Textes de la Messe |
Office |
Dom Guéranger, l’Année Liturgique |
Bhx Cardinal Schuster, Liber Sacramentorum |
Dom Pius Parsch, le Guide dans l’année liturgique |
L’Église prolonge durant huit jours la fête de la descente du Saint-Esprit sur les Apôtres (Or.). L’Épître nous montre le chef de l’Église qui rend témoignage au Christ non seulement devant les Juifs, mais aussi devant les païens, dans la maison du centurion romain, aussi est-ce à St-Pierre aux Liens qu’on fait cette lecture. « Quiconque croira en moi ne périra pas, avait dit le Sauveur, car Dieu a envoyé son Fils afin que le monde soit sauvé par lui » (Ev.). « Quiconque croira en lui, ajoute Saint Pierre, recevra par son nom la rémission de ses péchés ». Tous les hommes sans exception sont donc appelés à croire en Jésus-Christ, à être baptisés en son nom, à recevoir le Sacrement de la Confirmation qui donne l’Esprit-Saint, et l’Eucharistie où le Sauveur nourrit les âmes de la fleur du froment divin (Intr.). Puissent Jésus et l’Esprit-Saint, dont nous recueillons le témoignage par la bouche de Pierre, chef de l’Église, nous prémunir contre nos ennemis et nous donner la paix (Or., Post.).
Ant. ad Introitum. Ps. 80, 17. | Introït |
Cibávit eos ex ádipe fruménti, allelúia : et de petra, melle saturávit eos, allelúia, allelúia. | Il les a nourris de la fleur du froment, il les a rassasiés du miel sorti du rocher, alléluia, alléluia. |
Ps. ibid., 2. | |
Exsultáte Deo, adiutóri nostro : iubiláte Deo Iacob. | Tressaillez d’allégresse en Dieu notre protecteur ; chantez avec transport en l’honneur du Dieu de Jacob. |
V/.Glória Patri. | |
Oratio. | Collecte |
Deus, qui Apóstolis tuis Sanctum dedísti Spíritum : concéde plebi tuæ piæ petitiónis efféctum ; ut, quibus dedísti fidem, largiáris et pacem. Per Dóminum... in unitáte eiusdem. | Dieu, vous avez donné le Saint-Esprit à vos Apôtres : concédez à votre peuple l’effet de sa pieuse demande ; pour donner aussi la paix à ceux auxquels vous avez donné la foi. Par N.-S... en l’unité du même. |
Léctio Actuum Apostolórum. | Lecture des Actes des Apôtres |
Act. 10, 34 et 42-48. | |
In diébus illis : Apériens Petrus os suum, dixit : Viri fratres, nobis præcépit Dóminus prædicáre pópulo : et testificári, quia ipse est, qui constitútus est a Deo iudex vivórum et mortuórum. Huic omnes Prophétæ testimónium pérhibent, remissiónem peccatórum accípere per nomen eius omnes, qui credunt in eum. Adhuc loquénte Petro verba hæc, cecidit Spíritus Sanctus super omnes, qui audiébant verbum. Et obstupuérunt ex circumcisióne fidéles, qui vénerant cum Petro : quia et in natiónes grátia Spíritus Sancti effúsa est. Audiébant enim illos loquéntes linguis et magnificántes Deum. Tunc respóndit Petrus : Numquid aquam quis prohibére potest, ut non baptizéntur hi, qui Spíritum Sanctum accepérunt sicut et nos ? Et iussit eos baptizári in nómine Dómini Iesu Christi. | Lecture des Actes des Apôtres. — En ces jours-là, Pierre prenant la parole, dit : mes frères, le Seigneur nous a ordonné de prêcher et d’attester au peuple que c’est lui qui a été établi par Dieu juge des vivants et des morts. Tous les prophètes lui rendent témoignage que tous ceux qui croient en lui reçoivent par son nom la rémission des péchés. Tandis que Pierre prononçait encore ces mots, l’Esprit-Saint descendit sur tous ceux qui écoutaient la parole. Et les fidèles de la circoncision qui étaient venus avec Pierre furent frappés d’étonnement de ce que la grâce de l’Esprit-Saint se répandait aussi sur les Gentils. Car ils les entendaient parler diverses langues et glorifier Dieu. Alors Pierre dit : Est-ce qu’on peut refuser l’eau, et empêcher de baptiser ceux qui ont reçu l’Esprit-Saint comme nous ? Et il ordonna de les baptiser au nom du Seigneur Jésus-Christ |
Allelúia, allelúia. V/. Act. 2, 4. Loquebántur váriis linguis Apóstoli magnália Dei. | Allelúia, allelúia. V/. Les Apôtres annonçaient en diverses langues les merveilles de Dieu. |
Allelúia. (Hic genuflectitur) V/. Veni, Sancte Spíritus, reple tuórum corda fidélium : et tui amóris in eis ignem accénde. | Allelúia. (On se met à genoux) V/. Venez, Esprit-Saint, remplissez les cœurs de vos fidèles ; et allumez en eux le feu de votre amour. |
Sequentia. | Séquence. |
Veni, Sancte Spíritus,
et emítte cǽlitus lucis tuæ rádium. | Venez, ô Saint-Esprit,
Et envoyez du ciel Un rayon de votre lumière. |
Veni, pater páuperum ;
veni, dator múnerum ; veni, lumen córdium. | Venez, père des pauvres,
Venez, distributeur de tous dons, Venez, lumière des cœurs. |
Consolátor óptime,
dulcis hospes ánimæ, dulce refrigérium. | Consolateur suprême,
Doux hôte de l’âme, Douceur rafraîchissante. |
In labóre réquies,
in æstu tempéries, in fletu solácium. | Repos dans le labeur,
Calme, dans l’ardeur, Soulagement, dans les larmes. |
O lux beatíssima,
reple cordis íntima tuórum fidélium. | 0 lumière bienheureuse,
Inondez jusqu’au plus intime, Le cœur de vos fidèles. |
Sine tuo númine
nihil est in hómine, nihil est innóxium. | Sans votre secours,
Il n’est en l’homme, rien, Rien qui soit innocent. |
Lava quod est sórdidum,
riga quod est áridum, sana quod est sáucium. | Lavez ce qui est souillé,
Arrosez ce qui est aride, Guérissez ce qui est blessé. |
Flecte quod est rígidum,
fove quod est frígidum, rege quod est dévium. | Pliez ce qui est raide,
Échauffez ce qui est froid. Redressez ce qui dévie. |
Da tuis fidélibus,
in te confidéntibus, sacrum septenárium. | Donnez à vos fidèles,
qui en vous se confient Les sept dons sacrés. |
Da virtútis méritum,
da salútis éxitum, da perénne gáudium. Amen. Allelúia. | Donnez-leur le mérite de la vertu,
Donnez une fin heureuse, Donnez l’éternelle joie. Ainsi soit-il. Alléluia. |
+ Sequéntia sancti Evangélii secúndum Ioánnem. | Suite du Saint Évangile selon saint Jean. |
Ioann. 3, 16-21. | |
In illo témpore : Dixit Iesus Nicodémo : Sic Deus diléxit mundum, ut Fílium suum unigénitum daret : ut omnis, qui credit in eum, non péreat, sed hábeat vitam ætérnam. Non enim misit Deus Fílium suum in mundum, ut iúdicet mundum, sed ut salvétur mundus per ipsum. Qui credit in eum, non iudicátur ; qui autem non credit, iam iudicátus est : quia non credit in nómine unigéniti Fílii Dei. Hoc est autem iudícium : quia lux venit in mundum, et dilexérunt hómines magis ténebras quam lucem : erant enim eórum mala ópera. Omnis enim, qui male agit, odit lucem, et non venit ad lucem, ut non arguántur ópera eius : qui autem facit veritátem, venit ad lucem, ut manifesténtur ópera eius, quia in Deo sunt facta. | En ce temps-là : Jésus dit à Nicodème : Dieu a tant aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle. Car Dieu n’a pas envoyé son Fils dans le monde pour juger le monde, mais afin que le monde soit sauvé par lui. Celui qui croit en lui n’est pas jugé ; mais celui qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu’il ne croit pas au nom du Fils unique de Dieu. Or voici quel est le jugement : la lumière est venue dans le monde, et les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière, parce que leurs œuvres étaient mauvaises. Car quiconque fait le mal hait la lumière, et ne vient point à la lumière, de peur que ses œuvres ne soient condamnées. Mais celui qui agit selon la vérité vient à la lumière, afin que ses œuvres soient manifestées, parce que c’est en Dieu qu’elles sont faites. |
Credo | |
Ant. ad Offertorium. Ps. 17, 14 et 16. | Offertoire |
Intónuit de cælo Dóminus, et Altíssimus dedit vocem suam : et apparuérunt fontes aquárum, allelúia. | Et le Seigneur a tonné du haut du ciel ; et le Très-Haut a fait entendre sa voix : alors les sources des eaux ont paru, alléluia. |
Secreta. | Secrète |
Propítius, Dómine, quǽsumus, hæc dona sanctífica : et, hóstiæ spiritális oblatióne suscépta, nosmetípsos tibi pérfice munus ætérnum. Per Dóminum. | Étant propice à nos vœux, sanctifiez ces dons, nous vous en supplions, Seigneur, et, ayant agréé l’offrande de cette hostie spirituelle, perfectionnez-nous afin que nous soyons vôtres dans l’éternité. |
Præfatio, Communicantes et Hanc igitur, ut in die Pentecostes. | Préface, Communicantes et Hanc igitur du jour de la Pentecôte . |
Ant. ad Communionem. Ioann. 14, 26. | Communion |
Spíritus Sanctus docébit vos, allelúia : quæcúmque díxero vobis, allelúia, allelúia. | L’Esprit-Saint vous enseignera, alléluia, tout ce que je vous ai dit, alléluia, alléluia. |
Postcommunio. | Postcommunion |
Adésto, quǽsumus, Dómine, pópulo tuo : et, quem mystériis cæléstibus imbuísti, ab hóstium furóre defénde. Per Dóminum. | Assistez votre peuple, nous vous en supplions, Seigneur, et l’ayant nourri des mystères célestes, défendez-le de la fureur des ennemis. |
A MATINES
Invitatorium | Invitatoire |
Allelúia, Spíritus Dómini replévit orbem terrárum [1] : * Veníte, adorémus, allelúia. | Alléluia, l’Esprit du Seigneur a rempli l’univers : * Venez, adorons-le, alléluia. |
Psaume 94 (Invitatoire) | |
Hymnus | Hymne |
Iam Christus astra ascénderat,
Revérsus unde vénerat, Patris fruéndum múnere, Sanctum datúrus Spíritum. | Déjà le Christ était monté aux cieux,
retourné d’où il était venu, pour nous donner le Saint-Esprit, qui fera jouir de la grâce du Père. |
Solémnis urgébat dies,
Quo mystico septémplici Orbis volútus sépties, Signat beáta témpora. | Il approchait le jour solennel,
