La série dominicale qui prenait autrefois son point de départ à la solennité de Saint-Pierre, ou des Apôtres, ne dépassait jamais le présent Dimanche. La fête de Saint-Laurent désignait ceux qui suivent, comme elle le faisait dès le neuvième Dimanche après la Pentecôte, dans les années où Pâque s’éloignait davantage de l’équinoxe du printemps. Quand la date de cette solennité remontait ainsi vers son dernier terme, on comptait dès maintenant les Semaines du septième mois (septembre).
Les Quatre-Temps de l’automne peuvent déjà même se rencontrer en cette semaine, quoiqu’ils puissent aussi n’arriver qu’en la dix-huitième. Nous suivrons, pour en parler, l’ordre adopté par le Missel qui les inscrit à la suite du dix-septième Dimanche après la Pentecôte.
Le treizième Dimanche prend aujourd’hui son nom de l’Évangile des dix lépreux qu’on lit à la Messe.
A LA MESSE.
L’Église, en possession des promesses si longtemps attendues par le monde, aime à revenir sur l’expression des sentiments qui remplissaient l’âme des justes durant ces siècles désolés où le genre humain végétait sous les ombres de la mort. Elle redoute le danger où se trouvent ses trop heureux fils d’oublier, dans leur abondance, les conditions désastreuses que l’éternelle Sagesse leur a épargnées, en les appelants à vivre dans les temps qui ont suivi l’accomplissement des mystères du salut. D’un tel oubli naîtrait sans peine l’ingratitude, condamnée à bon droit par l’Évangile du jour. C’est pourquoi l’Épître, et, avant elle, l’Introït, nous reportent au temps où l’homme vivait de la seule espérance, ayant bien la promesse d’une alliance sublime qui devait se consommer dans les siècles futurs, mais, cependant, dénué de tout, en butte aux perfidies de Satan, abandonné aux représailles de la justice divine en attendant de retrouver l’amour.
Nous avons vu, il y a huit jours, le rôle de la foi et l’importance de la charité dans le chrétien vivant sous la loi de grâce. L’espérance aussi lui est nécessaire ; car bien que déjà en possession substantielle des trésors qui feront à jamais son bonheur, l’obscurité de cette terre d’exil les dérobe à sa vue, et, la vie présente restant toujours le temps d’épreuve où chacun doit mériter sa couronne [1], la lutte fait peser jusqu’au bout sur les meilleurs son incertitude et ses amertumes. Implorons donc avec l’Église, dans la Collecte, l’accroissement en nous des trois vertus fondamentales de foi, d’espérance et de charité ; pour mériter d’arriver à la consommation de tout bien qui nous est promise au ciel, obtenons la grâce de nous attacher de cœur à ces commandements de Dieu qui nous y conduisent, et que l’Évangile de Dimanche dernier résumait dans l’amour.
ÉPÎTRE.
« Regarde le ciel et comptes-en, si tu peux, les étoiles : aussi nombreuse sera ta descendance [2]. » Abraham avait près de cent ans [3], et la stérilité de Sara lui enlevait tout espoir naturel de postérité, quand le Seigneur lui parla de la sorte. Abraham cependant crut à Dieu, nous dit l’Écriture, et sa foi lui fut imputée à justice [4]. Et quand, plus tard, la même foi [5] lui eut fait offrir sur la montagne le fils de la promesse, son unique espérance, Dieu renouvela sa prophétie, et il ajouta : En ton germe seront bénies toutes les nations de la terre [6].
Or voici qu’à cette heure la promesse s’accomplit ; l’événement donne raison à la foi d’Abraham. Il crut contre toute espérance, se confiant au Dieu qui donne la vie aux morts et appelle ce qui est comme ce qui n’est pas [7] ; et voici que, selon la parole de Jean-Baptiste, des pierres mêmes de la gentilité surgissent en tous lieux des fils d’Abraham [8].
Sa foi, en même temps si ferme et si simple, rendit à Dieu la gloire qu’il attend de la créature [9]. L’homme ne peut rien ajouter aux perfections divines ; mais, sur la parole du Seigneur lui-même, quoique ne les voyant point directement ici-bas, il reconnaît ces perfections dans l’adoration et l’amour, il inspire de la foi sa vie entière ; et cet usage qu’il fait librement de ses facultés, cette adhésion spontanée d’un être intelligent, magnifie Dieu par l’extension de sa gloire extérieure.
Sur les traces d’Abraham [10] sont donc venues des multitudes nées pour le ciel de la foi dont il donna le spectacle au monde, vivant d’elle seule [11], rendant au Seigneur, dans tous leurs actes, l’hommage de la confession et de la louange par Jésus-Christ son Fils, et comme Abraham, recevant en retour la bénédiction d’une justice toujours croissante [12]. Le splendide épanouissement de la sainte Église, qui suscite au père des croyants cette nouvelle descendance, s’est encore accentué depuis la chute d’Israël. Dans les contrées les plus reculées, au sein des villes jadis païennes, voyons ces foules nombreuses d’hommes, de femmes et d’enfants quittant comme Abraham[Gen. XII, 1.[]], à la voix du ciel, sinon leur pays, du moins tout ce qui les rattachait à la terre ; confiants comme lui dans la fidélité de Dieu et sa puissance [13], ils se sont faits étrangers au milieu de leurs proches et dans leurs maisons mêmes, usant de ce monde comme n’en usant pas [14]. Dans le tumulte des cités comme au désert, au milieu des vains plaisirs de ce monde dont la figure passe [15], ils n’ont d’autre pensée que celle des réalités invisibles [16], d’autre souci que de plaire au Seigneur [17]. Ils prennent pour eux la parole qui fut dite à leur père : Marche en ma présence, et sois parfait [18]. C’était bien, en effet, à eux tous qu’elle s’adressait dès lors ; c’était la clause de l’alliance conclue par Dieu pour la suite des âges avec ces hommes fidèles, dans la personne du patriarche leur modèle et leur souche ; et Dieu répond de même à leur foi en d’intimes manifestations, ou par la voix plus sûre encore des Écritures [19], disant : Ne crains pas, je suis moi-même ta récompense immense [20] !
Véritablement donc la bénédiction d’Abraham s’est répandue sur les nations [21]. Jésus-Christ, vrai fils de la promesse, germe unique du salut, a par la foi dans sa résurrection [22] rassemblé de toute race [23] les hommes de bonne volonté [24], les faisant un en lui, les rendant comme lui fils d’Abraham [25] et, qui mieux est, fils de Dieu [26]. Car la bénédiction promise au début de l’alliance, c’était l’Esprit-Saint lui-même [27], l’Esprit d’adoption des enfants descendu dans nos cœurs pour faire de tous les héritiers de Dieu et les cohéritiers du Christ [28]. Puissance merveilleuse de la foi qui brise les anciennes barrières de séparation, unit les peuples [29], et substitue l’amour et la liberté sainte des fils du Très-Haut à la loi d’esclavage et de défiance [30] !
