Textes de la Messe |
Office |
Dom Guéranger, l’Année Liturgique |
Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum |
Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique |
La Station est dans un sanctuaire situé sur l’Esquilin. Le Pape S. Sylvestre reçut d’un saint prêtre sa maison pour en faire une église. Au VIe siècle, le Pape S. Symmaque en construisit une nouvelle à côté de la première, à un niveau plus élevé et les dédia à S. Sylvestre et à S. Martin, le grand thaumaturge des Gaules. C’est une des 25 paroisses de Rome au Ve siècle. On choisit cette église pour y lire l’Évangile qui parle de résurrection, car, au nom de la Trinité, Saint Martin ressuscita trois morts. Figure des baptisés qui naissent à une vie nouvelle au nom de la Sainte Trinité.
Ant. ad Introitum. Ps. 104, 3-4. | Introït |
Lætétur cor quæréntium Dóminum : quǽrite Dóminum, et confirmámini : quǽrite fáciem eius semper. | Que le cœur de ceux qui cherchent le Seigneur se réjouisse ! Cherchez le Seigneur, et soyez remplis de force, cherchez sans cesse son visage. |
Ps. ibid., 1. | |
Confitémini Dómino, et invocáte nomen eius : annuntiáte inter gentes ópera eius. | Célébrez le Seigneur, et invoquez son nom ; annoncez ses œuvres parmi les nations. |
V/.Glória Patri. | |
Oratio. | Collecte |
Præsta, quǽsumus, omnípotens Deus : ut, quos ieiúnia votíva castígant, ipsa quoque devótio sancta lætíficet ; ut, terrénis afféctibus mitigátis, facílius cæléstia capiámus. Per Dóminum. | Faites, nous vous en supplions, ô Dieu tout-puissant, que, nous mortifiant par ces jeûnes solennels, nous ressentions la joie d’une dévotion sainte, en sorte que l’ardeur de nos affections terrestres étant diminuée, nous goûtions plus aisément les choses du ciel. Par. |
Léctio libri Regum. | Lecture du livre des Rois. |
4 Reg. 4, 25-38. | |
In diébus illis : Venit múlier Sunamítis ad Eliséum in montem Carméli : cumque vidísset eam vir Dei e contra, ait ad Giézi púerum suum : Ecce Sunamítis illa. Vade ergo in occúrsum eius, et dic ei : Recte ne ágitur circa te, et circa virum tuum, et circa fílium tuum ? Quæ respóndit : Recte. Cumque venísset ad virum Dei in montem, apprehéndit pedes eius : et accéssit Giézi, ut amovéret eam. Et ait homo Dei : Dimítte illam : ánima enim eius in amaritúdine est, et Dóminus celávit a me, et non indicávit mihi. Quæ dixit illi : Numquid petívi fílium a dómino meo ? Numquid non dixi tibi : Ne illúdas me ? Et ille ait ad Giézi : Accínge lumbos tuos, et tolle báculum meum in manu tua, et vade. Si occurrérit tibi homo, non salútes eum : et si salutáverit te quíspiam, non respóndeas illi : et pones báculum meum super fáciem púeri. Porro mater pueri ait : Vivit Dóminus et vivit ánima tua, non dimíttam te. Surréxit ergo, et secútus est eam. Giézi autem præcésserat ante eos, et posúerat báculum super fáciem púeri, et non erat vox neque sensus : reversúsque est in occúrsum eius, et nuntiávit ei, dicens : Non surréxit puer. Ingréssus est ergo Eliséus domum, et ecce, puer mórtuus iacébat in léctulo eius : ingressúsque clausit óstium super se et super púerum : et orávit ad Dóminum. Et ascéndit, et incúbuit super púerum : posuítque os suum super os eius, et óculos suos super óculos eius, et manus suas super manus eius : et incurvávit se super eum : et calefácta est caro púeri. At ille revérsus, de ambulávit in domo, semel huc atque illuc : et ascéndit et incúbuit super eum : et oscitávit puer sépties, aperuítque oculos. At ille vocávit Giézi, et dixit ei : Voca Sunamítidem hanc. Quæ vocáta ingréssa est ad eum. Qui ait : Tolle fílium tuum. Venit illa, et córruit ad pedes eius, et adorávit super terram : tulítque fílium suum, et egréssa est, et Eliséus revérsus est in Gálgala. | En ces jours-là une femme de Sunam vint trouver le prophète Elisée, sur la montagne du Carmel ; et, lorsque l’homme de Dieu l’eut aperçue de loin, il dit à Giézi son serviteur : Voilà cette Sunamite. Va au-devant d’elle, et dis-lui : Tout va-t-il bien pour vous, et pour votre mari, et pour votre fils ? Et elle lui répondit : Bien. Et lorsqu’elle fut arrivée auprès de l’homme de Dieu sur la montagne, elle lui saisit les pieds, et Giézi s’approcha pour l’éloigner. Mais l’homme de Dieu lui dit : Laisse-la ; son âme est dans l’amertume, et le Seigneur me l’a caché et ne me l’a pas révélé. Alors cette femme lui dit : Vous ai-je demandé un fils, mon seigneur ? Ne vous ai-je pas dit : Ne me trompez pas ? Elisée dit à Giézi : Ceins tes reins, prends mon bâton dans ta main, et pars. Si tu rencontres quelqu’un, ne le salue point ; et si quelqu’un te salue, ne lui réponds pas, et mets mon bâton sur le visage de l’enfant. Mais la mère de l’enfant dit à Elisée : Vive le Seigneur et vive votre âme, je ne vous quitterai pas. Il alla donc avec elle, et il la suivit. Cependant Giézi les avait précédés, et il avait mis le bâton sur le visage de l’enfant. Mais il n’y avait ni voix ni sentiment ! Il revint au-devant de son maître, et lui dit : L’enfant n’est pas ressuscité. Elisée entra donc dans la maison, et il trouva l’enfant mort couché sur son lit. Il ferma aussitôt la porte sur lui et sur l’enfant, et invoqua le Seigneur. Il monta alors sur le lit et se coucha sur l’enfant. Il mit sa bouche sur sa bouche, ses yeux sur ses yeux et ses mains sur ses mains, et il se courba sur lui, et la chair de l’enfant fut échauffée. Et Elisée s’éloigna, alla ça et là dans la maison, puis il remonta sur le lit et se coucha sur l’enfant. Alors l’enfant éternua sept fois, et ouvrit les yeux. Elisée appela Giézi, et lui dit : Fais venir cette Sunamite, elle vint et entra dans la chambre. Elisée lui dit : Prenez votre fils. Et elle s’approcha de lui et se jeta à ses pieds et se prosterna contre terre et ayant pris son fils, elle s’en alla. Et Elisée retourna à Galgala. |
