Textes de la Messe |
Office |
Dom Guéranger, l’Année Liturgique |
Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum |
Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique |
Au sortir de la fontaine, les néophytes avaient reçu un vêtement blanc, symbole des effets du baptême dans leur âme : ‘Vous tous qui avez été baptisés, vous vous êtes revêtus de Jésus-Christ’ (Com.). Ils le conservaient jusqu’à ce jour qui porte le nom de « Samedi où l’on dépose les vêtements blancs », parce que, réunis à S. Jean de Latran, on leur retirait alors leur robe baptismale. L’Église en voyant rassemblés autour d’elle « ces enfants nouveau-nés » (Ép.) leur demande par la bouche de S. Pierre, son chef, de boire toujours le lait spirituel et pur de la vraie doctrine. Et dans cette basilique, dédiée au S. Sauveur, elle leur rappelle que leurs âmes sont les pierres vivantes d’un édifice spirituel dont le Christ est la pierre d’angle. L’Évangile montre aussi le Prince des Apôtres qui, avant S. Jean, constate la Résurrection de Jésus, dont il doit être le témoin pour toute l’Église.
Ant. ad Introitum. Ps. 104, 43. | Introït |
Eduxit Dóminus pópulum suum in exsultatióne, allelúia : et eléctos suos in lætítia, allelúia, allelúia. | Le Seigneur fit sortir son peuple avec allégresse, alléluia ; et ses élus avec des transports de joie, alléluia, alléluia. |
Ps. ibid., 1. | |
Confitémini Dómino et invocáte nomen eius : annuntiáte inter gentes ópera eius. | Célébrez le Seigneur et invoquez son nom ; annoncez ses œuvres parmi les nations. |
V/.Glória Patri. | |
Oratio. | Collecte |
Concéde, quǽsumus, omnípotens Deus : ut, qui festa paschália venerándo égimus, per hæc contíngere ad gaudia ætérna mereámur. Per Dóminum. | Nous vous en prions, Dieu tout-puissant, accordez-nous qu’après avoir célébré religieusement les Fêtes pascales, nous méritions d’arriver, grâce à elles, aux joies de l’éternité. |
Léctio Epístolæ beáti Petri Apóstoli. | Lecture de l’Epître du B. Ap. Pierre. |
1. Petri 2, 1-10. | |
Caríssimi : Deponéntes ígitur omnem malítiam, et omnem dolum, et simulatiónes, et invídias, et omnes detractiónes, sicut modo géniti infántes, rationábile, sine dolo lac concupíscite : ut in eo crescátis in salútem : si tamen gustástis, quóniam dulcis est Dóminus. Ad quem accedéntes lápidem vivum, ab homínibus quidem reprobátum, a Deo autem eléctum et honorificátum : et ipsi tamquam lápides vivi superædificámini, domus spirituális, sacerdótium sanctum, offérre spirituáles hóstias, acceptábiles Deo per Iesum Christum. Propter quod cóntinet Scriptúra : Ecce, pono in Sion lápidem summum angulárem, eléctum, pretiósum : et qui credíderit in eum, non confundátur. Vobis igitur honor credéntibus : non credéntibus autem lapis, quem reprobavérunt ædificántes, hic factus est in caput ánguli, et lapis offensiónis, et petra scándali his, qui offéndunt verbo, nec credunt in quo et pósiti sunt. Vos autem genus eléctum, regale sacerdótium, gens sancta, pópulus acquisitiónis : ut virtútes annuntiétis eius, qui de ténebris vos vocavit in admirábile lumen suum. Qui aliquándo non pópulus, nunc autem pópulus Dei : qui non consecúti misericórdiam, nunc autem misericórdiam consecúti. | Mes bien-aimés, ayant donc dépouillé toute malice, toute ruse, dissimulation et envie, et toute médisance, comme des enfants nouveau-nés, désirez ardemment le lait spirituel et pur, afin que par lui vous croissiez pour le salut, si toutefois vous avez goûté que le Seigneur est doux. Approchez-vous de lui, pierre vivante, rejetée par les hommes, mais choisie et mise en honneur par Dieu ; et vous-mêmes, comme des pierres vivantes, soyez posés sur lui pour former une maison spirituelle, et un sacerdoce saint qui offre des sacrifices spirituels, agréables à Dieu par Jésus-Christ. C’est pourquoi il est dit dans l’Écriture : Voici, je mets dans Sion la pierre angulaire choisie, précieuse ; et celui qui aura confiance en elle ne sera pas confondu. Ainsi donc, à vous qui croyez, l’honneur ; mais, pour les incrédules, la pierre qu’ont rejetée ceux qui bâtissaient, est devenue la tête de l’angle, et une pierre d’achoppement, et une pierre de scandale pour ceux qui se heurtent contre la parole et qui ne croient pas ; ce à quoi ils ont été destinés. Mais vous, vous êtes ta race choisie, le sacerdoce royal, la nation sainte, un peuple acquis, afin que vous annonciez les vertus de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière : vous qui autrefois n’étiez pas un peuple, mais qui maintenant êtes le peuple de Dieu ; vous qui n’aviez pas reçu miséricorde, mais qui maintenant avez reçu miséricorde. |
¶Ab hac die usque ad Sabbatum Quatuor Temporum Pentecostes inclusive, in omnibus Missis, non dicitur Graduale, sed quatuor Allelúia cum duobus Versibus, ordine infrascripto ; in Missa tamen Rogationum, in Vigilia Pentecostes et post quamlibet Lectionem in Sabbato Quatuor Temporum eiusdem, unum Allelúia dicitur cum unico Versu. | ¶De ce jour jusqu’au Samedi des Quatre Temps de Pentecôte inclus, à toutes les messes, on ne dit plus le Graduel, mais quatre Allelúia avec deux versets, dans l’ordre exposé ci-dessous ; Cependant, à la messe des Rogations, à la Vigile de la Pentecôte et après les leçons du Samedi des Quatre Temps de Pentecôten un seul Allelúia est dit avec un seul verset. |
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 117, 24.Hæc dies, quam fecit Dóminus : exsultémus et lætémur in ea. | Allelúia, allelúia. V/. Voici le jour que le Seigneur a fait ; passons-le dans l’allégresse et dans la joie. |
Allelúia. V/. Ps. 112. 1.Laudáte, pueri, Dóminum, laudáte nomen Dómini. | Allelúia. V/. Louez le Seigneur, vous ses serviteurs ; louez le nom du Seigneur. |
Sequentia. | Séquence. |
Víctimæ pascháli laudes ímmolent Christiáni. | A la victime pascale, que les Chrétiens immolent des louanges. |
Agnus rédemit oves : Christus ínnocens Patri reconciliávit peccatóres. | L’Agneau a racheté les brebis : le Christ innocent a réconcilié les pécheurs avec son Père. |
Mors et vita duéllo conflixére mirándo : dux vitæ mórtuus regnat vivus. | La vie et la mort se sont affronté en un duel prodigieux : l’Auteur de la vie était mort, il règne vivant. |
Dic nobis, María, quid vidísti in via ? | Dis-nous, Marie, qu’as-tu vu en chemin ? |
Sepúlcrum Christi vivéntis et glóriam vidi resurgéntis. | J’ai vu le tombeau du Christ vivant, et la gloire du ressuscité. |
Angélicos testes, sudárium et vestes. | J’ai vu les témoins angéliques, le suaire et les linceuls. |
Surréxit Christus, spes mea : præcédet vos in Galilǽam. | Il est ressuscité, le Christ, mon espérance : il vous précèdera en Galilée. |
Scimus Christum surrexísse a mórtuis vere : tu nobis, victor Rex, miserére. Amen. Allelúia. | Nous le savons : le Christ est ressuscité des morts : ô Vous, Roi vainqueur, ayez pitié de nous. Amen. Alléluia. |
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Joánnem. | Lecture du Saint Evangile selon saint Jean. |
Ioann. 20, 1-9. | |
In illo témpore : Una sábbati, Maria Magdaléne venit mane, cum adhuc ténebræ essent, ad monuméntum : et vidit lápidem sublátum a monuménto. Cucúrrit ergo, et venit ad Simónem Petrum, et ad álium discípulum, quem amábat Iesus, et dicit illis : Tulérunt Dóminum de monuménto, et nescímus, ubi posuérunt eum. Exiit ergo Petrus et ille álius discípulus, et venérunt ad monuméntum. Currébant autem duo simul, et ille álius discípulus præcucúrrit cítius Petro, et venit primus ad monuméntum. Et cum se inclinásset, vidit pósita linteámina, non tamen introívit. Venit ergo Simon Petrus sequens eum, et introívit in monuméntum, et vidit linteámina pósita, et sudárium, quod fúerat super caput eius, non cum linteamínibus pósitum, sed separátim involútum in unum locum. Tunc ergo introívit et ille discípulus, qui vénerat primus ad monuméntum : et vidit et crédidit : nondum enim sciébant Scriptúram, quia oportébat eum a mórtuis resúrgere. | En ce temps-là : le premier jour de la semaine, Marie-Madeleine vint au sépulcre dès le matin, comme les ténèbres régnaient encore ; et elle vit que la pierre avait été ôtée du sépulcre. Elle courut donc, et vint auprès de Simon-Pierre, et de l’autre disciple que Jésus aimait. Et elle leur dit : Ils ont enlevé le Seigneur du sépulcre, et nous ne savons où ils t’ont mis. Pierre sortit donc avec cet autre disciple, et ils allèrent au sépulcre. Ils couraient tous deux ensemble ; mais cet autre disciple courut plus vite que Pierre, et arriva le premier au sépulcre. Et s’étant baissé, il vit les linceuls posés à terre ; cependant, il n’entra pas. Simon-Pierre qui le suivait, vint aussi et entra dans le sépulcre ; et il vît les linceuls posés à terre, et le suaire, qu’on avait mis sur sa tête, non pas posé avec les linceuls, mais roulé à part, dans un autre endroit. Alors l’autre disciple, qui était arrivé le premier au sépulcre, entra aussi ; et il vit, et il crut. Car ils ne savaient pas encore, d’après l’Écriture, qu’il fallait qu’il ressuscitât d’entre les morts. |
Credo | |
Ant. ad Offertorium. Ps. 117, 26-27. | Offertoire |