Pourtant ce spectacle grandiose des nations incorporées à la race élue, et devenant participantes en Jésus-Christ des promesses sacrées [31], n’agrée pas à tous. Le Juif charnel qui se vante d’avoir Abraham pour père sans se soucier d’imiter ses œuvres [32], le circoncis qui se glorifie de porter en sa chair les marques d’une foi qui n’est pas dans son cœur [33], ces hommes qui ont renié le Christ renient maintenant ses membres et voudraient repousser ou tronquer son Église. C’est avec rage qu’ils voient de tous les points de l’horizon [34] ce concours immense que leur jalousie mesquine n’a pu arrêter. Tandis que leur orgueil froissé se tenait à l’écart [35], les peuples s’asseyaient en foule avec Abraham, Isaac, Jacob et tous les prophètes, au banquet du royaume de Dieu [36] ; les derniers devenaient les premiers [37]. Jusqu’à la fin des temps, Israël, déchu par son obstination de son antique gloire, restera l’ennemi de cette postérité spirituelle d’Abraham qui l’a supplanté [38] ; mais ses persécutions contre les fils de la promesse et l’Épouse légitime n’aboutiront qu’à faire voir en lui, comme dit saint Paul, le fils d’Agar, le fils de l’esclave exclue avec son fruit de l’héritage et du royaume [39].
Libre à lui de repousser l’affranchissement que lui offrait le Seigneur, plutôt que de reconnaître l’abrogation définitive de sa loi périmée. Sa haine n’amènera point les fils de l’Église, figurée par Sara la femme libre, à rejeter la grâce de leur Dieu pour lui complaire, à délaisser la justice de la foi, les richesses de l’Esprit, la vie dans le Christ, pour retourner au joug de servitude [40] brisé à jamais, quoi qu’en ait le Juif, par la croix qu’il dressa au Calvaire [41]. Jusqu’à la fin la vraie Jérusalem, la cité libre notre mère, l’Épouse jadis stérile, maintenant si féconde, opposera aux prétentions surannées et cependant toujours vivaces de la synagogue, la lecture publique de l’Épître qu’on vient d’entendre. Jusqu’à la fin, Paul, en son nom, traitant de la loi du Sinaï signifiée aux hommes qu’elle concernait par l’intermédiaire de Moïse et des anges, fera ressortir son infériorité relativement à l’alliance conclue par Abraham directement avec Dieu ; chaque année, aussi fortement qu’au premier jour, il redira le caractère transitoire de cette législation venue quatre cent trente ans après une promesse qui ne pouvait changer, pour durer seulement jusqu’au jour où paraîtrait ce fils d’Abraham de qui le monde attendait la bénédiction promise.
Mais que dire de l’impuissance du ministère mosaïque à fortifier l’homme, à le relever de sa chute ? L’Évangile que nous méditions il y a huit jours donnait de l’inutilité de l’ancienne loi sous ce rapport un symbolique et frappant commentaire, en même temps qu’il affirmait la puissance de guérison résidant dans le Christ et transmise par lui aux ministres de la loi nouvelle. Or, n’oublions pas que cet Évangile était autrefois l’Évangile du jour même où nous sommes. « Tout dans l’Office du treizième Dimanche, dit justement l’Abbé Rupert, se rapporte à l’histoire de ce Samaritain dont le nom signifie le gardien divin, notre Seigneur Jésus-Christ, venant par son incarnation au secours de l’homme que l’ancienne loi n’a pu sauver, et le remettant, quand il quitte la terre, aux soins des Apôtres et des hommes apostoliques dans l’hôtellerie de l’Église. La proximité voulue de cet Évangile jette une grande lumière sur notre Épître, ainsi que sur toute la Lettre aux Galates d’où elle est tirée. Le prêtre et le lévite de la parabole, en effet, c’est toute la loi représentée ; et leur passage auprès de l’homme à demi-mort qu’ils voient, sans chercher à le guérir, marque ce qu’a fait la loi. Elle n’allait point à l’encontre des promesses de Dieu, mais par elle-même ne pouvait justifier personne. Quelquefois le médecin qui ne doit pas venir encore envoie au malade un serviteur expert dans la connaissance des causes de maladie, mais inhabile à composer le remède contraire, et pouvant seulement indiquer à l’infirme les aliments, les breuvages dont il doit s’abstenir de crainte que son mal, en s’aggravant, n’amène la mort. Telle fut la loi, établie, nous dit l’Épître, à cause des transgressions, comme simple surveillante, jusqu’à l’arrivée du bon Samaritain, du médecin céleste. L’homme, en effet, tombé dès son entrée dans la vie entre les mains des voleurs, naît dépouillé de ses biens surnaturels et couvert des plaies que lui a faites le péché d’origine ; s’il ne s’abstient des péchés actuels, de ces transgressions pour l’indication desquelles la loi a été établie, il court risque de mourir tout à fait sans retour [42]. »
C’est pourquoi on reprend de nouveau, dans le Graduel, la supplication de l’Introït : Respice, Domine, in testamentum tuum. Car, dit Rupert [43], c’était la parole des anciens qui, gémissant sous l’infirmité de la loi impuissante du Sinaï, imploraient la consommation de l’alliance promise à la foi d’Abraham. Ils criaient au Christ, comme pouvait le faire au Samaritain libérateur le pauvre blessé qui voyait le prêtre et le lévite passer outre, sans apporter de remède à ses maux.
ÉVANGILE.
Le lépreux Samaritain, guéri de sa hideuse maladie, figure du péché, en compagnie de neuf lépreux de nationalité juive, représente la race décriée des gentils admise d’abord comme à la dérobée, et par surcroît, en communication des grâces destinées aux brebis perdues de la maison d’Israël [44]. La conduite différente que tiennent ces dix hommes, à l’occasion du miracle qui les concerne, répond elle-même à l’attitude des deux peuples dont ils sont l’image, en présence du salut apporté au monde par le Fils de Dieu. Elle démontre une fois de plus le principe posé par l’Apôtre : « Tous ceux-là ne sont pas Israélites qui sont nés d’Israël, tous ceux-là ne sont pas fils d’Abraham qui sont sortis de lui ; mais en Isaac, dit l’Écriture [45], est établie la race qui portera son nom : c’est-à-dire, ce ne sont pas les enfants nés de la chair qui sont les fils de Dieu, mais bien les fils de la promesse, nés de la foi d’Abraham et formant sa vraie race devant le Seigneur [46]. »
La sainte Église ne se lasse point de revenir sur cette comparaison des deux Testaments et le contraste offert par les deux peuples. C’est pourquoi, avant d’aller plus loin, nous sentons la nécessité de répondre à l’étonnement qu’une telle insistance ne peut manquer d’exciter en certaines âmes déshabituées de la sainte Liturgie. Le genre de spiritualité qui remplace aujourd’hui chez plusieurs l’ancienne vie liturgique de nos pères, ne les dispose en effet que médiocrement à entrer dans cet ordre d’idées. Accoutumés à ne vivre qu’en face d’eux-mêmes et de la vérité telle qu’ils la conçoivent, mettant la perfection dans l’oubli de tout le reste, il n’est pas surprenant que ces chrétiens ne comprennent aucunement ce retour continuel vers un passé fini, croient-ils, depuis des siècles. Mais la vie intérieure, vraiment digne de ce nom, n’est point ce que ces chrétiens s’imaginent ; aucune école de spiritualité, ni maintenant, ni jamais, ne plaça l’idéal de la vertu dans l’oubli des grands faits de l’histoire qui intéressent à ce point l’Église et Dieu même. Aussi qu’advient-il, trop souvent, de ce délaissement de la Mère commune par ses fils ? C’est que, dans l’isolement voulu de leurs prières privées, ils perdent de vue, par une juste punition, le but suprême de l’oraison qui est l’union et l’amour. La méditation dépouille en eux ce caractère de conversation intime avec Dieu, que lui assignent tous les maîtres de la vie spirituelle ; elle n’est bientôt plus qu’un exercice stérile d’analyse et de raisonnement, où l’abstraction domine en souveraine.