Graduale. Ps. 73, 20, 19 et 22. | Graduel |
Réspice, Dómine, in testaméntum tuum : et ánimas páuperum tuórum ne obliviscáris in finem. | Ayez égard, Seigneur, à votre alliance, et n’oubliez pas pour toujours les âmes de vos pauvres. |
V/. Exsúrge, Dómine, iúdica causam tuam : memor esto oppróbrii servórum tuórum. | Levez-vous, Seigneur, jugez votre cause, souvenez-vous de l’outrage qu’endurent vos serviteurs. |
+ Sequéntia sancti Evangélii secundum Lucam. | Lecture du Saint Evangile selon saint Luc. |
Luc. 7, 11-16. | |
In illo témpore : Ibat Iesus in civitátem, quæ vocátur Naim : et ibant cum eo discípuli eius et turba copiósa. Cum autem appropinquáret portæ civitátis, ecce, defúnctus efferebátur fílius únicus matris suæ : et hæc vidua erat, et turba civitátis multa cum illa. Quam cum vidísset Dóminus, misericórdia motus super eam, dixit illi : Noli flere. Et accéssit et tétigit lóculum. (Hi autem, qui portábant, steterunt.) Et ait : Adoléscens, tibi dico, surge. Et resédit, qui erat mórtuus, et cœpit loqui. Et dedit illum matri suæ. Accepit autem omnes timor : et magnificábant Deum, dicéntes : Quia Prophéta magnus surréxit in nobis : et quia Deus visitávit plebem suam. | En ce temps-là, Jésus se rendait dans une ville appelée Naïm ; et ses disciples allaient avec lui, ainsi qu’une foule nombreuse. Et comme il approchait de la porte de la ville, voici qu’on emportait un mort, fils unique de sa mère, et celle-ci était veuve ; et il y avait avec elle beaucoup de personnes de la ville. Lorsque le Seigneur l’eut vue, touché de compassion pour elle, il lui dit : Ne pleure point. Puis il s’approcha, et toucha le cercueil. Ceux qui le portaient s’arrêtèrent. Et il dit : Jeune homme, je te l’ordonne, lève-toi. Et le mort se mit sur son séant, et commença à parler. Et Jésus le rendit à sa mère. Tous furent saisis de crainte, et ils glorifiaient Dieu, en disant : Un grand prophète a surgi parmi nous, et Dieu a visité son peuple. |
Ant. ad Offertorium. Ps. 69, 2,3 et 4. | Offertoire |
Dómine, ad adiuvándum me festína : confundántur omnes, qui cógitant servis tuis mala. | Seigneur, hâtez-vous de me secourir : Qu’ils soient confondus tous ceux qui me veulent du mal. |
Secreta. | Secrète |
Purífica nos, misericors Deus : ut Ecclésiæ tuæ preces, quæ tibi gratæ sunt, pia múnera deferéntes, fiant expiátis méntibus gratióres. Per Dóminum. | Purifiez-nous, Dieu de miséricorde, en sorte que les prières de votre Église qui vous sont toujours agréables, vous deviennent plus agréables encore, nos offrandes pieuses vous étant apportées avec des âmes libres de toute faute. Par N.-S. |
Præfatio de Quadragesima. | Préface du Carême . |
Ant. ad Communionem. Ps. 70, 16-17 et 18. | Communion |
Dómine, memorábor iustítiæ tuæ solíus : Deus, docuísti me a iuventúte mea : et usque in senéctam et sénium, Deus, ne derelínquas me. | Seigneur, je me rappellerai votre justice, la vôtre seule ; ô Dieu, vous m’avez instruit dès ma jeunesse, et jusqu’à la vieillesse et aux cheveux blancs, ô Dieu, ne m’abandonnez pas. |
Postcommunio. | Postcommunion |
Cæléstia dona capiéntibus, quǽsumus, Dómine : non ad iudícium proveníre patiáris, quæ fidélibus tuis ad remédium providísti. Per Dóminum nostrum. | Nous vous en supplions, Seigneur, ne souffrez pas que ces dons célestes tournent à la condamnation de ceux qui les reçoivent, car vous les avez providentiellement donnés à vos fidèles comme un remède. Par Notre-Seigneur. |
Super populum : Orémus. Humiliáte cápita vestra Deo. | Sur le peuple : Prions. Humiliez vos têtes devant Dieu. |
Oratio. | Prière |
Pópuli tui, Deus, institútor et rector, peccáta, quibus impugnátur, expélle : ut semper tibi plácitus, et tuo munímine sit secúrus. Per Dóminum. | O Dieu, fondateur et guide de votre peuple, écartez de lui les fautes qui l’accablent, afin que vous étant toujours agréable, il soit aussi en sécurité sous votre protection. Par Notre-Seigneur. |
A MATINES
Invitatorium | Invitatoire |
Non sit vobis vanum mane súrgere ante lucem : * Quia promísit Dóminus corónam vigilántibus. | Ne pensez- pas que ce soit vain de vous lever le matin avant le jour : * Car le Seigneur a promis la couronne à ceux qui veillent. |
Ex more docti mýstico (matines du Carême)
Lectio i | 1ère leçon |
Léctio sancti Evangélii secúndum Lucam. | Lecture du saint Évangile selon saint Luc. |
Cap. 2, 13-25 | |
