dómini descéndit de cælo, allelúia. | Ant. 2 Et voilà qu’un tremblement de terre, * très grand se produisit : car un Ange du Seigneur descendit du ciel, alléluia. |
Psaume 99 | |
Ant. 3 Erat autem * aspéctus eius sicut fulgur, vestiménta autem eius sicut nix, allelúia, allelúia. | Ant. 3 Or il avait * l’aspect d’un éclair, et ses vêtements étaient comme la neige, alléluia, alléluia. |
Psaume 62 | |
Ant. 4 Præ timóre autem eius * extérriti sunt custódes, et facti sunt velut mórtui, allelúia. | Ant. 4 Par crainte de lui * les gardes furent épouvantés, et ils devinrent comme morts, alléluia. |
Cantique des trois Enfants | |
Ant. 5 Respóndens autem Angelus, * dixit muliéribus : Nolíte timére : scio enim quod Iesum quǽritis, allelúia. | Ant. 5 Et l’Ange répondant * dit aux femmes : ne craignez point : je sais que vous cherchez Jésus, alléluia. |
Psaume 148 | |
Capitulum, hymnus et V/. Non dicuntur, sed eorum loco dicitur antiphona : | On ne dit pas le capitule, l’hymne et le verset, mais à leur place, on dit l’antienne : |
Ant. Hæc dies, * quam fecit Dóminus : exsultémus, et lætémur in ea. | Ant. Voici le jour * qu’a fait le Seigneur [10] : réjouissons-nous et tressaillons d’allégresse en ce jour. |
Ad Bened. Ant. Undecim discípuli * in Galilǽa vidéntes Dóminum adoravérunt, allelúia. | Ant. au Bénédictus Les onze disciples * voyant le Seigneur en Galilée, l’adorèrent, alléluia. [11] |
Benedictus | |
Oratio | Prière |
Omnípotens sempitérne Deus, qui paschále sacraméntum in reconciliatiónis humánæ fœdere contulísti : da méntibus nostris ; ut, quod professióne celebrámus, imitémur efféctu. Per Dóminum. | Dieu tout-puissant et éternel, qui, par le mystère pascal, avez formé un pacte de réconciliation avec l’humanité : donnez à nos âmes de reproduire dans nos actes les vérités que nous professons en célébrant ce mystère. |
V/. Benedicámus Dómino, allelúia, allelúia. | V/. Bénissons le Seigneur, alléluia, alléluia. |
R/. Deo grátias, allelúia, allelúia. | R/. Rendons grâces à Dieu, alléluia, alléluia. |
AUX VÊPRES.
Ant. 1 Angelus autem Dómini * descéndit de cælo, et accédens revólvit lápidem, et sedébat super eum, allelúia, allelúia. | Ant. 1 Un Ange du Seigneur * descendit du ciel, et s’approchant, il renversa la pierre et s’assit dessus, alléluia, alléluia. |
Psaume 109 | |
Ant. 2 Et ecce terræmótus * factus est magnus : Angelus enim Dómini descéndit de cælo, allelúia. | Ant. 2 Et voilà qu’un tremblement de terre, * très grand se produisit : car un Ange du Seigneur descendit du ciel, alléluia. |
Psaume 110 | |
Ant. 3 Erat autem * aspéctus eius sicut fulgur, vestiménta autem eius sicut nix, allelúia, allelúia. | Ant. 3 Or il avait * l’aspect d’un éclair, et ses vêtements étaient comme la neige, alléluia, alléluia. |
Psaume 111 | |
Ant. 4 Præ timóre autem eius * extérriti sunt custódes, et facti sunt velut mórtui, allelúia. | Ant. 4 Par crainte de lui * les gardes furent épouvantés, et ils devinrent comme morts, alléluia. |
Psaume 112 | |
Ant. 5 Respóndens autem Angelus, * dixit muliéribus : Nolíte timére : scio enim quod Iesum quǽritis, allelúia. | Ant. 5 Et l’Ange répondant * dit aux femmes : ne craignez point : je sais que vous cherchez Jésus, alléluia. |
Psaume 113 | |
Capitulum, hymnus et V/. Non dicuntur, sed eorum loco dicitur antiphona : | On ne dit pas le capitule, l’hymne et le verset, mais à leur place, on dit l’antienne : |
Ant. Hæc dies, * quam fecit Dóminus : exsultémus, et lætémur in ea. | Ant. Voici le jour * qu’a fait le Seigneur : réjouissons-nous et tressaillons d’allégresse en ce jour. |
Ad Magnif. Ant. Data est mihi * omnis potéstas in cælo et in terra, allelúia. | Ant. au Magnificat Il m’a été donné * toute puissance dans le ciel et sur la terre, alléluia. [12] |
Magnificat | |
Oratio | Prière |
Omnípotens sempitérne Deus, qui paschále sacraméntum in reconciliatiónis humánæ fœdere contulísti : da méntibus nostris ; ut, quod professióne celebrámus, imitémur efféctu. Per Dóminum. | Dieu tout-puissant et éternel, qui, par le mystère pascal, avez formé un pacte de réconciliation avec l’humanité : donnez à nos âmes de reproduire dans nos actes les vérités que nous professons en célébrant ce mystère. |
V/. Benedicámus Dómino, allelúia, allelúia. | V/. Bénissons le Seigneur, alléluia, alléluia. |
R/. Deo grátias, allelúia, allelúia. | R/. Rendons grâces à Dieu, alléluia, alléluia. |
Il y a huit jours, nous entourions la croix sur laquelle « l’homme des douleurs » [13] expirait abandonné de son Père, et repoussé comme un faux Messie par le jugement solennel de la Synagogue, et voici que le soleil se lève aujourd’hui pour la sixième fois, depuis que le cri de l’Ange, proclamant la Résurrection de l’adorable victime, s’est fait entendre. L’Épouse qui naguère, le front dans la poussière , tremblait devant cette justice d’un Dieu qui se montre ennemi du péché, jusqu’à « ne pas épargner même son propre Fils » [14], parce que ce Fils divin en portait la ressemblance, a relevé tout à coup la tète pour contempler le triomphe subit et éclatant de son Époux qui la convie lui-même a la joie. Mais s’il est un jour dans cette Octave où elle doive exalter le triomphe d’un tel vainqueur, c’est assurément le Vendredi, où elle avait vu expirer, « rassasié d’opprobres » [15], celui-là même dont la victoire retentit présentement dans le monde entier.