Benedíctus, qui venit in nómine Dómini : benedíximus vobis de domo Dómini : Deus Dóminus, et illúxit nobis, allelúia, allelúia. | Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur. Nous vous bénissons de la maison du Seigneur. Le Seigneur est Dieu, et il a fait briller sur nous sa lumière, alléluia, alléluia. |
Secreta. | Secrète |
Concéde, quǽsumus, Dómine, semper nos per hæc mystéria paschália gratulári : ut contínua nostræ reparatiónis operátio perpétuæ nobis fiat causa lætítiæ. Per Dóminum. | Accordez-nous, nous vous en supplions, Seigneur, d’être toujours comblés de biens par ces mystères de Pâques, afin que l’œuvre continuelle de notre réparation soit pour nous le sujet d’une joie sans fin. |
Præfatio, Communicántes et Hanc ígitur, ut in die Paschæ.. | Préface, Communicantes et Hanc igitur du jour de Pâques |
Ant. ad Communionem. Gal. 3, 27. | Communion |
Omnes, qui in Christo baptizáti estis, Christum induístis, allelúia. | Vous tous qui avez été baptisés dans le Christ, vous avez revêtu 1e Christ, alléluia. |
Postcommunio. | Postcommunion |
Redemptiónis nostræ múnere vegetáti, quǽsumus, Dómine : ut, hoc perpétuæ salútis auxílio, fides semper vera profíciat. Per Dóminum. | Animés d’une vie nouvelle, grâce au bienfait de notre rédemption, nous vous demandons instamment, Seigneur, qu’en raison des moyens de salut qui nous sont perpétuellement offerts, la vraie foi se développe toujours davantage. |
¶ Post Dóminus vobíscum dicitur : Ite, Missa est, allelúia, allelúia. | ¶ Après Dóminus vobíscum on dit : Ite, Missa est, allelúia, allelúia. |
R/. Deo grátias, allelúia, allelúia. | R/. Deo grátias, allelúia, allelúia. |
A MATINES
Invitatorium | Invitatoire |
Surréxit Dóminus vere, * Allelúia. | Le Seigneur est vraiment ressuscité, * Alléluia. |
Psaume 94 (Invitatoire) | |
Hymni et capitula non dicuntur in aliqua horarum, nec versiculi, nisi in Nocturno. | On ne dit les hymnes et les capitules à aucune heure, ni les verts sauf au Nocturne. |
Ant. 1 Ego sum qui sum * et consílium meum non est cum ímpiis, sed in lege Dómini volúntas mea est, allelúia. | Ant. 1 Je suis celui qui suis [1], * et mon conseil n’est pas avec les impies [2], mais ma volonté est dans la loi du Seigneur [3], alléluia. |
Psaume 1 | |
On répète l’antienne du psaume après chaque psaume. | |
Ant. 2 Postulávi Patrem meum, * allelúia : dedit mihi Gentes, allelúia, in hereditátem, allelúia. | Ant. 2 J’ai demandé à mon Père, * alléluia : il m’a donné les nations, alléluia, en héritage, alléluia [4]. |
Psaume 2 | |
Ant. 3 Ego dormívi, * et somnum cepi : et exsurréxi, quóniam Dóminus suscépit me, allelúia, allelúia. | Ant. 3 Moi je me suis endormi, * j’ai sommeillé ; et je me suis levé parce que le Seigneur m’a pris sous sa protection [5]. |
Psaume 3 | |
V/. Gavísi sunt discípuli, allelúia. | V/. Les disciples se sont réjouis, alléluia. |
R/. Viso Dómino, allelúia. | R/. A la vue du Seigneur, alléluia. |
Lectio i | 1ère leçon |
Léctio sancti Evangélii secundum Ioánnem. | Lecture du saint Évangile selon saint Jean. |
Cap. 20, 1-9. | |
In illo témpore : Una sábbati María Magdaléne venit mane, cum adhuc ténebræ essent, ad monuméntum. Et réliqua. | En ce temps-là : le premier jour de la semaine, Marie-Madeleine vint au sépulcre dès le matin, comme les ténèbres régnaient encore. Et le reste. |
Homilía sancti Gregórii Papæ. | Homélie de saint Grégoire, Pape. |
Homilía 22 in Evangelia | |
Léctio sancti Evangélii, quam modo, fratres, audístis, valde in superfície histórica est apérta : sed eius nobis sunt mystéria sub brevitáte requirénda. María Magdaléne, cum adhuc ténebræ essent, venit ad monuméntum. Iuxta históriam notátur hora : iuxta intelléctum vero mýsticum, requiréntis signátur intelligéntia. María étenim auctórem ómnium, quem in carne víderat mortuum, quærébat in monuménto ; et quia hunc mínime invénit, furátum crédidit. Adhuc ergo erant ténebræ, cum venit ad monuméntum. Cucúrrit cítius, discípulis nuntiávit : sed illi præ céteris cucurrérunt, qui præ céteris amavérunt, vidélicet Petrus et Ioánnes. | La lecture du saint Évangile que vous venez d’entendre, mes frères, est bien facile à comprendre, si l’on s’arrête à la surface, en ne considérant que le sens historique ; mais il nous faut rechercher brièvement les mystères qu’elle renferme. « Marie-Madeleine vint au sépulcre quand les ténèbres duraient encore. » L’heure est marquée selon l’histoire, mais au sens mystique elle indique où en était l’entendement de celle qui cherchait. Marie cherchait dans le sépulcre l’auteur de toutes choses, celui qu’elle avait vu mort selon la chair ; comme elle ne l’y trouva pas, elle crut qu’il avait été dérobé. Les ténèbres duraient encore lorsqu’elle vint au sépulcre. Elle courut promptement et annonça aux disciples : et ceux-là coururent plus vite que les autres, qui aimaient plus que les autres, c’est-à-dire Pierre et Jean. |
R/. Christus resúrgens ex mórtuis, iam non móritur, mors illi ultra non dominábitur : quod enim mórtuus est peccáto, mórtuus est semel : * Quod autem vivit, vivit Deo, allelúia, allelúia. | R/. Le Christ ressuscité d’entre les morts ne meurt plus, la mort ne dominera plus sur lui : car, s’il est mort pour le péché, il est mort une seule fois : [6] * Et s’il vit, il vit pour Dieu, alléluia, alléluia. |
V/. Mórtuus est semel propter delícta nostra, et resurréxit propter iustificatiónem nostram. | V/. Il est mort une fois pour nos péchés, et il est ressuscité pour notre justification. |
R/. Quod autem vivit, vivit Deo, allelúia, allelúia. | R/. Et s’il vit, il vit pour Dieu, alléluia, alléluia. |
Lectio ii | 2e leçon |
Currébant autem duo simul : sed Ioánnes præcucúrrit cítius Petro. Venit prior ad monuméntum, et íngredi non præsúmpsit. Venit ergo postérior Petrus, et intrávit. Quid, fratres, quid cursus signíficat ? Numquid hæc tam subtílis Evangelístæ descríptio a mystériis vacáre credénda est ? Mínime. Neque enim se Ioánnes et præísse, et non intrásse díceret, si in ipsa sui trepidatióne mystérium defuísse credidísset. Quid ergo per Ioánnem, nisi synagóga : quid per Petrum, nisi Ecclésia designátur ? | « Ils couraient tous deux ensemble ; mais Jean courut plus vite que Pierre, il arriva le premier au sépulcre. » Cependant il n’osa pas entrer. « Pierre, qui le suivait, vint aussi, et entra. » Que signifie, mes frères, que signifie cette course ? Est-il à croire qu’un fait décrit avec tant de détails par l’Évangéliste soit sans mystère ? Non, sans doute. Saint Jean n’aurait pas dit, ni qu’il était arrivé le premier ni qu’il n’était point entré, s’il eût cru vide de mystère l’hésitation même qu’il éprouva. De qui saint Jean est-il donc la figure, sinon de la Synagogue ; que représente saint Pierre, sinon l’Église ? |
R/. Isti sunt agni novélli, qui annuntiavérunt, allelúia : modo venérunt ad fontes, * Repléti sunt claritáte, allelúia, allelúia. | R/. Ce sont ces agneaux nouvelets [7] qui ont annoncé l’alléluia : ils sont venus récemment à la fontaine, * Ils sont tout éclatants de blancheur, alléluia, alléluia. |
V/. In conspéctu Agni amícti sunt stolis albis, et palmæ in mánibus eórum. | V/. En la présence de l’Agneau, ils sont revêtus de robes blanches, et tiennent des palmes en leurs mains. [8] |
* Repléti sunt claritáte, allelúia, allelúia. Glória Patri. * Repléti sunt claritáte, allelúia, allelúia. | * Ils sont tout éclatants de blancheur, alléluia, alléluia. Gloire au Père. * Ils sont tout éclatants de blancheur, alléluia, alléluia. |
Lectio iii | 3e leçon |
Nec mirum esse videátur, quod per iuniórem synagóga, per seniórem vero Ecclésia signári perhibétur : quia etsi ad Dei cultum prior est synagóga, quam Ecclésia Géntium, ad usum tamen sǽculi prior est multitúdo Géntium, quam synagóga, Paulo attestánte, qui ait : Quia non prius quod spiritále est, sed quod animále. Per seniórem ergo Petrum significátur Ecclésia Géntium : per iuniórem vero Ioánnem synagóga Iudæórum. Currunt ambo simul : quia ab ortus sui témpore usque ad occásum, pári et commúni via, etsi non pári et commúni sensu, Gentílitas cum synagóga cucúrrit. Venit synagóga prior ad monuméntum, sed mínime intrávit : quia legis quidem mandáta percépit, prophetías de incarnatióne ac passióne Domínica audívit, sed crédere in mórtuum nóluit. | Qu’il ne nous semble pas étrange d’entendre dire que la Synagogue est figurée par le plus jeune des deux Apôtres, et l’Église par le plus âgé. Bien qu’en ce qui concerne le culte de Dieu, la Synagogue ait précédé l’Église où sont entrés les Gentils, néanmoins la multitude des Gentils est plus ancienne que la Synagogue en ce qui concerne l’usage des choses du siècle, et saint Paul l’atteste, lui qui dit : « Non d’abord ce qui est spirituel mais ce qui est animal » [9]. L’Église des Gentils est donc désignée par Pierre qui était le plus âgé, et la Synagogue des Juifs par Jean qui était le plus jeune. Ils courent tous deux ensemble, parce que depuis leur origine jusqu’à la fin, la Gentilité et la Synagogue qui diffèrent de pensée, et de sentiment, courent dans une même et commune voie. La Synagogue est arrivée la première au sépulcre, mais elle n’est point entrée ; car, bien qu’elle ait reçu les préceptes de la loi et entendu les prophéties annoncer l’incarnation et la passion du Seigneur, le sachant mort, elle n’a pas voulu croire en lui. |
Te Deum | |
A LAUDES.