où le cycle parcouru sept fois du septénaire mystérieux, annonce les temps bienheureux [2]. |
Cum lucis hora tértia
Repénte mundus íntonat, Apóstolis orántibus Deum veníre núntiat. | A la troisième heure du jour,
soudain le monde tonne, aux apôtres en prière il annonce que Dieu vient. |
De Patris ergo lúmine
Decórus ignis almus est, Qui fida Christi péctora Calóre Verbi cómpleat. | C’est donc de la lumière du Père
qu’est nourrit ce feu magnifique, qui remplit de la chaleur du Verbe les cœurs fidèles aux Christ. |
Impléta gaudent víscera,
Affláta Sancto Spíritu, Vocésque divérsas sonant, Fantur Dei magnália. | Au souffle de l’Esprit-Saint,
ils sont intérieurement comblés de joie, ils répandent des paroles diverses, ils publient les merveilles de Dieu. |
Notíque cunctis Géntibus,
Græcis, Latínis, Bárbaris, Simúlque demirántibus, Linguis loquúntur ómnium. | Compris par toutes les nations,
les Grecs, les Latins, les Barbares, et, à l’étonnement de tous, ils parlent le langage de tous. |
Iudǽa tunc incrédula,
Vesána torvo spíritu, Madére musto sóbrios Christi fidéles íncrepat. | La Judée alors incrédule,
égarée par un esprit mauvais, accuse d’un excès de vin nouveau les sobres disciples du Christ. |
Sed éditis miráculis
Occúrrit, et docet Petrus, Falsum profári pérfidos, Ioéle teste cómprobans. | Mais par les miracles accomplis
Pierre répond et enseigne, que les incrédules ont menti selon le témoignage du Prophète Joël [3]. |
Deo Patri sit glória,
Et Fílio, qui a mórtuis Surréxit, ac Paráclito, In sæculórum sǽcula. Amen. | Gloire soit rendue à Dieu le Père
Et au Fils qui est ressuscité des morts, Ainsi qu’au Consolateur, Dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il. |
Ad Nocturnum | Au Nocturne [4] |
Ant. 1 Factus est * repénte de cælo sonus adveniéntis spíritus veheméntis, allelúia, allelúia. | Ant. 1 Il se fit * soudain un bruit du ciel, comme celui d’un vent impétueux qui arrive [5], alléluia, alléluia. |
Psaume 47 | |
On répète l’antienne du psaume après chaque psaume. | |
Ant. 2 Confírma hoc, Deus, * quod operátus es in nobis : a templo sancto tuo, quod est in Ierúsalem [6], allelúia, allelúia. | Ant. 2 Affermissez, ô Dieu, * ce que vous avez opéré parmi nous, du milieu de votre saint temple, qui est dans Jérusalem, alléluia, alléluia. |
Psaume 67 | |
Ant. 3 Emítte Spíritum tuum, * et creabúntur : et renovábis fáciem terræ [7], allelúia, allelúia. | Ant. 3 Vous enverrez votre Esprit, * et vous renouvellerez la face de la terre, alléluia, alléluia. |
Psaume 103 | |
V/. Spíritus Dómini replévit orbem terrárum [8], allelúia. | V/. L’Esprit du Seigneur remplit l’univers, alléluia. |
R/. Et hoc quod cóntinet ómnia, sciéntiam habet vocis, allelúia. | R/. Et comme Il contient tout, Il connaît tout ce qui se dit, alléluia. |
Lectio i | 1ère leçon |
Léctio sancti Evangélii secundum Ioánnem. | Lecture du saint Évangile selon saint Jean. |
Cap. 3, 16-21. | |
In illo témpore : Dixit Iesus Nicodémo : Sic Deus diléxit mundum, ut Fílium suum unigénitum daret : ut omnis, qui credit in eum, non péreat, sed hábeat vitam ætérnam. Et réliqua. | En ce temps-là : Jésus dit à Nicodème : Dieu a tant aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle. Et le reste. |
Homilía sancti Augustíni Epíscopi. | Homélie de saint Augustin, Évêque. |
Tract. 12 in Ioann., sub finem | |
Quantum in médico est, sanáre venit ægrótum. Ipse se intérimit, qui præcépta médici observáre non vult. Venit Salvátor in mundum. Quare Salvátor dictus est mundi, nisi ut salvet mundum, non ut iúdicet mundum ? Salvári non vis ab ipso : ex te iudicáberis. Et quid dicam, Iudicáberis ? Vide quid ait : Qui credit in eum, non iudicátur. Qui autem non credit : quid dictúrum sperábas, nisi : Iudicátur ? Quod addit : Iam, inquit, iudicátus est : nondum appáruit iudícium, et iam factum est iudícium. | Le médecin vient guérir le malade, autant qu’il est en lui. Celui qui refuse d’observer les prescriptions du médecin se donne à lui-même la mort. Le Sauveur est venu dans le monde. Pourquoi a-t-il été appelé Sauveur du monde, sinon parce qu’il est venu pour sauver le monde et non pour le juger ? Tu ne veux pas être sauvé par lui, tu seras jugé par l’effet de ta volonté même. Que dis-je, tu seras jugé ? Écoute ce qu’il dit : « Celui qui croit en lui n’est point jugé, mais qui ne croit point » [9] ; que penses-tu qu’il va dire ? n’est-ce pas qu’il sera jugé ? Voici ce qu’il ajoute : « Il est déjà condamné. » Le jugement n’a pas encore été publié, et déjà la sentence est prononcée. |
R/. Iam non dicam vos servos, sed amícos meos ; quia ómnia cognóvistis, quæ operátus sum in médio vestri, allelúia : * Accípite Spíritum Sanctum in vobis Paráclitum : ille est, quem Pater mittet vobis, allelúia. | R/. Je ne vous appellerai plus mes serviteurs, mais mes amis, parce que vous avez connu toutes les choses que j’ai faites au milieu de vous [10], alléluia : * Recevez en vous l’Esprit-Saint, le Paraclet ; c’est lui que mon Père vous enverra [11], alléluia. |
V/. Vos amíci mei estis, si fecéritis quæ ego præcípio vobis. | V/. Vous êtes mes amis, si vous faites ce que je vous commande. |
* Accípite Spíritum Sanctum in vobis Paráclitum : ille est, quem Pater mittet vobis, allelúia. | * Recevez en vous l’Esprit-Saint, le Paraclet ; c’est lui que mon Père vous enverra, alléluia. |
Lectio ii | 2e leçon |
Novit enim Dóminus, qui sunt eius : novit qui permáneant ad corónam, qui permáneant ad flammam. Novit in área sua tríticum, novit et páleam : novit ségetem, novit et zizánia. Iam iudicátus est, qui non credit. Quare iudicátus ? Quia non crédidit in nómine unigéniti Fílii Dei. Hoc est autem iudícium : quia lux venit in mundum, et dilexérunt hómines magis ténebras, quam lucem : erant enim mala ópera eórum. Fratres mei, quorum ópera bona invénit Dóminus ? Nullórum. Omnia ópera mala invénit. Quómodo ergo quidam fecérunt veritátem, et venérunt ad lucem ? Et hoc enim séquitur : Qui autem facit veritátem, venit ad lucem. | Le Seigneur connaît ceux qui sont à lui, il connaît ceux qui doivent demeurer pour la couronne, ceux qui doivent demeurer pour les flammes. Il connaît dans son aire le froment, il connaît aussi la paille ; il connaît le bon grain, il distingue aussi l’ivraie. « Celui qui ne croit pas est déjà jugé » [12]. Pourquoi ? « Parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. Or, voici la cause de ce jugement, c’est que la lumière est venue dans le monde et que les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière : leurs œuvres en effet étaient mauvaises » Mes frères, quels sont ceux dont les œuvres ont été trouvées bonnes par le Seigneur ? Il n’y en a pas. Il a trouvé leurs œuvres à tous, mauvaises. Comment donc quelques-uns ont-ils agi selon la vérité et sont-ils venus à la lumière, comme l’indiquent les paroles suivantes : « Celui qui accomplit la vérité vient à la lumière » [13]. |
R/. Spíritus Sanctus, procédens a throno, Apostolórum péctora invisibíliter penetrávit novo sanctificatiónis signo : * Ut in ore eórum ómnium génera nasceréntur linguárum, allelúia. | R/. Le Saint-Esprit, descendant du trône de la divinité, pénétra invisiblement les cœurs des Apôtres par un nouveau signe de sanctification : * Afin que leur bouche pût faire entendre toutes sortes de langages, alléluia. |
V/. Advénit ignis divínus, non combúrens, sed illúminans, et tríbuit eis charísmatum dona. | V/. Il est descendu sur eux comme un feu divin, qui ne consume point, mais qui éclaire, et il leur a accordé ses dons. |
* Ut in ore eórum ómnium génera nasceréntur linguárum, allelúia. Glória Patri. * Ut in ore eórum ómnium génera nasceréntur linguárum, allelúia. | * Afin que leur bouche pût faire entendre toutes sortes de langages, alléluia. Gloire au Père. * Afin que leur bouche pût faire entendre toutes sortes de langages, alléluia. |
Lectio iii | 3e leçon |
Sed dilexérunt, inquit, ténebras magis quam lucem. Ibi pósuit vim. Multi enim dilexérunt peccáta sua, multi conféssi sunt peccáta sua : quia qui confitétur peccáta sua, et accúsat peccáta sua, iam cum Deo facit. Accúsat Deus peccáta tua : si et tu accúsas, coniúngeris Deo. Quasi duæ res sunt, homo et peccátor. Quod audis homo, Deus fecit : quod audis peccátor, ipse homo fecit. Dele, quod fecísti, ut Deus salvet, quod fecit. Opórtet, ut óderis in te opus tuum, et ames in te opus Dei. Cum autem cœperit tibi displícere quod fecísti, inde incípiunt bona ópera tua, quia accúsas mala ópera tua. Inítium óperum bonórum, conféssio est óperum malórum. | « Les hommes, dit le Seigneur, ont mieux aimé les ténèbres que la lumière. » Là se trouve la force du raisonnement. Il en est beaucoup, en effet, qui ont aimé leurs péchés, il en est beaucoup qui les ont confessés ; celui qui confesse ses péchés et s’en accuse, agit conjointement avec Dieu. Dieu accuse tes péchés ; si toi aussi tu les accuses, tu te joins à Dieu. L’homme et le pécheur sont comme deux choses distinctes. Tu m’entends nommer l’homme, il est l’ouvrage de Dieu ; tu m’entends nommer le pécheur, il est l’ouvrage de l’homme. Détruis ce que tu as fait, afin que Dieu sauve ce qu’il a fait lui-même. Il faut que tu haïsses en toi ton œuvre, et que tu aimes en toi l’œuvre de Dieu. Lorsque ce que tu as fait aura commencé à te déplaire, l’accusation du mal que tu as commis sera le commencement de tes bonnes œuvres. Le commencement des bonnes œuvres, c’est l’aveu des œuvres mauvaises. |