Quand Dieu, cependant, voulut manifester son Verbe, en appelant l’homme aux noces divines, il ne recourut point à l’abstraction pour traduire à la terre ce fils de sa substance éternelle que l’homme ne pouvait voir encore directement dans sa divinité. Pareille traduction de l’éternelle Sagesse, où résident dans l’amour toute beauté, toute chaleur et toute vie, eût été plus qu’imparfaite et que froide. Aussi Dieu, selon l’expression de saint Paul, jeta dans la chair ce grand mystère de la piété [47] ; le Verbe fut fait âme vivante [48] ; l’éternelle Vérité prit un corps pour converser avec les hommes [49] et grandit comme l’un d’eux [50]. Et quand ce corps que la Vérité doit garder à jamais fut enlevé dans la gloire [51], l’Église, Épouse de l’Homme-Dieu, os de ses os, chair de sa chair [52], continua dans le monde cette manifestation de Dieu par les membres du Christ, ce développement [53] historique du Verbe, qui ne s’arrêtera qu’au dernier jour, qui surpasse tout raisonnement, et révèle aux anges mêmes sous des aspects nouveaux la Sagesse de Dieu [54]. Assurément un respect profond est dû aux axiomes où l’homme renferme dans un ordre logique, indépendant de l’histoire et des faits, les principes de la science ; mais pas plus en Dieu qu’en l’homme même, la vie ne répond à cette immobilité de raison qui ne ressemble en rien, qu’on se garde de le croire, à l’immutabilité toujours féconde, essentiellement active, de la Vérité substantielle. Or donc, dans l’Eglise comme en Dieu, la vérité est vie et lumière [55]. S’il ne fallait y voir qu’une suite de formules, les accents de son Credo n’éclateraient pas aussi triomphants sous les voûtes de ses temples. S’il force victorieusement les portes du ciel, c’est que tous ses articles ont jusqu’à nous leur sublime histoire : c’est que chaque mot qui le compose se présente au Dieu très haut ruisselant du sang des martyrs ; que de siècle en siècle il rayonne toujours plus de l’éclat des travaux et des luttes glorieuses de tant de saints confesseurs, qui sont l’élite de l’humanité baptisée chargée de compléter le Christ ici-bas [56].
Il nous faut abréger ces considérations. Disons donc de suite qu’après ce grand fait de l’incarnation du Verbe venu en terre pour manifester Dieu dans la suite des âges par le Christ et ses membres [57], il n’en est point de plus important, il n’en est point qui ait tenu, qui tienne encore davantage au cœur de Dieu, que l’élection des deux peuples appelés par lui successivement au bénéfice de son alliance. Les dons et la vocation de Dieu sont sans repentir, nous dit l’Apôtre ; ces Juifs, ennemis aujourd’hui parce qu’ils repoussent l’Évangile, n’en sont pas moins toujours aimés et très aimés, carissimi, à cause de leurs pères [58]. C’est pourquoi aussi un temps viendra, attendu par le monde, où le reniement de Juda étant rétracté, ses iniquités effacées, les promesses reçues par Abraham, Isaac et Jacob auront leur accomplissement littéral [59]. Alors apparaîtra la divine unité des deux Testaments ; les deux peuples eux-mêmes n’en feront plus qu’un sous le Christ leur chef [60]. L’alliance de Dieu avec l’homme étant dès lors pleinement consommée telle qu’il l’avait voulue dans ses desseins éternels, la terre ayant donné son fruit [61], le monde ayant atteint son but, les tombes rendront leurs morts [62] et l’histoire cessera ici-bas, pour laisser l’humanité glorifiée s’épanouir dans la plénitude de la vie sous le regard éternel.
Rien donc n’est moins suranné que l’ordre d’idées auquel nous ramène de nouveau l’Évangile du jour ; rien n’est plus grand ; et ajoutons, quoi qu’il en puisse sembler à première vue : rien n’est plus pratique, dans cette partie de l’année consacrée aux mystères de la Vie unitive. Qu’est-ce, en effet, que l’union entre Dieu et l’homme, sinon tout d’abord la communauté des sentiments et des vues ? Or, nous venons de le montrer, les vues divines se trouvent résumées tout entières dans l’histoire comparée des deux Testaments et des deux peuples ; le résultat final qui clora l’histoire de ces rapports est l’unique but que poursuivait et que poursuive l’amour infini, au commencement, maintenant et toujours. L’Église donc, loin de se montrer d’un autre âge en revenant continuellement à ces pensées, ne fait que manifester ainsi l’éternelle jeunesse de son cœur d’Épouse à l’unisson toujours de celui de l’Époux.
Reprenons brièvement l’explication littérale de notre Évangile, interrompue par cette longue digression. Ici encore donc le Seigneur veut plutôt nous instruire symboliquement, que montrer sa puissance. C’est pourquoi il ne rend pas d’un mot la santé aux malheureux qui l’invoquent, comme il le fit dans une autre circonstance pour un cas semblable »Je le veux, sois guéri, » dit-il un jour à un de ces infortunés qui implorait son secours dans les débuts de sa vie publique, et la lèpre avait disparu aussitôt [63]. Les lépreux de notre Évangile, qui se rapporte aux derniers temps du Sauveur, sont délivrés seulement en allant se montrer aux prêtres ; Jésus les y renvoie, comme il l’avait fait pour le premier, donnant à tous, depuis le commencement jusqu’au dernier jour de sa vie mortelle, l’exemple du respect dû jusqu’au bout à l’ancienne loi non encore abrogée. Cette loi en effet donnait au fils d’Aaron le pouvoir, non de guérir, mais de discerner la lèpre et de prononcer sur sa guérison [64].
Le temps est venu cependant d’une loi plus auguste que celle du Sinaï, d’un sacerdoce dont les jugements n’auront plus pour objet de constater l’état des corps, mais d’enlever effectivement, par le prononcé même de leur sentence d’absolution, la lèpre des âmes. La guérison rencontrée par les dix lépreux avant d’être arrivés aux prêtres qu’ils cherchent, devrait suffire à leur montrer dans l’Homme-Dieu la puissance du sacerdoce nouveau qu’annonçaient les prophètes [65] ; le pouvoir qui surpasse pour eux, en la prévenant ainsi, l’autorité du ministère antique, révèle de soi dans celui qui l’exerce une dignité plus grande. Si, du moins, ils apportaient les dispositions convenables aux rites sacrés qui vont s’accomplir dans la cérémonie de leur purification [66], l’Esprit-Saint, qui régla autrefois, en vue du moment où ils sont, les prophétiques détails de cette fonction mystérieuse, les aiderait à comprendre la signification du passereau expiatoire dont le sang, versé sur les eaux vives, délivre par le bois l’autre passereau son semblable. Le premier, en effet, c’est le Christ, qui se compare dans le psaume au passereau solitaire [67] ; son immolation sur la croix, qui donne à l’eau la vertu de laver les âmes, communique aux autres passereaux ses frères [68] la pureté du sang divin.