Arrêtons-nous donc aujourd’hui à considérer la Résurrection de notre Sauveur comme l’apogée de sa gloire personnelle, comme l’argument principal sur lequel repose notre foi en sa divinité. Si le Christ n’est pas ressuscité, nous dit l’Apôtre, notre foi est vaine » [16] ; mais parce qu’il est ressuscité, notre foi est assurée. Jésus nous devait donc d’élever sur ce point notre certitude au plus haut degré ; voyez s’il a manqué de le faire ; voyez si, au contraire, il n’a pas porté en nous la conviction de cette vérité capitale jusqu’à la plus souveraine évidence de fait. Pour cela deux choses étaient nécessaires : que sa mort fût la plus réelle, la mieux constatée, et que le témoignage qui atteste sa Résurrection fût le plus irréfragable à notre raison. Le Fils de Dieu n’a manqué à aucune de ces conditions ; il les a remplies avec un divin scrupule : aussi le souvenir du triomphe qu’il a remporté sur la mort ne saurait-il s’effacer de la pensée des hommes ; et de là vient que nous éprouvons encore aujourd’hui, après dix-neuf siècles, quelque chose de ce frisson de terreur et d’admiration que ressentirent les témoins qui eurent à constater ce passage subit de la mort à la vie.
Certes, il était bien réellement devenu la proie de la mort, celui que, vers la dixième heure du jour, Joseph d’Arimathie et Nicodème descendaient de la croix, et dont ils déposaient les membres roidis et sanglants entre les bras de la plus désolée des mères. L’affreuse agonie de la veille, lorsqu’il luttait avec les répugnances de son humanité, à la vue du calice qu’il était appelé à épuiser ; le brisement qu’avait éprouvé son cœur par suite de la trahison de l’un des siens et de l’abandon des autres ; les outrages et les violences dont il fut assailli durant de longues heures ; l’effroyable flagellation que Pilate lui fit subir, dans le but d’apitoyer un peuple altéré de meurtre ; la croix, avec ses clous ouvrant quatre sources d’où le sang s’échappait à grands flots ; les angoisses du cœur de l’agonisant, à la vue de sa mère éplorée à ses pieds ; une soif ardente qui consumait rapidement les dernières ressources de la vie ; enfin le coup de lance traversant la poitrine, et allant atteindre le cœur et faire sortir de son enveloppe les dernières gouttes de sang et d’eau : tels furent les titres de la mort pour revendiquer une si noble victime. C’est afin de vous glorifier, ô Christ, que nous les rappelons aujourd’hui : pardonnez à ceux pour lesquels vous avez daigné mourir, de n’oublier aucune des circonstances d’une mort si chère. Ne sont-elles pas aujourd’hui les plus solides assises du monument de votre résurrection ?
Il avait donc véritablement conquis la mort, ce vainqueur d’une nouvelle espèce qui s’était montré à la terre. Un fait surtout restait acquis à son histoire : c’est que sa carrière, passée tout entière dans une obscure contrée, s’était terminée par un trépas violent, au milieu des acclamations de ses indignes concitoyens. Pilate adressa à Tibère les actes du jugement et du supplice du prétendu Roi des Juifs ; et dès ce moment l’injure fut toute prête pour les sectateurs de Jésus. Les philosophes, les beaux esprits, les esclaves de la chair et du monde, se les montreront du doigt, en disant : « Voila ces gens étranges qui adorent un Dieu mort sur une croix ». Mais si pourtant ce Dieu mort s’est ressuscité, que devient sa mort, sinon la base inébranlable sur laquelle s’appuie l’évidence de sa divinité ? Il était mort et il s’est ressuscité ; il avait annoncé qu’il mourrait et qu’il ressusciterait ; quel autre qu’un Dieu peut tenir entre ses mains « les clefs de la mort et du tombeau » [17] ?
Or il est ainsi. Jésus mort est sorti vivant du tombeau. Comment le savons-nous ? — Par le témoignage de ses Apôtres, qui L’ont vu vivant après sa mort, auxquels il s’est donné à toucher, avec Lesquels il a conversé durant quarante jours. Mais ces Apôtres, devons-nous les en croire ? — Et qui pourrait douter du témoignage le plus sincère que le monde entendit jamais ? Car quel intérêt auraient ces hommes à publier la gloire du maître auquel ils s’étaient donnés, et qui leur avait promis qu’après sa mort il ressusciterait, s’ils savaient qu’après avoir péri dans un supplice ignominieux pour eux aussi bien que pour lui, il n’a pas rempli sa promesse ? Que les princes des Juifs, pour décrier le témoignage de ces hommes, soudoient les gardes du tombeau, afin de leur faire dire que, pendant qu’ils dormaient, ces pauvres disciples que la frayeur avait dispersés, sont venus durant la nuit enlever le corps ; on est en droit de leur répondre par cet éloquent sarcasme de saint Augustin : « Ainsi donc les témoins que vous produisez sont des témoins qui dormaient ! Mais n’est-ce pas vous-mêmes qui dormez, quand vous vous épuisez à chercher une telle défaite [18] ? » Mais où les Apôtres auraient-ils pris le motif de prêcher une résurrection qu’ils auraient su n’être pas arrivée ? « A leurs yeux, remarque saint Jean Chrysostome, leur maître ne doit plus être qu’un faux prophète et un imposteur ; et ils iront défendre sa mémoire contre une nation tout entière ! Ils se dévoueront à tous les mauvais traitements pour un homme qui les aurait trompés ! Serait-ce dans l’espérance des promesses qu’il leur avait faites ? Mais s’ils savent qu’il n’a pas rempli sa promesse de ressusciter, quel fond peuvent-ils faire sur les autres [19] ? » Non, il faut nier la nature humaine, ou reconnaître que le témoignage des Apôtres est un témoignage sincère.
Ajoutons maintenant que ce témoignage fut le plus indépendant de tous : car il ne procurait d’autres avantages aux témoins que les supplices et la mort ; qu’il révélait dans ceux qui l’émettaient une assistance divine : car il faisait voir en eux, si timides la veille, une fermeté que rien ne fit jamais faiblir, et dans des hommes du peuple une assurance humainement inexplicable, et qui les accompagna jusqu’au sein des capitales les plus civilisées, où ils firent de nombreuses conquêtes. Disons encore que les prodiges les plus frappants venaient confirmer leur témoignage, et réunir autour d’eux dans la foi de la Résurrection de leur maître des multitudes de toute langue et de toute nation ; qu’enfin, lorsqu’ils disparurent de la terre, après avoir scellé de leur sang le grand fait dont ils étaient dépositaires, ils avaient répandu dans toutes les régions du monde, et bien au-delà des frontières de l’Empire romain, la semence de leur doctrine, qui germa promptement et produisit une moisson dont la terre entière se vit bientôt couverte. Tout ceci n’engendre-t-il pas la plus ferme de toutes les certitudes sur le fait étonnant dont ces hommes étaient porteurs ? Les récuser, ne serait-ce pas récuser en même temps les lois de la raison ? O Christ ! Votre résurrection est certaine comme votre mort ; la vérité a pu seule faire parler vos Apôtres ; seule elle peut expliquer le succès de leur prédication.