In illo témpore : Ibat Iesus in civitátem, quæ vocátur Naim : et ibant cum eo discípulus eius, et turba copiósa. Et réliqua. | En ce temps-là : Jésus s’en alla dans une ville appelée Naïm ; et ses disciples l’accompagnaient, ainsi qu’une foule nombreuse. Et le reste. |
Homilía sancti Ambrósii Epíscopi | Homélie de saint Ambroise, Évêque. |
Lib. 5 Comment. in Luc. c. 7, post initium | |
Et hic locus ad utrámque redúndat grátiam ; et ut cito flecti divínam misericórdiam matris víduæ lamentatióne credámus, eius præcípue, quæ únici fílii vel labóre, vel morte frangátur ; cui tamen víduæ gravitátis méritum exsequiárum turba concíliet : et ut hanc víduam populórum turba septam, plus vidéri esse quam féminam, quæ resurrectiónem únici et adolescéntis fílii suis lácrimis merúerit impetráre : eo quod sancta Ecclésia pópulum iuniórem a pompa fúneris atque a suprémis sepúlcri, suárum révocet ad vitam contemplatióne lacrimárum : quæ flere prohibétur eum, cui resurréctio debebátur. | Cet endroit de l’Évangile se rapporte à l’une et à l’autre grâce (dont nous allons parler). Il a d’abord pour but de nous donner l’assurance que la miséricorde divine se laisse vite fléchir par les gémissements d’une mère veuve, et surtout d’une mère brisée par la maladie ou la mort de son fils unique, d’une veuve enfin dont le mérite et la gravité sont prouvés par la foule qui l’accompagne aux funérailles. Il est destiné encore à nous faire voir plus qu’une simple femme dans cette veuve, entourée d’une grande foule de peuple, qui mérita d’obtenir par ses larmes la résurrection d’un jeune homme, son fils unique ; parce que cette veuve est l’image de la sainte Église, qui, en considération de ses larmes, obtient de rappeler du sein des pompes funèbres ou des profondeurs du sépulcre, pour le faire revenir à la vie, un jeune peuple qu’on lui a défendu de pleurer [1], parce que la résurrection lui est promise. |
R/. Locútus est Dóminus ad Móysen, dicens : Descénde in Ægýptum, et dic Pharaóni, * Ut dimíttat pópulum meum : indurátum est cor Pharaónis : non vult dimíttere pópulum meum, nisi in manu forti. | R/. Le Seigneur parla à Moïse [2], disant : Descend en Egypte, et dit à Pharaon : * Qu’il laisse aller mon peuple ; le cœur de Pharaon est endurci, il ne veut pas laisser aller mon peuple, s’il n’y est contraint par une main forte. |
V/. Clamor filiórum Israël venit ad me, vidíque afflictiónem eórum : sed veni, mittam te ad Pharaónem. | V/. La clameur des enfants d’Israël est venue jusqu’à moi et j’ai vu leur affliction, mais viens, et je t’enverrai à Pharaon. |
R/. Ut dimíttat pópulum meum : indurátum est cor Pharaónis : non vult dimíttere pópulum meum, nisi in manu forti. | R/. Qu’il laisse aller mon peuple ; le cœur de Pharaon est endurci, il ne veut pas laisser aller mon peuple, s’il n’y est contraint par une main forte. |
Lectio ii | 2e leçon |
Qui quidem mórtuus in lóculo materiálibus quátuor ad sepúlcrum ferebátur eleméntis, sed spem resurgéndi habébat, quia ferebátur in ligno. Quod etsi nobis ante non próderat, tamen posteáquam Iesus id tétigit, profícere cœpit ad vitam : ut esset indício, salútem pópulo per crucis patíbulum refundéndam. Audíto ígitur Dei verbo, stetérunt acérbi illi fúneris portitóres, qui corpus humánum letháli fluxu natúræ materiális urgébant. Quid enim áliud, nisi quasi in quodam féretro, hoc est, suprémi fúneris instruménto, iacémus exánimes, cum vel ignis immódicæ cupiditátis exǽstuat, vel frígidus humor exúndat, vel pigra quadam terréni córporis habitúdine vigor hebetátur animórum ; vel concréta noster spíritus labe, puræ lucis vácuus mentem alit ? Hi sunt nostri fúneris portitóres. | Le mort était porté au tombeau dans un cercueil par les quatre éléments matériels [3] ; mais il avait l’espoir de ressusciter puisqu’il était porté dans du bois. Bien que le bois ne nous ait pas été utile autrefois, il a néanmoins, depuis que Jésus-Christ l’a touché, commencé à servir pour la vie ; afin de montrer que le salut devait être rendu au monde par le gibet de la croix. En entendant la parole de Dieu, ils s’arrêtèrent donc, ces impitoyables conducteurs de convois funèbres qui poussaient le corps humain vers la dissolution, par suite du cours mortel de la nature matérielle. Et nous, ne gisons-nous pas inanimés sur la civière mortuaire, c’est-à-dire sur un instrument des dernières pompes funèbres, lorsque le feu des passions déréglées nous brûle, ou que la froideur inonde nos âmes ou bien quand nous sentons la vigueur de notre esprit s’émousser sous le poids de ce corps terrestre et paresseux, ou encore lorsque la pure lumière faisant défaut à notre esprit, il nourrit notre âme d’un air épais et vicié ? Voilà les porteurs qui nous mènent au tombeau. |
R/. Stetit Móyses coram Pharaóne, et dixit : Hæc dicit Dóminus : * Dimítte pópulum meum, ut sacríficet mihi in desérto. | R/. Moïse se présenta [4] devant Pharaon et lui dit : Voici ce que dit le Seigneur : * Laisse aller mon peuple, afin qu’il me sacrifie dans le désert. |
V/. Dóminus Deus Hebræórum misit me ad te, dicens. | V/. Le Seigneur, Dieu des Hébreux, m’a envoyé te dire : |