Ant. 1 Angelus autem Dómini * descéndit de cælo, et accédens revólvit lápidem, et sedébat super eum, allelúia, allelúia. | Ant. 1 Un Ange du Seigneur * descendit du ciel, et s’approchant, il renversa la pierre et s’assit dessus, alléluia, alléluia [10]. |
Psaume 92 | |
Ant. 2 Et ecce terræmótus * factus est magnus : Angelus enim Dómini descéndit de cælo, allelúia. | Ant. 2 Et voilà qu’un tremblement de terre, * très grand se produisit : car un Ange du Seigneur descendit du ciel, alléluia. |
Psaume 99 | |
Ant. 3 Erat autem * aspéctus eius sicut fulgur, vestiménta autem eius sicut nix, allelúia, allelúia. | Ant. 3 Or il avait * l’aspect d’un éclair, et ses vêtements étaient comme la neige, alléluia, alléluia. |
Psaume 62 | |
Ant. 4 Præ timóre autem eius * extérriti sunt custódes, et facti sunt velut mórtui, allelúia. | Ant. 4 Par crainte de lui * les gardes furent épouvantés, et ils devinrent comme morts, alléluia. |
Cantique des trois Enfants | |
Ant. 5 Respóndens autem Angelus, * dixit muliéribus : Nolíte timére : scio enim quod Iesum quǽritis, allelúia. | Ant. 5 Et l’Ange répondant * dit aux femmes : ne craignez point : je sais que vous cherchez Jésus, alléluia. |
Psaume 148 | |
Capitulum, hymnus et V/. Non dicuntur, sed eorum loco dicitur antiphona : | On ne dit pas le capitule, l’hymne et le verset, mais à leur place, on dit l’antienne : |
Ant. Hæc dies, * quam fecit Dóminus : exsultémus, et lætémur in ea. | Ant. Voici le jour * qu’a fait le Seigneur [11] : réjouissons-nous et tressaillons d’allégresse en ce jour. |
Ad Bened. Ant. Currébant duo simul, * et ille álius discípulus præcucúrrit cítius Petro, et venit prior ad monuméntum, allelúia. | Ant. au Bénédictus Ils couraient tous deux ensemble, * mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre, et il arriva le premier au sépulcre, alléluia. [12] |
Benedictus | |
Oratio | Prière |
Concéde, quǽsumus, omnípotens Deus : ut, qui festa paschália venerándo égimus, per hæc contíngere ad gaudia ætérna mereámur. Per Dóminum. | Nous vous en prions, Dieu tout-puissant, accordez-nous qu’après avoir célébré religieusement les Fêtes pascales, nous méritions d’arriver, grâce à elles, aux joies de l’éternité. |
V/. Benedicámus Dómino, allelúia, allelúia. | V/. Bénissons le Seigneur, alléluia, alléluia. |
R/. Deo grátias, allelúia, allelúia. | R/. Rendons grâces à Dieu, alléluia, alléluia. |
Post Nonam terminatur Officium proprium de octava. | Après None se termine l’Office propre de l’octave. |
Le septième jour de la plus joyeuse des semaines s’est levé, apportant avec lui le souvenir du repos du Seigneur, après son œuvre de six jours. Il nous retrace en même temps ce second repos que le même Seigneur voulut prendre, comme un guerrier assuré de la victoire, avant de livrer le combat décisif à son adversaire. Repos dans un sépulcre, sommeil d’un Dieu qui ne s’était laissé vaincre par la mort que pour rendre son réveil plus funeste à cette cruelle ennemie. Aujourd’hui que ce sépulcre n’a plus rien à rendre, qu’il a vu sortir de ses flancs le vainqueur qu’il ne pouvait retenir, il convenait que nous nous arrêtions à le contempler, à lui rendre nos hommages ; car ce sépulcre est saint, et sa vue ne peut qu’accroître notre amour envers celui qui daigna dormir quelques heures a son ombre.
Isaïe avait dit : « Le rejeton de Jessé sera comme l’étendard autour duquel se rallieront les peuples ; les nations l’entoureront de leurs hommages ; et son sépulcre deviendra glorieux » [13]. L’oracle est accompli ; il n’est pas une nation sur la terre qui ne renferme des adorateurs de Jésus ; et tandis que les tombeaux des autres hommes, quand le temps ne les a pas détruits et égales au sol, restent comme un trophée de la mort, celui de Jésus est toujours debout et proclame la vie.
Quel tombeau que celui qui réveille des pensées de gloire, et dont les grandeurs avaient été prédites tant de siècles à l’avance ! Quand les temps sont accomplis. Dieu suscite dans Jérusalem un homme pieux, Joseph d’Arimathie, qui secrètement, mais d’un cœur sincère, devient le disciple de Jésus. Ce magistrat songe à se faire creuser un tombeau ; et c’est à l’ombre des remparts de la ville, sur le versant de la colline du Calvaire, qu’il fait tailler dans la roche vive deux chambres sépulcrales, dont l’une sert de vestibule à l’autre. Joseph pensait travailler pour lui-même ; et c’était pour la dépouille d’un Dieu qu’il préparait ce funèbre asile ; il songeait à la fin commune de toute créature humaine depuis le péché ; et les décrets divins portaient que Joseph ne reposerait pas dans ce tombeau, et que ce tombeau deviendrait pour les hommes le titre de l’immortalité. Jésus expire sur la croix, au milieu des insultes de son peuple ; toute la ville est soulevée contre le fils de David, qu’elle avait accueilli peu de jours auparavant au cri de l’Hosannah ; c’est à ce moment même que, bravant les fureurs de la cité déicide, Joseph se rend chez le gouverneur romain pour réclamer l’honneur d’ensevelir le corps du supplicié. Il ne tarde pas d’arriver avec Nicodème sur le Calvaire ; et lorsqu’il a détaché de la croix les membres de la divine victime, il a la gloire de déposer ce corps sacré sur la table de pierre qu’il avait fait préparer pour lui-même : heureux d’en faire hommage au maître pour lequel il venait de confesser son attachement jusque dans le Prétoire de Ponce-Pilate. O homme véritablement digne des respects de l’humanité tout entière dont vous teniez la place dans ces augustes funérailles, nous ne doutons pas qu’un regard reconnaissant de la Mère des douleurs ne vous ait récompensé du sacrifice que vous faisiez si volontiers pour son Fils !
Les Évangélistes insistent avec une intention marquée sur les conditions du sépulcre. Saint Matthieu, saint Luc, saint Jean, nous disent qu’il était neuf, et qu’aucun corps mort n’y avait encore été déposé. Les saints Pères sont venus ensuite, et nous ont expliqué le mystère, à la gloire du saint tombeau. Ils nous ont enseigné la relation que ce sépulcre, qui rendit l’Homme-Dieu à la vie immortelle, devait avoir avec le sein virginal qui l’enfanta pour être la victime du monde ; et ils en ont tiré cette conséquence, que le Seigneur notre Dieu, quand il se choisit un asile dans sa créature, tient à le trouver libre et digne de sa souveraine sainteté. Honneur donc au tombeau de notre Rédempteur d’avoir présenté, dans son être matériel, un rapport mystérieux avec l’incomparable et vivante pureté de la Mère de Jésus !
Durant les heures qu’il conserva son précieux dépôt, quelle gloire égalait alors la sienne sur la terre ! Quel trésor fut confié à sa garde ! Sous sa voûte silencieuse reposait dans ses linceuls, mouillés des larmes de Marie, le corps qui avait été la rançon du monde. Dans son étroite enceinte, les saints Anges se pressaient, faisant la garde auprès de la dépouille de leur créateur, adorant son divin repos, et aspirant à l’heure où l’Agneau égorgé allait se lever Lion redoutable. Mais quel prodige inouï éclata sous la voûte de l’humble caverne, lorsque l’instant décrété éternellement étant arrivé, Jésus plein de vie pénétra, plus prompt que l’éclair, les veines de la roche, et s’élança au grand jour. Bientôt, c’est la main de l’Ange qui vient arracher la pierre de l’entrée, afin de révéler le départ du céleste prisonnier ; ce sont ensuite d’autres Anges qui attendent Madeleine et ses compagnes. Elles arrivent et font retentir cette voûte de leurs sanglots ; Pierre et Jean y pénètrent à leur tour. Vraiment ce lieu est saint entre tous ; le Fils de Dieu a daigné l’habiter ; sa Mère y a été vue en pleurs ; il a été le rendez-vous des Esprits célestes ; les plus saintes âmes de la terre l’ont consacré par leurs visites empressées, l’ont rendu le théâtre de leurs plus dévots sentiments. O sépulcre du Fils de Jessé, vous êtes véritablement glorieux !
L’enfer la voit, cette gloire ! Et il voudrait l’effacer de la terre. Ce tombeau désespère son orgueil ; car il rappelle d’une manière trop éclatante la défaite qu’a essuyée la mort, fille du péché. Satan croit avoir accompli son odieux dessein, lorsque Jérusalem avant succombé sous les coups des Romains, une ville nouvelle et toute païenne s’élève sur les ruines avec le nom d’Ælia. Mais le nom de Jérusalem ne périra pas plus que la gloire du saint tombeau. En vain des ordres impies prescrivent d’amonceler la terre autour du monument, et d’élever sur ce monticule un temple à Jupiter, en même temps que sur le Calvaire lui-même un sanctuaire à l’impure Vénus, et sur la grotte de la Nativité un autel à Adonis ; ces constructions sacrilèges ne feront que désigner d’une manière plus précise les lieux sacrés à l’attention des chrétiens. On a voulu tendre un piège, et tourner au profit des faux dieux les hommages dont les disciples du Christ avaient coutume d’entourer ces lieux : vain espoir ! Les chrétiens ne les visiteront plus, tant qu’ils seront souillés par la présence des infâmes idoles ; mais ils tiendront l’œil fixé sur ces vestiges d’un Dieu, vestiges ineffaçables pour eux ; et ils attendront en patience qu’il plaise au Père de glorifier encore son Fils.
Lorsque l’heure a sonné, Dieu envoie à Jérusalem une impératrice chrétienne, mère d’un empereur chrétien, pour rendre visibles de nouveau les traces adorables du passage de notre Rédempteur. Émule de Madeleine et de ses compagnes, Hélène s’avance sur le lieu où fut le tombeau. Il fallait une femme pour continuer les grandes scènes du matin de la Résurrection. Madeleine et ses compagnes cherchaient Jésus ; Hélène qui l’adore ressuscité ne cherche que son tombeau ; mais un même amour les transporte. Par les ordres de la pieuse impératrice, l’impie sanctuaire de Jupiter s’écroule, la terre amoncelée est écartée ; et bientôt le soleil éclaire de nouveau le trophée de la victoire de Jésus. La défaite de la mort était donc une seconde fois proclamée par cette réapparition du sépulcre glorieux. Bientôt un temple magnifique s’élève aux dépens du trésor impérial, et porte le nom de Basilique de la Résurrection. Le monde entier s’émeut à la nouvelle d’un tel triomphe ; le paganisme déjà croulant en ressent un ébranlement auquel il ne résiste plus ; et les pieuses pérégrinations des chrétiens vers le sépulcre glorifié commencent pour ne plus s’arrêter qu’au dernier jour du monde.