Te Deum | |
Ant. 1 Cum compleréntur * dies Pentecóstes, erant omnes páriter in eódem loco, allelúia. | Ant. 1 Quand furent accomplis * les jours de la Pentecôte, ils étaient tous ensemble dans le même lieu [14], alléluia. |
Psaume 92 | |
Ant. 2 Spíritus Dómini * replévit orbem terrárum, allelúia. | Ant. 2 L’Esprit du Seigneur * a rempli le globe de la terre [15], alléluia. |
Psaume 99 | |
Ant. 3 Repléti sunt omnes * Spíritu Sancto, et cœpérunt loqui, allelúia, allelúia. | Ant. 3 Ils furent tous remplis * de l’Esprit-Saint et ils commencèrent à parler [16], alléluia, alléluia. |
Psaume 62 | |
Ant. 4 Fontes, et ómnia * quæ movéntur in aquis, hymnum dícite Deo, allelúia. | Ant. 4 Fontaines, et toutes créatures * qui vous mouvez dans les eaux, dites un hymne à Dieu [17], alléluia. |
Cantique des trois Enfants | |
Ant. 5 Loquebántur * váriis linguis Apóstoli magnália Dei, allelúia, allelúia, allelúia. | Ant. 5 Les Apôtres annonçaient * en diverses langues les grandes œuvres de Dieu [18], alléluia, alléluia. |
Psaume 148 | |
Capitulum Act. 2. 1-2. | Capitule |
Cum compleréntur dies Pentecóstes, erant omnes discípuli páriter in eódem loco : et factus est repénte de cælo sonus, tamquam adveniéntis spíritus veheméntis, et replévit totam domum, ubi erant sedéntes. | Lorsque le jour de la Pentecôte fut arrivé, ils étaient tous ensemble dans un même lieu : tout à coup il se produisit, venant du ciel, un bruit comme celui d’un vent impétueux, et il remplit toute la maison où ils étaient assis. |
Hymnus | Hymne |
Beáta nobis gáudia
Anni redúxit órbita, Cum Spíritus Paráclitus Illápsus est Apóstolis. | Le cycle de l’année nous ramène
les joies bienheureuses du jour où l’Esprit Paraclet descendit sur les Apôtres. |
Ignis vibránte lúmine
Linguæ figúram détulit, Verbis ut essent próflui, Et caritáte férvidi. | Le feu à l’éclat vibrant
a pris la forme d’une langue, pour qu’ils abondent de paroles et soient brûlants de charité. |
Linguis loquúntur ómnium ;
Turbæ pavent Gentílium, Musto madére députant Quos Spíritus repléverat. | Ils parlent les langues de tous ;
les foules de Gentils sont dans la stupeur, ils croient pris de vin nouveau ceux que l’Esprit vient de remplir. |
Patráta sunt hæc mýstice,
Paschæ perácto témpore, Sacro diérum círculo, Quo lege fit remíssio. | Ces faits s’accomplissent selon le mystère,
le temps pascal étant écoulé, s’ouvre un cycle sacré de jours où la loi remettait toutes les dettes [19]. |
Te nunc, Deus piíssime,
Vultu precámur cérnuo : Illápsa nobis cælitus Largíre dona Spíritus. | Vous, maintenant, Dieu très clément,
nous vous en prions, prosternés : accordez-nous les dons de l’Esprit qui nous viennent du ciel. |
Dudum sacráta péctora
Tua replésti grátia : Dimítte nostra crímina, Et da quiéta témpora. | Vous venez de consacrer ces cœurs
remplis de votre grâce : remettez nos crimes, donnez des jours paisibles. |
Deo Patri sit glória,
Et Fílio, qui a mórtuis Surréxit, ac Paráclito, In sæculórum sǽcula. Amen. | Gloire soit rendue à Dieu le Père
Et au Fils qui est ressuscité des morts, Ainsi qu’au Consolateur, Dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il. |
V/. Repléti sunt omnes Spíritu Sancto, allelúia. | V/. Ils furent tous remplis de l’Esprit-Saint, alléluia [20]. |
R/. Et cœpérunt loqui, allelúia. | R/. Et ils commencèrent à parler, alléluia. |
Ad Bened. Ant. Sic Deus * diléxit mundum, ut Fílium suum unigénitum daret : ut omnis, qui credit in ipsum, non péreat, sed hábeat vitam ætérnam, allelúia. | Ant. au Benedictus Dieu a tellement * aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle [21], alléluia. |
Benedictus | |
Oratio | Prière |
Deus, qui Apóstolis tuis Sanctum dedísti Spíritum : concéde plebi tuæ piæ petitiónis efféctum ; ut, quibus dedísti fidem, largiáris et pacem. Per Dóminum... in unitáte eiusdem. | Dieu, vous avez donné le Saint-Esprit à vos Apôtres : concédez à votre peuple l’effet de sa pieuse demande ; pour donner aussi la paix à ceux auxquels vous avez donné la foi. Par N.-S... en l’unité du même. |
Ant. 1 Cum compleréntur * dies Pentecóstes, erant omnes páriter in eódem loco, allelúia. | Ant. 1 Quand furent accomplis * les jours de la Pentecôte, ils étaient tous ensemble dans le même lieu [22], alléluia. |
Psaume 109 | |
Ant. 2 Spíritus Dómini * replévit orbem terrárum, allelúia. | Ant. 2 L’Esprit du Seigneur * a rempli le globe de la terre [23], alléluia. |
Psaume 110 | |
Ant. 3 Repléti sunt omnes * Spíritu Sancto, et cœpérunt loqui, allelúia, allelúia. | Ant. 3 Ils furent tous remplis * de l’Esprit-Saint et ils commencèrent à parler [24], alléluia, alléluia. |
Psaume 111 | |
Ant. 4 Fontes, et ómnia * quæ movéntur in aquis, hymnum dícite Deo, allelúia. | Ant. 4 Fontaines, et toutes créatures * qui vous mouvez dans les eaux, dites un hymne à Dieu [25], alléluia. |
Psaume 112 | |
Ant. 5 Loquebántur * váriis linguis Apóstoli magnália Dei, allelúia, allelúia, allelúia. | Ant. 5 Les Apôtres annonçaient * en diverses langues les grandes œuvres de Dieu [26], alléluia, alléluia. |
Psaume 113 | |
Capitulum Act. 2. 1-2. | Capitule |
Cum compleréntur dies Pentecóstes, erant omnes discípuli páriter in eódem loco : et factus est repénte de cælo sonus, tamquam adveniéntis spíritus veheméntis, et replévit totam domum, ubi erant sedéntes. | Lorsque le jour de la Pentecôte fut arrivé, ils étaient tous ensemble dans un même lieu : tout à coup il se produisit, venant du ciel, un bruit comme celui d’un vent impétueux, et il remplit toute la maison où ils étaient assis. |
Hymnus | Hymne |
Veni, Creátor Spíritus,
Mentes tuórum vísita Imple supérna grátia, Quæ tu creásti péctora. | Venez, Esprit Créateur [27],
Visitez les âmes de vos fidèles, Remplissez de la grâce céleste Les cœurs que vous avez créés. |
Qui díceris Paráclitus,
Altíssimi donum Dei, Fons vivus, ignis, cáritas, Et spiritális únctio. | Vous êtes appelé le Paraclet [28],
Le Don [29] de Dieu très haut, La source d’eau vive, le feu, l’Amour, Et l’onction spirituelle [30]. |
Tu septifórmis múnere,
Dígitus patérnæ déxteræ, Tu rite promíssum Patris, Sermóne ditans gúttura. | Vous êtes l’Auteur des sept dons [31],
Le doigt de la droite du Père [32] : Vous, promis solennellement par le Père, Vous mettez sur nos lèvres votre parole. |
Accénde lumen sénsibus :
Infúnde amórem córdibus : Infírma nostri córporis Virtúte firmans pérpeti. | Allumez la lumière dans nos esprits [33] ;
Versez l’amour dans nos cœurs ; Soutenez la faiblesse de notre corps Par votre incessante énergie. |
Hostem repéllas lóngius,
Pacémque dones prótinus : Ductóre sic te prǽvio Vitémus omne nóxium. | Repoussez l’ennemi loin de nous,
Hâtez-vous de nous donner la paix, Marchant ainsi sous votre conduite, Nous éviterons tout mal. |
Per te sciámus da Patrem,
Noscámus atque Fílium, Teque utriúsque Spíritum Credámus omni témpore. | Par vous, que nous connaissions le Père,
Faites-nous connaître aussi le Fils, Et qu’en vous, Esprit de l’un et de l’autre Nous croyons en tout temps. |
Deo Patri sit glória,
Et Fílio, qui a mórtuis Surréxit, ac Paráclito, In sæculórum sǽcula. Amen. | Gloire soit rendue à Dieu le Père
Et au Fils qui est ressuscité des morts, Ainsi qu’au Consolateur, Dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il. |
V/. Loquebántur váriis linguis Apóstoli, allelúia. | V/. Les Apôtres annonçaient en diverses langues [34], alléluia. |
R/. Et cœpérunt loqui, allelúia. | R/. Et ils commencèrent à parler, alléluia. |
Ad Magnificat Ant. Si quis díligit me, * sermónem meum servábit ; et Pater meus díliget eum, et ad eum veniémus, et mansiónem apud eum faciémus, allelúia. | Ant. au Magnificat Si quelqu’un m’aime, * il gardera ma parole, et mon Père l’aimera, et nous viendrons à lui, et nous ferons notre demeure en lui [35], alléluia. |
Magnificat | |
Oratio | Prière |
Deus, qui Apóstolis tuis Sanctum dedísti Spíritum : concéde plebi tuæ piæ petitiónis efféctum ; ut, quibus dedísti fidem, largiáris et pacem. Per Dóminum... in unitáte eiusdem. | Dieu, vous avez donné le Saint-Esprit à vos Apôtres : concédez à votre peuple l’effet de sa pieuse demande ; pour donner aussi la paix à ceux auxquels vous avez donné la foi. Par N.-S... en l’unité du même. |
Hier L’Esprit-Saint a pris possession du monde, et ses débuts dans la mission qu’il a reçue du Père et du Fils ont annoncé sa puissance sur les cœurs, et ont préludé avec éclat à ses conquêtes futures. Nous allons suivre respectueusement sa marche et ses opérations sur cette terre qui lui a été confiée ; la succession des jours d’une si solennelle Octave nous permettra de signaler tour à tour ses œuvres dans l’Église et dans les âmes.
Jésus, notre Emmanuel, est le Roi du monde ; il a reçu de son Père les nations en héritage [36]. Il nous a déclaré lui-même que « toute puissance lui a été donnée au ciel et sur la terre » [37]. Mais il est monté au ciel avant que son empire fût établi ici-bas. Le peuple d’Israël lui-même auquel il a fait entendre sa parole, sous les yeux duquel il a opéré les prodiges qui attestaient sa mission, ce peuple l’a renié et a cessé d’être son peuple [38]. Quelques-uns de ses membres seulement l’ont accepté et l’accepteront encore ; mais la masse d’Israël confirme le cri sacrilège de ses pontifes : « Nous ne voulons pas que celui-là règne sur nous » [39].