R/. Dimítte pópulum meum, ut sacríficet mihi in desérto. | R/. Laisse aller mon peuple, afin qu’il me sacrifie dans le désert. |
Lectio iii | 3e leçon |
Sed quamvis supréma mortis spem vitæ omnis aboléverint, et túmulo próxima córpora iáceant defunctórum : verbo tamen Dei iam mórtua resúrgunt cadávera : vox redit, rédditur fílius matri, revocátur a túmulo, erípitur a sepúlcro. Quis iste est túmulus tuus, nisi mali mores ? Túmulus tuus perfídia est : sepúlcrum tuum guttur est. Sepúlcrum enim patens, est guttur eórum, unde verba mórtua proferúntur. Ab hoc sepúlcro te líberat Christus : ab hoc túmulo surges, si audias verbum Dei. Et si grave peccátum est, quod pœniténtiæ lácrimis ipse laváre non possis ; fleat pro te mater Ecclésia, quæ pro singulis tamquam pro únicis fíliis vídua mater intérvenit. Compátitur enim quodam spiritáli dolóre natúræ, cum suos líberos lethálibus vítiis ad mortem cernit urgéri. | Mais quoique les derniers devoirs rendus aux morts aient enlevé toute espérance de vie, et que les corps des défunts gisent déjà près du tombeau, cependant, à la parole de Dieu, les cadavres ressuscitent aussitôt, la voix leur revient, un fils est rendu à sa mère, il est rappelé du tombeau, arraché du sépulcre. Quel est pour toi ce tombeau, sinon les mauvaises habitudes ? Ton tombeau, c’est ta déloyauté ; ton gosier est un sépulcre : « C’est un sépulcre ouvert que leur gosier » [5], d’où sont proférées des paroles de mort. Le Christ te délivre de ce sépulcre ; tu sortiras de ce tombeau si tu écoutes la parole de Dieu. Et s’il est un péché grave que tu ne puisses laver toi-même par les larmes de la pénitence, que l’Église ta mère pleure pour toi, elle qui intervient en faveur de chacun de ses enfants, comme une mère veuve pour son fils unique, car elle est pleine de compassion et éprouve une douleur spirituelle qui lui est propre, lorsqu’elle voit ses enfants entraînés à leur perte par des vices mortels. |
R/. Cantémus Dómino : glorióse enim honorificátus est, equum et ascensórem proiécit in mare : * Adiútor et protéctor factus est mihi Dóminus in salútem. | R/. Chantons [6] le Seigneur car il s’est glorieusement signalé ; il a précipité dans la mer le cheval et celui qui le montait. * Le Seigneur est devenu mon aide et mon protecteur pour me sauver. |
V/. Dóminus quasi vir pugnátor. Omnípotens nomen eius. | V/. Le Seigneur est comme un combattant, le tout-puissant est son nom. |
* Adiútor et protéctor factus est mihi Dóminus in salútem. Glória Patri. * Adiútor et protéctor factus est mihi Dóminus in salútem. | * Le Seigneur est devenu mon aide et mon protecteur pour me sauver. Gloire au Père. * Le Seigneur est devenu mon aide et mon protecteur pour me sauver. |
A LAUDES
O sol salútis, íntimis (laudes du Carême)
Ad Bened. Ant. Ibat Iesus * in civitátem, quæ vocátur Naim : et ecce defúnctus efferebátur fílius únicus matris suæ. | Ant. au Bénédictus Jésus s’en alla * dans une ville appelée Naïm : et voilà qu’on emportait un mort, fils unique de sa mère. |
AUX VÊPRES
Audi, benígne Cónditor (vêpres du Carême)
Ad Magnificat Ant. Prophéta magnus * surréxit in nobis, et quia Deus visitávit plebem suam. | Ant. au Magnificat Un grand Prophète * s’est levé parmi nous, et Dieu a visité son peuple. |
La Station est à l’Église de Saint-Sylvestre-et-Saint-Martin aux Monts, l’une des plus vénérées de la piété romaine. Élevée d’abord par le pape saint Sylvestre, dont elle a retenu le nom et le patronage, elle était consacrée, dès le VIe siècle, au grand thaumaturge des Gaules, saint Martin. Au VIIe siècle on y apporta de la Chersonèse le corps du saint pape Martin, qui avait mérité la couronne du martyre peu d’années auparavant. Cette Église a été le premier titre cardinalice de saint Charles Borromée, et, au siècle dernier, celui du Bienheureux cardinal Joseph-Marie Tommasi, savant liturgiste, dont on y vénère aussi le corps.
LEÇON
Toutes les merveilles du plan divin pour le salut de l’homme sont réunies dans cette mystérieuse narration ; empressons-nous de les y découvrir, afin que nous n’ayons rien à envier à nos Catéchumènes. Cet enfant mort, c’est le genre humain que le péché a privé de la vie ; mais Dieu a résolu de le ressusciter. D’abord un serviteur est envoyé près du cadavre ; ce serviteur est Moïse. Sa mission est de Dieu ; mais, par elle-même, la loi qu’il apporte ne donne pas la vie. Cette loi est figurée par le bâton que Giézi tient à la main, et dont il essaie en vain le contact sur le corps de l’enfant. La Loi n’est que rigueur : elle établit un régime de crainte, à cause de la dureté du cœur d’Israël ; mais elle triomphe à peine de cette dureté ; et les justes dans Israël, pour être vraiment justes, doivent aspirer à quelque chose de plus parfait et de plus filial que la loi du Sinaï. Le Médiateur, qui doit tout adoucir en apportant du ciel l’élément de la charité, n’est pas venu encore ; il est promis, il est figuré ; mis il ne s’est pas fait chair, il n’a pas encore habité parmi nous. Le mort n’est pas ressuscité. Il faut que le Fils de Dieu descende lui-même.