Durant trois siècles, Jérusalem demeura la ville sainte et libre, éclairée des splendeurs du saint tombeau ; mais les conseils de la justice divine avaient arrêté que l’Orient, foyer inépuisable de toutes les hérésies, serait châtié et soumis à l’esclavage. Le Sarrasin vient inonder de ses hordes enthousiastes la terre des prodiges ; et les eaux de ce déluge honteux n’ont reculé un moment que pour se répandre avec une nouvelle impétuosité sur cette terre qui leur semble abandonnée pour longtemps encore. Mais ne craignons pas pour la tombe sacrée ; elle demeurera toujours debout. Le Sarrasin aussi la révère ; car à ses veux elle est le sépulcre d’un grand prophète. Pour approcher d’elle, le chrétien devra payer un tribut ; mais elle est en sûreté ; on verra même un calife offrir en hommage à notre Charlemagne les clefs de cet auguste sanctuaire, montrant par cet acte de courtoisie la vénération que lui inspire à lui-même la grotte sacrée, autant que le respect dont il est pénétré envers le plus grand des princes chrétiens. Ainsi le sépulcre continuait d’apparaître glorieux à travers même les tribulations qui, à penser humainement, auraient dû l’effacer de la terre.
Sa gloire parut avec plus d’éclat encore, lorsque, à la voix du Père de la chrétienté, l’Occident tout entier se leva soudain en armes, et marcha, sous la bannière de la croix, à la délivrance de Jérusalem. L’amour du saint tombeau était dans tous les cœurs, son nom sur toutes les lèvres ; et dès le premier choc, le Sarrasin, contraint de reculer à son tour, laissa la place aux croisés. La Basilique d’Hélène vit alors un sublime spectacle : le pieux Godefroi de Bouillon sacré avec l’huile sainte roi de Jérusalem, à l’ombre du sépulcre du Christ, et les saints mystères célèbres pour la première fois, avec la langue et les rites de Rome, sous les lambris orientaux de la Basilique constantinienne. Mais ce règne de Japhet sous les tentes de Sem ne se perpétua pas. D’un côté, l’étroite politique de nos princes d’Occident n’avait pas su comprendre le prix d’une telle conquête ; de l’autre, la perfidie de l’empire grec ne se donna pas de relâche qu’elle n’eût amené, par ses noires trahisons, le retour du Sarrasin dans les murs sans défense de Jérusalem. Cette période n’en fut pas moins l’une des gloires prédites par Isaïe au saint tombeau ; elle ne sera pas la dernière.
Aujourd’hui, profané par les sacrifices offerts dans son enceinte par les mains sacrilèges du schisme et de l’hérésie ; confié, à des heures rares et comptées, aux hommages légitimes de l’unique Épouse de celui qui daigna se reposer dans son sein, le divin sépulcre attend le jour où son honneur sera encore une fois vengé. Sera-ce que l’Occident, redevenu docile à la foi, viendra renouer sur cette terre les grands souvenirs qu’y a laisses sa chevalerie ? Sera-ce que l’Orient lui-même, renonçant à une scission qui ne lui a valu que la servitude, tendra la main à la Mère et à la Maîtresse de toutes les Églises, et scellera sur le roc immortel de la Résurrection une réconciliation qui serait la ruine de l’islamisme ? Dieu seul le sait ; mais nous avons appris de sa divine et infaillible parole qu’avant la fin des temps, l’antique Israël doit revenir au Dieu qu’il a méconnu et crucifié ; que Jérusalem sera relevée par la main des Juifs devenus chrétiens. Alors la gloire du sépulcre du fils de Jessé s’élèvera au-dessus de tout ; mais le fils de Jessé lui-même ne tardera pas à paraître ; la terre sera au moment de rendre nos corps pour la résurrection générale ; et le dernier accomplissement de la Pâque se trouvera lié ainsi avec le dernier et suprême honneur qu’aura reçu la tombe sacrée. En nous éveillant de nos sépulcres, nous la chercherons du regard ; et il nous sera doux de la contempler alors comme le point de départ et comme le principe de cette immortalité dont nous serons déjà en possession. En attendant l’heure où nous devrons entrer dans l’habitation passagère qui gardera nos corps, vivons dans l’amour du sépulcre du Christ ; que son honneur soit le nôtre ; et héritiers de cette foi sincère et ardente qui animait nos pères et les arma pour venger son injure, remplissons ce devoir particulier de la Pâque, qui consiste à comprendre et à goûter les magnificences du Sépulcre glorieux.
Cette journée, dans la Liturgie, est appelée le Samedi in albis, ou plus exactement in albis deponendis ; parce que c’était aujourd’hui que les néophytes devaient déposer les robes blanches qu’ils avaient portées durant toute l’Octave. L’Octave, en effet, avait commencé pour eux plus tôt que pour les autres fidèles ; car c’était dans la nuit du Samedi saint qu’ils avaient été régénérés, et qu’on les avait ensuite couverts de ce vêtement, symbole de la pureté de leurs âmes. C’était donc sur le soir du Samedi suivant, après l’office des Vêpres, qu’ils le quittaient, comme nous le raconterons plus loin.
La Station, à Rome, est aujourd’hui dans la Basilique de Latran, l’Église Mère et Maîtresse. qu’avoisine le Baptistère de Constantin, où les néophytes ont reçu, il y a huit jours, la grâce de la régénération. La Basilique qui les réunit aujourd’hui est celle-là même de laquelle ils partirent, sous les ombres de la nuit, se dirigeant vers la fontaine du salut, précédés du cierge mystérieux qui éclairait leurs pas ; c’est celle où étant de retour sous leurs habits blancs, ils assistèrent pour la première fois à la célébration entière du Sacrifice chrétien, et participèrent au corps et au sang du Rédempteur. Nul autre lieu ne convenait mieux que celui-ci pour la Station de ce jour, dont les impressions doivent se conserver durables dans le cœur des néophytes, qui sont au moment de rentrer dans la vie commune. La sainte Église, dans ces dernières heures où ses nouveaux-nés se pressent autour d’elle, comme autour d’une mère, les considère avec complaisance ; elle couve de son regard ces précieux fruits de sa fécondité, qui lui inspiraient, durant ces jours, de si touchants et de si mélodieux cantiques.
Tantôt elle se les représentait se levant du divin banquet, et vivifiés par la chair de celui qui est à la fois sagesse et douceur ; et elle chantait ce répons :
R/. De ore prudéntis procédit mel, allelúia : dulcédo mellis est sub lingua eius, allelúia : * Favus distíllans lábia eius, allelúia, allelúia. | R/. De la bouche du Sage découle le miel, Alléluia ; qu’il est doux ce miel sous sa langue ! Alléluia ; * Un rayon de miel distille de ses lèvres. Alléluia. |
V/. Sapiéntia requiéscit in corde eius, et prudéntia in sermóne oris illíus. | V/. La Sagesse repose dans son cœur, et la prudence est dans les paroles de sa bouche. |
* Favus distíllans lábia eius, allelúia, allelúia. | * Un rayon de miel distille de ses lèvres. Alléluia. |
Tantôt elle s’attendrissait en voyant transformés en tendres agneaux ces hommes qui avaient vécu jusque alors de la vie du siècle, et qui recommençaient leur carrière avec l’innocence des enfants ; et elle disait dans un langage pastoral :
R/. Isti sunt agni novélli, qui annuntiavérunt, allelúia : modo venérunt ad fontes, * Repléti sunt claritáte, allelúia, allelúia. | R/. Ce sont là ces agneaux nouvelets qui nous ont annoncé l’Alléluia ; ils sortent à l’instant de la fontaine * Ils sont tout brillants de lumière. Alléluia. |
V/. In conspéctu Agni amícti sunt stolis albis, et palmæ in mánibus eórum. | V/. Compagnons de l’Agneau, ils sont vêtus de robes blanches et tiennent des palmes dans leurs mains. |
* Repléti sunt claritáte, allelúia, allelúia. | * Ils sont tout brillants de lumière. Alléluia, Alléluia. |
D’autres fois elle se prenait à contempler avec un saint orgueil l’éclat des vertus que le saint Baptême avait infusées dans leurs âmes, la pureté sans tache qui les rendait brillants comme la lumière ; et sa voix pleine d’enthousiasme célébrait ainsi leur beauté :
R/. Cándidi facti sunt Nazarǽi eius, allelúia : splendórem Deo dedérunt, allelúia : * Et sicut lac coagulátui sunt, allelúia, allelúia. | R/. Qu’ils sont blancs les Nazaréens de mon Christ ! Alléluia ; leur éclat rend gloire à Dieu ; Alléluia ; * Leur blancheur est celle du lait le plus pur. Alléluia, Alléluia. |
V/. Candidióres nive, nitidióres lacte, rubicundióres ébore antíquo, sapphíro pulchrióres. | V/. Plus blancs que la neige, plus purs que le lait, plus vermeils que l’ivoire antique, plus beaux que le saphir ; |
* Et sicut lac coagulátui sunt, allelúia, allelúia | * Leur blancheur est celle du lait le plus pur. Alléluia, Alléluia. |
Ces trois Répons font encore partie des Offices de la sainte Église au Temps pascal [14].
A LA MESSE.
L’Introït est formé des paroles du Psaume CIV, dans lesquelles Israël glorifie le Seigneur d’avoir ramené son peuple de l’exil. Par ce peuple nous devons entendre nos néophytes qui étaient exilés du ciel à cause de la faute originelle et de leurs péchés personnels ; le Baptême leur a rendu tous leurs droits à cette heureuse patrie, en les établissant dans l’Église.
Au moment de voir expirer la Semaine pascale, l’Église demande au Seigneur, dans la Collecte, que les joies que ses enfants ont goûtées en ces jours leur ouvrent le chemin aux joies plus grandes encore de la Pâque éternelle.
ÉPÎTRE.
Les néophytes ne pouvaient entendre, en ce jour, une exhortation mieux appropriée à leur situation que colle que nous adresse à tous le prince des Apôtres, dans ce passage de sa première Épître. Saint Pierre avait adressé cette lettre à de nouveaux baptisés ; aussi avec quelle douce paternité il épanchait les sentiments de son cœur sur ces « enfants nouveau-nés ! » La vertu qu’il leur recommande, c’est la simplicité qui sied si bien à ce premier âge ; la doctrine dont ils ont été instruits, c’est un lait qui les nourrira et leur donnera la croissance ; ce qu’il faut goûter, c’est le Seigneur ; et le Seigneur est plein de douceur.
L’Apôtre insiste ensuite sur un des principaux caractères du Christ : il est la pierre fondamentale et angulaire de l’édifice de Dieu. C’est sur lui seul que doivent s’établir les fidèles, qui sont les pierres vivantes du temple éternel. Lui seul leur donne la solidité et la résistance ; et c’est pour cela que, devant retourner à son Père, il a choisi et établi sur la terre une autre Pierre, une Pierre toujours visible qu’il s’est unie à lui-même, et à laquelle il a communiqué sa propre solidité. La modestie de l’Apôtre l’empêche d’insister sur ce que le saint Évangile renferme de glorieux pour lui à ce sujet ; mais quiconque connaît les paroles du Christ à Pierre va jusqu’au fond de la doctrine.