Mais le Juif est loin d’être préparé à l’intelligence de ces grands mystères. La loi pourtant lui fut donnée pour le conduire au Christ comme par la main et sans crainte d’erreur [69] : faveur précieuse qu’il ne méritait point, qu’il devait à ses pères [70], et d’autant plus inestimable qu’au moment où elle lui fut accordée, la notion du sauveur à venir allait se corrompant toujours plus dans l’esprit des peuples. La reconnaissance eût dû s’imposer à Juda ; l’orgueil prit sa place. L’attache au privilège surmonte en lui le désir du Messie. Il refuse de se faire à la pensée qu’un temps viendra où, le Soleil de justice s’étant levé pour la terre entière, l’avantage fait à quelques-uns durant les heures de nuit s’effacera dans les flots surabondants d’une lumière égale pour tous. Il proclame donc sa loi définitive en dépit d’elle-même, affirmant ainsi l’éternité du règne des figures et des ombres. Il pose en dogme qu’aucune intervention divine n’égalera celle du Sinaï dans l’avenir, que tout prophète futur, tout envoyé de Dieu, ne pourra qu’être inférieur à Moïse, que tout salut possible est dans sa loi et que d’elle seule découle toute grâce.
C’est la raison pour laquelle de ces dix hommes guéris par Jésus de la lèpre, il s’en trouve neuf qui ne songent même pas à venir remercier leur libérateur : ceux-là sont juifs, et Jésus n’est pour eux qu’un disciple de Moïse, un instrument des grâces provenant du Sinaï ; la formalité légale de leur purification accomplie, ils se croient quittes envers le ciel. Seul le Samaritain abandonné, le gentil, disposé par sa longue misère à l’humilité qui rend au pécheur la simplicité du regard de l’âme, reconnaît Dieu à ses œuvres et lui rend grâces pour ses bienfaits. Que de siècles d’abandon apparent, d’humiliation et de souffrance, devront passer sur Juda à son tour, pour qu’enfin, reconnaissant lui-même son Dieu et son Roi dans l’adoration, le repentir et l’amour, il entende comme cet étranger tomber de la bouche du Christ les paroles de pardon : Lève-toi et va, ta foi t’a sauvé !
Hâtons de nos vœux le moment si glorieux pour le ciel où les deux peuples, réunis dans une même foi par la conscience des mêmes espérances réalisées, s’écrieront au Christ, comme dans l’Offertoire : Seigneur, j’ai espéré en vous, vous êtes mon Dieu !
C’est l’oblation déposée sur l’autel qui doit nous obtenir de Dieu le pardon du passé et les grâces de l’avenir. Prions-le, dans la Secrète, d’agréer pour le Sacrifice ces dons présentés par l’Église en notre nom à tous.
Quand donc les Juifs voudront-ils venir éprouver enfin la supériorité du pain de l’alliance nouvelle sur la manne du Vieux Testament ? Nous gentils, les derniers-venus, qui avons précédé nos aînés au banquet de l’amour, chantons d’autant mieux, dans la Communion, les divines suavités de ce vrai pain du ciel.
Comme l’exprime la Postcommunion, l’œuvre de notre rachat par Jésus-Christ s’affirme et croit en nous aussi souvent que nous recourons aux sacrés Mystères. L’Eglise demande pour ses enfants la grâce de cette fréquentation fructueuse des Mystères du salut.
La lecture des épîtres aux Corinthiens étant terminée, aujourd’hui commence celle de la lettre aux Galates, qui continuera les dimanches suivants. Il faut remarquer que l’ordre suivi pour la lecture intégrale des saintes Écritures à la messe durant le cycle annuel, est antérieur, à Rome, à l’institution même de l’Office divin quotidien ; bien plus, il en fait complètement abstraction, conservant ainsi le souvenir des origines, où la première partie de la messe — celle qu’on appela plus tard messe des catéchumènes — avec sa splendide alternance de psaumes et de lectures, constituait l’unique rite euchologique préparatoire au divin Sacrifice. Les diverses parties de l’Office divin ne représentent donc rien d’autre que d’anciens démembrements de la primitive synaxe eucharistique des temps apostoliques. C’est la raison pour laquelle, aujourd’hui encore, dans les basiliques cathédrales et capitulaires, la messe solennelle et conventuelle constitue comme le point central vers lequel converge, comme autant de rayons vers leur centre, toutes les parties de l’Office quotidien.
Le psaume pour l’entrée solennelle du cortège des ministres sacrés est le 73e : « Souvenez-vous, Seigneur, de vos promesses, et n’oubliez pas les perpétuels outrages faits à vos pauvres. Levez-vous, ô Seigneur, défendez votre cause, et n’oubliez pas le cri de ceux qui vous cherchent. »
La cause du peuple chrétien est la cause de Dieu, car l’homme ne persécute son semblable que parce qu’il représente et incarne la mission de Celui que Siméon prédit devoir être le point de mire de l’aversion universelle. Toutefois, malgré cet immense héritage de haine, la victoire finale sera toujours au Christ et à ses fidèles, parce que Dieu l’a promis aux anciens Patriarches dont le Messie devait s’appeler le fils. Il semble que Dieu oublie momentanément le sort de l’Église, quand nos péchés élevant une sorte de barrière entre Lui et nous, nous empêchent de le voir.
Dans la prière de ce jour, nous demandons un accroissement des trois vertus théologales, foi, espérance et charité, lesquelles sont le vrai fondement de la perfection chrétienne. On les appelle théologales, parce qu’elles ont Dieu pour auteur et pour objet. La foi est la lumière intérieure qui nous montre la fin dernière surnaturelle, et qui éclaire le chemin y conduisant. L’espérance alimente dans l’âme le désir d’obtenir cette fin tandis que Dieu lui garantit son secours puissant. Quant à l’amour, il est l’impulsion irrésistible de l’âme qui court vers Dieu, anxieuse de se jeter entre ses bras pour le posséder comme son bien propre et qui ne lui manquera jamais dans l’éternité.
Toute la perfection chrétienne repose sur ce triple fondement des vertus théologales, en sorte que les maîtres de la vie spirituelle insistent beaucoup sur les avantages qui découlent pour l’âme de l’émission répétée de ces actes de foi, d’espérance et de charité, lesquels finiront ainsi par orienter habituellement notre vie intérieure tout entière. Ici également, l’entraînement aide beaucoup, et est un puissant instrument d’héroïque perfection.