Mais le témoignage des Apôtres a cessé ; et un autre témoignage non moins imposant, celui de l’Église, est venu continuer le premier, et il proclame avec non moins d’autorité que Jésus n’est plus parmi les morts. L’Église attestant la résurrection de Jésus, c’est la voix de toutes ces centaines de millions d’hommes qui, chaque année depuis dix-huit siècles, ont fêté la Pâque. En face de ces milliards de témoignages de foi, y a-t-il place pour le doute ? Qui ne se sent écrasé sous le poids de cette acclamation qui n’a pas fait défaut une seule année, depuis que la parole des Apôtres est venue l’ouvrir ? Et dans cette acclamation, il est juste de distinguer la voix de tant de milliers d’hommes doctes et profonds qui ont aimé à sonder toute vérité, et n’ont donne leur adhésion à la foi qu’après avoir tout pesé dans leur raison ; de tant de millions d’autres qui n’ont accepté le joug d’une croyance si peu favorable aux passions humaines, que parce qu’ils ont vu clairement que nulle sécurité après cette vie n’était possible en dehors des devoirs qu’elle impose ; enfin, de tant de millions d’autres qui ont soutenu et protégé la société humaine par leurs vertus, et qui ont été la gloire de notre race, uniquement parce qu’ils ont fait profession de croire au Dieu mort et ressuscité pour les hommes.
Ainsi s’enchaîne d’une façon sublime l’incessant témoignage de l’Église, c’est-à-dire de la portion la plus éclairée et la plus morale de l’humanité, à celui des premiers témoins que le Christ daigna se choisir lui-même : en sorte que ces deux témoignages n’en font qu’un seul. Les Apôtres attestèrent ce qu’ils avaient vu ; nous, nous attestons, et nous attesterons jusqu’à la dernière génération, ce que les Apôtres ont prêché. Les Apôtres s’assurèrent par eux-mêmes du fait qu’ils avaient à annoncer ; nous nous assurons de la véracité de leur parole. Après expérience, ils crurent ; et après expérience, nous aussi nous croyons. Ils ont été assez heureux pour voir, dès ce monde, le Verbe de vie, pour l’entendre, pour le toucher de leurs mains [20] ; nous, nous voyons et nous entendons l’Église qu’ils avaient établie en tous lieux, mais qui ne faisait encore que sortir du berceau, lorsqu’ils furent enlevés de la terre. L’Église est le complément du Christ, qui l’avait annoncée aux Apôtres comme devant couvrir le monde, bien que sortie du faible grain de sénevé. Sur ce sujet, saint Augustin, dans un de ses Sermons sur la Pâque, dit ces admirables paroles : « Nous ne voyons pas encore le Christ ; mais nous voyons l’Église ; croyons donc au Christ. Les Apôtres, au contraire, virent le Christ ; mais ils ne voyaient l’Église que par la foi. L’une des deux choses leur était montrée, et l’autre était l’objet de leur croyance ; il en est de même pour nous. Croyons au Christ que nous ne voyons pas encore ; et en nous tenant attachés à l’Église que nous voyons, nous arriverons à celui dont la vue ne nous est que différée [21]. »
Ayant donc, ô Christ, par une si magnifique attestation, la certitude de votre Résurrection glorieuse, comme nous avons celle de votre mort sur l’arbre de la croix, nous confessons que vous êtes le grand Dieu, l’auteur et le souverain Seigneur de toutes choses. Votre mort vous a abaissé, et votre résurrection vous a élevé ; et c’est vous-même qui avez été l’auteur de votre abaissement et de votre élévation. Vous aviez dit devant vos ennemis : « Personne ne m’ôte la vie ; c’est moi-même qui la dépose ; j’ai le pouvoir de la quitter, et j’ai aussi celui de la reprendre » [22] ; un Dieu pouvait seul réaliser cette parole : vous l’avez accomplie dans toute son étendue ; en confessant votre Résurrection, nous confessons donc votre Divinité : rendez digne de vous l’humble et heureux hommage de notre foi.
La Station, à Rome, est dans l’Église de Sainte-Marie ad Martyres. Cette Église est l’ancien Panthéon d’Agrippa, dédié autrefois à tous les faux dieux, et concédé par l’empereur Phocas au pape saint Boniface IV, qui le consacra à la Mère de Dieu et à tous les Martyrs. Nous ignorons en quel sanctuaire de Rome avait lieu auparavant la Station d’aujourd’hui. Quand elle fut fixée à cette Église, au VIIe siècle, les néophytes, réunis pour la seconde fois de cette Octave dans un temple dédié à Marie, devaient sentir combien l’Église avait à cœur de nourrir dans leurs âmes la confiance filiale en celle qui était devenue leur Mère, et qui est chargée de conduire elle-même à son Fils tous ceux qu’il appelle par sa grâce à devenir ses frères.
A LA MESSE.
L’Introït, tiré des Psaumes, rappelle aux néophytes le passage de la mer Rouge, et la puissance de ses eaux pour la délivrance d’Israël. Ces grands souvenirs continuent d’attirer l’attention de l’Église durant toute l’Octave de la Pâque.
La Pâque est la réconciliation de l’homme avec Dieu ; car le Père ne peut rien refuser à un vainqueur tel que son Fils ressuscité. L’Église demande, dans la Collecte, que nous demeurions toujours dignes d’une si belle alliance, en conservant fidèlement en nous le cachet de la régénération pascale.
ÉPÎTRE.