Élisée est la figure de ce divin Rédempteur. Voyez comme il se rapetisse à la mesure du corps de l’enfant, comme il s’unit étroitement à tous ses membres dans le mystérieux silence de cette chambre fermée. C’est ainsi que le Verbe du Père, voilant sa splendeur au sein d’une vierge, s’y est uni à notre nature, et, « prenant la forme de l’esclave, s’est anéanti jusqu’à devenir semblable à l’homme [7] », « afin de nous rendre la vie, et une vie plus abondante encore [8] » que celle que nous avions eue au commencement. Observez aussi ce qui se passe dans l’enfant, et quelles sont les marques de la résurrection qui s’opère en lui. Sept fois sa poitrine se dilate, et il aspire, afin de marquer par ce mouvement que l’Esprit aux sept dons reprendra possession de l’âme humaine qui doit être son temple. Il ouvre les yeux, pour signifier la fin de cet aveuglement qui est le caractère de la mort : car les morts ne jouissent plus de la lumière, et les ténèbres du tombeau sont leur partage. Enfin considérez cette femme, cette mère : c’est la figure de l’Église qui implore de notre divin Élisée la résurrection de ses chers Catéchumènes, de tous les infidèles qui sont encore sous les ombres de la mort [9] ; unissons-nous à sa prière, et efforçons-nous d’obtenir que la lumière de l’Évangile s’étende de plus en plus, et que les obstacles qu’apporte à sa propagation la perfidie de Satan, jointe à la malice des hommes, disparaissent sans retour.
ÉVANGILE.
Aujourd’hui et demain encore, la sainte Église ne cesse de nous offrir des types de la résurrection : c’est l’annonce de la Pâque prochaine, et en même temps un encouragement à l’espérance pour tous les morts spirituels qui demandent à revivre. Avant d’entrer dans les deux semaines consacrées aux douleurs du Christ, l’Église rassure ses enfants sur le pardon qui les attend, en leur offrant le spectacle consolant des miséricordes de celui dont le sang est notre réconciliation. Délivrés de toutes nos craintes, nous serons plus à nous-mêmes pour contempler le sacrifice de notre auguste victime, pour compatir à ses douleurs. Ouvrons donc les yeux de l’âme, et considérons la merveille que nous offre notre Évangile. Une mère éplorée conduit le deuil de son fils unique, et sa douleur est inconsolable. Jésus est touché de compassion ; il arrête le convoi ; sa main divine touche le cercueil ; et sa voix rappelle à la vie le jeune homme dont le trépas avait causé tant de larmes. L’écrivain sacré insiste pour nous dire que Jésus le rendit à sa mère. Quelle est cette mère désolée, sinon la sainte Église qui mène le deuil d’un si grand nombre de ses enfants ? Jésus s’apprête à la consoler. Il va bientôt, par le ministère de ses prêtres, étendre la main sur tous ces morts ; il va bientôt prononcer sur eux la parole qui ressuscite ; et l’Église recevra dans ses bras maternels tous ces fils dont elle pleurait la perte, et qui seront pleins de vie et d’allégresse.
Considérons le mystère des trois résurrections opérées par le Sauveur : celle de la fille du prince de la synagogue [10], celle du jeune homme d’aujourd’hui, et celle de Lazare, à laquelle nous assisterons demain. La jeune fille ne fait que d’expirer ; elle n’est pas ensevelie encore : c’est l’image du pécheur qui vient de succomber, mais qui n’a pas contracté encore l’habitude et l’insensibilité du mal. Le jeune homme représente le pécheur qui n’a voulu faire aucun effort pour se relever, et chez lequel la volonté a perdu son énergie : on le conduit au sépulcre ; et, sans la rencontre du Sauveur, il allait être rangé parmi ceux qui sont morts à jamais. Lazare est un symbole plus effrayant encore. Déjà il est en proie à la corruption. Une pierre roulée sur le tombeau condamne le cadavre à une lente et irrémédiable dissolution. Pourra-t-il revivre ? Il revivra si Jésus daigne exercer sur lui son divin pouvoir. Or, en ces jours où nous sommes, l’Église prie, elle jeûne ; nous prions, nous jeûnons avec elle, afin que ces trois sortes de morts entendent la voix du Fils de Dieu, et qu’ils ressuscitent. Le mystère de la Résurrection de Jésus-Christ va produire son merveilleux effet à ces trois degrés. Associons-nous aux desseins de la divine miséricorde ; faisons instance, jour et nuit, auprès du Rédempteur, afin que, dans quelques jours, nous puissions, à la vue de tant de morts rendus à la vie, nous écrier avec les habitants de Naïm : « Un grand Prophète s’est levé « parmi nous, et Dieu a visité son peuple. »
Nous plaçons ici ce beau cantique de l’Église gothique d’Espagne, aux premiers siècles. Il s’adresse aux Catéchumènes admis au Baptême ; mais plus d’un de ses traits peut s’appliquer aux pécheurs qui vont être réconciliés.