La gentilité est tout aussi éloignée d’accepter le fils de Marie pour son maître. Elle ignore profondément sa personne, sa doctrine, sa mission. Les traditions antiques de la religion primitive se sont graduellement effacées. Le culte de la matière a envahi le monde civilisé comme le monde barbare, et l’adoration est prodiguée à toute créature. La morale est altérée jusque dans ses sources les plus sacrées et les plus inviolables. La raison s’est obscurcie chez cette minorité imperceptible qui se fait gloire du nom de philosophes ; « ils se sont évanouis dans leurs pensées, et leur cœur insensé s’est aveuglé » [40]. Les races humaines déracinées ont été mêlées successivement par la conquête. Tant de bouleversements n’ont laissé chez les peuples que l’idée de la force, et le colossal empire romain dominé par César pèse de tout son poids sur la terre. C’est le moment que le Père céleste a choisi pour envoyer son Fils en ce monde. Il n’y a pas place pour un roi des intelligences et des cœurs ; et cependant il faut que Jésus règne sur les hommes et que son règne soit accepté.
En attendant, un autre maître s’est présenté, et les peuples l’ont accueilli avec acclamation. C’est Satan, et son empire est si fortement établi que Jésus lui-même l’appelle le Prince de ce monde. Il faut qu’il soit « jeté dehors » [41] ; il s’agit de le chasser de ses temples, de l’expulser des mœurs, de la pensée, de la littérature, des arts, de la politique ; car il possède tout. Ce n’est pas seulement l’humanité dépravée qui résiste ; c’est le fort armé qui la regarde comme son domaine, et qui ne cédera pas devant une force créée.
Tout est donc contre le règne du Christ, et rien pour lui. Que sert à l’impiété moderne de dire, contre l’évidence des faits, que le monde était prêt pour une si complète révolution ? Comme si tous les vices et toutes les erreurs étaient une préparation à toutes les vertus et à toutes les vérités ! comme s’il suffisait à l’homme vicieux de sentir le malheur, pour comprendre que son malheur vient de ce qu’il est dans le mal, pour se résoudre à devenir tout d’un coup, et au prix de tous les sacrifices, un héros de vertu !
Non, pour que Jésus régnât sur ce monde pervers, il fallait un miracle et le plus grand de tous les miracles, un prodige qui, comme le dit Bossuet, n’a de terme de comparaison qu’avec l’acte créateur qui a fait sortir les êtres du néant. Or, ce prodige, qui l’a fait, sinon le divin Esprit ? C’est lui-même qui a voulu que nous qui n’avons pas vu le Seigneur Jésus, nous fussions rendus aussi certains de sa nature divine et de sa mission de Sauveur, que si nous eussions été témoins de ses miracles et auditeurs de ses enseignements. C’est dans ce but qu’a été opéré ce prodige des prodiges, cette conversion du monde, dans laquelle « Dieu a choisi ce qu’il y avait de plus faible dans le monde pour renverser ce qui était fort, ce qui n’était pas pour détruire ce qui était » [42]. C’est dans ce fait immense et plus lumineux que le soleil, que l’Esprit-Saint a rendu sa présence visible, qu’il s’est affirmé lui-même. Voyons par quels moyens il s’y est pris pour assurer le règne de Jésus sur le monde. Retournons d’abord au Cénacle. Considérez ces hommes revêtus maintenant de la Vertu d’en haut. Qu’étaient-ils tout à l’heure ? Des gens sans influence, de condition vile, sans lettres, d’une faiblesse connue. N’est-il pas vrai que l’Esprit-Saint en a fait tout à coup des hommes éloquents et du plus haut courage, des hommes que le monde connaîtra bientôt, et qui remporteront sur lui une victoire devant laquelle pâliront les triomphes des plus glorieux conquérants ? Il faut bien que l’incrédulité l’avoue, le fait est par trop évident : le monde a été transformé, et cette transformation est l’œuvre de ces pauvres juifs du Cénacle. Ils ont reçu le Saint-Esprit en ce jour de la Pentecôte, et cet Esprit a accompli par eux tout ce qu’il avait à accomplir. Il leur a donné trois choses en ce jour : la parole figurée par les langues, l’ardeur de l’amour représentée par le feu, et le don des miracles qu’ils exercent tout aussitôt. La parole est le glaive dont ils sont armés, l’amour est l’aliment du courage qui leur fera tout braver, et par le miracle ils forceront l’attention des hommes. Tels sont les moyens devant lesquels le Prince du monde sera réduit à capituler, par lesquels le règne de l’Emmanuel s’établira dans son domaine, et ces moyens procèdent tous de l’Esprit-Saint.
Mais il ne borne pas là son action. Il ne suffit pas que les hommes entendent retentir la parole, qu’ils admirent le courage, qu’ils voient des prodiges. Il ne suffit pas qu’ils entrevoient la splendeur de la vérité, qu’ils sentent la beauté de la vertu, qu’ils reconnaissent la honte et le crime de leur situation. Pour arriver à la conversion du cœur, pour reconnaître un Dieu dans ce Jésus qu’on va leur prêcher, pour l’aimer et se vouer à lui dans le baptême et jusqu’au martyre, s’il le faut, il est nécessaire que le Saint-Esprit intervienne. Lui seul, comme parle le Prophète, peut enlever de leur poitrine le cœur de pierre et y substituer un cœur de chair capable d’éprouver le sentiment surnaturel de la foi et de l’amour. L’Esprit divin accompagnera donc partout ses envoyés ; à eux l’action visible, à lui l’action invisible ; et le salut pour l’homme résultera de ce concours. Il faudra que l’une et l’autre action s’exercent sur chaque individu, que la liberté de chaque individu acquiesce et se rende à la prédication extérieure de l’apôtre et à la touche intérieure de l’Esprit. Certes, c’est un grand œuvre d’entraîner la race humaine à confesser Jésus son seigneur et roi ; la volonté perverse résistera longtemps ; mais qu’il s’écoule seulement trois siècles, et le monde civilisé se rangera autour de la croix du Rédempteur.
Il était juste que l’Esprit-Saint et ses envoyés s’adressassent d’abord au peuple de Dieu. Ce peuple « avait reçu en dépôt les divins oracles » [43] ; il avait fourni le sang de la rédemption. Jésus avait déclaré qu’il était envoyé « pour les brebis perdues de la maison d’Israël » [44]. Pierre, son vicaire, devait hériter de cette gloire d’être l’Apôtre du peuple circoncis [45] ; bien que la gentilité, en la personne de Corneille le Centurion, dût être par lui introduite dans l’Église, et l’émancipation des gentils baptisés proclamée par lui dans l’assemblée de Jérusalem. Mais l’honneur était dû d’abord à la famille d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ; voilà pourquoi notre première Pentecôte est juive, pourquoi nos premiers ancêtres en ce jour sont juifs. C’est sur la race d’Israël que l’Esprit-Saint répand d’abord ses dons ineffables.
Voyez-les maintenant partir de Jérusalem ces juifs qui ont reçu la parole, et dont le saint baptême a fait de véritables enfants d’Abraham. La solennité passée, ils retournent dans les provinces de la gentilité qu’ils habitent, portant dans leurs cœurs Jésus qu’ils ont reconnu pour le Messie roi et sauveur. Saluons ces prémices de la sainte Église, ces trophées de l’Esprit divin, ces porteurs de la bonne nouvelle. Ils ne tarderont pas à voir arriver les hommes du Cénacle qui se tourneront vers les gentils, après l’inutile sommation faite à l’orgueilleuse et ingrate Jérusalem.
Une faible minorité dans la nation juive a donc consenti à reconnaître le fils de David pour l’héritier du Père de famille ; la masse est demeurée rebelle et court obstinément à sa perte. Comment qualifier son crime ? Etienne, le Protomartyr, nous l’apprend. S’adressant à ces indignes fils d’Abraham : « Hommes à la tête dure, leur dit-il, cœurs et oreilles incirconcis, vous résistez continuellement au Saint-Esprit » [46]. Un si coupable refus d’obéir chez la nation privilégiée donne le signal de la migration des Apôtres vers la gentilité. L’Esprit Saint ne les quitte plus, et c’est désormais sur les peuples assis dans les ombres de la mort qu’il va épancher les torrents de la grâce que Jésus a mérités aux hommes par son Sacrifice sur la croix.
Ils s’avancent, ces porteurs de la parole de vie, vers les régions païennes. Tout s’arme contre eux, mais ils triomphent de tout. L’Esprit qui les anime féconde en eux ses dons. Il agit en même temps sur les âmes de leurs auditeurs, la foi en Jésus se répand avec rapidité ; et bientôt Antioche, puis Rome, puis Alexandrie, voient s’élever en leur sein une population chrétienne. La langue de feu parcourt le monde ; elle ne s’arrête même pas aux limites de l’empire romain, prédestiné, selon les divins Prophètes, à servir de base à l’empire du Christ. Les Indes, la Chine, l’Éthiopie et cent peuples lointains entendent la voix des Évangélistes de la paix. Mais il ne leur faut pas seulement rendre témoignage par la parole à la royauté de leur Maître ; ils lui doivent aussi le témoignage du sang. Ils ne seront pas en retard. Le feu qui les embrasa au Cénacle les consume dans l’holocauste du martyre.