Si l’Apôtre ne se glorifie pas lui-même, quels titres magnifiques il nous reconnaît en retour, à nous baptisés ! Nous sommes « la race choisie et sainte, le peuple que Dieu s’est conquis, un peuple de Rois et de Prêtres ». En effet, quelle différence du baptisé avec celui qui ne l’est pas ! Le ciel ouvert à l’un est fermé à l’autre ; l’un est esclave du démon, et l’autre roi en Jésus-Christ Roi, dont il est devenu le propre frère ; l’un tristement isolé de Dieu, et l’autre lui offrant le sacrifice souverain par les mains de Jésus-Christ Prêtre. Et tous ces dons nous ont été confères par une miséricorde entièrement gratuite ; ils n’ont point été mérités par nous. Offrons-en donc à notre Père adoptif d’humbles actions de grâces ; et, nous reportant au jour où, nous aussi, nous fûmes néophytes, renouvelons les promesses qui furent faites en notre nom, comme la condition absolue à laquelle de si grands biens nous étaient octroyés.
A partir de ce jour, l’Église cesse, jusqu’à la fin du Temps pascal, d’employer, entre l’Épître et l’Évangile, la forme du Répons appelé Graduel. Elle y substitue le chant répété de l’Alléluia, qui présente moins de gravité, mais exprime un plus vif sentiment d’allégresse. Dans les six premiers jours de la solennité pascale qui sont en rapport avec les six jours de la création, elle n’a pas voulu dérogera la majesté de ses chants ; maintenant que le repos du Seigneur est arrivé, que son œuvre est achevée, elle se livre avec plus d’abandon à la sainte liberté qui la transporte.
ÉVANGILE.
Cet épisode de la matinée du jour de Pâques a été réservé pour aujourd’hui par la sainte Église, parce qu’on y voit figurer saint Pierre, dont la voix s’est déjà fait entendre dans l’Épître. Ce jour est le dernier auquel les néophytes assistent au Sacrifice revêtus de la robe blanche ; demain, leur extérieur n’aura plus rien qui les distingue des autres fidèles. Il importe donc d’insister auprès d’eux sur le fondement de l’Église, fondement sans lequel l’Église ne pourrait se soutenir, et sur lequel ils doivent être établis, s’ils veulent conserver cette foi dans laquelle ils ont été baptisés, et qu’il leur faut garder pure jusqu’à la fin pour obtenir le salut éternel. Or cette foi se maintient inébranlable en tous ceux qui sont dociles à l’enseignement de Pierre, et qui révèrent la dignité de cet Apôtre. Nous apprenons d’un Apôtre même, dans ce passage du saint Évangile, le respect et la déférence qui sont dus à celui que Jésus a chargé de paître le troupeau tout entier, agneaux et brebis. Pierre et Jean courent ensemble au tombeau de leur maître ; Jean, plus jeune que Pierre, arrive le premier. Il regarde dans le sépulcre ; mais il n’entre pas. Pourquoi cette humble réserve dans celui qui est le disciple bien-aimé du maître ? Qu’attend-il ? — Il attend celui que Jésus a préposé à eux tous, celui qui est leur Chef, et à qui il appartient d’agir en chef. Pierre arrive enfin ; il entre dans le tombeau ; il constate l’état des choses, et ensuite Jean pénètre à son tour dans la grotte. Admirable enseignement que Jean lui-même a voulu nous donner, en écrivant de sa propre main ce récit mystérieux ! C’est toujours à Pierre de précéder, de juger, d’agir en maître ; et c’est au chrétien de le suivre, de l’écouter, de lui rendre honneur et obéissance. Et comment n’en serait-il pas ainsi, quand nous voyons un Apôtre même, et un tel Apôtre, agir ainsi envers Pierre, et lorsque celui-ci n’avait encore reçu que la promesse des clefs du Royaume des cieux, qui ne lui furent données effectivement que dans les jours qui suivirent ?
Les paroles de l’Offertoire sont tirées du Psaume CXVII, qui est par excellence le Psaume de la Résurrection. Elles saluent le divin triomphateur qui se levé comme un astre éclatant, et vient verser sur nous ses bénédictions.
Dans la Secrète, l’Église nous enseigne que l’action des divins mystères que nous célébrons dans le cours de l’année, est incessante sur les fidèles. Ces mystères apportent tour à tour avec eux une nouvelle vie et une nouvelle allégresse ; et c’est par leur succession anniversaire dans la sainte Liturgie que l’Église arrive à maintenir en elle la vitalité, qu’ils lui ont conférée par leur accomplissement dans leur temps.
Nos néophytes doivent, en ce jour même, déposer leurs habits blancs ; quel sera donc désormais leur vêtement ? Le Christ lui-même, qui s’est incorporé à eux par le Baptême. C’est le Docteur des Gentils qui leur confirme cette espérance dans l’Antienne de la Communion.
Dans la Postcommunion, l’Église insiste encore sur le don de la foi. Sans la foi, le christianisme cesse d’exister ; mais la divine Eucharistie, qui est le mystère de la foi, a la vertu de la nourrir et de la développer dans les âmes.
DÉPOSITION DES HABITS BLANCS.
Chacun des jours de cette semaine, l’Office des Vêpres s’est accompli avec la même solennité dont nous avons été témoins au Dimanche. Le peuple fidèle remplissait la Basilique, et accompagnait de ses regards et de son intérêt fraternel cette blanche troupe de néophytes qui s’avançait, chaque soir, à la suite du Pontife, pour revoir encore l’heureuse fontaine qui donne une nouvelle naissance à ceux qui y sont plongés. Aujourd’hui, le concours est plus grand encore ; car un nouveau rite va s’accomplir. Les néophytes, en quittant le vêtement qui retrace à l’extérieur la pureté de leurs aines, vont prendre l’engagement de conserver intérieurement cette innocence dont le symbole ne leur est plus nécessaire. Par ce changement qui s’opère sous les yeux des fidèles, l’Église est censée rendre ses nouveaux enfants à leurs familles, aux soins et aux devoirs de la vie ordinaire ; c’est à eux maintenant de se montrer ce qu’ils sont désormais pour toujours : chrétiens, disciples du Christ.
Au retour du Baptistère, et après avoir terminé l’Office des Vêpres par la station devant la Croix de l’arc triomphal, les néophytes sont conduits dans une des salles attenantes à la Basilique, et dans laquelle on a préparé un vaste bassin rempli d’eau. L’Évêque, assis sur un siège d’honneur, et voyant autour de lui ces jeunes agneaux du Christ, leur adresse avec émotion un discours dans lequel il exprime la joie du Pasteur, à la vue des heureux accroissements du troupeau qui lui est confié. Il félicite de leur bonheur ces élus de la grâce divine ; et venant ensuite à l’objet de leur réunion dans ce lieu, c’est-à-dire à la déposition des vêtements qu’ils reçurent de ses mains au sortir de la fontaine du salut, il les avertit paternellement de veiller sur eux-mêmes et de ne jamais souiller cette blancheur de l’âme dont celle des habits n’a été que la faible image.
Les vêtements blancs des néophytes leur ont été fournis par l’Église, ainsi que nous l’avons vu au Samedi saint ; c’est pour cette raison qu’ils viennent les remettre entre les mains de l’Église. L’eau du bassin est destinée à les laver. Après l’allocution, le Pontife bénit cette eau, en récitant sur elle une Oraison dans laquelle il rappelle la vertu que l’Esprit-Saint adonnée à cet clément de purifier les taches même de l’âme. Puis se tournant vers les néophytes, après avoir adressé à Dieu ses actions de grâces par la récitation du Psaume CXVI, il prononce cette belle prière :
Visitez, Seigneur, votre peuple dans vos desseins de salut ; voyez-le tout illuminé des joies pascales ; mais daignez conserver dans nos néophytes ce que vous y avez opéré vous-même, pour qu’ils fussent sauvés. Faites qu’en se dépouillant de ces robes blanches, le changement ne soit en eux qu’un changement extérieur ; que l’invisible blancheur du Christ soit toujours inhérente à leurs âmes ; qu’ils ne la perdent jamais ; et que votre grâce les aide à obtenir par les bonnes œuvres cette vie immortelle à laquelle nous oblige le mystère de la Pâque.
Après cette prière, les néophytes aidés, les hommes de leurs parrains, et les femmes de leurs marraines, dépouillaient les vêtements blancs, qui étaient consignés aux mains des serviteurs de l’Église charges de les laver et de les conserver. Ils se revêtaient ensuite de leurs habits ordinaires, toujours aides de leurs parrains et marraines ; et enfin, reconduits aux pieds du Pontife, ils recevaient de sa main le symbole pascal, l’image en cire de l’Agneau divin. Le dernier vestige de cette touchante fonction est la distribution des Agnus Dei que le Pape fait en ce jour, à Rome, la première et chaque septième année de son pontificat. On a vu comment ils ont été bénis par le Pontife le Mercredi précédent, et comment les rites que le Pape emploie dans cette occasion rappellent le baptême par immersion des néophytes. Le samedi suivant, dans les années dont nous venons de parler, il y a Chapelle papale au palais. Après la Messe solennelle, le Souverain Pontife étant sur son trône, on apporte dans des corbeilles les Agnus Dei, qui sont en très grand nombre. Le Prélat qui les présente chante ces touchantes paroles empruntées à l’un de ces beaux Répons que nous avons cités : « Saint Père, voici ces agneaux nouvelets qui nous ont annoncé l’Alléluia ; ils sortent à l’instant de la fontaine ; ils sont tout brillants de lumière. » Le Pape répond : Deo gratias. La pensée se reporte alors à ces temps où, en ce jour même, les nouveaux baptisés étaient amenés aux pieds du Pontife comme de tendres agneaux à la blanche toison, objet des complaisances du pasteur. Le Pape fait lui-même de son trône la distribution des Agnus Dei aux Cardinaux, aux Prélats et à tous ceux des assistants que les maîtres des cérémonies laissent approcher ; et ainsi se termine cette cérémonie si intéressante et par les souvenirs qu’elle retrace, et par son objet actuel.