HYMNE. | |
Breviar. gothicum. Sabbato Hebdomadæ V in Quadragesima. | |
Vocaris ad vitam, sacrum Dei genus,
Creator adsciscens, amat quæ condidit : Redemptor attrahit benigno spiritu ; Venite, dicit, vester unus sum Deus. | On t’appelle à la vie, peuple saint de Dieu ; le Créateur t’invite ; il aime l’œuvre de ses mains. Le Rédempteur dans sa bénignité attire les hommes ; il leur dit : Venez, je suis votre Dieu unique. |
Prorsus relicto claritatis lumine,
Ingens chaos vos pessime concluserat : Locus beatitudinis jam non erat ; Cruenta terra qua remors intraverat. | Vous aviez fui l’éclat de la lumière ; un immense chaos vous environnait ; le séjour du bonheur n’était plus pour vous ; la mort sanglante avait fait son entrée sur la terre. |
En, mitis adveni, creans et recreans Deus :
Potens, infirmitatis particeps vestræ Valenter vos feram, concurrite ; Ut jam receptet vos ovile gaudii. | Moi, le Dieu qui crée et qui ressuscite, je suis arrivé plein de douceur ; je viens participer à votre infirmité ; dans ma puissance je vous porterai sans effort ; accourez à moi ; le bercail joyeux est prêt à vous recevoir. |
Signo crucis frons prænotetur indito :
Aures, et os perfusa signet unctio : Præbete dictis cordis aurem : vividum Confessionis personate canticum. | Le front va être marqué du signe de la croix ; les oreilles et la bouche seront consacrées par l’onction ; prêtez l’oreille du cœur à l’enseignement ; chantez avec ardeur le Symbole comme un cantique vivifiant. |
Omnes novo estote læti nomine :
Omnes novæ sortis fovet hæreditas : Nullus manebit servus hosti subditus : Eritis unius Dei regnum manens. | Réjouissez vous de votre nom nouveau ; vous êtes appelés à recueillir un nouvel héritage ; nul de vous ne sera désormais l’esclave soumis à son ennemi ; vous serez le royaume permanent du seul Dieu. |
Honor sit æterno Deo, sit gloria
Uni Patri, ejusque soli Filio, Cum Spiritu ; quas Trinitas perenniter Vivit potens in sæculorum sæcula. Amen. | Honneur au Dieu éternel ; gloire au Père unique, au Fils unique aussi et à l’Esprit : Trinité qui vit, à jamais puissante, dans les siècles des siècles. Amen. |
L’église de Saint-Cyr, au pied du Quirinal, fut dédiée par le pape Vigile en l’honneur, probablement, des saints diacres Etienne et Laurent ; mais plus tard, grâce à l’influence des Byzantins, elle changea de nom et prit celui des martyrs orientaux Cyr et Julitte, les mêmes qui sont vénérés particulièrement dans un oratoire de Sainte-Marie-Antique au Forum romain.
La basilique stationnale est l’ancien titre d’Équitius, érigé au temps du pape saint Sylvestre. Par la suite, s’élevèrent à ses côtés, par les soins du pape Symmaque, deux célèbres oratoires, celui de Saint-Martin de Tours et celui de Saint-Sylvestre pape, les premiers confesseurs auxquels, après les martyrs, ait été attribué un culte liturgique. Ils attirèrent vite à eux toute la dévotion du peuple ; si bien que le fondateur du titre étant tombé en oubli, son nom fut changé en celui des Saints-Sylvestre-et-Martin.
Serge Ier y entreprit des restaurations grandioses ; mais n’ayant pu les conduire à bonne fin, prévenu qu’il fut par la mort, Léon IV les acheva, et annexa aussi à l’église un monastère pour le service divin.
COENOBIVMQVE • SACRVM • STATUIT • MONACHOSQVE • LOCAVIT
QUI • DOMINO • ASSIDVAS • VALEANT • PERSOLVERE • LAVDES
Cette basilique est très riche en corps d’anciens martyrs, transportés des cimetières suburbains au IXe siècle. Le bienheureux cardinal Tommasi en fut titulaire, et il voulut y être enseveli.
Comme la station de ce jour n’est pas primitive et remonte seulement à l’époque de Grégoire II, les divers chants de la messe sont empruntés à d’autres jours. L’introït est celui du vendredi des Quatre-Temps de septembre, et provient du psaume 104 : « Que le cœur de ceux qui cherchent le Seigneur se réjouisse. Cherchez le Seigneur et sa puissance ; cherchez sans cesse son visage. » Chercher le Seigneur, veut dire l’avoir, Lui et sa gloire, pour fin de nos actions ; c’est vivre et agir en présence de Dieu, pour Lui et non pour nous.
Dans la collecte, identique à celle d’hier après la première lecture, on invoque la joie du Saint-Esprit et une dévotion fervente, en faveur de ceux qui mortifient leur corps par le jeûne. Il est impossible d’unir les consolations des sens et celles de l’esprit ; leurs goûts sont en parfaite opposition. Quand les sens jouissent, l’esprit devient comme obscurci par la fumée des passions charnelles ; au contraire, plus l’âme imprime dans la chair les stigmates de la croix, plus elle se sent libre et pure, plus son regard est clair et perspicace.
Les lectures de la messe racontent deux résurrections opérées, l’une par Élisée, l’autre par le Sauveur. Ce choix semble inspiré par les souvenirs de la voisine nécropole de la via Merulana ; toutefois ces lectures contiennent une belle allusion au thaumaturge de Tours, si célèbre chez les anciens, parce que in fide Trinitatis trium mortuorum suscitator meruit esse magnificus. La résurrection miraculeuse des défunts arrive à propos pour nous rappeler aussi que la sainte abstinence et la communion nous confèrent un droit spécial à la résurrection glorieuse au dernier jour.
La première lecture est tirée du IVe livre des Rois (IV, 25-38) où nous devons remarquer que l’enfant qui ne put être rappelé à la vie par le bâton du prophète Élisée, se réveilla toutefois au souffle léger de sa bouche. Cela doit apprendre aux supérieurs, et, en général, à tous, que dans nos relations avec le prochain les moyens les plus énergiques ne sont pas toujours les plus efficaces, et que, comme le disait spirituellement le saint évêque de Genève, on prend plus de mouches avec le miel qu’avec le vinaigre.
Le graduel est tiré du psaume 73, et il est emprunté au XIIIe dimanche après la Pentecôte : « Souvenez-vous de votre alliance, et n’abandonnez pas à jamais vos pauvres. Levez-vous, Seigneur, jugez votre cause ; n’oubliez pas les outrages que souffrent vos serviteurs. » L’alliance de Dieu est la promesse messianique faite à Abraham et aux patriarches ; cette promesse, à la différence de l’ancien pacte bilatéral conclu entre Dieu et les Juifs par l’intermédiaire de Moïse, a un caractère parfaitement gratuit et elle est irrévocable.