C’est encore l’Apôtre saint Pierre que nous entendons aujourd’hui dans l’Épître ; et ses enseignements sont d’une haute importance pour nos néophytes. L’Apôtre leur rappelle d’abord la visite que fit naguère l’âme du Rédempteur à ceux qui étaient captifs dans les régions inférieures de la terre, et parmi lesquels elle rencontra plusieurs de ceux qui autrefois avaient été victimes des eaux du déluge, et qui avaient trouvé leur salut sous ces vagues vengeresses ; parce que ces hommes, incrédules d’abord aux menaces de Noé, mais bientôt abattus par l’imminence du fléau, regrettèrent leur faute, et en implorèrent sincèrement le pardon. De là l’Apôtre élève la pensée des auditeurs vers les heureux habitants de l’Arche, qui représentent nos néophytes, auxquels nous avons vu traverser l’eau, non pour périr sous cet élément, mais pour devenir, ainsi que les fils de Noé, les pères d’une nouvelle génération d’enfants de Dieu. Le Baptême n’est donc pas, ajoute l’Apôtre, un bain vulgaire ; il est la purification des âmes, à la condition que ces âmes auront été sincères dans rengagement solennel qu’elles ont pris, sur les bords de la fontaine sacrée, d’être fidèles au Christ qui les sauve, et de renoncer à Satan et à tout ce qui est de lui. L’Apôtre termine en nous montrant le mystère de la Résurrection de Jésus-Christ comme la source de la grâce du Baptême, dont l’Église a, pour cette raison, attaché l’administration solennelle à la célébration même de la Pâque.
ÉVANGILE.
Dans ce passage de l’Évangile, saint Matthieu, celui des Évangélistes qui a raconté le plus brièvement la Résurrection du Sauveur, résume en quelques mots les relations de Jésus ressuscité avec ses disciples en Galilée. Ce fut là qu’il daigna se faire voir non seulement aux Apôtres, mais encore à beaucoup d’autres personnes. L’Évangéliste ne manque pas de remarquer qu’il y en eut plusieurs qui d’avance étaient disposés à croire, et quelques-uns qui passèrent d’abord par le doute. Il nous montre ensuite le Sauveur donnant à ses Apôtres la mission d’aller prêcher sa doctrine dans le monde entier ; et comme il ne doit plus mourir, il s’engage à demeurer avec eux jusqu’à la fin des temps. Mais les Apôtres ne vivront pas jusqu’au dernier jour du monde : comment donc s’accomplira la promesse ? C’est que les Apôtres, ainsi que nous l’avons dit tout à l’heure, se continuent dans l’Église ; le témoignage des Apôtres et celui de l’Église s’enchaînent l’un à l’autre d’une manière indissoluble ; et Jésus-Christ veille à ce que ce témoignage unique soit aussi fidèle qu’il est incessant. Nous avons aujourd’hui même sous les yeux un monument de sa force invincible. Pierre, Paul. Jean, ont prêché dans Rome la Résurrection de leur maître, et ils y ont jeté les fondements du christianisme ; et cinq siècles après, l’Église, qui n’a cessé de continuer leurs conquêtes, recevait en hommage des mains d’un empereur le temple vide et dépouillé de tous les faux dieux, et le successeur de Pierre le dédiait à Marie, Mère de Dieu, et à toute cette légion de témoins de la Résurrection que l’on appelle les Martyrs. L’enceinte de ce vaste temple réunit en ce jour l’assemblée des fidèles. A la vue de ce superbe édifice qui a vu le feu des sacrifices païens s’éteindre faute d’aliment, et qui, après trois siècles d’abandon, comme pour expier son passé impie, maintenant purifié par l’Église, reçoit dans ses murs le peuple chrétien, comment nos néophytes ne diraient-ils pas : « Il est vraiment ressuscité, le Christ qui, après être mort sur une croix, triomphe ainsi des Césars et des dieux de l’Olympe ? »
L’Offertoire est formé des paroles de l’Exode, dans lesquelles le Seigneur fait à son peuple le commandement de célébrer, chaque année, le jour anniversaire de son Passage. S’il en est ainsi pour un événement qui n’avait qu’une portée terrestre et figurative, avec quelle fidélité et quelle allégresse les chrétiens doivent-ils célébrer l’anniversaire de cet autre Passage du Seigneur, dont les conséquences embrassent l’éternité tout entière, et dont l’heureuse réalité a mis au néant toutes les figures !
La sainte Église, dans la Secrète, offre à Dieu le Sacrifice qui s’apprête, en faveur de ses nouveaux enfants ; elle demande qu’il serve au rachat de leurs péchés. Mais leurs péchés n’existent plus ? Il est vrai qu’ils ont été lavés dans la fontaine du salut ; mais la science divine prévoyait cette offrande d’aujourd’hui, et c’est en vue d’elle que la miséricorde a été octroyée, avant même que la condition eût été remplie dans le temps.
L’Antienne de la Communion proclame en triomphe le commandement du Sauveur à ses Apôtres et à son Église, d’enseigner toutes les nations, et de baptiser tous les peuples ; c’est là le titre de leur mission ; mais l’usage que les Apôtres en ont fait et que l’Église continue d’en faire, depuis dix-huit siècles, montre assez que celui qui a parlé ainsi est vivant et qu’il ne mourra plus.
L’Église, après avoir nourri ses enfants du pain de l’éternité, continue dans la Postcommunion à demander pour eux la rémission de ces fautes que l’homme commet dans le temps, et qui le perdraient pour toujours, si les mérites de la mort et de la Résurrection du Seigneur n’étaient pas sans cesse présents aux yeux de la divine justice.
Le sixième jour est arrivé, le jour qui vit la main du Fils de Dieu façonner avec l’argile le corps de l’homme, et d’un souffle de vie animer cette créature appelée à régner sur l’univers visible. Un seul commandement du Verbe divin avait suffi pour faire sortir de la terre tous les animaux qui vivent sur sa surface ; mais lorsque, vers la fin de cette grande journée, le Créateur se fut dit : « Faisons l’homme à notre image », il sembla se recueillir, et ce ne fut plus seulement le commandement qu’il employa ; il daigna se faire l’artisan de son ouvrage. Adorons cette souveraine bonté envers notre race, et, dans notre reconnaissance, célébrons le Vendredi comme le jour dans lequel le Fils de Dieu mit le complément à l’œuvre qu’il avait commencée le Dimanche, en installant dans ses honneurs le roi de la Création. Cependant ce jour a vu le Verbe divin faire plus encore pour l’homme. Il l’a vu revêtu de cette même humanité, ouvrage de ses mains, mourir attaché à une croix, pour sauver l’homme révolté et perdu par sa révolte. Jour sacré dans lequel s’unissent notre création et notre rédemption, tu nous parles de l’amour du Fils de Dieu pour nous plus éloquemment encore que de sa puissance ! Exprimons nos sentiments en ce jour, par cette touchante prière que la Liturgie mozarabe emploie le Vendredi de l’Octave de Pâques.