Nous n’achèverons pas les récits qui se rattachent à ce dernier jour de l’Octave des nouveaux baptisés, sans avoir dit un mot de la Pâque annotine. On nommait ainsi le jour anniversaire de la Pâque de l’année précédente ; et ce jour était comme la fête de ceux qui comptaient une année révolue depuis leur baptême. L’Église célébrait solennellement le Sacrifice en faveur de ces nouveaux chrétiens, auxquels elle remettait ainsi en mémoire l’immense bienfait dont Dieu les avait favorisés en ce jour ; et c’était l’occasion de festins et de réjouissances dans les familles dont les membres avaient été, l’année précédente, du nombre des néophytes. S’il arrivait, à raison du mouvement irrégulier de la Pâque, que cet anniversaire tombât, l’année suivante, dans quelqu’une des semaines du Carême, on devait s’abstenir cette année-là de célébrer la Pâque annotine, ou la transférer après le jour de la Résurrection. Il paraît que, dans certaines Églises, pour éviter ces continuelles variations, on avait fixé l’anniversaire du Baptême au Samedi de Pâques. L’interruption de l’usage d’administrer le Baptême dans la fête de la Résurrection devait amener peu à peu la suppression de la Pâque annotine ; on en trouve cependant encore des traces en quelques lieux jusqu’au XIIIe siècle, et peut-être au-delà. Cette coutume de fêter l’anniversaire du Baptême étant fondée sur la grandeur du bienfait qui pour chacun de nous se rattache à ce jour, n’a jamais dû sortir des habitudes chrétiennes ; et de nos temps, comme dans l’antiquité, tous ceux qui ont été régénérés en Jésus-Christ doivent au moins porter à ce jour où ils ont reçu la vie surnaturelle, le respect que les païens portaient à celui qui les avait mis en possession de la vie naturelle. Saint Louis aimait à signer Louis de Poissy, parce que c’était sur les fonts de l’humble église de Poissy qu’il avait reçu le baptême ; nous pouvons apprendre d’un si grand chrétien à tenir mémoire du jour et du lieu où nous fûmes faits enfants de Dieu et de son Église.
Le septième jour de cette semaine durant laquelle nous avons suivi toutes les phases de la création, à partir du moment où la lumière, sortant du néant, désigna le jour où celui qui est la lumière incréée et infinie devait sortir lui-même des ombres du tombeau ; le septième jour s’est levé, et nous y révérons le repos du Seigneur qui cesse de créer. Mais ce jour est aussi celui du repos que le même Seigneur a voulu prendre dans son glorieux sépulcre. Honorons aujourd’hui ce second mystère qui nous révèle, bien plus vivement encore que le premier, l’amour du Fils de Dieu pour l’homme ; et payons notre hommage du Samedi, en lui offrant la prière que le Bréviaire mozarabe consacre aujourd’hui à l’accomplissement de ce devoir.
CAPITULA. | |
Christe Dei Filius, nostrarum requies animarum, qui otium Sabbati requiescens in tumulo complevisti : ut in quo olim requieveras ab omni opere faciendo, in eo etiam requiesceres in sepulcro, hunc nobis veraciter sanctificans diem, cujus vesperum in prima nobis Sabbati, quæ et octava dies est, lucescit : ut, qui dixeras de tenebris lumen splendescere, manifeste a mortuis resurgens appareres in carne ; dirige cursum vitæ nostræ in viam sanctificationis omnimodæ, qualiter ita in his septem diebus, quibus mundus iste peragitur, et in quibus quotidie nobis Agnus occiditur, et Pascha quotidie celebratur, salubriori vitæ curriculo conversemur : ut absque fermento malitiæ verum Pascha mereamur quotidie celebrare : et ita ab omnibus operibus nostris in hoc die sanctificatione tibi placita quiescamus, ut octavi illius æterni diei resurrectionis gloria consolemur. | O Christ, Fils de Dieu, repos de nos âmes, qui avez accompli dans le sépulcre le repos du sabbat, ayant voulu que ce même jour où vous vous reposâtes de toutes vos œuvres, fût aussi celui de votre repos dans le sépulcre ; vous avez véritablement sanctifié pour nous ce jour dont le soir est déjà le commencement du huitième jour, qui est celui où vous fîtes jaillir la lumière des ténèbres, et où, ressuscité d’entre les morts, vous apparûtes dans votre chair. Daignez diriger le cours de notre vie dans la voie de toute sainteté ; afin que durant ces sept jours qui représentent la durée du monde, et dans chacun desquels l’Agneau est immolé et la Pâque célébrée pour nous, nous vivions d’une manière conforme à notre salut. Faites que, chaque jour, nous méritions de célébrer la Pâque sans aucun levain de malice, et que nous nous reposions de toutes nos œuvres en ce jour d’une manière si sainte, que nous avons part à la consolation du huitième et éternel jour, ayant obtenu de ressusciter glorieux. |
Nous demanderons aujourd’hui à l’Église grecque un chant sur la Résurrection. Elle nous fournit encore ces belles strophes que nous détachons de ses Offices du jour de Pâques.
IN DOMINICA RESURRECTIONIS
Tu es descendu, ô Christ, jusque dans les entrailles de la terre ; tu as brisé les serrures éternelles qui retenaient captives les âmes saintes ; et trois jours après, tu sortais du tombeau, comme Jonas de la baleine.
Tu as laissé intact le sceau qui fermait le sépulcre, ô Christ ! Toi qui, dans ta naissance, avais maintenu l’intégrité de la Vierge ; et tu nous as rouvert les portes du Paradis.
Mon Sauveur, tu t’es librement offert à ton Père en hostie vivante, toi qui, comme Dieu, ne saurais être une victime ; et sortant du sépulcre, tu as ressuscité Adam tout entier.
Tu es descendu dans le sépulcre, ô immortel ! Tu as brisé la puissance de l’enfer, et comme un vainqueur tu t’es levé, ô Christ Dieu ! Aux femmes qui portaient des parfums, tu as dit : « Je vous salue » ; aux Apôtres tu as donné la paix, toi qui relèves ceux qui étaient tombés.
En ce jour nous célébrons la destruction de la mort, la ruine de l’enfer et les prémices d’une vie nouvelle et éternelle, un Dieu unique et comblé de gloire, le Dieu célébré par nos pères.
O nuit vraiment sacrée et vraiment festive, nuit salutaire et brillante, qui porte l’annonce du jour radieux de la résurrection, où la lumière éternelle, s’élançant du sépulcre avec son corps, a lui sur tous les hommes.
Venez donc, et participons, dans une divine allégresse, aux fruits de notre vigne nouvelle, en ce jour où le Christ ressuscite et proclame sa royauté ; louez-le dans vos cantiques comme le Dieu qui est à jamais.
Lève tes yeux, ô Sion ! Regarde autour de toi et vois : brillants d’une splendeur divine et semblables à des lampes éclatantes, des fils te sont venus de l’Occident et de l’Aquilon, de la mer du Midi et de l’Orient ; ils s’unissent dans ton sein pour bénir le Christ à jamais.
O voix divine ! Voix amie ! Voix pleine de tendresse ! C’est en toute vérité que tu as promis, ô Christ, de demeurer avec nous jusqu’à la consommation du monde ; nous, tes fidèles, appuyés sur l’ancre d’espérance, nous sommes dans la joie.
O Christ, grande Pâque, sainte Pâque ! O Sagesse ! ô Verbe ! ô Vertu de Dieu ! sois notre modèle ; fais-nous participants de ton royaume, lorsque se lèvera le jour qui n’aura pas de couchant.
En ce jour que nous avons consacré à la gloire du divin tombeau, empruntons cette belle Hymne que nous fournit le Propre des Offices de l’Ordre du Saint-Sépulcre.
HYMNE. | |
Dic sepulcri gloriosi,
Læta mens, miracula ; Quo velut matris pudica ; Christus alvo prodiit : Ut prophetarum fideles Paginas spoponderant. | Chante, ô mon âme, avec transport,
les prodiges du sépulcre glorieux, d’où le Christ s’est élancé, comme autrefois du sein de sa chaste mère ; ainsi l’avait annoncé l’oracle fidèle des prophètes. |
In novo conceptus alvo
Virginis puerperæ, In novo compostus antro Conquievit pumicis ; Gloriosus hoc et illa, Vir, puerque prodiit. | Il fut conçu dans les entrailles
d’une vierge sans tache ; il fut enseveli sous un antre où nul corps n’avait encore été placé ; qu’il naisse enfant, qu’homme il s’élance, c’est toujours avec la même gloire. |
Hæc parit corpus caducum,
Omnium spe serius ; Æviternum reddit illud, Omnium spe citius ; Illa pannis involutum, Linteis hoc conditum. | Après l’espoir d’une longue attente,
sa mère l’enfante dans un corps mortel ; avant l’espoir de son retour, le tombeau le restitue immortel ; sa mère l’enveloppa de langes ; dans le sépulcre il était couvert de linceuls. |
Ex sinu matris futuram
Ad salutem nascitur ; At salute jam parata, Rupis alvus reddidit ; Ad crucem parens produxit, At silex ad gloriam. | Du sein de sa mère,
il naît pour accomplir le salut ; des flancs de la roche, il sort, le salut étant consommé ; sa mère l’enfanta pour la croix ; la pierre le rendit pour la gloire. |
Ergo te, cœlestis Agni
Purpurata sanguine Aula ter felix, adorent Terra, pontus, æthera ; Nec sepulcrum quis vocarit, Vita de quo nascitur. | Sanctuaire trois fois heureux,
empourpré du sang de l’Agneau céleste, reçois les adorations de la terre, de la mer et des cieux ; mais tu n’es plus un sépulcre, depuis qu’on a vu la vie sortir de toi. |
Gloria et honor Deo
Usquequaque Altissimo, Una Patri, Filioque, Inclyto Paraclito, Cui laus est, et potestas Per immensa sæcula. Amen. | Gloire et honneur à Dieu Très-Haut ;
gloire unique au Père, au Fils, à l’auguste Paraclet ; puissance et louange dans les siècles éternels. Amen. |
Enfin, ne terminons pas cette journée du Samedi avant d’avoir rendu à Marie nos hommages, en la félicitant sur la glorieuse Résurrection de son Fils. Offrons-lui cette Prose touchante tirée des anciens Missels des Églises d’Allemagne.
SÉQUENCE. | |
Resurgenti tuo nato,
Mater, plaude, qui prostrato Regnat mortis principe ; Tuum virgo pone luctum, Jesum ventris tui fructum Redivivum suscipe. | A vous, o Mère, de fêter
votre fils ressuscité, qui règne victorieux du prince de la mort. O Vierge, cessez votre deuil ; recevez Jésus fruit de vos entrailles ; il revit aujourd’hui. |
Morte prolis cruciata,
Corde dure sauciata Passionis gladio : Voce jubilationis, Jam de resurrectionis Jocundare gaudio. | La mort de ce fils
vous fut cruelle ; le glaive de sa passion traversa votre cœur ; livrez-vous à la joie de sa résurrection ; faites entendre un chant d’allégresse. |
Crucifixum, qui, surrexit
De sepulcro teque vexit Sua in palatia, Nobis placa, supplicamus, A peccatis ut surgamus Ad æterna gaudia. Amen. | Il fut crucifié ;
mais il s’est levé du tombeau ; il vous a introduite dans son palais : apaisez-le en notre faveur ; de l’abîme de nos péchés faites-nous monter aux joies éternelles. Amen. |
La conclusion des fêtes baptismales ramène aujourd’hui les néophytes à la basilique du Latran, près des fonts où ils furent régénérés durant la nuit qui précéda Pâques. Ce sont les derniers moments de leur enfance spirituelle, puisque demain ils seront comme sevrés et prendront place parmi les autres fidèles. C’est pourquoi la liturgie stationnale de ce jour semble plus que jamais éprise de la pureté de leur innocence, telle une tendre mère qui se sent ravie par la beauté de son petit enfant.