La lecture évangélique (Luc., VII, 11-16), avec le récit de la résurrection du fils de la veuve de Naïm, est empruntée au XVe dimanche après la Pentecôte. Cette veuve symbolise l’Église, qui, à force de prières et de larmes, obtient du Seigneur la conversion des pécheurs et leur renaissance à la grâce. Les fossoyeurs qui transportent au tombeau notre cercueil, ce sont les sens, les passions, menant grand bruit autour de l’âme qui, comme prise de vertige, est morte et ne le sait pas. La première grâce que Dieu nous accorde est de faire arrêter ces funestes porteurs de notre bière ; quand le tumulte des passions se calme, il se fait dans l’âme un profond silence, et alors elle commence à réfléchir sur son sort. Combien donc il est nécessaire que la grâce divine dissipe en nous tant d’illusions qui nous font croire être ce que nous ne sommes point ! Semblables en cela à cet ange de l’Apocalypse, à qui Dieu dit : Nomen habes quod vivas, et mortuus es (III, 1).
L’offertoire est pris du psaume 69 et il était particulièrement cher à la piété des anciens Pères du désert, qui récitaient ce verset comme prière jaculatoire très souvent durant la journée : « Seigneur, accourez à mon aide. Qu’ils demeurent confondus ceux qui font des complots contre moi. » Le cœur de Dieu ne sait pas résister à la voix d’un fils qui l’appelle à son secours, et nous avons le Seigneur à nos côtés toutes les fois que nous crions vers lui avec amour.
Les prières et le sacrifice de l’Épouse mystique du Christ, l’Église, sont toujours agréables à Dieu, et toujours efficaces sur son cœur. Néanmoins, si la dévotion des fidèles s’y ajoute, le sacrifice eucharistique ne pourra qu’être encore plus cher au Seigneur, et plus profitable aux croyants. Telle est la pensée si élégamment exprimée dans la brève collecte qui aujourd’hui se récite sur les oblations. En d’autres termes, les sacrements et l’Eucharistie produisent, il est vrai, leur effet en vertu de l’institution divine ; le fruit toutefois dépend beaucoup des dispositions subjectives de celui qui les reçoit. Il en est comme d’un mets exquis et nutritif, qui peut être moins opportun et peu salutaire à un estomac malade et faible.
L’antienne durant la communion du peuple est tirée du psaume 70 : « Seigneur, je me souviendrai seulement de votre sainteté. Vous qui avez été mon maître dès ma jeunesse, ah ! ne m’abandonnez pas maintenant que je plie sous le poids de la vieillesse. » Avec la marche des années et l’expérience amère que, en ce monde, tout, sauf Dieu, est vanité et affliction d’esprit, l’âme à qui tout échappe, jeunesse, santé, applaudissements et richesse, lasse et précocement vieillie, sent qu’il n’y a que le Seigneur que nous puissions étreindre pour ne plus jamais l’abandonner. Il est l’unique ami fidèle qui ne nous délaisse pas dans l’adversité, selon la parole de l’Esprit Saint : Omni tempore diligit qui amicus est.
Dans la collecte d’action de grâces nous demandons que notre indignité et notre froideur dans la réception de la nourriture angélique du saint Autel, ne transforme pas en sujet de condamnation le sacrement qui fut institué pour la rémission des péchés. La prière s’inspire du texte connu de saint Paul dans la première épître aux Corinthiens, là où il traite des sacrilèges qui, en recevant indignement l’Eucharistie : iudicium sibi manducant et bibunt.
Dans l’oraison pour le renvoi du peuple, le prêtre prie Dieu de détourner des fidèles les fautes qui les accablent, afin qu’à l’avenir leur conduite lui soit toujours agréable, et qu’ils puissent se promettre la grâce de sa protection. Tel est l’ordre parfait institué par Dieu : d’abord il faut écarter le péché, puis il est nécessaire d’agir en conformité avec les divins commandements, et c’est seulement à ce prix que nous pouvons nous promettre les faveurs de Dieu.
Contemplons une fois encore le prophète Élisée quand il ressuscite l’enfant mort. Il s’étend doucement sur lui, pose son visage sur le sien, ses mains, ses pieds sur ceux de l’enfant, il s’adapte, se fait petit avec ce petit, et réussit ainsi à répandre dans le cadavre glacé la chaleur de la vie. Quel bel exemple de discrétion ! Il faut avant tout aux supérieurs, pour faire du bien, un certain esprit de prudente adaptation, pour mesurer d’abord ce qu’ils exigent des autres, et les forces de ceux qui doivent exécuter leurs commandements. Il ne faut pas regarder trop exclusivement ce que l’on devrait faire, mais il est nécessaire de peser ce qui se peut effectivement, tant de notre part que de celle d’autrui.
Le Christ, celui qui ressuscite les morts.
Nous allons célébrer successivement deux messes de résurrection des morts, aujourd’hui et demain. La messe de demain est plus ancienne et traite des catéchumènes ; celle d’aujourd’hui est plus récente, composée d’après celle de demain et elle pense aux pénitents. Les pénitents, comme les catéchumènes, doivent être ressuscités de la mort spirituelle, par le Christ. Quant à nous, les fidèles, nous recevons chaque jour dans l’Eucharistie une vie nouvelle.
Les antiennes directrices du jour : « Jésus vint dans une ville nommée Naïm et voici qu’on portait en terre un mort qui était le fils unique de sa mère » (Ant. Bened.). « Un grand prophète s’est levé parmi nous, Dieu a visité son peuple » (Ant. Magn.).
La liturgie chante, le matin, le commencement et, le soir, la fin de la péricope. Elle veut nous enseigner par là que, pendant toute la journée, nous devons en faire l’objet de nos méditations.