La seconde partie de la collecte explique encore mieux le contenu de la première. Dieu promet une magnifique récompense c’est-à-dire Lui-même. Cette récompense est toutefois subordonnée à notre fidélité dans l’observation de sa loi, laquelle, dans l’état présent d’affaiblissement de notre nature corrompue, est difficile et dure. Comment surmonter l’obstacle ? D’autre part, est-il convenable pour Dieu que ses fidèles le cherchent en pleurant et à grand’peine, presque par contrainte, comme des esclaves condamnés aux travaux forcés ? Non pas. « Faites, Seigneur, — ajoute donc la collecte, — que nous aimions tout ce que vous nous commandez. » Voici l’effet de la grâce divine. Elle fortifie le cœur du fidèle et mêle tant de douceur au service du Seigneur, qu’on le sert non point comme le prisonnier qui sent l’aiguillon du geôlier l’excitant au travail, mais avec l’amour du fils à qui rien n’est plus doux que d’accomplir la volonté du Père. Quae placita sunt Ei facio semper.
Dans l’épître aux Galates (3, 16-22), l’Apôtre fait observer que la loi donnée à Moïse quatre cent trente ans après la divine promesse faite à Abraham et à sa postérité, ne put en abolir les effets, celle-ci étant antérieure, gratuite et absolue, tandis que celle-là eut le caractère d’un contrat temporaire, bilatéral et sujet à annulation du fait de l’une et de l’autre parties. Israël a, le premier, annulé le contrat en reniant le Messie ; il est donc juste que Dieu, lui aussi, abroge la Loi, la remplaçant par l’Évangile. En conséquence, tout monopole religieux cesse dès lors pour les Hébreux, et tous les croyants sont appelés à avoir part à l’héritage de foi promis à Abraham.
Le répons, tiré du même psaume 73 que l’introït, est commun au jeudi qui précède le dimanche de la Passion. On y rappelle à Dieu les promesses faites aux patriarches, et l’on met en avant les mérites de ces derniers, qui, d’une certaine manière, couvrent notre indignité. En d’autres termes, on parle ainsi à Dieu : Seigneur, nous ne méritons pas votre grâce, mais accordez-la nous comme un héritage qui nous est dû, car vous l’avez promis aux anciens Patriarches, qui vous ont servi en toute pureté et perfection. Nous n’avons pas de mérites personnels à faire valoir, mais leurs mérites à eux sont aussi les nôtres, parce que nous sommes leurs fils et leurs héritiers. Notre cause est la leur, et par conséquent la vôtre. L’humiliation à laquelle nous ont réduits nos ennemis est aussi leur humiliation, et donc la vôtre ; et toute la vie d’Israël — le véritable Israël, c’est-à-dire l’Église — représente et continue mystiquement l’apparition messianique du Christ.
Le verset alléluiatique qui venait après une seconde lecture précédant celle de l’Evangile — il est bon de le rappeler de temps à autre — est tiré du psaume 89 : « Seigneur, vous avez été d’âge en âge notre refuge. » L’aide des hommes fait défaut car elle est inconstante et insuffisante. Dieu au contraire est toujours fidèle dans son amitié, et son amour, parfaitement désintéressé et gratuit, donne généreusement toutes sortes de grâces à celui qu’il aime.
La lecture de saint Luc (17, 11-19) avec 1e récit de la guérison des dix lépreux, dont un seul, le Samaritain, se montra reconnaissant envers Jésus, prélude à l’orientation future des apôtres qui, chassés par la perfide Judée, se tourneront vers les Samaritains et les Gentils pour leur annoncer l’Évangile avec un grand succès. Ainsi par un secret mais juste jugement de Dieu, les parias de la religiosité juive, qu’étaient les schismatiques de la Samarie et les païens, deviennent les prémices du nouveau royaume messianique, tandis que les héritiers d’Abraham et de David renoncent avec mépris à l’héritage de la Foi.
Le verset pour la présentation des offrandes à l’autel est tiré du psaume 30 et il est commun au premier mardi de Carême. « J’ai confiance en vous, Seigneur, et je dis : vous êtes mon Dieu ; en votre main est mon sort. » Quand notre sort est entre les mains de Dieu, il ne peut se faire que tout ne tourne pas à notre bien, puisque tout ce que Dieu fait, II le fait par amour, et l’amour qui est bon sait donner à ses fils des dons excellents.
Dans la secrète, nous implorons la bienveillance du Seigneur sur les prières et sur les offrandes du peuple fidèle, afin que, par les mérites du Sacrifice, outre le pardon des fautes commises, il nous accorde ces grâces qu’appellent nos vœux. L’ordre suivi est magnifique. D’abord la prière de propitiation pour que le divin Sacrifice qui ne peut, de soi, ne pas être agréable à Dieu, ne rencontre pas d’obstacle dans l’indignité de ceux qui l’offrent. Puis on demande les fruits eucharistiques, et d’abord le retrait des suites du péché, tels que la peine temporelle, le désordre des passions, etc. Viennent ensuite les divers bienfaits spirituels et temporels que l’âme purifiée par le divin Sacrifice peut convenablement implorer de Dieu. Nous disons : l’âme purifiée par le divin Sacrifice, parce que les dons sont pour les amis, et tant que l’âme se trouve devant le tribunal de Dieu en qualité de coupable et de débitrice, elle ne peut prétendre à ces faveurs spéciales qu’on n’accorde qu’aux amis : Qui non placet, non placat.
L’antienne pour la Communion du peuple est tirée du Livre de la Sagesse (16, 20) là où sont décrites les qualités de la manne qui était un symbole de l’Eucharistie. « Vous nous avez donné du ciel, ô Seigneur, un pain où se trouve toute douceur et la saveur la plus exquise. » La divine Eucharistie est précisément ce pain de saveur multiple, parce qu’elle ne contient pas une grâce unique et déterminée, mais cache sous ses blanches apparences l’Auteur même de toute grâce ; et aussi parce que, produisant ses effets selon les dispositions spirituelles de celui qui la reçoit, elle s’adapte merveilleusement à ses exigences et à ses goûts, en sorte qu’elle est la divine nourriture de tous les fils de Dieu — Vere Panis filiorum — appropriée à tous les âges, à tous les états et à toutes les conditions de la vie.
Dans la collecte d’action de grâces, commune au lundi de la semaine in mediana (Ive du Carême), nous supplions le Seigneur de faire que la sainte Communion affermisse de plus en plus en nous l’effet de la Rédemption. De quelle manière ? En multipliant en nous les œuvres bonnes. Selon la terminologie scolastique, les théologiens distinguent le décret de prédestination fixé une fois pour toujours, et l’exécution de ce décret, laquelle a lieu dans le temps et se réalise graduellement grâce aux vertus. Tel est à peu près le concept exprimé par la collecte de ce jour, quand elle demande que la sainte Communion soit pour nous un accroissement de l’éternelle Rédemption. Il ne s’agit pas ici de degrés dans l’œuvre de salut du Christ, mais cela veut dire que les fruits de la divine Eucharistie, c’est-à-dire les actes de vertu et de vie sainte qu’elle suscite, représentent un rapprochement et un réel progrès dans la réalisation du plan magnifique de notre salut éternel.
En vertu de quel terrible secret les Samaritains, c’est-à-dire les âmes moins privilégiées de Dieu, se montrent-elles quelquefois plus reconnaissantes pour ses bienfaits ? Cela arrive en raison de leurs dispositions favorables aux opérations de la grâce, dispositions d’humilité et d’intense désir des choses de Dieu. Tandis qu’au contraire tant d’âmes privilégiées qui nagent, pour ainsi dire, dans l’abondance de tout bien, se montrent parfois, comme les Hébreux, dégoûtées de la manne céleste, l’accueillent négligemment, s’en nourrissent par habitude et sans aucun appétit.