En ce jour, dans l’ancienne liturgie romaine, le Pape distribuait au peuple les Agnus Dei de cire bénite, mélangée avec le saint Chrême, et sur lesquels était imprimée l’image de l’Agneau de Dieu. Cette distribution est très ancienne et se faisait pendant la messe, tandis que la Schola Cantorum chantait l’invocation Agnus Dei avant le baiser de paix qui précède la Communion.
Au XIVe siècle, la cérémonie nous est ainsi décrite : Durant le chant de 1’’Agnus Dei, le Pape distribue les Agnus Dei de cire aux cardinaux et aux prélats, les déposant dans leurs mitres. Quand le divin Sacrifice est terminé, il se rend dans le Triclinium et se met à table ; pendant le repas apparaît sur le seuil un acolyte portant un bassin d’argent plein d’Agnus Dei, et qui lui dit : Domine, Domine, isti sunt agni novelli qui annuntiaverunt alléluia ; modo venerunt ad fontes, repleti sunt claritate, alléluia [15].
S’avançant au milieu de la salle, le clerc répète la même annonce ; puis, s’étant approché davantage du Pontife, sur un ton plus élevé il répète avec encore plus d’insistance son message, déposant cette fois le bassin sur la table papale. C’est alors que le Pape commençait la distribution des Agnus Dei à ses familiers, aux prêtres, aux chapelains, aux acolytes, et il en envoyait même en cadeau aux souverains catholiques.
L’introït est tiré du psaume 104 et se rapporte aux néophytes sortis des ténèbres de l’Égypte.
La prière est la suivante : « Dieu tout-puissant, faites qu’après avoir célébré dévotement les fêtes pascales, nous puissions, grâce à elles, arriver aux joies éternelles. Par notre Seigneur, etc. »
Voilà l’esprit de la sainte liturgie : grâce à la fête temporelle, parvenir à l’éternelle fête. Festa Paschalia... egimus. Aujourd’hui, en effet, l’antique liturgie entendait célébrer l’octave de la solennité pascale, en tant qu’elle commençait au soir du samedi saint ; d’un samedi à l’autre on compte les huit jours requis. Pour la Pentecôte on retrouve le même calcul, en sorte que, maintenant encore, le dimanche qui la suit n’est aucunement considéré comme l’octave de la descente du Saint-Esprit. L’octave se termine le samedi à la messe ; aussi le dimanche in albis, où, la fête pascale achevée, on déposait les tuniques blanches, ne fut dénommé que postérieurement in Octava Paschæ.
Durant cette semaine pascale, l’ancienne liturgie romaine ramenait chaque jour les néophytes ad Fontes, au baptistère du Latran, pour imprimer dans leurs âmes un vif souvenir des obligations qu’ils avaient contractées au bord de cette vasque mystérieuse. L’Église romaine, à cette occasion, chantait le verset connu d’Ézéchiel : Vidi aquam egredientem de templo a latere dextro ; J’ai vu l’eau qui sortait du côté droit du temple [16], et, par là, elle voulait insinuer que les eaux du saint Baptême ont précisément jailli du côté ouvert de Jésus, puisque là est l’océan où nos pisciculi secundum Ίχθύν nostrum [17], nous vînmes à la lumière.
Aujourd’hui dans l’épître (I Petr., II, 1-10) saint Pierre explique à ses premières recrues de la milice chrétienne la dignité sublime à laquelle les a élevées le saint Baptême. Pendant un temps, les gentils n’étaient pas considérés comme un peuple légitime, puisqu’ils n’avaient pas reçu, comme les Juifs, la divine promesse. Maintenant, au contraire, le Sacrement de la régénération a fait d’eux une race sainte, un peuple élu, un sacerdoce royal, à la condition toutefois qu’ils s’unissent spirituellement au Christ au moyen d’une foi agissante. Il ne s’agit pas ici de rites matériels et de solidarité extérieure, comme c’était le cas pour le peuple hébreu. Dieu est esprit, et il veut que le chrétien l’adore surtout en esprit et en vérité.
A partir de ce jour, durant tout le temps pascal, le psaume graduel, après l’épître, devient alléluiatique, c’est-à-dire que, à chaque verset du soliste, le peuple répondait par cette exclamation : Alléluia.
« Alléluia, Alléluia. Ps. : C’est le jour, etc. » « Alléluia. Ps.. : Enfants, louez le Seigneur, louez le nom du Seigneur. »
Les enfants, invités ici à louer le Seigneur, sont les néophytes qui assistent à la messe stationnale dans leurs blanches tuniques baptismales. La lecture évangélique qui suit est choisie fort à propos à cause du rôle qu’y jouent Pierre et Jean. Pierre est le « Pasteur » qui, durant toute cette semaine, s’est réservé le droit de paître par sa parole les néophytes ; Jean est l’un des patrons du baptistère du Latran, en sorte que, d’une certaine manière, la station se célèbre aujourd’hui dans sa maison.
Jean, plus jeune et plus ardent dans l’amour, laissa Pierre en arrière dans sa course au tombeau de Jésus. Toutefois, arrivé au bord de l’ouverture par où l’on pénétrait dans la caverne souterraine, il se pencha pour regarder, mais il n’osa pas descendre, à cause d’un certain sentiment de terreur qui lui était inspiré par ce lieu, témoin du miracle accompli. Enfin Pierre arrive, et dans l’impétuosité de sa foi il descend sur-le-champ et invite Jean à l’imiter. Cela nous montre que l’amour doit toujours s’inspirer de la foi, qui, pour cette raison, le précède, et que ces formes vagues de religiosité sentimentale, tant aimées de beaucoup d’âmes modernes, ne s’inspirant point du catéchisme catholique, n’ont aucune efficacité sur la vie de l’individu et constituent une sorte d’état morbide voisin de la superstition, mais non pas un culte vrai et agréable à Dieu.
L’antienne ad offerendum est prise du psaume pascal 117. Désormais, l’Église a donné aux néophytes tout ce qu’elle possédait. Ils se sont présentés à elle au moyen de la foi en Dieu, Dieu les a illuminés. Il ne reste plus à l’Église, au terme de la solennité pascale, qu’à invoquer sur eux dans le lieu saint l’abondance des bénédictions divines. « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur. Nous vous bénissons de la maison du Seigneur. Le Seigneur est Dieu, et il nous a illuminés. Alléluia, alléluia. » Ce beau verset du psaume 117 appartient dans sa première partie au chœur sacerdotal saluant les nouveaux prosélytes. Ceux-ci, avant de déposer les vêtements blancs, sont bénits par les prêtres. Alors les néophytes reconnaissent les immenses bienfaits dont ils ont été comblés par le Seigneur durant cette semaine, et, pleins de gratitude, ils proclament ses magnificences.
Au terme de la solennité pascale, l’Église semble regretter de mettre fin à cette fête. Extérieurement elle s’y résigne, mais à la condition que l’âme célébrera intérieurement une Pâque perpétuelle, comme est perpétuelle, sur les autels, l’immolation de l’Agneau Pascal. C’est là le sens de la collecte suivante sur les oblations. « Faites, Seigneur, que ces mystères de la Pâque nous remplissent toujours de joie, en sorte que l’offrande continuelle du Sacrement de notre Rédemption nous soit un sujet d’éternelle allégresse. Par notre Seigneur, etc. »
L’antienne pour la Communion est fort belle. Les néophytes vont déposer les tuniques reçues après le baptême. Cependant leurs âmes ont pris un autre vêtement spirituel qui ne doit plus jamais être laissé. L’image semble hardie, mais elle est de l’Apôtre dans sa lettre aux Galates (III, 27) : Jésus-Christ y est comparé à un vêtement, car le chrétien étant recouvert des mérites du Sauveur, en doit revivre aussi la vie, les pensées, les affections et jusqu’aux mouvements mêmes du cœur. « Vous tous qui avez été plongés en Jésus-Christ, vous êtes revêtus de lui. »
Dans la prière après la Communion, l’Église se montre soucieuse de voir les néophytes se détachant, pour ainsi dire, de la robe de leur mère, garder jalousement cette foi qu’avec tant de soin, elle leur a enseignée durant toute la longue période de leur préparation catéchétique. Gage de conservation et aliment de cette vraie foi est la divine Eucharistie, le mysterium fidei par excellence, qui, dans le cœur des Martyrs, a alimenté la flamme sacrée les poussant au supplice pour la défense de la foi catholique. « Maintenant que nous avons été réconfortés par votre don, gage de notre rédemption, nous vous demandons, Seigneur, qu’au moyen de ce remède d’éternel salut, la vraie foi prenne toujours plus d’accroissement. Par notre Seigneur, etc. »
La divine Eucharistie n’est pas seulement un gage quelconque de la Rédemption ; elle la contient dans la plus vaste signification du mot, car elle ne se borne pas à commémorer le sacrifice du Golgotha et à nous en appliquer les mérites, mais elle est aussi le germe de la résurrection glorieuse et nous donne dans notre exil, en nous mettant en possession de Dieu, un avant-goût des joies de la patrie céleste.
Jésus apparaît aux Apôtres le soir du jour de Pâques, puis il se montre à eux huit jours après et de nouveau leur souhaite la paix. Au terme de cette semaine séculaire, c’est-à-dire à la fin du monde, Jésus apparaîtra aussi à son Église, et, par le don de sa paix, il la réconfortera contre les dernières persécutions de l’antéchrist.
Vous tous qui avez été baptisés dans le Christ, vous avez revêtu le Christ.
Aujourd’hui, les néophytes portaient pour la dernière fois leurs habits blancs ; ils déposaient ces habits blancs et revêtaient des habits ordinaires. Ils étaient désormais majeurs et recevaient tous les droits de membres de la communauté de Dieu. Pour la première fois, ils portaient eux-mêmes leurs dons à l’autel au moment de l’offrande ; jusqu’ici, leurs parrains le faisaient à leur place.