CAPITULA. | |
Deus, Dei Filius, qui hominem, quem sexto die formasti ex nihilo, sexta ætate sæculi redemisti sanguine tuo : et qui tunc bene conditus male cecidit ; nunc in melius reformatus surrexit : da nobis, ut ita veraciter redemptionis nostræ mysterium perpendamus, qualiter in morte et resurrectione tua perenniter gloriemur : ut qui tempore salutis, mundo occurrens, mortem nostram moriendo devicisti, ab æterna nos liberes damnatione judicii. | O Dieu, Fils de Dieu, qui avez racheté par votre sang, au sixième âge du monde, l’homme que vous aviez tiré du néant le sixième jour ; qui, créé dans le bien, se précipita dans le mal ; et qui a été en ces jours régénéré dans le mieux : faites que nous soyons si sincèrement pénétrés du mystère de notre rédemption, que nous méritions de nous glorifier toujours dans votre mort et dans votre résurrection. Daignez enfin, vous qui, au jour marqué pour le salut, êtes venu au secours de ce monde, et avez vaincu notre mort en mourant vous-même, nous délivrer de l’éternelle damnation du jugement. |
Écoutons aujourd’hui les accents de l’Église arménienne célébrant la Résurrection du Sauveur. Sa voix retentit à travers treize siècles, dans ces strophes qu’une main fraternelle a bien voulu extraire et traduire, pour l’embellissement de notre œuvre, du livre des Hymnes de cette antique Église qui est désigné sous le nom de Charagan. Le sentiment est le même que celui qui s’exprime dans les autres Liturgies ; mais on y trouve le cachet du génie arménien, avec Le parfum de l’antiquité, et un lyrisme mâle et imposant qui surpasse en beauté celui de l’Église grecque.
IN RESURRECTIONE DOMINI.
Aujourd’hui est ressuscité d’entre les morts l’Époux immortel et céleste : à toi la nouvelle joyeuse, ô Épouse, Église de la terre ! Bénis ton Dieu, ô Sion, avec une voix d’allégresse.
Aujourd’hui l’ineffable Lumière de lumière a illuminé tes enfants, illumine-toi, Jérusalem ; car le Christ, ta lumière, est ressuscité.
Aujourd’hui les ténèbres de l’ignorance ont été dissipées par la triple lumière ; et la lumière de la science s’est levée, le Christ ressuscitant d’entre les morts.
Aujourd’hui est notre Pâque, par l’immolation du Christ ; nous tous, renouvelés du vieil homme et du péché, faisons fête avec transport ; disons : Le Christ est ressuscité d’entre les morts.
Aujourd’hui l’Ange descendu du ciel et tout éclatant de splendeur a effrayé les gardes : il a parlé aux saintes femmes, et leur a dit : Le Christ est ressuscité d’entre les morts.
Aujourd’hui la grande nouvelle a été apportée à Adam le premier créé : Toi qui dors, lève-toi ; le Christ, Dieu de nos pères, vient t’éclairer.
Aujourd’hui la voix de ses filles qui portent des parfums retentit aux oreilles d’Ève : Nous avons vu ressuscité celui qui est ta résurrection, le Christ Dieu de nos pères.
Aujourd’hui les Anges descendant du ciel disent aux hommes : Le crucifié est ressuscité, et il vous fait ressusciter avec lui.
Aujourd’hui, par ta sainte résurrection, ô Christ, tu as changé la Phase des misères d’Israël dans la Pâque qui sauve les âmes.
Aujourd’hui, en place du sang des agneaux sans raison, tu nous as donné, ô Agneau de Dieu, ton sang qui opère le salut.
Aujourd’hui, à la place du rachat des premiers-nés, tu as substitue le rachat des captifs, toi qui es le premier-né d’entre les morts, les prémices de la vie à ceux qui dormaient.
Aujourd’hui les Anges dans les cieux partagent la joie des hommes ; ils descendent des régions célestes, et viennent dire à ce monde : Triomphez maintenant ; le Christ est ressuscité d’entre les morts.
Aujourd’hui l’Ange qui veille assis sur la pierre, faisait entendre sa voix éclatante aux saintes femmes qui portaient leurs parfums ; il leur ordonnait d’aller dire aux disciples : Triomphez maintenant ; le Christ est ressuscité d’entre les morts.
Aujourd’hui celui qui est la Pierre de la foi et Jean le bien-aimé couraient ensemble au sépulcre du ressuscité ; et racontant ce qu’ils ont vu, ils disent : Le Christ est ressuscité d’entre les morts.
Aujourd’hui, nous aussi, dans notre allégresse, illuminons-nous des splendeurs d’une telle fête ; Dieu est apaisé ; donnons-nous le baiser avec amour, et crions ensemble : Le Christ est ressuscité d’entre les morts.
Nous terminons cette journée par une Séquence tirée du répertoire d’Adam de Saint-Victor, dont nous n’avons pas encore épuisé toutes les richesses. Plusieurs des traits que renferme cette pièce la désignaient à notre choix pour le Vendredi de l’Octave.
SÉQUENCE. | |
Sexta passus feria,
Die Christus tertia Resurrexit ; Surgens cum victoria, Collocat in gloria Quos dilexit. | Au sixième jour
le Christ avait souffert ; au troisième jour il ressuscite. Victorieux, il se lève ; et il associe à sa gloire ceux qu’il aime. |
Pro fideli populo,
Crucis in patibulo Immolatur ; Clauditur in tumulo, Tandem in diluculo Suscitatur. | Pour son peuple fidèle,
il s’immole sur le gibet de la croix ; on l’enferme dans le tombeau, et il ressuscite au point du jour. |
Christi crux et passio
Nobis est præsidio, Si credamus ; Christi resurrectio Facit ut a vitio Resurgamus. | La croix du Christ et sa passion,
c’est là notre sauvegarde, si nous sommes fermes dans la foi ; la résurrection du Christ nous donne de sortir du péché. |
Hostia sufficiens
Christus fuit moriens Pro peccato ; Sanguinis effusio Abluit nos, impio Triumphato. | Mourant pour nos crimes,
le Christ fut notre hostie de réparation ; son sang versé est pour nous le bain qui purifie ; sa force terrasse notre ennemi. |
Morte sua simplici,
Nostræ morti duplici Fert medelam ; Vitæ pandit aditum, Nostrum sanat gemitum Et querelam. | Il est mort une fois ;
c’en est assez pour nous arracher à notre double mort ; il nous fraie le sentier de la vie, apaisant pour toujours nos gémissements et nos lamentations. |
Leo fortis hodie
Dat signum potentiæ, Resurgendo, Principem nequitiæ, Per arma justitiæ, Devincendo. | Ce fort Lion montre aujourd’hui
sa puissance en sortant du tombeau, en renversant par les armes de la justice le prince d’iniquité. |
Diem istam Dominus
Fecit, in qua facinus Mundi lavit, In qua mors occiditur, In qua vita redditur, Hostis ruit. | C’est le Seigneur lui-même
qui a fait ce jour, dans lequel il lave notre crime, dans lequel la mort succombe, la vie est restituée et l’ennemi abattu. |
Geminatum igitur
Alleluia canitur, Corde puro ; Quia culpa tollitur Et vita promittitur In futuro. | Chantons d’un cœur pur
un double Alléluia ; car en ce jour le péché est effacé, et la vie nous est promise dans le siècle futur. |
In hoc mundi vespere,
Fac tuos resurgere, Jesu Christe ; Salutaris omnibus Sit tuis fidelibus Dies iste. Amen. | Quand le soir du monde sera venu,
daignez, ô Christ, ressusciter vos fidèles ; en attendant, rendez-leur salutaire ce jour consacré à vos grandeurs. Amen. |
De même que, hier, la station était indiquée simplement ad Apostolos, ainsi aujourd’hui elle était ad Martyres, avec cette intention d’être comme un tribut spécial de vénération de l’Église romaine envers ses héroïques enfants, lesquels, au dire de l’Apôtre, n’avaient pas épargné leur vie ut meliorem invenirent resurrectionem. Les martyrs, en effet, semblent avoir un droit spécial à la gloire de la résurrection, à cause de leur parfaite ressemblance avec Jésus crucifié et beaucoup d’anciennes liturgies avaient même institué une fête particulière en leur honneur, précisément au milieu de la solennité pascale. La station de ce jour ad Martyres conserve donc comme le dernier souvenir de cette primitive tradition liturgique, puisque, par la suite, la fête collective des Martyrs, même à Rome, fut transférée à la mi-mai, et enfin au Ier novembre.