Admirons ici la puissance et la fécondité du divin Esprit. A ces premiers envoyés il fait succéder une génération nouvelle. Les noms sont changés, mais l’action continue et continuera jusqu’à la fin des temps, parce qu’il faut que Jésus soit reconnu sauveur et maître de l’humanité, et que l’Esprit Saint a été envoyé pour opérer cette reconnaissance sur la terre. Le Prince de ce monde, « l’ancien serpent » [47], s’agite avec violence pour arrêter les conquêtes des envoyés de l’Esprit. Il a crucifié Pierre, tranché la tête à Paul, immolé leurs compagnons ; mais lorsque ces nobles chefs ont disparu, son orgueil est soumis à une épreuve plus dure encore. C’est un peuple entier qu’a produit le mystère de la Pentecôte ; la semence apostolique a germé dans des proportions immenses. La persécution de Néron a pu abattre les chefs juifs du nouveau peuple ; mais voici maintenant la gentilité elle-même établie dans l’Église. Ainsi que nous le chantions hier en triomphe, « l’Esprit du Seigneur a rempli la terre entière » [48]. Nous voyons, dès la fin du premier siècle, le glaive de Domitien sévir jusque sur les membres de la famille impériale. Bientôt les Trajan, les Adrien, les Antonin, les Marc-Aurèle, épouvantés du compétiteur Jésus de Nazareth, s’élancent sur son troupeau ; mais c’est en vain. Le Prince du monde les avait armés de la politique et de la philosophie ; l’Esprit-Saint dissout tous ces faux prestiges, et la vérité s’étend toujours plus sur la surface du monde. A ces sages succèdent des tyrans forcenés, un Sévère, un Décius, un Gallus, un Valérien, un Aurélien, un Maximien ; le carnage s’étend à tout l’empire, parce que les chrétiens y sont partout. Enfin l’effort suprême du Prince du monde est dans l’effroyable persécution décrétée par Dioclétien et les farouches Césars qui partagent le pouvoir avec lui. Ils avaient résolu l’extermination du christianisme, et ce sont eux-mêmes qui, après avoir répandu des torrents de sang, s’affaissent dans le désespoir et l’ignominie. Qu’ils sont magnifiques vos triomphes, ô divin Esprit ! Qu’il est surhumain l’empire du Fils de Dieu, lorsque vous l’établissez ainsi à l’encontre de toutes les résistances de la faiblesse et de la perversité humaines, à la face de Satan dont le règne semblait pour jamais consolidé sur la terre ! Mais vous aimez le futur troupeau du Rédempteur, et vous répandez dans des millions d’âmes l’attrait pour une vérité qui exige de si redoutables sacrifices. Vous renversez les prétextes d’une vaine raison par des prodiges innombrables, et échauffant ensuite par l’amour ces cœurs arrachés à la concupiscence et à l’orgueil, vous les envoyez pleins d’un enthousiasme tranquille au-devant de la mort et des tortures.
Alors s’accomplit la promesse que Jésus avait faite pour le moment où ses fidèles comparaîtraient devant les ministres du Prince du monde. Il avait dit : « Ne prenez pas la peine de réfléchir sur la manière dont vous parlerez et sur ce que vous direz. A l’heure même, vous sera donné ce que vous aurez à dire ; car ce ne sera pas vous-mêmes qui parlerez, mais ce sera l’Esprit de votre Père qui parlera en vous » [49]. Nous en pouvons juger encore en lisant les immortels Actes de nos martyrs, en suivant ces interrogatoires et ces réponses simples et sublimes qui s’échappent du milieu même des tourments. C’est la voix de l’Esprit, la parole de l’Esprit qui lutte et qui triomphe. Les assistants s’écriaient : « Il est grand, le Dieu des chrétiens ! » et plus d’une fois on vit les bourreaux, séduits par une si divine éloquence, se déclarer eux-mêmes les disciples d’un Dieu si puissant, et se ranger soudain parmi les nobles victimes qu’ils déchiraient tout à l’heure. Nous savons par les monuments contemporains que l’arène du martyre fut la tribune de la foi, et que le sang des martyrs, joint à la beauté de leur parole, fut la semence des chrétiens.
Après trois siècles de ces merveilles du divin Esprit, la victoire fut complète. Jésus était reconnu Roi et Sauveur du monde, docteur et rédempteur des hommes ; Satan était expulsé du domaine qu’il avait usurpé, le polythéisme dont il fut l’auteur était remplacé par la foi en un seul Dieu, et le culte ignoble de la matière n’était plus qu’un objet de honte et de mépris. Or, une telle victoire qui eut d’abord pour théâtre l’empire romain tout entier, et qui n’a cessé de s’étendre, de siècle en siècle, à tant d’autres nations infidèles, est l’œuvre du Saint-Esprit. La manière miraculeuse dont elle s’est accomplie contre toutes les prévisions humaines est l’un des principaux arguments sur lesquels repose notre foi. Nous n’avons pas vu de nos yeux, nous n’avons pas entendu de nos oreilles le Seigneur Jésus ; mais nous le confessons pour notre Dieu, à cause du témoignage que lui a rendu si visiblement l’Esprit-Saint qu’il nous a envoyé. Soient donc à jamais à ce divin Esprit gloire, reconnaissance et amour de la part de toute créature ! Car il nous a mis en possession du salut que notre Emmanuel nous avait apporté.
A LA MESSE.
La Station est aujourd’hui dans la Basilique de Saint-Pierre-aux-Liens. Cette église, appelée aussi la Basilique d’Eudoxie, du nom de l’impératrice qui l’éleva, garde précieusement les chaînes dont saint Pierre fut lié à Jérusalem par l’ordre d’Hérode, et à Rome par l’ordre de Néron. La réunion du peuple fidèle en son enceinte aujourd’hui rappelle merveilleusement la force dont l’Esprit-Saint revêtit les Apôtres au jour de la Pentecôte. Pierre s’est laissé lier pour le service de son maître Jésus, et il s’est fait honneur de ses liens. Cet apôtre qui avait tremblé à la voix d’une servante, ayant reçu le don de l’Esprit-Saint, est allé au-devant des chaînes. Le Prince du monde a cru qu’il pourrait enchaîner la divine parole ; mais cette parole était libre jusque dans les fers. L’Introït, formé des paroles de David, fait allusion aux néophytes qui viennent d’être baptisés, et sont là présents avec leurs robes blanches. Au sortir de la fontaine, ils ont été nourris du pain de vie qui est la fine fleur du divin froment. On leur a donné à goûter la douceur du miel qui procède de la pierre. Or la Pierre est le Christ, nous dit l’Apôtre [50], et le Christ a admis Simon, fils de Jonas, à l’honneur de participer à ce noble symbole. Il lui a dit : « Tu es Pierre », et les chaînes sacrées qui sont là montrent assez avec quelle fidélité Simon a compris qu’il devait s’attacher à la suite de son Maître. Le même Esprit qui l’a fortifié dans la lutte repose maintenant sur les néophytes de la Pentecôte.
Dans la Collecte, la sainte Église rappelle la descente du Saint-Esprit sur les Apôtres, et remerciant Dieu qui a daigné répandre le don de la foi dans les nouveaux chrétiens, elle implore pour eux celui de la paix que Jésus ressuscité apporta à ses disciples.
ÉPÎTRE.
Ce passage du livre des Actes des Apôtres est d’une haute éloquence en un tel jour et en un tel lieu. Pierre, le vicaire du Christ, est en présence des chrétiens sortis de la Synagogue ; sous leurs yeux sont réunis plusieurs hommes de la gentilité que la grâce a conduits, par la prédication de Pierre, à reconnaître Jésus pour le Fils de Dieu. L’Apôtre est arrivé au moment solennel où il doit ouvrir la porte de l’Église aux gentils. Pour ménager la susceptibilité des anciens juifs, il en appelle à leurs prophètes. Qu’ont-ils dit, ces prophètes ? Ils ont annoncé que tous ceux, sans exception, qui croiraient en Jésus recevraient la rémission de leurs péchés par son Nom. Tout à coup l’Esprit-Saint interrompt l’Apôtre, il décide la question en fondant, comme au jour de la Pentecôte, sur ces gentils humbles et croyants. Les signes de sa présence en eux arrachent un cri d’étonnement aux chrétiens circoncis, « C’en est donc fait, s’écrient-ils ; la grâce du Saint-Esprit est donc aussi pour les Gentils ! » Alors Pierre, avec toute l’autorité de Chef de l’Église, décide la question. « Oserions-nous refuser le baptême à des hommes qui ont reçu l’Esprit-Saint comme nous l’avons reçu nous-mêmes ? » Et sans attendre la réponse, il donne ordre de conférer immédiatement le baptême à ces heureux catéchumènes.
Une telle lecture, au sein de Rome centre de la gentilité, dans une Basilique dédiée à saint Pierre, en présence de ces néophytes si récemment initiés aux dons de l’Esprit-Saint par le Baptême, offrait un à propos qu’il nous est aisé de sentir. Puisons-y en même temps un profond sentiment de reconnaissance envers le Seigneur notre Dieu qui a daigné appeler nos pères du sein de l’infidélité, et nous associer après eux aux faveurs de son divin Esprit.
ÉVANGILE.
Le Saint-Esprit crée la foi dans nos âmes, et par la foi nous obtenons la vie éternelle ; car la foi n’est pas l’adhésion à une thèse rationnellement démontrée, mais une vertu qui procède de la volonté fécondée par la grâce. Au temps où nous vivons, la foi devient rare. L’orgueil de l’esprit est monté à son comble, et la docilité de la raison aux enseignements de l’Église fait défaut chez un grand nombre. On se croit chrétien et catholique, et en même temps on ne se sent pas disposé à renoncer à ses idées en toute simplicité, si elles étaient désapprouvées par l’autorité qui seule a le droit de nous diriger dans la croyance. On se permet des lectures imprudentes, quelquefois même mauvaises, sans s’inquiéter si l’on contrevient à des défenses sacrées. On fait peu pour arriver à une instruction sérieuse et complète sur les choses de la religion, en sorte que l’on conserve dans son esprit, comme un poison caché, beaucoup d’idées hétérodoxes qui ont cours dans l’atmosphère que l’on respire. Souvent il arrive qu’un homme compte parmi les catholiques, et remplit les devoirs extérieurs de la foi par principe d’éducation, par tradition de famille, par une certaine disposition naturelle du cœur ou de l’imagination. Il est triste de le dire, plusieurs aujourd’hui pensent avoir la foi, et elle est éteinte en eux.
Cependant la foi est le premier lien avec Dieu ; c’est par la foi, nous dit l’Apôtre, que l’on approche de Dieu [51], et qu’on lui demeure attaché. Telle est l’importance de la foi, que le Seigneur vient de nous dire que « celui qui croit n’est pas jugé. » En effet, celui qui croit dans le sens de notre Évangile, n’adhère pas seulement à une doctrine ; il croit, parce qu’il se soumet de cœur et d’esprit, parce qu’il veut aimer ce qu’il croit. La foi opère par la charité qui la complète, mais elle est un avant-goût de la charité ; et c’est pour cela que le Seigneur promet déjà le salut à celui qui croit. Cette foi éprouve des obstacles de la part de notre nature déchue. Nous venons de l’entendre : « La lumière est venue dans le monde ; mais les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière. » En notre siècle, les ténèbres règnent, elles s’épaississent ; on voit même s’élever de fausses lumières ; des mirages trompeurs égarent le voyageur, et nous le répétons, la foi est devenue plus rare, cette foi qui unit à Dieu et sauve de ses jugements. Divin Esprit, arrachez-nous aux ténèbres de notre temps, corrigez l’orgueil de notre esprit, délivrez-nous de cette vaine liberté que l’on prône comme l’unique fin de toutes choses, et qui est si complètement stérile pour le bien des âmes. Nous voulons aimer la lumière, la posséder, la conserver, et mériter par la docilité et la simplicité des enfants le bonheur de la voir épanouie dans le jour éternel.
L’Offertoire est tiré d’un des plus magnifiques cantiques de David. On y entend le bruit de la tempête qui annonce l’arrivée de l’Esprit. Bientôt les sources des eaux vives s’épanchent et fertilisent la terre ; c’est le vent impétueux de la Pentecôte et le baptême qui succède à l’émission des feux.