1. La déposition de la robe baptismale. — Cette journée est entièrement consacrée au symbolisme de la robe baptismale. L’Évangile même peut se ramener à cette pensée. Rappelons-nous qu’au moment de notre baptême nous avons reçu deux insignes de notre dignité chrétienne, — que nous pouvons, après saint Pierre, appeler une dignité sacerdotale : l’habit blanc (représenté par le chrémeau) et le cierge allumé. Le prêtre qui nous baptisa nous avertit que nous devions porter ces deux insignes toute notre vie. « Reçois l’habit blanc et porte-le sans tache devant le tribunal de Notre-Seigneur Jésus-Christ, afin que tu aies la vie éternelle ». « Reçois la lampe allumée et conserve sans reproche la grâce de ton baptême. Observe les commandements de Dieu, afin que, quand le Seigneur viendra pour les noces célestes, tu puisses aller à sa rencontre, avec tous les saints, dans la cour céleste et vivre éternellement ». Quand les nouveaux baptisés déposent aujourd’hui, dans la salle du trésor de l’Église, leurs blancs vêtements baptismaux, il y a dans cette action une signification profonde : ils doivent conserver sans tache le blanc vêtement de l’âme, le vêtement de la grâce, pour recevoir un jour, du juge éternel, la robe de la gloire.
2. L’Office des Heures. — Saint Grégoire commente l’Évangile d’aujourd’hui d’une manière allégorique. « La lecture du saint Évangile que vous venez d’entendre, mes frères, est, dans son extérieur historique, d’une clarté lumineuse. Mais il nous faut essayer d’en scruter les profondeurs cachées. Marie-Madeleine vint de bonne heure au tombeau, comme il faisait encore noir. Historiquement on donne ici l’heure, mais, d’après le sens mystique, on indique l’état d’esprit de celle qui cherche. Marie, en effet, cherchait l’auteur de toutes choses, qu’elle avait vu mort selon la chair, au tombeau ; et parce qu’elle ne le trouvait pas, elle croyait qu’il avait été enlevé. Or, il faisait sombre (dans son esprit) quand elle vint au tombeau. Alors, elle courut rapidement et elle annonça la nouvelle aux disciples. Ceux qui l’aimaient plus ardemment que les autres coururent aussi plus vite que les autres ; c’étaient Pierre et Jean. « Tous les deux coururent ensemble ; mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au tombeau », mais il n’osa pas entrer. Pierre vint plus tard « et entra à l’intérieur ». Que signifie cette course, mes frères ? Doit-on penser que cette description si précise de l’évangéliste est dépourvue de mystère ? Nullement. Jean n’aurait pas raconté qu’il était arrivé le premier et que, cependant, il n’était pas entré, s’il n’y avait pas eu, précisément, dans ce retard, un mystère. Qui est désigné par Jean, sinon la synagogue ? Et qui est désigné par Pierre, sinon l’Église ? Il ne faut pas s’étonner que la synagogue soit désignée par le plus jeune et l’Église par le plus vieux. Si, par rapport au culte de Dieu, la synagogue est plus ancienne que l’Église des Gentils, par rapport à l’usage du monde, la masse des Gentils est plus ancienne que la synagogue, d’après le témoignage de saint Paul qui dit : « Ce n’est pas le spirituel qui vient d’abord, mais le terrestre » [18]. Pierre, le plus âgé, désigne donc l’Église des Gentils et Jean, le plus jeune, la synagogue des Juifs. Tous les deux coururent ensemble. En effet, depuis le commencement du monde, la Gentilité et la synagogue coururent ; ce ne fut sans doute pas dans des sentiments égaux et communs, mais sur un sentier égal et commun. La synagogue arriva plus vite au tombeau, mais elle n’entra pas, car, bien qu’elle ait reçu les prescriptions de la Loi, les prophéties sur l’Incarnation et la Passion du Sauveur, elle ne voulut pas croire à celui qui était mort ».
3. La messe (Eduxit). — La station est aujourd’hui à Saint-Jean de Latran. Voilà huit jours, dans la nuit de Pâques, l’office avait lieu dans l’église baptismale, l’Église-Mère de la chrétienté, qui est dédiée aux deux saint Jean. Durant la semaine, les nouveaux baptisés ont été conduits dans différentes églises. Aujourd’hui, à cette solennité d’adieu, sont présents les deux Jean, mais aussi Pierre, Paul et Madeleine. C’est ici que les néophytes déposent leurs vêtements blancs qui sont conservés dans la chambre du trésor comme gages de la fidélité baptismale, mais aussi comme témoignages contre ceux qui perdraient la grâce baptismale (Sabbatum in albis depositis). — La messe, aussi, traite du symbolisme du vêtement. L’Église console les néophytes obligés de déposer leur vêtement d’honneur ; ils pourront le conserver à jamais dans leur cœur.
a) Ils ne doivent déposer que le vêtement du vieil homme, avec tous les péchés. (C’est intentionnellement que l’Épître commence par ces mots « Déposez... »).
b) Le Christ, lui aussi, a déposé ses vêtements au moment de mourir ; dans sa Résurrection, il a abandonné les blancs vêtements de lin ; ils reposent sur la tablette du tombeau ; ils sont pour Pierre et Jean (l’Église) l’attestation de la Résurrection ; de même, les vêtements blancs déposés dans l’Église doivent être l’attestation de la résurrection spirituelle.
c) Les néophytes ont revêtu, dans le baptême, l’homme nouveau : « Revêtez-vous, comme des élus de Dieu, saints et aimés, de miséricorde cordiale, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience » (Ép.). Bien plus, dans le baptême, c’est le Christ qu’ils ont revêtu. « Vous tous qui avez été baptisés dans le Christ, vous avez revêtu le Christ ». Ils ne doivent jamais se dépouiller du Christ, mais s’en revêtir toujours de nouveau dans l’Eucharistie (Comm.).
Qu’y a-t-il de plus intimement uni à l’homme que son vêtement ? Dans les cultes des mystères païens, les initiés prenaient le vêtement de la divinité et croyaient revêtir la divinité elle-même. Pour nous, chrétiens, ce revêtement est véritable et, dans un sens plus profond : dans le baptême, nous sommes incorporés au Christ. Comme cette parole de saint Paul résonne magnifiquement au moment de la communion !
L’Église adresse aux néophytes un dernier discours avant de les laisser rentrer dans les rangs des chrétiens ordinaires : Songez que le Seigneur vous a conduits hors de l’Égypte ; marchez maintenant pleins de joie vers la terre promise, vers le ciel (Introït). Saint Pierre prononce à l’Épître des paroles saisissantes : Vous êtes des « pierres vivantes », vous devez entrer dans la construction du temple de Dieu dont « la pierre d’angle est le Christ ». Vous êtes devenus « prêtres » ; vous pouvez célébrer le sacrifice de la Nouvelle Alliance (aujourd’hui, pour la première fois, ils participent à l’offrande). Vous êtes une race « élue », un « sacerdoce royal » ; vous devez, par votre vie, « annoncer la force de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière ». Nous clôturons aujourd’hui la solennité pascale ; puisse cette solennité être pour nous la voie et le symbole de l’éternelle joie pascale dans le ciel (Or., Sec.) ! Nous rendons grâces à Dieu, avec ferveur, pour les grâces pascales de cette année. Puisse la joie de la fête de Pâques prolonger ses échos dans notre cœur ! Répétons le grand Alléluia sous la direction de l’Église (aujourd’hui, pour la première fois, il n’y a pas de Graduel, mais seulement Alléluia). Nous recevons une dernière bénédiction de l’Église : « Nous vous bénissons de la maison de Dieu ». Ite, missa est, Alléluia, Alléluia. Deo gratias, Alléluia, Alléluia.
[1] Ex. 3, 14.
[2] Ps. 1, 2.
[3] La première partie de cette Antienne se rapporte à la nature divine de Notre-Seigneur, la seconde à sa nature humaine. Le 1er Psaume nous rappelle que le Christ, l’Homme nouveau a suivi fidèlement la loi du Seigneur, transgressée par le premier homme et que le Seigneur l’a comblé de gloire en ce jour de la Résurrection. Le 2e Psaume nous montre le complot de la Synagogue contre Jésus : les Juifs ont pu immoler le Messie qui devait les sauver ; ils n’ont pu l’enchaîner dans le sépulcre. Le 3e Psaume est une prophétie de la Résurrection du Christ : il s’est endormi dans le tombeau, mais le Seigneur l’a réveillé, et il sera toujours vainqueur de ceux qui s’élèveront contre lui.
[4] Ps. 2, 8.
[5] Ps. 3, 6.
[6] Rom. 6, 9.
[7] « Les acolytes de l’Église romaine font des agneaux de cire nouvelle et bénite, ou de la cire du cierge pascal de l’année précédente en y mêlant du chrême, et le samedi in albis ils sont distribués par le seigneur pape. Ces agneaux désignent l’Agneau sans tache qui efface les péchés du monde : le miel se trouve dans la cire, dit saint Grégoire, et la divinité dans l’humanité. Ils rappellent aussi l’Agneau immolé dans la Pâque ; ils figurent encore les néophytes et ceux-ci sont les agneaux nouveaux que l’Église célèbre aujourd’hui dans ses chants. » (Durand de Mende).
[8] Apoc. 7, 9.
[9] I Cor. 15, 46. Il faut ici se reporter à ce que dit encore saint, Paul au même endroit : « Le premier homme, Adam, a été fait âme vivante ; le dernier Adam, esprit vivifiant », par conséquent, ce qui est spirituel est venu après ; « le premier homme tiré de la terre est terrestre ; le second, venu du Ciel, est céleste. »
[10] Toutes les antiennes sont de Matth. 28, 2-5
[11] « Le jour de la résurrection du Seigneur est appelé le jour que le Seigneur a fait, soit parce que le Christ ressuscitant l’a éclairé comme soleil de justice, soit parce que Dieu se l’est consacré d’une manière particulière » (St Bellarmin), soit encore parce que le triomphe du Seigneur a marqué le début de l’ère chrétienne qui peut bien s’appeler le jour du salut.
[12] Jn. 20, 4.
[13] Isaïe, XI, 10.
[14] De ore prudéntis : 2ème répons Mardi de Pâques ; Isti sunt : 2ème répons Samedi in Albis ; Cándidi facti : 8ème répons Commun des Apôtres et des Martyrs au Temps Pascal.
[15] « Seigneur, Seigneur, ce sont ces agneaux nouvelets qui ont annoncé l’alléluia : ils sont venus récemment à la fontaine, ils sont tout éclatants de blancheur, alléluia. » : 2nd répons des Matines du Samedi in Albis.
[16] Ez., XLVII, 2-9.
[17] « Jésus est notre Poisson symbolique, et nous sommes les petits poissons. » — Tertull., De Baptism., P. L., I, col. 1306. On sait que ce mot grec compose l’acrostiche : Jésus-Christ, Fils de Dieu, Sauveur.
[18] 1 Cor., XV, 46.