De la nuit de Pâques à la solennité du dimanche
La journée d’aujourd’hui présente deux aspects, deux impressions opposées. Le premier aspect est grave, triste : c’est la prière. Le second est joyeux : c’est l’action de grâces. Deux pièces sont particulièrement importantes pour comprendre la messe du dimanche dans sa forme actuelle. Ce sont d’abord les trois chants tirés du psaume 73 (Intr., Grad., Comm.) ; ces chants nous donnent le ton principal et l’impression fondamentale du jour. C’est ensuite l’Évangile qui est un beau « mystère ».
1. La messe (Respice Domine). — Parlons de l’Évangile. Nous voyons dix lépreux qui sont guéris par le Christ. Neuf, après leur guérison, ne reparaissent plus ; le dixième, un Samaritain, revient vers le Seigneur pour le remercier. Que veut nous dire l’Église avec ce récit ? Nous avons ici un exemple classique du « mystère ». L’intention première de l’Église n’est pas de nous donner un enseignement concernant la reconnaissance. Elle veut, en nous représentant la guérison des dix lépreux dont un seul revient pour remercier, dérouler devant nos yeux une image de la messe d’aujourd’hui et de son efficacité salutaire. Le dimanche est un jour de Pâques, un jour de baptême. La messe est un renouvellement de la grâce du baptême, une cérémonie d’action de grâces pour notre conversion. Rappelons-nous que, dans l’ancienne Église, les adultes étaient baptisés dans la nuit de Pâques. L’Église a devant les yeux les baptisés qui, dans les fonts baptismaux, ont été guéri de la lèpre du péché originel. Or chaque dimanche est un renouvellement de la grâce du baptême. La sainte Eucharistie continue l’œuvre du baptême ; elle est le développement et le perfectionnement de la grâce du baptême.
On trouve, au reste, dans l’Évangile d’aujourd’hui, une belle allusion à l’Eucharistie : « Louant Dieu à haute voix, il tomba la face contre terre et le remercia » (eucharistôn autô) Eucharistie veut dire action de grâces. La messe du dimanche est un office d’action de grâces : les heureux privilégiés de la grâce remercient Dieu de les avoir guéris de la lèpre du péché. Puissions-nous voir, en effet, dans cette image, la signification de l’office du dimanche ! Le dimanche est le jour où nous devons louer Dieu à haute voix, le remercier de la grâce du baptême. C’est en même temps pour notre âme un jour de maturité dans lequel elle reçoit : « l’accroissement dans la foi, l’espérance et la charité » (Or.), « l’accroissement de la rédemption éternelle » (Postc.).
Cela nous fait comprendre l’Évangile. Dans cet étranger, le seul reconnaissant parmi les dix lépreux, nous nous reconnaissons, nous qui venons aujourd’hui assister à la messe. Aujourd’hui le Seigneur « entre dans le castel » de l’Église ; nous « allons au-devant de lui » et il nous guérit de la lèpre du péché ; il veut nous donner de nouvelles grâces au Saint-Sacrifice et dans la sainte communion.
Tel est l’aspect joyeux et lumineux de l’Évangile. Il a aussi un aspect triste et sombre. Le Seigneur se plaint de l’ingratitude des neuf autres lépreux guéris. Il désigne ici les chrétiens tièdes. Ces chrétiens ont reçu le baptême, mais ils ne pratiquent plus leur christianisme, ils n’assistent pas à la messe du dimanche (dans les grandes villes, il n’est pas exagéré de parler des neuf dixièmes). Cette plainte du Seigneur forme la transition qui nous amène aux chants mélancoliques du psaume 73. Toute la messe s’éclaire. La prière mélancolique pour nos frères égarés constitue le ton fondamental (c’est à l’Introït, à l’Évangile et à la Communion que la douleur est le plus sensible). C’est l’aspect sombre qui fait contraste avec la lumineuse action de grâces de la messe et la joie du baptême qui s’y exprime. C’est dans cette impression changeante que nous chantons comme une plainte le Kyrie, que suivent l’allégresse et l’action de grâces du Gloria. La belle oraison demande une véritable vie chrétienne. « L’accroissement dans la foi, l’espérance et la charité » est le renouvellement et l’augmentation de la grâce du baptême. Nous demandons non seulement d’accomplir les commandements, mais encore de les aimer.
L’Épître (sans doute la plus difficile de toute l’année) nous apprend que c’est par la grâce seulement, sans aucun mérite de notre part, que nous sommes devenus enfants de Dieu.
A l’Offertoire, nous déposons avec nos offrandes toute notre vie entre les mains de Dieu. « Dans tes mains est placé mon sort. »
Au moment de la Consécration apparaît le Seigneur, qui nous guérit de la lèpre.
A la Communion, il nous donne « l’accroissement de la vie éternelle » ; et à l’Ite Missa est, il congédie le Samaritain, c’est-à-dire nous-mêmes : « Lève-toi et va » vers une véritable vie chrétienne. — On pourrait donc intituler la messe : De la nuit de Pâques à la solennité du dimanche. C’est précisément aujourd’hui que nous comprenons clairement les relations intimes entre la messe du dimanche et le baptême. Les dimanches sont comme les anneaux d’une chaîne qui réunissent les deux plus grands jours de notre vie : le jour du baptême et le jour de la mort : nos deux jours de naissance, l’un pour la grâce et l’autre pour la gloire.
Dans l’esprit de l’Église, nous ne devons pas nous contenter de lire l’Évangile pendant la messe ; nous devons le vivre pendant toute la journée. Dans la matinée jusqu’à midi Jésus vient dans le castel de l’Église, et nous, les lépreux, nous allons à sa rencontre : « Jésus vint dans un castel et dix lépreux allèrent à sa rencontre. Ils se tenaient à distance et criaient à haute voix : Jésus, Maître, aie pitié de nous ! » (Ant. Ben.). Le soir, nous le remercions pour la guérison : « Quand l’un d’entre eux vit qu’il était guéri, il revint sur ses pas et loua Dieu à haute voix (magnificans), Alléluia ». Nous chantons alors en action de grâces le Magnificat.
2. Le psaume 73. — Pour l’intelligence de la messe d’aujourd’hui, il est nécessaire de connaître le psaume dans son entier. Le psaume est un des plus sombres du psautier et contient une phase triste de l’histoire d’Israël : Les païens pénètrent dans le temple, le dévastent, le profanent, le détruisent. Le psalmiste cherche dans l’histoire ancienne un motif de consolation. Dieu a délivré son peuple de l’Égypte, il a anéanti ses ennemis. Il cherche des consolations dans la nature : l’aurore, le soleil, le printemps et ses splendeurs sont des créatures de Dieu. Ainsi réconforté, il envoie vers le ciel une ardente prière pour implorer le secours. — Nous nous demandons maintenant quelle est la pensée de l’Église dans ce psaume. Le temple profané, c’est elle-même, la sainte Église de Dieu, le corps mystique du Christ, poursuivie par les ennemis, profanée par le péché. Elle songe aujourd’hui à tous ses enfants qui ne remplissent plus jamais leur devoir de reconnaissance, le dimanche. Unissons-nous aujourd’hui aux sentiments de ce psaume et offrons nos intercessions pour tous nos frères indifférents et tièdes. Trois fois nous avons l’occasion de nous associer à ces prières du psaume : à l’entrée dans la maison de Dieu, à l’Évangile et à la Communion. C’est à ces trois moments de la messe que notre compassion est particulièrement excitée. Ah ! disons-nous : ces malheureux ne trouvent plus le chemin de la maison de Dieu ; ils n’entendent plus le joyeux message du Christ ; ils ne goûtent plus la douceur du pain du ciel « qui contient toute suavité » (Comm.). Quant à nous, nous avons voulu, par notre reconnaissance, effacer les rides que le chagrin a creusées sur le front de notre Mère l’Église.