L’antienne d’introït provient du psaume 77, et se rapporte à la Pâque des néophytes, lesquels à l’égal des anciens Israélites ont échappé à la servitude d’Égypte à travers la mer Rouge, symbole du baptême. L’ennemi submergé sous ces eaux est Satan, le péché.
Le Nouveau Testament a été scellé par le Sacrifice Pascal, qui, renouvelé quotidiennement sur nos autels, donne au contenu spirituel de la Pâque un caractère de pérennité. Il est donc nécessaire que les œuvres s’accordent avec la foi.
La collecte exprime bien la même pensée : « O Dieu éternel et tout-puissant, qui avez scellé le pacte de votre réconciliation avec le monde au moyen du Sacrement Pascal ; accordez à nos âmes d’accomplir par nos œuvres ce que nous professons maintenant par la solennité des rites. Par notre Seigneur, etc. »
Tel est précisément le but que se propose l’Église dans la sainte liturgie : enseigner les fidèles, et leur obtenir par sa puissante intercession, la grâce de réaliser dans leurs œuvres cette sainteté sublime exprimée par les rites.
La première lecture est prise de l’Épître de saint Pierre (I, III, 18-22). Il y traite de la mort de Jésus et de sa descente aux Limbes, alors que le Divin Sauveur parut en cette prison close, pour porter aux Patriarches l’annonce de la Rédemption accomplie. Parmi ces morts, il y avait aussi ceux qui n’avaient pas cru aux menaces de Noé alors qu’il avait prédit que seule son arche serait épargnée par le tourbillon des eaux. Maintenant le type prophétique va obtenir son entière réalisation, puisque l’arche flottante symbolise l’Église, qui s’élève sur les ondes purificatrices du baptême.
Le dogme énoncé dans l’article du symbole : descendit ad inferos, est clairement enseigné ici par l’apôtre Pierre, dont les paroles ne doivent toutefois pas être prises en ce sens que le Sauveur aurait prêché en enfer pour y convertir ceux qui s’étaient déjà damnés pour leur péché d’infidélité. Non ; l’état des âmes est immuable après la mort ; la descente de Jésus parmi les défunts eut pour tout but d’annoncer aux bons et aux méchants la rédemption accomplie. Aux bons, pour leur suprême consolation, aux impies, au contraire, comme un argument définitif de leur condamnation. L’art chrétien antique se plaisait à représenter cette descente du Christ aux Limbes, où il apparaissait, tel un triomphateur venant prendre possession d’une forteresse qui lui fut si longtemps contestée, mais qu’il a enfin enlevée de vive force.
La liturgie exprime la même pensée le samedi saint aux Matines : « Ille captus est qui captivum tenebat primum hominem ; hodie portas mortis et seras pariter Salvator noster disrupit. Destruxit quidem claustra inferni et subvertit potentias diaboli. [23] »
Le répons-graduel, comme à l’ordinaire, provient du psaume 117. Suit le verset alléluiatique du psaume 95 avec l’adjonction des mots a ligno qui nous est attestée par beaucoup d’anciens Pères : « Annoncez parmi les Gentils que le Seigneur a inauguré son règne sur un gibet. » C’est le trône où Jésus montre sa puissance. Il broie la mort par sa propre mort, et il donne à l’Église la grâce de triompher de ses ennemis en succombant à leur haine sanguinaire. Semen Christianorum est sanguis Martyrum [24] ; bien plus, la croix est devenue l’étendard et le glorieux blason de presque toutes les nations civilisées de l’Europe au moyen âge.
La brève lecture évangélique qui suit contient en abrégé toute l’histoire de l’Église, la somme de ses droits, sa mission dans le monde. Euntes docete : c’est l’affirmation de sa libre puissance d’enseigner partout la loi évangélique, indépendamment du pouvoir civil ; baptizantes : c’est l’autorité de paître les fidèles avec les divins Sacrements, dont le baptême est comme la porte ; docentes servare omnia quæcumque mandavi : c’est la puissance législative et judiciaire de l’Église, sans laquelle il n’y a pas d’autorité véritable ; ego vobiscum sum usque ad consummationem sæculi : c’est l’assurance de l’indéfectible assistance de la vertu divine jusqu’à la fin des siècles. (Matth., XXVIII, 16-20.)
L’antienne ad offerendum s’inspire de l’Exode (XII, 14) et fait allusion au baptême, où les néophytes, sortis de l’Égypte du péché et de l’idolâtrie, ont fait un nouveau pacte avec Dieu. La solennité pascale devra, durant toute leur vie, leur rappeler l’engagement sacré pris en ce jour. De plus, dans l’antiquité, grâce à la solennité dite Pascha annotinum décrite dans le Sacramentaire Gélasien, les néophytes, au premier anniversaire de leur baptême, célébraient une fête spéciale commémorative de la Pâque précédente.