Dans la Secrète, l’Église demande qu’il n’y ait qu’une offrande sur l’autel, et qu’elle soit formée à la fois des éléments sacrés et des cœurs des fidèles par l’opération du divin Esprit.
L’Antienne de la Communion est formée des paroles du Christ annonçant à ses disciples le ministère que va remplir le Saint-Esprit sur la terre. Il présidera à l’enseignement des vérités que Jésus lui-même a révélées.
Dans la Postcommunion, la sainte Église se préoccupe du sort de ses chers néophytes. Ils viennent de participer au Mystère céleste, mais au dehors de graves épreuves les attendent : Satan, le monde, les persécuteurs. La Mère commune intervient auprès de Dieu, pour obtenir que ces nouveaux fruits de son sein soient traités avec des ménagements proportionnés à leur âge encore tendre.
L’Église arménienne continue de nous fournir ses beaux chants pour célébrer la mission du Saint-Esprit. Voici l’Hymne qui se rapporte au lundi de l’Octave.
CANON SECVNDAE DIEI.
O Esprit semblable au Père et au Fils et de la même essence, tu n’as pas été fait, mais tu coexistes, procédant du Père d’une façon mystérieuse, et recevant du Fils d’une manière inénarrable ; tu es descendu aujourd’hui dans le Cénacle pour donner à tes convives le breuvage de ta grâce : daigne nous abreuver aussi dans ta miséricorde au calice de la sagesse.
Créateur de tous les êtres, toi qui étais porté sur les eaux, tu te montres caressant comme la colombe dans les eaux du bain sacre qu’a daigné instituer pour nous celui qui t’est coexistant ; là tu enfantes des hommes qui ont la forme de Dieu : daigne nous abreuver aussi dans ta miséricorde au calice de la sagesse.
Toi qui instruis à la fois les intelligences célestes et nous qui venons sous les organes corporels ; toi qui prends des bergers pour en faire des Prophètes, des pécheurs pour en faire des Apôtres, des publicains pour en faire des Evangélistes, des persécuteurs pour en faire des prédicateurs de ta parole, daigne nous abreuver aussi dans ta miséricorde au calice de la sagesse.
Comme un vent redoutable, au bruit violent d’une tempête, o Esprit, tu es apparu dans le Cénacle au chœur des douze ; tu les as baptisés dans le feu, tu les as purifiés comme l’or dans la flamme ; chasse loin de nous les ténèbres du péché, et revêts-nous de la lumière de gloire.
Celui qui est amour t’a envoyé par amour, toi qui es amour ; par toi il s’est uni ses membres, il a établi sur tes sept colonnes son Église qu’il a bâtie ; il a établi en elle, pour l’administrer, ses Apôtres décorés de tes sept dons ; chasse loin de nous les ténèbres du péché, et revêts-nous de la lumière de gloire.
La Séquence qui suit fut composée au XIe siècle par le pieux et docte Hildebert, d’abord évêque du Mans, plus tard archevêque de Tours. On y sent combien était profonde, dans les âges de foi, la connaissance du mystère du Saint-Esprit, et quel enthousiasme excitait sa venue parmi les hommes.
SÉQUENCE. | |
Spiritus Sancte,
Pie Paraclite, | Esprit-Saint,
miséricordieux Paraclet, |
Amor Patris et Filii,
Nexus Gignentis et Geniti. | Amour du Père et du Fils,
lien éternel entre celui qui engendre et celui qui est engendré. |
Utriusque bonitas et caritas,
Et amborum essentiæ puritas ; Benignitas, suavitas, Jocunditas. | Vous êtes le principe de bonté et d’amour qui unit l’un et l’autre,
la pureté de leur essence ; vous êtes tout bénignité, suavité, vous charmez tout par votre présence. |
Vinculum nectens
Deum homini, Virtus adunans Hominem Numini. | C’est vous qui formez le lien
pour réunir Dieu à l’homme ; vous êtes la force qui produit cette union. |
Tibi soli digno coli
Cum Patre Filioque Jugis cultus, Honor multus Sit semper Procedenti ab utroque. | A vous seul donc digne d’adoration,
ainsi que le Père et le Fils, culte à jamais. A vous qui procédez éternellement des deux, hommage immense. |
Tu mitis et hilaris,
Amabilis, laudabilis, Vanitatis mundator, Munditiæ amator. | Vous êtes doux et joyeux,
digne d’amour et de louanges : vous purifiez l’âme de la vanité, la pureté fait vos délices. |
Vox suavis exsulum
Mœrentium, Melodia civium Gaudentium. | Vous inspirez de suaves accents
à ceux que consumait la tristesse de l’exil, de mélodieux accords à ceux qui sont dans l’allégresse. |
Istis solamen,
Ne desperent de te, Istis juvamen, Ut suspirent ad te. | Vous consolez les premiers,
et les sauvez du désespoir ; vous venez apprendre aux seconds à soupirer vers vous. |
Consolator piorum,
Inspirator bonorum, Consiliator mœstorum. | Consolateur des cœurs pieux,
inspirateur des bons, conseiller des affligés, |
Purificator errorum,
Eruditor ignotorum, Declarator perplexorum. | Vous purifiez l’homme de ses erreurs,
vous lui enseignez ce qu’il ignorait, vous fixez ses perplexités. |
Debilem erigens,
Devium colligens, Errantem corrigens, Sustines labantem, Promoves conantem, Perficis amantem. | Vous ranimez celui qui est faible,
vous recueillez celui qui s’égarait, vous corrigez celui qui se trompait ; vous soutenez celui qui allait tomber, vous aidez les efforts de celui qui combat, vous perfectionnez celui qui aime déjà. |
Perfectum educis
De lacu fæcis, Et miseriæ. | C’est vous qui avez fait sortir
du lac de corruption et de misère celui qui maintenant est parfait. |
Deducis per semitam
Pacis et lætitiæ : Inducis sub nube In aulam Sapientiæ. | C’est vous qui le conduisez par un sentier
de paix et d’allégresse, et l’introduisez sous le nuage de la foi jusque dans le sanctuaire de la divine Sagesse. |
Fundamentum sanctitatis,
Alimentum castitatis, Ornamentum lenitatis, Lenimentum paupertatis, Supplementum largitatis, Munimentum probitatis. | Fondement de toute sainteté,
vous êtes l’aliment delà chasteté, vous embellissez la douceur, vous rendez douce la pauvreté, vous fournissez aux largesses, vous êtes l’appui de toute honnêteté. |
Miserorum refugium,
Captivorum suffragium. Illis aptissimus, Istis promptissimus. | Refuge des misérables,
secours de ceux qui sont captifs ; Venant à point pour les premiers, envoyant un prompt secours aux seconds. |
Spiritus veritatis,
Nodus fraternitatis, Ab eodem missus A quo et promissus. | Esprit de vérité,
nœud de la fraternité ; celui qui vous a envoyé est le même qui vous avait promis. |
Tu crederis
Omnium judex, Qui crederis Omnium opifex. | Notre foi qui reconnaît
en vous le créateur des êtres, vous reconnaît aussi comme leur juge qui doit venir. |
Honestans bene meritos
Præmio, Onustans immeritos Supplicio. | Pour honorer de la récompense
ceux qui l’auront méritée, et soumettre au supplice ceux qui s’en seront rendus dignes. |
Spiras ubi vis
Et quando vis ; Doces quos vis Et quantum vis. | Vous soufflez où il vous plaît
et quand il vous plaît ; vous êtes le docteur de ceux que vous choisissez, et au degré qui vous convient. |
Imples et instruis
Certos in dubiis, Firmas in subitis, Regis in licitis. | Vous remplissez les âmes et les éclairez
de votre lumière dans leurs doutes ; vous êtes leur force dans les attaques subites, leur règle dans le choix de ce qui est licite. |
Tu ordo decorans
Omnia, Decor ordinans et ornans Omnia, Dicta, facta, cogitata, Dicta veritate, Facta honestate, Cogitata puritate. | Vous êtes l’harmonie qui donne
à tout sa beauté ; car toute chose est par vous mise en ordre et reçoit de vous sa splendeur. Dans nos paroles, vous mettez la vérité, dans nos actions l’honnêteté, dans nos pensées la pureté. |
Donum bonum,
Bonum perfectum, Dans intellectum, Dans et affectum. | O don excellent !
Bien parfait ! Vous donnez l’intelligence et vous donnez aussi le sentiment. |
Dirigens rectum,
Formans affectum, Firmans provectum, Et ad portas Paradisi Coronans dilectum. Amen. | Vous dirigez en nous le bien,
vous créez en nous l’amour, vous nous fortifiez dans la course, et aux portes du paradis, vous couronnez celui que vous avez aimé. Amen. |
Primitivement, à Rome, la fête de la Pentecôte terminait la quinquagésime pascale et inaugurait les jeûnes des Quatre-Temps d’été. Puis la solennité commença à se prolonger pendant deux jours le lundi et le mardi, et finalement, après saint Léon le Grand, elle embrassa toute la semaine, à l’égal de l’octave de Pâques. Par égard à cette conformité affectée entre les deux fêtes, la station de ce jour aurait dû être à Saint-Pierre ; mais, pour ne pas célébrer deux solennités de suite au Vatican, on a désigné l’antique basilique ad Vincula dédiée primitivement aux deux Princes des Apôtres et où l’on conserve les chaînes sacrées de Pierre. La lecture des Actes des Apôtres à la messe nous rapporte la prédication de Pierre dans la maison du centurion Corneille. L’acte était décisif. Jusqu’alors les Apôtres s’étaient abstenus, par égard pour Israël, de porter l’annonce évangélique aux Gentils, mais la Providence se hâte désormais et supprime tout délai. Encouragé par une vision céleste, le Chef du Collège apostolique prêche la foi à la famille d’un centurion païen, et, à la parole de Pierre, le Saint-Esprit descend visiblement sur les nouveaux convertis, consacrant ainsi par ses charismes les prémices du monde romain. L’introït que, par la suite, saint Thomas rendit célèbre grâce à son office du Corpus Domini, est tiré du psaume 80 et fait allusion aux néophytes qui, hier, ont bu le suave breuvage de lait et de miel qu’on leur faisait goûter après le baptême et la première Communion. « Le Seigneur les a nourris de la fleur du froment » — c’est la sainte Eucharistie qui, avec la Divinité, nous donne l’humanité sainte de Jésus, laquelle est la fleur véritable au milieu du froment abondant qui symbolise la famille humaine.
Dans la collecte, on demande à Dieu que, de même qu’il a fait don du Saint-Esprit aux Apôtres, il l’accorde aux supplications du peuple chrétien. La venue du Paraclet dans l’âme suppose le don de la foi et est ordonnée à l’enrichir d’une autre grâce précieuse : la paix. Il s’agit de cette paix que Jésus appelle sa paix, parce que de même que le Paraclet procède du Père, il procède aussi du fils. Cette paix est le lien qui unit Dieu à l’âme ; en d’autres termes, c’est la charité, c’est la grâce sanctifiante. C’est donc à bon droit que l’Apôtre, énumérant les fruits du Saint-Esprit, mentionnait en premier lieu la paix et la joie qui en découlent immédiatement.