Leçons des Matines avant 1960
Au troisième nocturne.
Lecture du saint Évangile selon saint Luc.
En ce temps-là : Jésus faisait route vers Jérusalem et passait aux confins de la Samarie et de la Galilée. Comme il entrait dans un village, dix lépreux vinrent au-devant de lui. Et le reste.
Homélie de saint Augustin, évêque.
Septième leçon. Le Seigneur a purifié dix lépreux et leur a dit : "Allez vous montrer aux prêtres." A ce sujet, on peut se demander pourquoi il les envoya aux prêtres, de telle sorte qu’en cours de route, ils soient purifiés. Hormis les lépreux, nul de ceux qu’il a gratifiés de bienfaits corporels ne se trouve jamais envoyé aux prêtres. C’était aussi de la lèpre qu’il avait purifié celui auquel il a dit : "Va, montre-toi aux prêtres et offre pour toi le sacrifice prescrit par Moïse pour leur servir d’attestation." Il faut donc rechercher la signification de cette lèpre. Ceux qui en sont délivrés ne sont pas dits guéris mais purifiés. La lèpre est à proprement parler une corruption de la couleur plutôt que de la santé ou de l’intégrité des sens et des membres.
Huitième leçon. On peut donc, sans absurdité, penser que les lépreux représentent ceux qui, sans avoir la science de la vraie foi, professent en conséquence les doctrines variées de l’erreur. Loin de cacher leur ignorance, ils la produisent au grand jour comme la science suprême et dans des discours pleins de jactance, ils en font étalage. Or, il n’est si fausse doctrine qui ne soit mêlée de quelque vérité. Dans une seule et même discussion ou récit d’un homme, les vérités s’entremêlent sans ordre aux erreurs comme si elles apparaissaient dans la coloration d’un seul corps. Ainsi en va-t-il de la lèpre, elle altère et flétrit les corps humains, mêlant aux teintes vraies des fausses couleurs.
Neuvième leçon. Que l’Église se garde donc de tels hommes ! Ainsi, s’il se peut, se voyant maintenus à distance ils interpelleront le Christ en une grande clameur, comme ces dix qui s’arrêtèrent à distance puis, élevant la voix, dirent : " Jésus, maître, aie pitié de nous. " Ils l’appellent : " Maître. " Et de ce nom, personne, que je sache, n’a jamais interpellé le Seigneur pour lui demander un remède corporel. C’est assez montrer, je crois, que la fausse doctrine est signifiée par la lèpre dont le bon maître lave la souillure.
Ant. du Benedictus à Laudes Comme Jésus entrait * dans un village, dix lépreux vinrent au-devant de lui ; et, se tenant éloignés, ils élevèrent la voix, en disant : Jésus, maître, ayez pitié de nous.
Ant. du Magnificat aux 2èmes Vêpres L’un d’eux, * voyant qu’il était guéri revint, glorifiant Dieu à haute voix, alléluia
Dominica Decima tertia post Pentecosten |
13ème Dimanche après la Pentecôte |
Ant. ad Introitum. Ps. 73, 20, 19 et 23. | Introït |
Réspice, Dómine, in testaméntum tuum, et ánimas páuperum tuórum ne derelínquas in finem : exsúrge, Dómine, et iúdica causam tuam, et ne obliviscáris voces quæréntium te. | Ayez égard à votre alliance, Seigneur, n’abandonnez pas à la fin les âmes de vos pauvres. Levez- vous, Seigneur et jugez votre cause, et n’oubliez pas les appels de ceux qui vous cherchent. |
Ps. ibid., 1. | |
Ut quid, Deus, reppulísti in finem : irátus est furor tuus super oves páscuæ tuæ ? | Pourquoi, ô Dieu, nous avez-vous rejetés finalement ? Pourquoi votre colère s’est-elle allumée contre les brebis de vos pâturages ? |
V/.Glória Patri. | |
Oratio. | Collecte |
Omnípotens sempitérne Deus, da nobis fídei, spei et caritátis augméntum : et, ut mereámur asséqui quod promíttis, fac nos amáre quod prǽcipis. Per Dóminum. | Dieu tout-puissant et éternel, augmentez en nous la foi, l’espérance et la charité ; et pour que nous méritions d’obtenir ce que vous promettez, faites-nous aimer ce que vous commandez. |
Léctio Epístolæ beáti Pauli Apóstoli ad Gálatas. | Lecture de l’Épître de Saint Paul Apôtre aux Galates. |
Gal. 3, 16-22. | |
Fratres : Abrahæ dictæ sunt promissiónes, et sémini eius. Non dicit : Et semínibus, quasi in multis ; sed quasi in uno : Et sémini tuo, qui est Christus. Hoc autem dico : testaméntum confirmátum a Deo, quæ post quadringéntos et trigínta annos facta est lex, non írritum facit ad evacuándam promissiónem. Nam si ex lege heréditas, iam non ex promissióne. Abrahæ autem per repromissiónem donávit Deus. Quid igitur lex ? Propter transgressiónes pósita est, donec veníret semen, cui promíserat, ordináta per Angelos in manu mediatóris. Mediátor autem uníus non est : Deus autem unus est. Lex ergo advérsus promíssa Dei ? Absit. Si enim data esset lex, quæ posset vivificáre, vere ex lege esset iustítia. Sed conclúsit Scriptúra ómnia sub peccáto, ut promíssio ex fide Iesu Christi darétur credéntibus. | Mes frères, les promesses ont été faites à Abraham, et à sa postérité. Il ne dit pas : Et à ses postérités, comme s’il s’agissait de plusieurs ; mais il dit : comme parlant d’un seul : Et à ta postérité, qui est le Christ. Voici ce que je veux dire : Dieu ayant conclu une alliance en bonne forme, la loi, qui a été donnée quatre cent trente ans après, n’a pu la rendre nulle, ni abroger la promesse. Car si c’est par la loi qu’est donné l’héritage, ce n’est donc plus par la promesse. Or, Dieu l’a donné à Abraham par une promesse. Pourquoi donc la loi ? Elle a été établie à cause des transgressions, jusqu’à ce que vînt la postérité à qui la promesse avait été faite ; cette loi a été promulguée par les anges et par l’entremise d’un médiateur. Or un médiateur n’est pas le médiateur d’un seul ; et Dieu est un seul. La loi est-elle donc opposée aux promesses de Dieu ? Loin de là ! Car s’il avait été donné une loi qui pût produire la vie, la justice viendrait véritablement de la loi. Mais l’Ecriture a tout renfermé sous le péché, afin que la promesse fût réalisée, pour les croyants par la foi en Jésus-Christ. |