La prière secrète sur l’oblation s’exprime ainsi : « Nous vous prions, Seigneur, d’accepter favorablement les offrandes que nous vous présentons, tant pour expier les fautes des nouveaux régénérés à la grâce, que pour hâter votre céleste secours. Par notre Seigneur, etc. » Pour bien saisir le sens de cette prière, il faut se rappeler que le sacrifice de la Croix, et par conséquent celui, non sanglant, de l’autel, expient les péchés du monde et donnent l’efficacité sanctificatrice aux sacrements. Aujourd’hui l’Église, dans la secrète, se reporte au moment précédant le baptême des néophytes in remissionem peccatorum, et à leurs pénitences, à leur contrition des fautes commises — dans l’antiquité il s’agissait d’adultes — elle unit l’offrande du sacrifice eucharistique.
Dans l’antienne pour la Communion, empruntée à l’Évangile du jour, le Christ donne à l’Église la mission de continuer à travers les siècles son œuvre rédemptrice, grâce à la doctrine céleste et aux Sacrements dont elle est dépositaire et trésorière. Le Christ a obtenu la somme des pouvoirs au ciel et sur la terre. Dans le ciel, il l’exerce directement ; sur la terre, il la confie à l’Église, qui est ainsi sa vivante image, nous pourrions dire avec saint Paul, le plérome, l’intégrité ou la plénitude du Christ.
Après la Communion, la collecte concerne encore spécialement les néophytes, initiés à une vie nouvelle de sainteté : « Regardez, Seigneur, votre peuple, et puisque vous avez daigné l’initier à une vie éternelle moyennant les célestes Mystères, qu’il vous plaise aussi de l’absoudre des fautes commises durant cette vie temporelle. Par notre Seigneur, etc. »
Pendant cette semaine, l’Église fait remarquer avec insistance l’importance de notre initiation baptismale. Durant l’octave pascale, chaque après-midi, elle ramène au baptistère les néophytes vêtus de blanc. Dans l’offertoire de ce jour, elle souhaite que la date du baptême soit un jour mémorable et de grande fête pour toute la vie. De fait, elle institua le Pascha annotinum en mémoire du baptême reçu à la fête de Pâques de l’année précédente.
De nos jours, on ne mettra jamais trop d’insistance à faire remarquer aux fidèles la sainteté dont le Sacrement de la régénération baptismale a été pour eux le principe. Le gage de cette sainteté nous est donné par les promesses du Baptême, en vertu desquelles nous nous sommes obligés à renoncer pour toujours à Satan et à ses œuvres, et à aspirer à être parfaits, comme est parfait notre Père céleste. Une bonté purement négative ne suffit pas ; nous ne devons pas nous contenter d’être simplement bons, nous devons aspirer à devenir parfaits, comme le Divin Modèle. C’est aux chrétiens qu’il est dit particulièrement par le Seigneur : « Soyez saints parce que Je suis saint. »
Et comme les fils participent à la même nature que leur Père, ainsi nous, qui sommes fils de Dieu, nous devons souverainement prendre garde à ce que l’image divine en nous soit de plus en plus parfaite et conforme à l’ineffable beauté de notre Père céleste.
Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la consommation des siècles.
Aujourd’hui, nous participons à la revue que Jésus fit de son armée sur la montagne, en Galilée. Les néophytes se rendent auprès de la Reine des martyrs et, huit jours après le Vendredi Saint, ils voient la Croix dans la gloire pascale.
1. L’Office des Heures. — Nous méditons le bel Évangile et surtout les paroles puissantes que le Christ nous adresse à nous aussi : « Toute puissance m’a été donnée au ciel et sur la terre... » Aux matines, saint Jérôme nous explique ces paroles : « Toute puissance lui a été donnée, à lui qui naguère a été crucifié, qui a reposé mort dans le tombeau, qui, ensuite, est ressuscité. Au ciel et sur la terre, toute puissance lui a été donnée. Lui, qui auparavant régnait au ciel, règne maintenant sur la terre aussi, par la foi, dans le cœur de ceux qu’il a rachetés. C’est pourquoi allez et enseignez tous les peuples, baptisez-les au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. D’abord, les Apôtres enseignent les peuples ; puis, ils les baptisent dans les flots de l’eau. Car il n’est pas possible que le corps reçoive le sacrement du baptême avant que l’âme n’ait accueilli la vérité de la foi. Ils sont baptisés au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit afin que, de même qu’on enseigne ici une seule divinité, il ne soit conféré qu’une seule et même grâce ; car l’expression Trinité désigne l’unique divinité. « Enseignez-leur à garder ce que je vous ai commandé ». C’est une ordonnance tout à fait grave. Il ordonne d’abord aux Apôtres d’enseigner tous les peuples, ensuite de laver ceux qui ont cru dans le sacrement de la foi et, après la foi et le baptême, de leur prescrire ce qu’ils doivent observer. Pour que nous ne nous imaginions pas que ce qui est prescrit est léger et de peu d’importance, le Sauveur ajoute : « tout ce que je vous ai commandé », ce qui veut dire que quiconque croit et est baptisé au nom de la Trinité doit aussi observer les commandements. « Et voici que je suis avec vous, tous les jours, jusqu’à la consommation des siècles ». Comme le Christ promet à ses disciples d’être avec eux jusqu’à la consommation des siècles, il indique à la fois que les siens seront toujours vainqueurs et que lui-même n’abandonnera jamais ses fidèles ».
Toute la journée d’aujourd’hui appartient à l’apparition du Ressuscité sur la montagne. Nous y assistons. Les deux antiennes directrices, à chaque limite du jour, encadrent nos méditations : « Les onze disciples virent le Seigneur en Galilée et l’adorèrent, Alléluia » (Ant. Bened.). « Toute puissance m’a été donnée au ciel et sur la terre, Alléluia » (Ant. Magn.).