Dans la lecture des Actes des Apôtres (X, 42-48), on rapporte un passage du discours de Pierre dans la maison du centurion Corneille. C’est une heure décisive. Il s’agit de savoir si la nouvelle religion devra demeurer un mouvement d’esprit judaïque au sein d’Israël, ou si, au contraire, les barrières nationales étant détruites, le Christ sera indistinctement à tous, sans monopole ni distinctions de castes. Dieu même tranche la question par un miracle et répand son Esprit sur les Gentils. L’apostolat des païens est réservé d’une manière spéciale à Paul, l’Apôtre de la dernière heure. Toutefois, comme l’initiative de ce mouvement doit être prise par le Chef de l’Église qui est Pierre, celui-ci est aujourd’hui le protagoniste de la scène. L’honneur de Paul est sauf, mais le principe d’autorité est affirmé. Pierre est le premier qui, par ordre de Dieu, prêche aux Gentils, et ceux-ci reçoivent en ce jour le saint Baptême sous la responsabilité de Pierre.
Dans le verset alléluiatique, tiré des Actes, il est dit que les Apôtres narraient les grandeurs divines en des langues différentes. Le reste est comme hier, « Venez, etc. ».
La lecture évangélique (Ioan., III, 16-21) consiste en un passage de l’entretien nocturne de Jésus avec Nicodème, alors que le Sauveur parla à celui-ci de la nécessité de renaître spirituellement de l’eau et du Saint-Esprit.
Le Saint-Esprit est amour, c’est pourquoi l’on attribue aussi à son opération l’incarnation du Fils de Dieu dans le sein de la Bienheureuse Vierge pour la rédemption du genre humain. Le saint Évangile nous décrit aujourd’hui et nous explique la malice du monde, qui refuse avec dédain de rendre amour pour amour à Dieu, et péchant ainsi contre le Saint-Esprit, mérite la réprobation finale. L’antithèse est criante.
De la part de Dieu, lumière, vérité, sainteté, amour ; de la part des nommes, aveuglement volontaire, perversité, ténèbres, mensonge. Quelle horreur ne doit pas nous inspirer l’esprit du monde !
L’antienne d’offertoire est identique à celle du mardi de Pâques. Dieu, dans son indignation contre le cruel Satan qui tenait captif le genre humain, a poussé un cri. La terre en a frémi, les montagnes se sont ouvertes et ont laissé se répandre au dehors les veines d’eau cachées en leur sein. Voici l’eau baptismale, voici la nature qui revient de nouveau comme à l’origine, au service de l’homme, et devient, dans le Sacrement, l’instrument de sa purification intérieure.
La prière sur les oblations est pleine de beauté. « Consacrez, par votre bonté, Seigneur, cette oblation, et faites que, recevant en nous la divine Eucharistie, nous-mêmes soyons, d’une certaine manière, transformés en elle, en sorte que nous devenions devant vous un holocauste vivant, perpétuellement immolé à votre gloire. »
L’antienne pour la Communion est tirée de l’Évangile selon saint Jean (XV, 26) et contient la promesse du Saint-Esprit avec l’assurance de sa spéciale assistance pour que l’Église ne perde rien du divin dépôt de vérité qui lui a été confié. Dans l’histoire du catéchisme catholique depuis les saintes Écritures du Nouveau Testament et la tradition sacrée de l’Église, il n’y a donc ni oublis ni vérités nouvelles reçues du dehors. L’Esprit Saint rend toujours vivante et complète la prédication de l’Évangile du royaume, auquel il n’y a rien à ajouter, rien à retrancher.
Dans la prière d’action de grâces, nous supplions le Seigneur, par les mérites de la sainte Communion, de nous défendre de la fureur de nos ennemis. En effet, si le sang de l’Agneau, répandu sur les portes des Hébreux, servit à les sauver des coups de l’Ange vengeur, combien plus n’apparaîtrons-nous pas redoutables aux démons, alors que nos lèvres sont encore rougies par la communion du sang du Christ ?
La grâce des charismes du Saint-Esprit concédée aux Gentils avant même qu’ils n’eussent reçu le baptême, est un signe tout extraordinaire, nécessaire en cette circonstance pour déterminer l’Église à leur ouvrir les portes de la foi.
Toutefois, cette diffusion de la grâce du Paraclet, effet de cette sorte de baptême spirituel appelé par les théologiens baptême de désir, ne dispensa pas ces premières recrues chrétiennes de recevoir régulièrement le baptême d’eau institué par Jésus.
L’Incarnation et la Rédemption, étant une œuvre d’amour, sont attribuées à l’Esprit Saint, en tant que les divines flammes du Paraclet sanctifièrent et consumèrent l’innocente Victime offerte sur la Croix pour le salut des hommes. La lecture évangélique de ce jour, pour éclairer plus vigoureusement cette pensée, établit un terrible contraste entre Dieu et les hommes ; Dieu aime tant le monde, que pour le sauver il sacrifie son Fils unique, tandis que les hommes correspondent par une telle ingratitude à l’amour divin, qu’ils s’obstinent à aimer les ténèbres et à les préférer à la lumière.
Du baptême à la Confirmation.
Le second jour de la Pentecôte ! Le premier jour n’envisage que le grand événement de la Pentecôte. Tous les peuples étaient rassemblés dans l’église mondiale de Saint-Pierre et revivaient le miracle de la Pentecôte. Aujourd’hui, l’Église considère les nouveaux baptisés et les nouveaux confirmés (nous sommes de ce nombre, nous qui voulons renouveler la grâce de la Confirmation). Nous ne devons pas l’oublier que la Pentecôte, aussi, était un temps de baptême dans l’ancienne Église. L’Église s’adresse, aujourd’hui, aux nouveaux baptisés (et à nous) pour leur annoncer la grandeur et le bonheur de leur nouvel état. Elle nous réunit auprès des pères de notre foi, auprès des Apôtres. L’église de station, Saint-Pierre-ès-liens, était primitivement dédiée à tous les Apôtres ; depuis qu’on y conserve les chaînes de Saint-Pierre, elle porte son nom actuel. On comprend que l’Église nous rassemble auprès des Apôtres, qui furent les premiers bénéficiaires de la grâce de la Pentecôte.
1. La messe (Cibavit eos). — La grâce de la Pentecôte nous est communiquée à la messe. Ce que disent les textes liturgiques, le Saint-Sacrifice veut le réaliser L’Introït s’adresse aux néophytes. Ils sont entrés dans la « terre promise » de l’Église ; ils ont reçu la « moelle du froment » (la sainte Eucharistie) ; ils ont été nourris du « miel » sorti du « rocher » qui est le Christ (après la communion, on présentait aux nouveaux baptisés un mélange de lait et de miel). Le psaume 80 devrait être récité, ici, dans son entier. C’est une prédication de Dieu à son peuple. Dieu l’a tiré d’Égypte et l’a introduit dans la terre promise. Maintenant, le devoir du peuple est d’être fidèle à son Dieu. A cette condition, il règnera sur tous ses ennemis et connaîtra la prospérité dans son pays.
L’oraison est brève, précise et pleine de sens. Parlant du miracle de la Pentecôte, dont les Apôtres — dans l’église desquels nous nous trouvons — furent bénéficiaires, l’Église demande pour nous : « Accorde à ton peuple l’effet de sa pieuse demande, afin qu’à ceux à qui tu as accordé la foi tu donnes aussi la paix ». Cette oraison nous éclaire sur la signification liturgique du mot paix. La paix signifie un degré plus élevé de l’état de chrétien. La foi est le commencement et correspond au baptême ; la paix est l’achèvement et correspond à la Confirmation. Des bienheureux au ciel la liturgie dit volontiers : « illi autem sunt in pace — pour eux, ils sont dans la paix ». Nous comprendrons peut-être mieux ce mot si nous le paraphrasons ainsi : la grâce dans ce monde, et la gloire dans l’autre. L’oraison demande donc : A ceux à qui tu as donné la grâce du baptême, donne aussi celle de la Confirmation.
Dans la leçon, le saint de station, « Pierre », se tient au milieu de nous et « ouvre la bouche », comme jadis quand il s’adressa à la première famille païenne convertie (le centurion Corneille). C’est une scène d’histoire universelle. Le Saint-Esprit lui-même est intervenu. Il a conféré aux païens, avant le baptême, la grâce de la Pentecôte et de la Confirmation. Ainsi le Saint-Esprit lui-même a ouvert aux païens les portes de l’Église. Avec combien plus de raison nous accordera-t-il, à nous qui sommes déjà baptisés, la grâce de l’affermissement dans la foi !
A l’Évangile, nous assistons à l’entretien nocturne de Jésus avec Nicodème. L’Église pense encore — et en première ligne — aux nouveaux baptisés : leur élection est le jugement favorable de Dieu. A la lumière du renouvellement de la Pentecôte, nous voyons aujourd’hui l’œuvre rédemptrice. C’est l’amour suprême de Dieu : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique ». Le Christ est d’abord Sauveur, avant d’être Juge. La divine Lumière est venue dans le monde. Nous, les enfants de Dieu, nous aimons la lumière et non les ténèbres et, parce que nous « faisons la vérité », nous venons à la lumière. Pour que nous puissions venir complètement à cette lumière, le Saint-Esprit descend sur nous.
L’Offertoire réunit de nouveau l’envoi du Saint-Esprit — la Confirmation — et le baptême : « Le Seigneur fit retentir son tonnerre dans le ciel et le Très-Haut fit entendre sa voix et des sources d’eau jaillirent ».
A la Communion, nous recevons l’assurance, de la bouche même du Seigneur, que le Saint-Esprit sera notre docteur. Nous pouvons donc intituler la seconde messe de la Pentecôte : Du baptême à la Confirmation.
1. La prière des Heures nous donne une profonde méditation de saint Augustin sur la péricope de l’entretien de Jésus avec Nicodème. « Autant que cela dépend du médecin, il vient guérir le malade. Celui-là se tue lui-même qui ne veut pas suivre les préceptes du médecin. Le Sauveur est venu dans le monde. Pourquoi s’appelle-t-il le Sauveur du monde ? Parce qu’il veut guérir le monde, et non juger le monde. Si tu ne veux pas te laisser guérir par lui, tu seras jugé par ta propre faute. Et que dis-je : tu seras jugé ? Écoute ce qu’il dit lui-même : Celui qui croit en lui ne sera pas jugé ; quant à celui qui ne croit pas... que penses-tu qu’il va dire ? Qu’il sera jugé ? Non, il dit qu’il est déjà jugé. Le jugement n’est pas encore manifesté, mais il est déjà prononcé... Ils aimèrent mieux, dit-il, les ténèbres que la lumière. C’est sur cela qu’il insiste. Les uns, en effet, aimèrent leurs péchés ; les autres confessèrent leurs péchés. Celui qui confesse ses péchés et accuse ses péchés se tient déjà du côté de Dieu. Dieu accuse tes péchés ; si tu les accuses, toi aussi, tu t’unis à Dieu. Il y a, pour ainsi dire, deux choses différentes : l’homme et le pécheur. Ce qui constitue l’homme, c’est Dieu qui l’a fait ; ce qui constitue le pécheur, c’est l’homme lui-même qui l’a fait. Anéantis ce que tu as fait afin que Dieu sauve ce qu’il a fait. Tu dois haïr en toi ton œuvre et aimer en toi l’œuvre de Dieu. Or, quand tu commences à ne plus aimer ce que tu as fait, c’est alors que tes bonnes œuvres commencent, parce que tu accuses tes mauvaises œuvres. Le commencement des bonnes œuvres est l’accusation des mauvaises œuvres ».