Graduale. Ps. 73, 20, 19 et 22. | Graduel |
Réspice, Dómine, in testaméntum tuum : et ánimas páuperum tuórum ne obliviscáris in finem. | Ayez égard à votre alliance, Seigneur, n’oubliez pas pour toujours les âmes de vos pauvres. |
V/. Exsúrge, Dómine, et iúdica causam tuam : memor esto oppróbrii servórum tuórum. | Levez-vous, Seigneur, et jugez votre cause, souvenez-vous des outrages faits à vos serviteurs. |
Allelúia, allelúia. V/. Ps. 89, 1. | |
Dómine, refúgium factus es nobis a generatióne et progénie. Allelúia. | Le Seigneur s’est fait notre refuge de génération en génération. Alléluia. |
+ Sequéntia sancti Evangélii secúndum Lucam. | Suite du Saint Évangile selon saint Luc. |
Luc. 17, 11-19. | |
In illo témpore : Dum iret Iesus in Ierúsalem, transíbat per médiam Samaríam et Galilǽam. Et cum ingrederétur quoddam castéllum, occurrérunt ei decem viri leprósi, qui stetérunt a longe ; et levavérunt vocem dicéntes : Iesu præcéptor, miserére nostri. Quos ut vidit, dixit : Ite, osténdite vos sacerdótibus. Et factum est, dum irent, mundáti sunt. Unus autem ex illis, ut vidit quia mundátus est, regréssus est, cum magna voce magníficans Deum, et cecidit in fáciem ante pedes eius, grátias agens : et hic erat Samaritánus. Respóndens autem Iesus, dixit : Nonne decem mundáti sunt ? et novem ubi sunt ? Non est invéntus, qui redíret et daret glóriam Deo, nisi hic alienígena. Et ait illi : Surge, vade ; quia fides tua te salvum fecit. | En ce temps-là, en se rendant à Jérusalem, Jésus côtoyait la frontière de la Samarie et de la Galilée. Et comme il entrait dans un village, dix lépreux vinrent au-devant de lui ; et, se tenant éloignés, ils élevèrent la voix, en disant : Jésus, maître, ayez pitié de nous. Lorsqu’il les eut vus, il dit : Allez, montrez-vous aux prêtres. Et comme ils y allaient, ils furent guéris. Or l’un d’eux, voyant qu’il était guéri revint, glorifiant Dieu à haute voix. Et il se jeta le visage contre terre aux pieds de Jésus, lui rendant grâces ; et celui-là était Samaritain. Alors Jésus, prenant la parole, dit : Est-ce que les dix n’ont pas été guéris ? Où sont donc les neuf autres ? Il ne s’en est pas trouvé qui soit revenu, et qui ait rendu gloire à Dieu, sinon cet étranger. Et il lui dit : Lève-toi, va ; ta foi t’a sauvé. |
Credo | |
Ant. ad Offertorium. Ps. 30, 15-16. | Offertoire |
In te sperávi, Dómine ; dixi : Tu es Deus meus, in mánibus tuis témpora mea. | J’ai espéré en vous, Seigneur, j’ai dit : Vous êtes mon Dieu, mes jours sont entre vos mains. |
Secreta. | Secrète |
Propitiáre, Dómine, pópulo tuo, propitiáre munéribus : ut, hac oblatióne placátus, et indulgéntiam nobis tríbuas et postuláta concedas. Per Dóminum. | Seigneur, soyez propice à votre peuple et regardez favorablement les dons qu’il vous offre, de sorte qu’apaisé par cette oblation, vous nous accordiez le pardon et nous concédiez ce que nous demandons. |
Præfatio de sanctissima Trinitate ; non vero in feriis, quando adhibetur Missa huius dominicæ, sed tunc dicitur præfatio communis. | Préface de la Sainte Trinité ; mais les jours de Féries, où l’on reprend la Messe de ce Dimanche, on dit la Préface Commune . |
Ant. ad Communionem. Sap. 16, 20. | Communion |
Panem de cælo dedísti nobis, Dómine, habéntem omne delectaméntum et omnem sapórem suavitátis. | Vous nous avez donné, Seigneur, le pain du ciel, un pain ayant toute saveur et toute douceur. |
Postcommunio. | Postcommunion |
Sumptis, Dómine, cæléstibus sacraméntis : ad redemptiónis ætérnæ, quǽsumus, proficiámus augméntum. Per Dóminum. | Ayant reçu ces célestes sacrements, nous vous supplions, Seigneur, de nous faire progresser pour que le fruit de l’éternelle rédemption augmente en nous. |
[1] I Cor. IX, 25.
[2] Gen. XV, 5.
[3] Rom. IV, 19.
[4] Gen. XV, 6.
[5] Heb. XI, 17-19.
[6] Gen. XXII, 18.
[7] Rom. IV, 17-18.
[8] Matth. III, 9.
[9] Rom. IV, 20.
[10] Rom. IV, 12.
[11] Ibid. 1, 17.
[12] Ibid. IV, 23-24 ; Gal. III, 9.
[13] Rom. IV, 20-21.
[14] I Cor. VII, 31.
[15] Ibid.
[16] Heb. XI, 1.
[17] I Cor. VII, 32.
[18] Gen XVII, 1.
[19] II Petr. I, 19.
[20] Gen. XV, 1.
[21] Gal. III, 14.
[22] Rom. IV, 24.
[23] Gal. III, 28.
[24] Luc. II, 14.
[25] Gal. III, 29.
[26] Ibid. IV. 5-7.
[27] Ibid. III, 14.
[28] Rom. VIII, 15-17.
[29] Eph. II, 14-18.
[30] Rom. VIII, 2.
[31] Eph. III, 6.
[32] Jean. VIII, 39.
[33] Rom. IV, 11.
[34] Luc XIII, 29.
[35] Luc. XV, 28.
[36] Ibid. XIII, 28.
[37] Ibid. 3o.
[38] Gen. XXVII, 36.
[39] Gal. IV, 22-31.
[40] Ibid. V, 1.
[41] Ibid. II, 19-21.
[42] Rup. De div. Off. XII, 13.
[43] Ibid.
[44] Matth XV, 24.
[45] Gen. XXI, 12
[46] Rom. IX, 6-8.
[47] I Tim. III, 16.
[48] Gen. II, 7.
[49] Bar. III, 38.
[50] Luc. II, 52.
[51] I Tim. III, 16.
[52] Eph. V, 3o-32.
[53] Ibid. 1, 23.
[54] Ibid. III, 10.
[55] Jean. I, 4.
[56] Col. I, 24 ; II, 19.
[57] II Cor. IV, 10, 11.
[58] Rom. XI, 28-29.
[59] Ibid. 25-27.
[60] Eph. II, 14.
[61] Psalm. LXVI, 7.
[62] Rom. XI, 15.
[63] Matth. VIII, 3.
[64] Levit. XIII.
[65] Isai. LXVI, 21-23.
[66] Levit. XIV, 1-32.
[67] Psalm. CI, 8.
[68] Psalm. LXXXIII, 4.
[69] Gal. III, 24.
[70] Deut. V, 37 ; IX, 4-6.