1. Thème de la station. — Station à Saint-Sylvestre et Saint-Martin. Les deux saints de station sont les deux premiers saints non martyrs de l’Église romaine. Le pape saint Sylvestre et le grand évêque de Tours, saint Martin, ont toujours joui, dans l’Église, et jouissent encore de la plus grande vénération. Dans notre église de station, qui remonte à un ancien titre (c’est-à-dire une maison appartenant à l’Église romaine et dans laquelle demeuraient des prêtres), on honora d’abord saint Sylvestre. Plus tard, on bâtit à cet endroit une basilique en l’honneur de saint Martin, et le premier saint passa un peu au second plan (c’est sans doute de cette époque que date l’introduction du service de station). Au IXe siècle, on transporta dans cette basilique les ossements de saint Sylvestre et de plusieurs martyrs ; ils reposent aujourd’hui encore dans la crypte. Les lectures de notre messe de station doivent rappeler les résurrections de morts qui rendirent saint Martin célèbre.
2. La messe (Lætetur). — C’est une messe de pénitents. Ce qui frappe, c’est la belle concordance entre la Leçon et l’Évangile. Dans ces deux lectures, il est question de résurrection de mort.
Dans les deux cas, il y a trois personnages en scène : une mère veuve plongée dans le chagrin, un jeune homme mort qui va être ressuscité et un thaumaturge. Remarquons cependant la différence. Le Prophète ressuscite le jeune homme après de longs efforts. — Jésus ressuscite le fils de la veuve de Naïm d’un seul mot. Jésus est le maître de la mort et de l’enfer. Dans quelques jours, il scellera sa victoire par sa propre Résurrection. Les ressuscités sont les symboles du pécheur qui doit ressusciter à Pâques. C’est pourquoi, à travers toute la messe, on entend les joyeux accents du thème de Pâques. On chante, à l’Introït : « Que le cœur se réjouisse. ». L’Introït et la Communion considèrent les voies de Dieu dans notre vie. Comme il les a bien ordonnées ! (Ps. 104). Il était mon Dieu dans ma jeunesse, il est encore mon Dieu dans ma vieillesse (Ps. 70).
3. La vie et la mort. — Ces deux notions jouent un grand rôle dans la Bible et la liturgie. Que de fois le Christ parle de la vie, de la vie éternelle ! Ce que nous appelons vie et mort n’est pas la vraie vie et la vraie mort. Notre vie terrestre n’est qu’une ombre de vie et la mort terrestre n’est qu’un sommeil. La vraie vie est la participation à la vie divine, à la vie du Christ ; il est « la Vie », lui seul peut donner la vie. Seul, l’homme en état de grâce peut dire qu’il vit. Cette vie est nourrie et développée dans l’Eucharistie qui est la source de la vie éternelle. Nous trouvons l’image de cette vie dans les deux résurrections de la messe d’aujourd’hui. Considérons les trois personnages, la mère, le jeune homme et le thaumaturge, Jésus-Christ.
a) Les deux femmes représentent très bien l’Église : l’une est l’Église à la prière instante, qui se prosterne aux pieds de Dieu et ne s’éloigne pas avant d’avoir été exaucée ; dans l’autre, nous voyons la douleur maternelle de l’Église qui n’a d’autre souci que les péchés de ses enfants. On lit, au bréviaire, ces belles paroles de saint Ambroise : « Si tes péchés sont si grands que tu ne peux pas les laver dans tes larmes de pénitence, laisse ta Mère l’Église pleurer pour toi. Elle supplie Dieu pour chacun d’entre vous, comme cette mère veuve pleurait pour son fils unique. Car elle souffre des douleurs spirituelles de mère, quand elle voit ses enfants, par leurs péchés mortels, se précipiter vers la mort. »
b) Le jeune homme mort est l’image de l’âme morte par le péché. L’âme est jeune, créée pour l’éternelle jeunesse. Le péché lui donne la mort. Dans le bréviaire, on poursuit l’allégorie. Le jeune homme est couché sur une civière de bois. Or, c’est par le bois (de la science du bien et du mal) que le péché est entré dans le monde. Mais lorsque Jésus toucha le bois, c’est-à-dire monta sur la Croix, le mort revint à la vie. Les porteurs sont nos passions. « Nous aussi, nous gisons, en quelque sorte, inanimés sur une civière, quand brûle en nous le feu des désirs illégitimes ou bien quand la froideur pour tout ce qui est divin nous pénètre, quand la force de l’esprit est paralysée par la paresse de notre corps ou bien quand notre cœur chargé de péchés trouble l’esprit de la pure lumière. Voilà quels sont les porteurs de notre cadavre » (Saint Ambroise). Ces porteurs se hâtent de nous déposer dans la tombe de l’enfer.
c) Le miracle de la résurrection se renouvelle en chacun de nous. Le thaumaturge qui nous ressuscite est le Christ. Le Christ s’approche personnellement de chacun de nous et prononce ces paroles ; « Jeune homme, lève-toi. » Cette résurrection s’étend sur toute notre vie, depuis le baptême jusqu’à la parousie. Le Christ réveille toutes les forces de l’âme et du corps. Il nous donne un nouvel esprit, un nouveau cœur, un regard nouveau, une ouïe nouvelle. La résurrection est son œuvre. Le Carême, avec Pâques, est une résurrection en petit. « Jeune homme, lève-toi. »
[1] Jésus a dit à la veuve de Naïm : « Ne pleure plus ».
[2] Ex 3
[3] Les anciens donnaient le nom d’éléments à l’air, au feu, à la terre et à l’eau, considérant que tous les corps en étaient composés, et étaient amenés à la ruine par la dissolution de ces principes constitutifs.
[4] Ex 5, 1
[5] Ps. 5, 10.
[6] Ex 15, 1
[7] Philip. II, 7.
[8] Johan. X, 10.
[9] Isai. IX, 2.
[10] L’Église nous présente ce récit dans l’Évangile du XXIIIe Dimanche après la Pentecôte.