3. Le Veni sancte. — D’ordinaire, l’Église se sert des paroles de la Sainte Écriture. On dirait qu’elle redoute de s’adresser à Dieu avec ses propres paroles. Quand elle le fait cependant, elle emploie les termes les plus riches de sens. De même que le cristal de roche acquiert, par le travail séculaire de la nature, du brillant et du poli, de même ces textes de l’Église où elle a déposé ce qu’il y a de plus fervent dans son amour, ses désirs, sa prière et sa foi, ont été élaborés au cours des siècles. C’est le cas pour cette prière si simple et si profonde : « Viens, Saint-Esprit, remplis les cœurs de tes fidèles et allume en eux le feu de ton amour ! » Toutes les fois que cette prière est chantée ou récitée, l’Église nous ordonne de nous agenouiller.
a) Veni, viens. Ce mot a une histoire. Avant la naissance du Christ, il était dans la bouche du peuple juif. Le Rédempteur s’appelait : « Celui qui doit venir ». C’est pourquoi le Baptiste demande : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » Les chrétiens adoptèrent ce petit mot et en firent l’expression de leur désir de la parousie. Les anges avaient déjà dit du Seigneur monté aux cieux : « Il viendra de nouveau... » Dans la primitive Église, on terminait chaque prière par ce vœu ardent : « Maranatha », c’est-à-dire, viens, Seigneur. Il n’est pas étonnant que l’Église ait introduit ce mot dans sa liturgie. Rappelons-nous les grandes antiennes O de l’Avent. Nous comprenons que l’Église se serve du même mot pour implorer la descente du Saint-Esprit. — Ici, se pose une question : Le Saint-Esprit n’est-il donc pas parmi nous ? A quoi bon, dès lors, implorer sa venue ? Oui, il est parmi nous et, pourtant, il faut qu’il vienne à nous. Autrefois, le Baptiste pouvait dire aux sanhédrites : « Il y a au milieu de vous quelqu’un que vous ne connaissez pas ». On peut en dire autant du Saint-Esprit. Il demeure dans l’Église, dans l’âme, et, pourtant, nous ne le connaissons pas : nous empêchons son action. La force est là, mais elle est liée, elle dort. Le petit mot « Veni » veut donc dire : Déploie ta puissance, brise les entraves que la volonté humaine met à ton action.
b) Saint-Esprit. Examinons le nom du Saint-Esprit. Le Christ l’appelle volontiers Paraclet. Ce mot se traduit de deux façons : avocat ou consolateur. Cependant, le Seigneur l’appelle deux fois Saint-Esprit. La Séquence donne une série de surnoms : père des pauvres, distributeur des dons, lumière des cœurs. On le nomme aussi, volontiers, le doigt de la main droite de Dieu. Mais son nom ministériel est : Saint-Esprit. Ce nom est pour nous une exhortation à être saints et spirituels. Nous ne pouvons porter le Saint-Esprit en nous que si nous tendons à la sainteté, que si nous sommes des hommes spirituels, et non des hommes charnels.
c) Remplis les cœurs de tes fidèles. Nous trouvons déjà ce mot : remplir, dans le récit de la fête : « ils furent tous remplis de l’Esprit-Saint ». Nos cœurs et nos âmes doivent être comme des coupes dans lesquelles le Saint-Esprit verse le vin précieux de ses dons et qu’il remplit jusqu’au bord. Ne soyons pas des, coupes vides. Si nos cœurs sont remplis d’amour-propre, de présomption, d’égoïsme, le Saint-Esprit ne pourra verser son vin précieux.
d) Quel est ce vin précieux ? La dernière phrase nous le dira : « Allume en eux le feu de ton amour ». C’est donc l’amour qui est le don du Saint-Esprit : le saint amour de Dieu et du prochain. Le Christ dit du Saint-Esprit : « Il prendra du mien ». La charité est le précepte du Christ ; maintenant, c’est celui du Saint-Esprit : de ton amour. Cet amour est un feu, c’est pourquoi le Saint-Esprit est apparu dans le feu ; nous serons baptisés dans l’Esprit-Saint et dans le feu ». Le feu brille, chauffe, brûle et purifie. Que le Saint-Esprit daigne aujourd’hui être ce feu, qu’il chasse les ténèbres de nos cœurs, qu’il en réchauffe la froideur, qu’il brûle tout ce qui est vain et coupable, qu’il purifie notre âme, afin qu’elle soit de l’or pur pour la couronne du Christ !
[1] Sap. 1, 7.
[2] Sept semaines figuratives avaient séparé la sortie d’Égypte de la promulgation de la loi sur le Sinaï, et l’Hymne divise le temps de Pâques à la Pentecôte, comme l’Écriture le fait elle-même, en sept fois sept jours, après lesquels apparaît le cinquantième qui désigne l’éternité ; le nombre sept rappelle aussi les sept sacrements et les sept dons du Saint-Esprit.
[3] Joël. 2, 28.
[4] Comme les Matines de l’Octave de Pâques, les Matines de l’Octave de la Pentecôte ne comporte qu’un seul nocturne de trois psaumes et trois lectures.
[5] Act. 2, 2.
[6] Ps. 67, 28.
[7] Ps. 103, 30.
[8] Sap. 1, 7.
[9] Jn. 3, 18.
[10] Jn. 15, 15.
[11] Jn. 20, 22 ; 14, 26 ; 15, 14.
[12] Jn. 3, 18.
[13] Jn. 3, 21.
[14] Act. 2, 1.
[15] Sap. 1, 7.
[16] Act. 2, 4.
[17] Dan. 3, 77.
[18] Act. 2, 11.
[19] Allusion au jubilé, ère de pardon, de libération des esclaves, de remise de dettes, qui avait lieu tous les cinquante ans.
[20] Act. 2, 4.
[21] Jn. 3, 16.
[22] Act. 2, 1.
[23] Sap. 1, 7.
[24] Act. 2, 4.
[25] Dan. 3, 77.
[26] Act. 2, 11.
[27] « Le Saint-Esprit est appelé ici créateur, par rapport à la nouvelle création dont le Psalmiste a dit : « Créez en moi un cœur pur, un esprit droit. » (Ps. 50).Ce n’est pas qu’il ne soit Créateur dans la 1ère création avec le Père et le Fils ; mais la création nouvelle lui est donnée par une attribution particulière. » (Bossuet).
[28] Paraclet vient d’un mot grec qui veut dire à la fois Consolateur et Avocat. Jésus-Christ lui-même a désigné sous ce nom l’Esprit-Saint. (Saint Jean, 14, 26). L’Apôtre nous dit aussi qu’il est « le Dieu de toute consolation » (2 Cor., 1, 3), et ailleurs, « qu’il supplie pour nous avec des gémissements inénarrables » (Rom., 8, 26), et ces deux assertions répondent au sens du mot Paraclet.
[29] « Le mot Don appliqué à une personne divine forme un nom propre du Saint-Esprit. Cela se conçoit : tout don procède de l’amour, et la première chose que nous donnons est l’amour même par lequel nous désirons le bien de notre ami. Puisque l’Esprit-Saint procède comme Amour, il procède avec la nature de premier don. C’est là ce qui fait dire à saint Augustin : Les dons qui sont partagés aux membres de Jésus-Christ leur viennent du Don qui est l’Esprit-Saint. » (Saint Thomas).
[30] Le divin Esprit est cette source d’eau vive dont le Sauveur parlait à la Samaritaine. Il est le feu qui consume en nous la souillure et la rouille du péché, qui fond la glace de nos cœurs, et y allume la pure flamme du divin amour. Bien que la Trinité entière soit amour (I Saint Jean, 4, 16), dit saint Thomas, ce nom, quand il ne s’entend plus de l’essence, mais de la personne, est un nom propre de l’Esprit-Saint.— L’onction spirituelle doit s’entendre du Saint-Esprit opérant : 1° ce mystère d’amour, qui a accompagné notre justification, et par lequel nous avons été oints pour un sacerdoce royal (I Saint Pierre, 2, 9) ; 2° agissant ensuite en nous par le rayonne ment continu de sa divine présence. Cette opération persévérante est également appelée Onction, parce qu’elle est, comme l’huile, merveilleusement douce et pénétrante. » (L’abbé Pimont).
[31] « Les dons du Saint-Esprit peuvent se définir des bienfaits que Dieu nous accorde relativement aux mouvements de sa grâce, afin que nous les suivions avec promptitude. Ils présupposent les vertus théologales qui sont la base de notre union avec l’Esprit-Saint, et celui qui a la charité les possède tous. Ils sont supérieurs aux vertus intellectuelles et morales et diffèrent de ces vertus. Celles-ci sont, en effet, des habitudes qui perfectionnent notre volonté ou nos autres facultés pour suivre les ordres de la raison, tandis que les dons nous perfectionnent pour obéir fidèlement à l’Esprit-Saint qui nous meut. » (Saint Thomas).
[32] « Le divin Paraclet est ainsi nommé parce que Dieu le Père nous montre, par la lumière et l’impulsion du Saint-Esprit, les actions conformes à la justice et à la vérité qu’il faut accomplir pour lui plaire, et le mal que nous devons éviter. » (Denys le Chartreux). « C’est aussi par le Saint-Esprit qu’il grave de plus en plus dans nos âmes les pieux sentiments ». (Père de Caussade).
[33] Ou, plus littéralement : dans nos sens, ce qui doit s’entendre des sens intérieurs qui sont les facultés de notre âme.
[34] Act. 2, 11.
[35] Jn. 14, 23.
[36] Psalm. II, 8.
[37] Matth. XXVIII, 8.
[38] Dan. IX, 26.
[39] Luc. XIX, 14.
[40] Rom. I, 21.
[41] Johan. XII, 31.
[42] I Cor. I, 27.
[43] Rom III, 2.
[44] Matth. XV, 24.
[45] Gal. II, 7.
[46] Act. VII, 51.
[47] Apoc. XII, 9.
[48] Introït de la fête de la Pentecôte tiré du livre de la Sagesse.
[49] Matth. X, 20.
[50] I Cor. X, 4.
[51] Hebr. XI, 6.