2. La messe (Eduxit). — Dans le choix des stations pour les messes pascales, la liturgie montre une grande délicatesse. Aujourd’hui, l’office se fait à Sainte-Marie des Martyrs (cette église est le berceau de la fête de tous les saints ; l’Orient la célébrait aujourd’hui). C’est aujourd’hui vendredi et, involontairement, notre pensée se reporte au Vendredi Saint, au vendredi des douleurs. Il y a quinze jours, l’Église chantait le « Stabat mater » ; il y a huit jours, elle chantait : « Je suis un ver et non un homme ». Aujourd’hui, elle jette encore une fois un regard en arrière, vers le crucifié et la Mère des Douleurs, mais cette fois elle les voit dans la gloire pascale de la Résurrection. Nous nous rappelons les Sept douleurs de Marie que nous avons célébrées il y a quinze jours. Marie est dans la gloire pascale, portant la palme du martyre, entourée de la « blanche armée des martyrs ». Entre ces deux dates, se trouve le grand vendredi. Or, quelle leçon reçoivent les néophytes, vêtus de, blanc, quand ils se rendent auprès de la Reine des martyrs et de la blanche phalange des témoins du Christ ? La vie chrétienne est une vie de combat, une vie de souffrance. Ils doivent être prêts à porter la palme du martyre. Même après Pâques, il y aura bien des combats. Il. y a encore une autre leçon. En ce vendredi, la Croix sanglante est devenue la « Crux gemmata », la Croix gemmée, glorifiée. Apprenons à regarder les croix de la vie à la lumière du soleil de Pâques. Groupons-nous autour de l’ »armée brillante des martyrs », qui est conduite par Marie.
Si nous examinons les prières de la messe, nous y remarquons un va-et-vient entre ces deux pôles : Résurrection-Baptême, d’une part, et Croix-péché, d’autre part.
a) Le péché On se demande ce que vient faire le péché dans ce temps céleste. C’est une nouveauté. Jusqu’ici, pendant la semaine de Pâques, nous n’avons pas entendu le mot péché. Aujourd’hui, les trois oraisons en parlent. N’oublions pas que nous sommes des pécheurs : ce n’est que par un dur combat contre le péché que nous pouvons être des vainqueurs de Pâques. Même après Pâques, le Saint-Sacrifice est un sacrifice d’expiation pour le péché.
b) La Croix. Nous ne pouvons pas en vouloir à l’Église de nous mettre aujourd’hui la Croix devant les yeux. Dans l’Épître, saint Pierre décrit la Croix sous les couleurs les plus vives : « Le Christ est mort une fois pour nos péchés... pour nous offrir à Dieu... Selon la chair, il a été mis à mort ». Comme ces paroles font revivre le souvenir du Vendredi Saint ! A l’Alléluia, l’Église chante : « Dites aux nations : Dieu règne par la Croix ». Au Canon, nous dresserons la Croix et nous songerons particulièrement à la « beata Passio », à la Passion bienheureuse. Quelle pensée émouvante : la Croix dans la gloire pascale !
c) Le second pôle est constitué par ces deux paroles, Résurrection et Baptême. L’Église s’adresse encore, aujourd’hui, d’une manière particulière, aux néophytes vêtus de leur blanche robe baptismale. Dès l’Introït, elle nous présente l’image de la sortie de l’Égypte. Nous sommes sortis de la servitude de l’Égypte en traversant la mer de grâce du baptême. L’ennemi est vaincu. Il est vrai que commence maintenant la traversée du désert avant l’entrée dans la terre promise. Le baptême est aussi la délivrance des flots du déluge dans l’arche de l’Église (Épître). Le baptême est le rayonnement de la gloire pascale du Christ dans notre âme (Grad.). L’Évangile nous dit : Nous sommes baptisés au nom de la Sainte Trinité ; nous lui appartenons. Si nous pouvions comprendre ce que cela signifie : être baptisés au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit ! Nous sommes comme enveloppés par la Sainte Trinité. Le jour de notre baptême doit être notre plus grande fête (Off.). Comme l’Église nous parle aujourd’hui de notre baptême ! Comprenons de mieux en mieux notre noblesse chrétienne.
d) La Résurrection du Christ. L’Évangile est court, mais riche de contenu. Le Christ apparaît aux onze sur la montagne en Galilée. Il passe la revue de ses fidèles. Et quelles puissantes paroles : « Toute puissance m’a été donnée !... » Puis, c’est l’ordre de baptiser, l’ordre de mission et la dernière parole : « Je suis avec vous, tous les jours jusqu’à la consommation des siècles ». Cette parole retentit à travers tous les temps. Le Christ est avec nous dans l’Église. Aujourd’hui, au Saint-Sacrifice, il se tient encore devant nous sur la sainte montagne, il nous adresse les paroles qu’il adressait jadis aux Apôtres. Ta puissance, ô Maître, tu l’as transmise à ton Église ; tu nous as envoyé des apôtres, pour nous instruire et nous baptiser, et tu veux rester près de nous tous les jours... Que de grandes pensées l’Église nous propose aujourd’hui !
[1] Ex. 3, 14.
[2] Ps. 1, 2.
[3] La première partie de cette Antienne se rapporte à la nature divine de Notre-Seigneur, la seconde à sa nature humaine. Le 1er Psaume nous rappelle que le Christ, l’Homme nouveau a suivi fidèlement la loi du Seigneur, transgressée par le premier homme et que le Seigneur l’a comblé de gloire en ce jour de la Résurrection. Le 2e Psaume nous montre le complot de la Synagogue contre Jésus : les Juifs ont pu immoler le Messie qui devait les sauver ; ils n’ont pu l’enchaîner dans le sépulcre. Le 3e Psaume est une prophétie de la Résurrection du Christ : il s’est endormi dans le tombeau, mais le Seigneur l’a réveillé, et il sera toujours vainqueur de ceux qui s’élèveront contre lui.
[4] Ps. 2, 8.
[5] Ps. 3, 6.
[6] Jn. 20, 19.
[7] I Cor. 5, 7.
[8] Rom. 4, 25.
[9] Toutes les antiennes sont de Matth. 28, 2-5
[10] « Le jour de la résurrection du Seigneur est appelé le jour que le Seigneur a fait, soit parce que le Christ ressuscitant l’a éclairé comme soleil de justice, soit parce que Dieu se l’est consacré d’une manière particulière » (St Bellarmin), soit encore parce que le triomphe du Seigneur a marqué le début de l’ère chrétienne qui peut bien s’appeler le jour du salut.
[11] Matth. 28, 16.
[12] Matth. 28, 18.
[13] Isai. LIII. 3.
[14] Rom. VIII, 32.
[15] Thren. III, 30.
[16] I Cor. XV. 17.
[17] Apoc. I, 17.
[18] Enarrat. In Psalm. LXIII.
[19] In Matth. Homil. LXXXIX.
[20] I Johan. I.
[21] Sermo CCXXXVII. In diebus Paschalibus, X.
[22] Johan. X. 18.
[23] « Celui qui tenait en captivité le premier homme a été fait captif lui-même ; aujourd’hui notre Sauveur a brisé les portes et les verrous de la mort. Il a détruit les prisons de l’enfer, et il a renversé la puissance du diable. », 4ème répons Matines du Samedi Saint.
[24] Le sang des Martyrs est la semence des Chrétiens.